Judith-Pauline White, photographe du Nunatsiavut

À la gauche de l’image, Tatânga Mânî (le chef Walking Buffalo, aussi appelé George McLean) est à cheval dans une tenue cérémonielle traditionnelle. Au centre, Iggi et une fillette font un kunik, une salutation traditionnelle dans la culture inuite. À droite, le guide métis Maxime Marion se tient debout, un fusil à la main. À l’arrière-plan, on aperçoit une carte du Haut et du Bas-Canada et du texte provenant de la collection de la colonie de la Rivière-rouge.Par Heather Campbell

Photographie noir et blanc d’une Inuite faisant face à l’appareil photo. La jeune fille porte un amauti blanc (un manteau de femme ou de fille muni d’un grand capuchon) et se tient devant un bâtiment, tandis qu’une femme regarde par une fenêtre derrière elle.

Jeune Inuite devant un bâtiment; une femme regarde par une fenêtre derrière elle, entre 1900 et 1950. (e011307844)

Judith-Pauline White (née Hunter) est une Inuite née en 1905 à Hebron, Terre-Neuve (maintenant Terre-Neuve-et-Labrador), environ 200 kilomètres au nord de Nain, au Labrador. En 1922, elle épouse un propriétaire de poste de traite bien connu, Richard White, et devient ainsi la belle-mère de la fille de White. Le couple aura cinq enfants. Le poste de traite Richard (Dick) White, qui est devenu un édifice patrimonial, est situé à Kauk, environ 4 kilomètres au sud de Nain et 34 kilomètres au nord de la baie de Voisey.

Mme White, une photographe amateur, prend des photos dans la région à partir des années 1920. Dans les années 1950, elle rencontre l’anthropologue Alika Podolinsky Webber, venue au Labrador pour mener des recherches dans le cadre de sa thèse sur l’art des Innus Mushuau (de la Nation innue). Podolinsky Webber se rend à Kauk, car ce poste de traite est un lieu de rencontre pour les Innus et les Inuits sur la côte nord du Labrador.

Mme White expédie des documents à Podolinsky Webber après le décès de Richard White, en 1960. Ces documents comprennent des photographies et des négatifs de plus de 200 scènes de la vie quotidienne et des environs du poste de traite. Les photographies prises par White (voir les niveaux hiérarchiques inférieurs) représentent des Innus et des Inuits, et constituent des documents visuels authentiques de la vie au Labrador des années 1920 aux années 1950. Cette mine d’information, bien dissimulée pendant des décennies avant d’être offerte à Bibliothèque et Archives Canada en 2007, est maintenant accessible au public.

Une photographie noir et blanc d’un Innu regardant l’appareil photo, vêtu de vêtements traditionnels et assis sur une pile de provisions. À l’arrière-plan, plusieurs personnes se tiennent debout devant une maison de couleur foncée percée de deux petites fenêtres.

Innus en déplacement entre 1925 et 1940. (e011305800)

Étant moi-même une Inuite du Nunatsiavut, une artiste et une ancienne conservatrice, je m’intéresse beaucoup à la vie et à l’œuvre de cette photographe. Je ne peux m’empêcher de penser au célèbre photographe inuit Peter Pitseolak, de Cape Dorset. Avec ses instantanés de la vie inuite pris dans les années 1940 et 1950, il fut l’un des premiers Inuits à tourner l’appareil photo vers sa propre communauté, au lieu de faire lui-même l’objet d’études ethnographiques. À l’insu de Pitseolak et de ceux qui ont suivi ses traces, quelque part au Nunatsiavut, une femme inuite prenait elle aussi des photos de la vie quotidienne. Pourquoi n’avons-nous jamais entendu parler d’elle?

La chercheuse inuite Heather Igloliorte explique dans le numéro automne-hiver 2015 de la revue Inuit Art Quarterly que, lorsque Terre-Neuve a joint la Confédération en 1949, la Loi sur les Indiens excluait les Inuits du Nunatsiavut :

Les artistes inuits du Labrador ont malheureusement été exclus de presque tous les projets découlant des efforts concertés de James Houston (qui a « découvert » l’art inuit moderne), du gouvernement, de la Canadian Guild of Crafts, de la Compagnie de la Baie d’Hudson et de bien d’autres intervenants, car il a fallu attendre des décennies avant que le gouvernement fédéral ne reconnaisse officiellement qu’il y avait des Inuits au Labrador. Nous n’avons établi aucun studio ou coopérative, ni tissé de relations avec le milieu des arts dans le sud du Canada, ni développé de marchés nationaux ou internationaux pour vendre nos œuvres. Avant 1991, nous n’avions même pas le droit d’utiliser la très répandue « étiquette L’Igloo » pour authentifier nos œuvres. [Traduction]

Une photographie noir et blanc d’une femme debout à la fenêtre d’un bâtiment en bois, portant une robe avec un collet blanc et une chaîne ornée d’une grande croix. Dans le coin inférieur gauche de la fenêtre, un enfant regarde en direction de l’appareil photo.

Femme debout à la fenêtre, vers 1900-1950. (e011307849)

White prenait encore des photos lorsque Terre-Neuve a joint la Confédération. Mais à l’époque, les musées et les expositions ne présentaient pas d’artistes inuits du Nunatsiavut. Ces derniers vendaient leurs œuvres de porte à porte, dans des boutiques d’artisanat locales ou à des visiteurs occasionnels. Nous ne pouvons qu’imaginer comment le milieu de l’art inuit aurait réagi à l’œuvre de White si les gouvernements provincial et fédéral de l’époque avaient soutenu et reconnu les artistes inuits du Nunatsiavut.

Nous sommes reconnaissants envers la succession d’Alika Podolinsky Webber pour son précieux don. Ce témoignage visuel de la passion de Judith-Pauline White pour la photographie, et de sa volonté de documenter la culture des Innus et des Inuits du Labrador, est maintenant accessible en ligne pour le grand public.

Une photographie noir et blanc d’un Innu avec trois membres de sa famille. Les hommes et un jeune garçon portent un manteau et des mitaines en fourrure. Il y a une tente et des arbres à l’arrière-plan.

Un Innu nommé Pasna et sa famille, vers 1920-1940. (e008299593)

Allez visiter le site Flickr pour voir une plus grande sélection des photos de Judith-Pauline White.

Ce blogue fait partie d’une série portant sur les Initiatives du patrimoine documentaire autochtone. Apprenez-en plus sur la façon dont Bibliothèque et Archives Canada (BAC) améliore l’accès aux collections en lien avec les Premières Nations, les Inuits et les Métis. Voyez aussi comment BAC appuie les communautés en matière de préservation d’enregistrements de langue autochtone.


Heather Campbell travaille comme archiviste à la Direction générale des services au public de Bibliothèque et Archives Canada.

Un visage, un nom : célébration du passé et regard vers l’avenir

Par Julie Dobbin

Depuis ses débuts, en 2012, le projet Un visage, un nom, axé sur les Inuits, a été étendu afin que l’ensemble des Autochtones participent à l’identification des photographies de la collection de Bibliothèque et Archives Canada (BAC).

La majorité des personnes sur les images faisant partie de la collection n’ont jamais été identifiées; elles sont anonymes. De plus, les descriptions archivistiques liées aux événements et aux activités sont absentes ou doivent être mises à jour (noms de lieux, noms de bandes ou terminologie). L’information est fondée sur les légendes et les inscriptions originales se trouvant dans les dossiers, elle reflète donc les préjugés et les attitudes des non-Autochtones de l’époque. Depuis 2002, environ 10 000 images ont été numérisées, et approximativement 2 500 activités, lieux et Inuits (principalement) ont été identifiés.

Pour souligner le 15e anniversaire du projet, un événement a eu lieu pendant trois jours en mars 2017. Il a été tenu à BAC et à l’Université Carleton, à Ottawa, et des Inuits, des membres des Premières Nations, des Métis ainsi que le grand public y ont participé.

L’événement soulignant le 15e anniversaire d’Un visage, un nom ne visait pas seulement à célébrer l’identification des personnes et les partenariats avec les communautés inuites, mais il se voulait aussi une célébration des cultures autochtones ainsi qu’une occasion de jeter un regard sur le passé pour bâtir un avenir meilleur. Pendant les trois jours, les aînés inuits, métis et des Premières Nations ont fait part de leurs connaissances et formulé des recommandations importantes sur l’orientation future d’Un visage, un nom et sur l’avenir d’un pays où les Autochtones ont désormais une identité, peuvent s’exprimer et ne sont plus oubliés.

Photographie en couleurs d’un homme de la Nation métisse portant une veste ornée de broderies et se tenant sur un podium.

Clément Chartier, président du Ralliement national des Métis, à @visage_nom sur Twitter pour l’événement soulignant le 15e anniversaire d’Un visage, un nom, le 3 mars 2017.

Même si Un visage, un nom a fait de grands pas pour corriger les erreurs du passé, il reste encore bien du travail à accomplir. Pour souligner le 15e anniversaire du projet, de nouvelles pages officielles ont été lancées sur Facebook et sur Twitter. Cette plus grande présence dans les médias sociaux fournit une nouvelle plateforme aux peuples autochtones et aux Canadiens non autochtones pour relater leurs récits, raconter leur histoire et continuer le travail important entrepris par Un visage, un nom.

Photographie en couleurs de deux femmes inuites regardant attentivement une photographie. La femme la plus âgée tient la photographie alors que la plus jeune prend une photo de celle-ci avec son téléphone. Derrière elles, des gens parlent et des tables sont couvertes de photos.

Manitok Thompson (à gauche) et Kathleen Ivaluarjuk Merrit (à droite) identifiant des photographies à la galerie d’art de l’Université Carleton, à Ottawa, le 2 mars 2017.

« Voir ces photographies, c’est comme rentrer à la maison », a déclaré l’aîné inuit Piita Irniq pendant l’événement. Sa déclaration montre tout le pouvoir d’une photographie. Par conséquent, le projet Un visage, un nom ne consiste pas simplement à identifier des personnes, des lieux et des objets; il aide à regagner ce qui était perdu, à se retrouver et à rentrer chez soi. L’événement a permis bien plus que trouver des noms. Il a permis de faire part de connaissances, qu’elles concernent les vêtements, les traits physiques, la chasse, la pêche, le trappage, les familles ou les modes de vie traditionnels. Surtout, chaque photographie donnait la possibilité de faire part d’un récit ou d’un souvenir.

Photographie en couleurs d’un aîné inuit qui porte une veste traditionnelle inuite, se tient devant un moniteur et pointe une image à l’écran. Deux jeunes inuits regardent et écoutent attentivement.

L’aîné Piita Irniq (à droite) et les étudiants du collège Nunavut Sivuniksavut Gabe Klengenberg (à gauche) et Aislyn Gizelle (au centre) lors d’une séance tenue à BAC pour le 15e anniversaire d’Un visage, un nom, le 1er mars 2017.

Je ne peux pas parler pour les autres, mais j’ai l’impression que les personnes qui ont participé à l’événement sont reparties avec plus de connaissances qu’à leur arrivée. C’était véritablement trois journées d’enseignement, un enseignement dont chaque Canadien tirerait parti, et un enseignement qu’Un visage, un nom a l’intention de favoriser. Chaque fois qu’un visage était identifié lors de l’événement, cela était ressenti comme une victoire et faisait une différence, car une identité était rendue. Avoir la chance de regarder les aînés identifier des personnes et des lieux était remarquable. Le plus incroyable, c’était l’énergie dans l’air, le sentiment de collaboration, de respect et de réconciliation. Un visage, un nom continuera le travail significatif accompli au cours des 15 dernières années; grâce aux nouveaux partenariats établis avec les Inuits, les membres des Premières Nations et les Métis, une différence positive continuera à être faite. Les personnes qui ne connaissent pas Un visage, un nom et ne savent pas comment aider sont invitées à visiter la page Web du projet et ses comptes dans les médias sociaux, à « aimer » la page, à publier les photographies et à contribuer à rendre le Canada meilleur, à en faire un pays où l’identité des personnes ne sera pas effacée, où elle sera plutôt célébrée et honorée.

Pour promouvoir Un visage, un nom et en savoir plus sur ce projet :

Photographie en couleurs d’un jeune Inuit regardant plusieurs grandes photographies sur des chevalets.

Curtis Kuumuaq Konek à BAC lors de l’événement soulignant le 15e anniversaire d’Un visage, un nom.


Julie Dobbin fait sa maîtrise ès arts en études autochtones et canadiennes à l’Université Carleton. Elle a écrit cet article pendant un stage à la Division sur les expositions et le contenu en ligne de Bibliothèque et Archives Canada.

Inuits : numéros de disque et projet Nom de famille

Cet article renferme de la terminologie et des contenus à caractère historique que certains pourraient considérer comme offensants, notamment au chapitre du langage utilisé pour désigner des groupes raciaux, ethniques et culturels. Pour en savoir plus, consultez notre Mise en garde — terminologie historique.

De nos jours, Inuits s’identifient à l’aide d’une combinaison de prénoms d’origine euro chrétienne et de noms de famille inuits. Cela n’a pas toujours été le cas. Avant la première moitié du 20e siècle, Inuits ne portaient pas de nom de famille. Les noms inuits traditionnels reflétaient ce qui avait de l’importance pour eux : la famille, les esprits, les animaux, l’environnement. Ces noms n’étaient pas spécifiques à un sexe en particulier; ce n’était pas non plus des patronymes reconnus et partagés.

Dans les années 1920, les missionnaires, les commerçants de fourrures et les fonctionnaires du gouvernement ont voulu identifier les Inuits conformément aux normes européennes et an modèle de société patriarcale. Ces groupes croyaient que l’absence de noms de famille et d’orthographe normalisée compliquait l’identification des Inuits dans les documents reliés au commerce, lors des recensements et dans bien d’autres occasions. Un système d’attribution de numéros de disque a alors été mis en place; il avait pour but, non seulement d’identifier les Inuits, mais aussi de gérer la distribution des allocations familiales et autres formes d’aide, ainsi que les soins de santé.

Une photographie en noir et blanc, prise dans un iglou, de deux hommes lisant un numéro de disque attaché au parka d’un jeune garçon.

Collecte des données de recensement et vérification de certaines questions reliées aux allocations familiales, Windy River, [T. du N.-O. (Nunavut)], 10 décembre 1950 (a102695)

À l’époque, plusieurs suggestions ont été formulées au gouvernement fédéral, telles que la mise sur pied d’un système d’appellation à deux noms comprenant un nom de famille, la normalisation de l’orthographe, la création de dossiers de la GRC et l’obtention des empreintes digitales de tous Inuits. La GRC a commencé à relever les empreintes digitales, mais cette mesure a été mal accueillie, surtout en raison de son association avec la criminalité.

Finalement, en 1941, le gouvernement fédéral a choisi d’attribuer à chaque Inuit un identifiant numérique unique, lequel était estampillé sur un disque ou imprimé sur une carte. Ces identifiants étaient souvent appelés « numéro de disque esquimau » ou ujamiit (ujamik) en inuktitut. Inuits devaient toujours avoir ce numéro sur eux; il était souvent cousu sur un vêtement ou attaché à un lacet porté autour du cou. Ces numéros ont été utilisés jusqu’en 1972, sauf au Québec, où cette pratique a continué pendant quelques années.

Les trois photographies suivantes, prises en ordre séquentiel, montrent les membres d’une même famille tenant leur numéro de disque écrit sur un tableau.

Une photographie en noir et blanc d’un homme inuit tenant un petit tableau sur lequel est écrit le numéro 6008.

Portrait d’un homme [David Arnatsiaq] tenant un petit tableau portant le numéro 6008, à Pond Inlet (Mittimatalik/Tununiq), Nunavut, août 1945 (e002344278)

Une photographie en noir et blanc d’une femme inuite tenant un petit tableau sur lequel est écrit le numéro 6009.

Portrait d’une femme [Tuurnagaaluk] tenant un petit tableau portant le numéro 6009, à Pond Inlet (Mittimatalik/Tununiq), Nunavut, août 1945 (e002344279)

Une photographie en noir et blanc d’une femme inuite tenant un petit tableau sur lequel est écrit le numéro 6010.

Portrait d’une jeune femme [Juunaisi/Eunice Kunuk Arreak] tenant un petit tableau portant le numéro 6010, à Pond Inlet (Mittimatalik/Tununiq), Nunavut, août 1945 (e002344280)

De 1968 à 1971, le gouvernement fédéral et le Conseil des Territoires du Nord-Ouest ont entrepris, dans le cadre du Projet Nom de famille, de modifier la façon d’identifier les Inuits, en abandonnant le système de numéros de disques pour le remplacer par l’utilisation de patronymes. Ce projet était dirigé par Abraham « Abe » Okpik qui a parcouru les Territoires du Nord-Ouest et le nord du Québec en compagnie d’un linguiste.

Bibliothèque et Archives Canada conserve des témoignages du système de numéros de disque sur des photographies et des documents, tels que des listes de personnes avec leur numéro de disque et des listes montrant la transition vers l’adoption du nom de famille et du numéro d’assurance sociale. Notez bien que ces documents ne peuvent être consultés, car ils contiennent des renseignements personnels.

Nommer les Autochtones Canadiens

Cet article renferme de la terminologie et des contenus à caractère historique que certains pourraient considérer comme offensants, notamment au chapitre du langage utilisé pour désigner des groupes raciaux, ethniques et culturels. Pour en savoir plus, consultez notre Mise en garde — terminologie historique.

Lorsqu’ils effectuent une recherche historique quelconque, les chercheurs doivent choisir une variété de termes de recherche. Ils espèrent qu’en utilisant le bon terme, ils pourront trouver et utiliser des sources primaires et secondaires. Choisir les bons termes de recherche est un défi dans le meilleur des cas, mais les problèmes inhérents à la recherche dans le contenu autochtone sont particulièrement importants. Plusieurs termes de recherche reflètent des préjugés historiques et des malentendus. Au fil du temps, les noms ou les termes changent complètement tandis que l’orthographe est modifiée en fonction de la période, du lieu et des circonstances.

Et les termes continuent de changer.

Rien ne semble indiquer que les Premières Nations, les Métis ou les Inuits, en tant que gardiens du savoir, aient participé à la création et au développement historique des documents que l’on retrouve à Bibliothèque et Archives Canada (BAC). Toutefois, les personnes ou les institutions qui ont créé les documents ont laissé sur eux une empreinte déterminante colorée par la raison, la période et l’endroit de leur création.

Le langage et l’imagerie utilisés dans le passé, même s’ils peuvent être problématiques, demeurent dans les descriptions de la base de données. Les termes comme « squaw », « sang-mêlé », « massacre », « sauvage » et « victoire » doivent être utilisés avec une attention toute particulière et dans un contexte approprié.

Aquarelle montrant une femme vêtue d’une robe rouge avec une couverture enroulée autour de la tête et des épaules. Elle porte des raquettes et regarde vers la gauche. Derrière elle, au loin, on aperçoit la silhouette d’une église et une montagne derrière elle.

Femme indienne dans ses beaux habits; vue de Montréal au loin. Peinture par Francis George Coleridge, 1866 (MIKAN 2836790)

Lithographie montrant un groupe de neuf personnes, probablement une famille, y compris un bébé et trois enfants assis devant un tipi. Une personne est debout et tient une carabine, et deux hommes métis fument la pipe.

Tipi indien et sang-mêlé [Métis] rebelle, 1885 (MIKAN 2933963)

Aquarelle montrant trois figures debout près d'une étendue d’eau. De gauche à droite : une femme fumant la pipe portant un bébé sur le dos, un homme portant des jambières, une longue veste bleue et une ceinture fléchée métisse et tenant une carabine dans sa main droite et une autre femme vêtue d'une robe bleue avec un châle enroulé autour de la tête et du corps.

Un sang-mêlé [Métis] et ses deux épouses (MIKAN 2897207)

Le matériel dont la description n’est pas idéale est tout aussi problématique. Les descriptions ne sont pas toujours utiles. On obtient peu de détails lorsque des termes comme « type indigène » et « Peau-Rouge » sont utilisés. Parallèlement, la majorité des personnes représentées sur les images des collections de Bibliothèque et Archives Canada n’ont jamais été identifiées. De nombreuses descriptions archivistiques relatives à certains événements ou activités sont absentes ou contiennent des informations périmées (par exemple, les noms de lieu et de bande ou la terminologie). Par ailleurs, l’information est fondée sur des inscriptions et des légendes originales trouvées dans les documents et elle reflète donc les préjugés et les attitudes de la société non autochtone de l’époque.

Le très grand nombre de descriptions de ce type fait de la recherche d’une photographie ou d’un document particulier une tâche colossale.

BAC modifie les descriptions dans sa collection. Tout en assurant l’intégrité de la description originale, BAC s’efforce de clarifier les données incomplètes et de modifier le langage inapproprié lorsque des exemples sont portés à notre attention. Nous ne modifions jamais l’original d’un document ou d’une image, seulement la description qui a été créée pour le document ou l’image.

Photographie en noir et blanc d’un homme inuit vêtu d’une chemise et de bretelles et regardant directement le photographe.

[Gros plan d’un homme portant des bretelles, Chesterfield Inlet (Igluligaarjuk), Nunavut]. Titre original : Type indigène, Chesterfield Inlet (T.N.-O.), juillet 1926 (MIKAN 3379826)

Un visage, un nom voit plus grand!

Cet article renferme de la terminologie et des contenus à caractère historique que certains pourraient considérer comme offensants, notamment au chapitre du langage utilisé pour désigner des groupes raciaux, ethniques et culturels. Pour en savoir plus, consultez notre Mise en garde — terminologie historique.

Le projet Un visage, un nom a vu le jour au début de 2002, quand Bibliothèque et Archives Canada s’est associé au programme de formation Nunavut Sivuniksavut et au ministère de la Culture, de la Langue, des Aînés et de la Jeunesse du gouvernement du Nunavut. Son but? Numériser des photos d’Inuits conservées par Bibliothèque et Archives Canada pour tenter d’identifier les personnes sur ces clichés. (Les photos ont été prises sur le territoire du Nunavut actuel.) On croyait alors que le projet durerait une année. C’était sans compter son succès auprès du public!

Pour souligner en juin le Mois national de l’histoire autochtone, Bibliothèque et Archives Canada est heureux d’annoncer le lancement du nouveau site Un visage, un nom. En plus des communautés du Nunavut, ce projet élargi englobe maintenant les Inuits d’Inuvialuit, dans les Territoires-du-Nord-Ouest; ceux du Nunavik, dans le nord du Québec; et ceux du Nunatsiavut, au Labrador; s’y ajoutent aussi les Premières Nations et les Métis du reste du Canada. Du contenu tout neuf sera versé sur le nouveau site; quant au projet original Un visage, un nom, il demeurera tel quel sur le Web.

Le projet Un visage, un nom : 2002-2012 a commencé par la numérisation d’environ 500 photos du fonds Richard Harrington. Depuis, Bibliothèque et Archives Canada a numérisé environ 8 000 photos provenant de divers ministères et de collections privées. Grâce à l’enthousiasme et au soutien des chercheurs inuits et non inuits, près du quart des personnes, des activités et des événements représentés sur les photos ont pu être identifiés. Toute l’information recueillie a été ajoutée à la base de données du projet.

Au fil des ans, Bibliothèque et Archives Canada a reçu plusieurs photos et entendu de touchants récits de personnes qui ont pu renouer avec leur famille et leurs amis grâce à Un visage, un nom. Par exemple, Mona Tigitkok, une aînée de Kugluktuk, s’est reconnue sur un portrait de jeunesse alors qu’elle assistait, à l’hiver 2011, à une rencontre de la Société patrimoniale Kitikmeot (site en anglais). La Société avait organisé plusieurs de ces rencontres, où l’on présentait des photos de personnes non identifiées.

Photographie en couleur prise dans une salle communautaire à Kugluktuk, au Nunavut, en février 2011. On y voit une femme âgée inuite, vêtue d’un long parka à motif floral bordé de fourrure; elle se tient devant une toile où est projetée une diapositive d’elle-même quand elle était jeune femme.

Mona Tigitkok devant une photo d’elle-même prise plus de 50 ans auparavant (Kugluktuk, Nunavut, février 2011). Crédit : Société patrimoniale Kitikmeot

Pour l’auteure et historienne Deborah Kigjugalik Webster, Un visage, un nom a été utile tant sur le plan personnel que professionnel. Elle raconte :

Je travaille dans le domaine de l’histoire et du patrimoine inuits, et c’est comme ça que j’ai découvert le projet Un visage, un nom il y a quelques années. Mais le projet a aussi une signification personnelle pour moi. En faisant une recherche dans la base de données, j’ai découvert des photos de parents et de gens de ma communauté.

Les photographes d’autrefois n’identifiaient pas souvent les gens qu’ils prenaient en photo. Ils se contentaient d’indiquer « groupe d’Esquimaux » ou « femmes autochtones », par exemple. Un après-midi où je prenais le thé avec ma mère, Sally Qimmiu’naaq Webster, je lui ai montré des photos dans la base de données d’Un visage, un nom. Ensemble, nous avons pu identifier quelques visages de notre communauté de Baker Lake (Qamanittuaq). Quelle satisfaction! En redonnant leurs noms à ces personnes, réduites à l’anonymat dans les légendes des photographes, nous nous réapproprions notre histoire et notre patrimoine. 

Photographie d’une jeune femme inuite vêtue d’un col roulé et regardant vers le bas, Baker Lake (Qamanittuaq), Nunavut, 1969

Photo de feu Betty Natsialuk Hughson (identifiée par sa parente Sally Qimmiu’naaq Webster), prise à Baker Lake (Qamanittuaq), Nunavut, 1969 (MIKAN 4203863)

Avec Un visage, un nom, on peut bien sûr identifier des gens sur des photos, mais aussi ajouter ou corriger de l’information dans la base de données, comme corriger l’orthographe d’un nom. On n’a qu’à utiliser le formulaire en ligne. Ça vaut vraiment la peine d’aller voir les photos dans la base de données, surtout avec un aîné : ça débouche toujours sur des conversations intéressantes.

Au travail, je m’occupe d’une page Facebook qui s’appelle Inuit RCMP Special Constables from Nunavut [en anglais seulement]. On y rend hommage à nos gendarmes spéciaux inuits de la Gendarmerie royale du Canada. L’année dernière, j’y ai publié un portrait de Jimmy Gibbons, pris à Arviat en 1946. Je l’avais trouvé dans la base de données d’Un visage, un nom. Le gendarme spécial Gibbons était un homme remarquable. Il s’est joint à la GRC en 1936 et a pris sa retraite en 1965. Plusieurs personnes ont « aimé », partagé et commenté sa photo, dont certains de ses descendants : fils, neveux, petits-fils. Des gens ont tout simplement écrit « Merci ». Shelley Ann Voisey Atatsiaq a fièrement commenté : « Pas étonnant que j’aie déjà écrit à quel point je respecte la GRC : j’ai du sang de la GRC qui coule dans mes veines! Merci d’avoir partagé cette photo avec nous! »

Photographie noir et blanc prise de près d’un homme Inuit portant un veston et une cravate debout à l’extérieur.

Jimmy Gibbons, Gendarme spéciale de la Gendarmerie royale du Canada, Arviat (Nunavut), 1 août 1946 (MIKAN 4805042)

Envie d’en savoir plus sur le projet? Lisez l’article Project Naming/Un visage, un nom, paru en anglais dans le International Preservation News (aux pages 20 à 24 du no 61, publié en décembre 2013).

BAC aimerait aussi connaître votre opinion sur le deuxième volet du projet Un visage, un nom. Exprimez-vous grâce au formulaire « Le projet Un visage, un nom se poursuit ».

Histoire autochtone : Commencez votre recherche

Les colliers de wampum

« Colliers de porcelaine », « branches de porcelaine », « wampum belts », ou encore « strings of wampum »… à quoi renvoient ces expressions rencontrées dans les archives coloniales de la collection de Bibliothèque et Archives Canada?

On nomme wampum – un mot d’origine algonquin du sud de la Nouvelle-Angleterre – les perles blanches et pourpres de forme tubulaire fabriquées à partir de certains coquillages marins provenant exclusivement des côtes de l’océan Atlantique. C’est une abréviation du mot wampumpeague (ou wampumpeake), signifiant « enfilade de coquillages blancs ». Dès le début du XVIIe siècle, le wampum devint un bien d’échange important dans la traite des fourrures en pleine expansion dans le Nord-Est du continent, en plus de servir de monnaie dans les colonies hollandaises et anglaises jusque dans les années 1660.

Dessin montrant deux exemples de wampum : un collier et des branches de porcelaines.

Dessin publié en 1722 montrant la distinction entre les cordons (aussi appelés « branches ») et les colliers de wampum (MIKAN 2953327)

Les peuples iroquoiens de l’intérieur des terres en firent un usage particulier en les utilisant dans leurs rencontres diplomatiques officielles avec les groupes voisins ou étrangers. Ces perles étaient alors tissées en des cordons et colliers de diverses tailles pouvant contenir de quelques centaines à plus de dix milles perles.

Peinture à l’huile sur toile montrant un homme debout dans une forêt avec un loup à ses pieds. Il est vêtu de noir et porte une écharpe rouge et tient dans sa main un collier de wampum.

Portrait de Tee Yee Neen Ho Ga Row (baptisé Hendrick), l’un des « Quatre rois Indiens » ayant rencontré la reine d’Angleterre en 1710, tenant un collier de wampum.

Jouant un rôle central dans les rencontres internationales et dans l’entretien de bonnes relations, les colliers de wampum étaient offerts lors des rencontres formelles pour supporter le discours prononcé, pour le rendre légitime et officiel. Du début du XVIIe siècle jusqu’au début du XIXe siècle environ, ce système diplomatique se répandit dans une grande partie du Nord-Est américain, de la vaste région des Grands-Lacs jusque dans les Maritimes, avec toutefois d’importantes variantes.

Photo noir et blanc montrant divers colliers et cordons de wampum.

Colliers et cordons de wampum conservés parmi les Six Nations dans les années 1870 (MIKAN 3367331)

Comme ils étaient utilisés pour soutenir les paroles prononcées, certains de ces colliers étaient préservés pendant plusieurs années afin que les messages qu’ils portent soient maintenus et conservés dans le temps. C’est pourquoi les observateurs des XVIIe et XVIIIe siècles ont souvent comparé les wampums avec les archives ou avec d’autres documents officiels écrits (actes, registres, annales, contrats, etc.).

Photo noir et blanc montrant six hommes regardant des wampums. Cinq individus sont assis et le sixième semble expliquer un collier de wampum.

Chefs iroquois des Six Nations expliquant les colliers de wampum qu’ils conservent en 1871 (MIKAN 363053)

Ces wampums étaient conservés parfois sur une longue période de sorte que les termes des ententes passées demeurent connus. En tant que supports de la tradition orale, les wampums portant les paroles prononcées lors d’un événement particulier devaient donc être accompagnés d’un discours pour être signifiants. Ainsi, le gardien des wampums s’assurait que leur signification soit répétée de temps à autre devant les membres de la communauté. De façon périodique, il répétait publiquement le « contenu » des wampums qui étaient conservés afin que l’histoire de la nation se transmette à la génération plus jeune.

Pour continuer votre recherche : France fonds des colonies et le fonds Haldimand font souvent référence aux wampums. Il faut noter que ces deux fonds ont beaucoup de bobines de microfilms et que le site Héritage est en train d’en faire la numérisation.