La mystérieuse affaire de la photo sur cuir verni : un pannotype de Bibliothèque et Archives Canada

Par Tania Passafiume, avec l’aide de Shannon Perry

J’ai découvert un trésor caché alors que je répertoriais plus de 300 objets emboîtés dans les fonds photographiques de Bibliothèque et Archives Canada. Une de ces images me semblait quelque peu étrange. Elle ne ressemblait ni à un daguerréotype, ni à un ambrotype, ni même à un ferrotype, soit le genre de photographies habituellement conservées dans de petits écrins de cuir, de papier ou de plastique.

Image couleur d’un coffret en papier tapissé de velours rouge. Sur le côté droit, une photo en noir et blanc encadrée par un passe-partout de cuivre représente un jeune homme vêtu d’un veston de couleur foncée.

Un pannotype d’un jeune homme inconnu, dans un coffret en papier (e011200812_s15-v8)

Les questions n’ont pas tardé. De quoi s’agissait-il? Quel procédé photographique avait servi pour créer cet objet? Le premier indice m’indiquant qu’il s’agissait d’un objet insolite fut l’absence de scellant, ce qui signifiait qu’on n’avait pas apposé à l’origine de ruban de scellement. Traditionnellement, pour diverses raisons, un ruban de papier était utilisé pour sceller le paquet placé dans le coffret. N’ayant pas de ruban original à briser, j’ai décidé d’ouvrir le paquet.

Mes découvertes

Après avoir retiré le paquet de son écrin, j’ai immédiatement noté un fragment de papier épais posé au dos du paquet, qui semblait provenir d’une feuille plus grande. Dans le quadrant supérieur gauche apparaissaient des mots incomplets inscrits au crayon : « hol » et « acid ». La partie supérieure présentait une sorte de détérioration, sans doute une tache laissée par un liquide, à en juger par la décoloration du papier. Au début, je n’ai pas tellement porté attention à ce papier. Puisque le ruban de scellement original n’était plus là, il était vraisemblable qu’une personne eut placé ce morceau de papier derrière la photo après avoir retiré le sceau. Cette découverte en soi n’était pas surprenante, puisque les plaques photographiques étaient souvent retirées d’un coffret pour être placées dans un autre. Ce n’est que plus tard que je me suis rendu compte que le texte était en fait essentiel pour saisir la nature de la photo.

En retirant la feuille de papier, j’ai vu un morceau de cuir. Immédiatement, j’ai compris ce que je tenais entre les mains! Ce morceau de cuir n’était pas une autre couche ajoutée derrière la plaque photographique, c’était la photo elle-même gravée sur cuir! Ce procédé photographique est appelé pannotype (d’après le latin « pannos », qui signifie étoffe). J’avais lu à propos des pannotypes et vu des exemples modernes; toutefois, il est très rare de tomber sur des originaux, surtout en si bon état. J’ai retourné l’objet et retiré le passe-partout de laiton avec sa plaque de verre. Sous le verre détérioré et sale se trouvait une surface brillante en cuir sur laquelle était gravée l’image impeccable d’un homme. Le verre en mauvais état m’avait confondue et fait douter du procédé photographique utilisé. Grâce à mon analyse minutieuse et à un heureux hasard, Bibliothèque et Archives Canada venait de découvrir un pannotype du 19e siècle dans ses fonds!

L’histoire derrière ce procédé

Les pannotypes ont été à la mode de 1853 au début des années 1880. La méthode était semblable à celle utilisée pour les ambrotypes, à cette différence près qu’un morceau de tissu ou de cuir servait de support au lieu du verre. Fait intéressant, les pannotypes étaient réalisés en appliquant sur un ambrotype des gouttes d’une solution d’acide nitrique dilué dans l’alcool. Cela permettait au photographe de retirer l’émulsion (contenant l’image en tant que telle) du support en verre pour la placer sur un nouveau support, par exemple un morceau de cuir. J’ai alors repensé aux mots incomplets écrits à la main sur le morceau de papier trouvé derrière le cuir, « hol » et « acid ». Ces mots seraient-ils « alcohol » et « nitric acid » (alcool et acide nitrique), soit les ingrédients mêmes pour réaliser un pannotype?

Image couleur d’une feuille de papier tachée sur laquelle sont inscrits les mots incomplets « hol » et « acid ».

La feuille de papier trouvée au dos de la photo, avec le texte « hol » et « acid » inscrit au crayon. (e011200812_s25-v8)

Image couleur de mains gantées tenant un morceau de cuir dont la partie supérieure et les côtés sont tachés.

Le cuir au verso de la photo. Photo : Carla Klück.

Image couleur de mains gantées en train de séparer le portrait en noir et blanc d’un homme du passe-partout de cuivre avec plaque de verre qui le recouvrait.

La photo (cuir verni avec émulsion) et le passe-partout de cuivre avec sa plaque de verre. Photo : Carla Klück.

Le procédé photographique appelé pannotype a été présenté pour la première fois en 1853 à l’Académie des sciences de France par l’entreprise Wulff & Co, laquelle vendait les explications sur son procédé pour la somme de 100 francs. Les pannotypes se répandent rapidement, alors que de nombreux photographes professionnels les utilisent dans un contexte commercial, comme en témoignent des annonces et des articles de journaux ayant traversé le temps. À cette époque, les clients s’intéressaient à ce procédé puisqu’ils le croyaient plus durable : il ne se brisait pas comme les ambrotypes sur verre, ne s’égratignait pas comme les daguerréotypes et ne se déformait pas comme les ferrotypes. Nous ne savons presque rien de la diffusion et de l’utilisation du pannotype ici au Canada, mis à part le fait que plusieurs photographes réputés y ont eu recours, dont George Robinson Fardon (1807-1886), de Victoria, en Colombie-Britannique. Son album de photos « Portrait and Views on patent leather » (Portraits et vues sur cuir verni) a été présenté à l’Exposition universelle de 1862 à Londres, puis a été ajouté aux fonds du Victoria and Albert Museum.

Ici et maintenant

De nos jours, la découverte de pannotypes est chose rare, leur durée de vie étant très limitée en raison de leur fragilité intrinsèque. Or, ce pannotype nouvellement découvert sur cuir verni est en excellente condition. Son seul défaut est la détérioration du verre original dans le passe-partout de cuivre, ce à quoi quelques efforts de conservation ont su remédier. Il est maintenant temps de partager notre découverte avec le public et, peut-être, d’essayer d’élucider le prochain mystère : qui est l’homme sur la photo et qui était le photographe? Restez à l’affût!


Tania Passafiume est la restauratrice en chef des documents photographiques de la Division des soins de la collection au sein de la Direction générale des opérations numériques et de la préservation de Bibliothèque et Archives Canada.

Shannon Perry est une archiviste en photographie de la Division des archives gouvernementales de la Direction générale des archives de Bibliothèque et Archives Canada.

Conservatrice invitée : Anne Maheux

Bannière pour la série Conservateurs invités. À gauche, on lit CANADA 150 en rouge et le texte « Canada: Qui sommes-nous? » et en dessous de ce texte « Série Conservateurs invités ».Canada : Qui sommes-nous? est une nouvelle exposition de Bibliothèque et Archives Canada (BAC) qui marque le 150e anniversaire de la Confédération canadienne. Une série de blogues est publiée à son sujet tout au long de l’année.

Joignez-vous à nous chaque mois de 2017! Des experts de BAC, de tout le Canada et d’ailleurs donnent des renseignements additionnels sur l’exposition. Chaque « conservateur invité » traite d’un article particulier et en ajoute un nouveau — virtuellement.

Ne manquez pas l’exposition Canada : Qui sommes-nous? présentée au 395, rue Wellington à Ottawa, du 5 juin 2017 au 1er mars 2018. L’entrée est gratuite.


 Mary Miles Minter dans Anne of Green Gables … tiré des quatre célèbres livres « Anne », Realart Pictures, 1919

Épreuve colorée d’Anne portant une tenue habillée contre un fond vert. Elle tient un parasol rouge et jaune, et porte des bottes noires, une jupe rouge sous une superbe jupe de dessus blanche et un châle marron. Le logo de Realart Pictures est situé dans le coin supérieur gauche, avec le nom de l’actrice et le titre du film en bas.

Une affiche de lithographie en couleurs de l’actrice Mary Miles Minter dans Anne of Green Gables de Realart Pictures, 1919 (AMICUS 27641454). « Anne of Green Gables » est une marque déposée et une marque officielle canadienne de Anne of Green Gables Licensing Authority Inc.

Avez-vous reconnu l’héroïne rousse de Lucy Maud Montgomery sur cette affiche d’un film américain? C’est l’une des premières images d’Anne imprimées en série. La célèbre fillette est depuis devenue un symbole réglementé du Canada.


Parlez-nous de vous.

Ma curiosité à l’égard des matériaux et des techniques des artistes a été l’objet de mes recherches sur de nombreux sujets, depuis les pastels d’Edgar Degas et d’autres artistes du XIXsiècle jusqu’aux techniques d’impression complexes de l’artiste canadienne Betty Goodwin. Je pratique la conservation du papier depuis plus de 30 ans, appliquant le traitement sur tout, des dessins des vieux maîtres jusqu’aux énormes dessins contemporains. De plus, j’ai un amour particulier pour le tissage, le violoncelle et les artefacts surdimensionnés, qui présentent de grands défis pour ce qui est du traitement et du montage.

Les Canadiens devraient-ils savoir autre chose à ce sujet selon vous?

Notre affiche d’Anne of Green Gables est rare. Comme les journaux, les affiches de films sont des objets éphémères qui ne sont pas destinés à durer longtemps. Ces types d’objets sont généralement imprimés sur des papiers de mauvaise qualité qui n’ont jamais été conçus pour résister aux ravages du temps, ce qui rend la survie de notre affiche d’Anne of Green Gables tellement spéciale.

Trois sections distinctes de l’affiche ci-dessus. La première section montre la moitié supérieure du corps d’Anne; la seconde, la moitié inférieure de son corps; et la troisième, le nom de l’actrice et le titre du film.

Trois sections distinctes de l’affiche d’Anne of Green Gables (AMICUS 27641454). « Anne of Green Gables » est une marque déposée et une marque officielle canadienne de Anne of Green Gables Licensing Authority Inc.

Cette affiche de 1919 a été réalisée avec un procédé appelé lithographie, une méthode d’impression commune utilisée au tournant du siècle dernier pour produire en masse des produits commerciaux tels que des affiches, des cartes, des publicités et des emballages. La lithographie a été inventée en 1799 par Alois Senefelder et tire son nom de la surface d’impression sur pierre calcaire, du mot grec lithos, qui signifie « pierre ». Cette technique est devenue un moyen populaire et peu coûteux de créer des images colorées et lumineuses à la fin du XIXsiècle. Contrairement à d’autres procédés d’impression, la lithographie est basée sur un principe chimique : l’huile et l’eau ne se mélangent pas. Pour fabriquer une plaque lithographique, l’artiste dessine directement sur la surface de pierre spécialement traitée. Un procédé chimique rend le dessin graisseux réceptif à l’encre d’impression graisseuse, tandis que les zones en dehors de l’image restent humides pour repousser l’encre.

En raison de sa taille, notre affiche a été dessinée sur trois pierres distinctes, puis imprimée sur trois morceaux de papier (figure 1). Si l’on regarde les côtés de l’image, on peut voir les bords irréguliers des pierres lithographiques (figure 2). Les fines lignes blanches sur toute l’image sont des plis d’impression. La minceur et la taille du papier rendent le placement des feuilles sur la pierre difficile, d’où les rides fines qui s’ouvrent une fois que l’encre est sèche, laissant ces marques blanches caractéristiques (figure 3). Dans ce détail, nous pouvons voir que l’artiste a utilisé un crayon gras pour dessiner l’image sur la pierre lithographique, et a également appliqué l’encre grasse en fine pulvérisation. Les couleurs sont ajoutées en utilisant des pierres supplémentaires qui sont imprimées dans des encres transparentes superposées (figure 4). Les traits de coupe spéciaux aident à guider l’imprimante pour l’impression de chaque pierre consécutive (figure 5).

Seulement quatre couleurs superposées (rouge, jaune, bleu et noir) ont été utilisées pour produire cette image colorée d’Anne of Green Gables!

Un gros plan de la bordure montrant la ligne flou de la pierre lithographique

Figure 2. Détail du bord inégal de la pierre lithographique

Un gros plan des trois lignes blanches causé par le plis de l’imprimante.

Figure 3. Détail des plis de l’imprimante

Un détail des couleurs transparentes utilisé dans l'affiche.

Figure 4. Détail des couleurs transparentes et superposées

Gros plan des du coin droit de l'affiche montrant les répères pour les différentes couleurs.

Figure 5. Détail des marques d’impressions.

Parlez-nous d’un élément connexe que vous aimeriez ajouter à l’exposition.

Les quintuplées Dionne viennent à l’esprit comme un autre exemple d’icônes canadiennes célèbres (figures 6 et 7). En 1934, les « quintuplées » sont devenues des célébrités internationales, étant en fait les premiers nouveau-nés de naissance multiple survivants qui ont été documentés. Dans leurs premières années, elles ont fait l’objet de trois longs métrages et attiré des foules de touristes dans leur petite ville du nord de l’Ontario. Les quintuplées ont fourni des appuis lucratifs pour de nombreux produits, comme Quaker Oats, figurant sur cette affiche.

Comme l’affiche d’Anne of Green Gables, cette image des quintuplées (« Quins » sur l’affiche) a été produite en série en utilisant la méthode d’impression lithographique. L’affiche était destinée à être utilisée comme présentoir autoportant en trois dimensions et elle s’est usée en raison de la manipulation physique. Elle a été conservée récemment pour une exposition, et le traitement a été maintenu à un minimum pour préserver la preuve de son utilisation. L’affiche a été stabilisée en réparant les fissures et en remplaçant le support en carton abîmé par un matériau d’archives plus robuste. Les dommages causés par l’abrasion et l’utilisation ont été réduits par un virage soigneux avec de l’aquarelle pour rendre l’image plus lisible (figures 8 et 9).

Publicité plissée et déchirée représentant des estampes découpées en noir et blanc des petites filles portant des salopettes et des chemises blanches sur un fond rouge. Le logo se trouve sur le dessus des jambes de chaque fillette, avec le nom de l’entreprise en bas de l’affiche.

Figure 6. Publicité de Quaker Oats [Les quintuplées Dionne] Today our healthy Dionne Quins had Quaker Oats (Aujourd’hui nos quintuplées Dionne en bonne santé ont mangé des céréales Quaker)
Image complète, avant traitement (MIKAN 4169312)

La même affiche après le traitement, sans la plupart des fissures et des plis.

Figure 7. Today our healthy Dionne Quins had Quaker Oats (Aujourd’hui nos quintuplées Dionne en bonne santé ont mangé des céréales Quaker)
Image complète, après traitement (MIKAN 4169312)

La figure 8 (à gauche) est une vue de détail de la tête d’Émilie avec des trous et des plis. La figure 9 (à droite) est la même vue de détail après traitement, sans les trous ni les plis.

Figure 8. Détail d’Émilie, avant traitement.
Figure 9. Détail d’Émilie, après traitement.

Biographie

Photo noir et blanc d'une femme avec des cheveux foncé .Anne F. Maheux est titulaire d’un baccalauréat ès arts de l’Université de Guelph et d’une maîtrise en conservation de l’art de l’Université Queen’s ainsi que d’un certificat de conservation d’œuvres d’art sur papier au Centre de conservation et d’études techniques de Harvard University Art Museums. Elle est lauréate du prix de préservation et de conservation du patrimoine de l’Académie américaine de Rome. Elle est également membre accréditée de l’Association canadienne des conservateurs professionnels. Elle a été conservatrice des estampes et dessins au Musée des beaux-arts du Canada pendant plus de 25 années, et elle est maintenant chef de la conservation des œuvres sur papier, des cartes et des manuscrits à BAC. Elle s’intéresse particulièrement à la peinture pastel du XIXsiècle, en particulier les œuvres d’Edgar Degas et de Giuseppe De Nittis. Elle a publié de nombreux ouvrages sur les pastels et sur les techniques et les traitements de conservation novateurs.

Conservateurs invités : Michael Smith et J. Andrew Ross

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Canada : Qui sommes-nous? est une nouvelle exposition de Bibliothèque et Archives Canada (BAC) qui marque le 150e anniversaire de la Confédération canadienne. Une série de blogues est publiée à son sujet tout au long de l’année.

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Signature de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982 mettant en vigueur la Charte des droits et libertés, par Robert Cooper, 1982

Photographie de la signature de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982, par Robert Cooper. (MIKAN 3206003) © Gouvernement du Canada

Photographie de la signature de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982, par Robert Cooper. (MIKAN 3206003) © Gouvernement du Canada

Signature de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982, photographiée par Robert Cooper en 1982.


Parlez-nous de vous.

Michael Smith a piloté un projet visant à concevoir et fabriquer des caissons d’entreposage sur mesure pour préserver deux des plus prestigieux documents de BAC, à savoir les deux exemplaires de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982. J. Andrew Ross est chargé des documents du registraire général (RG68), l’entrepôt de toutes les proclamations du gouvernement du Canada.

Les Canadiens devraient-ils savoir autre chose à ce sujet selon vous?

Document blanc-jaune pâle, rédigé à l’encre noire et rouge, orné des armoiries du Canada dans le haut.

Proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982. (MIKAN 3782519) © Gouvernement du Canada

La proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982 a été signée sur les marches du Parlement, à Ottawa, le 17 avril 1982 par la reine Elizabeth II, le premier ministre Pierre Trudeau, le procureur général (ministre de la Justice) Jean Chrétien et le registraire général (ministre de la Consommation et des Corporations) André Ouellet. La proclamation, seul document fondateur canadien signé par la reine, a permis l’entrée en vigueur de la Loi constitutionnelle de 1982 en modifiant la constitution canadienne et en adoptant la Charte canadienne des droits et libertés. La signature faisait suite à plusieurs années de négociations constitutionnelles au Canada qui ont abouti au rapatriement de la Constitution, c’est-à-dire la transmission des pleins pouvoirs de modification constitutionnelle du Royaume-Uni au Canada.

Il existe en fait deux exemplaires de la proclamation : celui signé à l’extérieur, qui a été endommagé par la pluie (voir plus haut) et est devenu ce qu’on appelle l’exemplaire « mouillé », et celui qui a été signé plus tard à l’intérieur du Parlement. Au départ intact, ce dernier a été abîmé par de la peinture rouge par un manifestant, en 1983, et on l’appelle dorénavant l’exemplaire « taché ». Les deux exemplaires de la proclamation sont conservés par BAC et ont très souvent été exposés depuis 1982. L’exemplaire mouillé a récemment été exposé au Musée canadien pour les droits de la personne à Winnipeg, et BAC l’a récupéré au début du mois de septembre. En 2017, il sera exposé à la Bibliothèque du Parlement à Ottawa.

Exemplaire de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982 avec une grande tache rouge au milieu.

Exemplaire taché de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982. © Gouvernement du Canada. (MIKAN 3782551)

Parlez-nous d’un élément connexe que vous aimeriez ajouter à l’exposition.

BAC possède également les deux stylos utilisés pour signer la proclamation mouillée. Le premier ministre Jean Chrétien, qui entretenait un lien particulier avec ces stylos, en a fait don en 2000 aux Archives nationales du Canada. Plus tard, il a raconté ses échanges pleins d’humour avec la reine au moment de la signature :

« J’ai pris le stylo pour signer. Il ne fonctionnait pas, j’ai dit “merde” tout bas, et elle a éclaté de rire, relate-t-il. Tout le monde m’a demandé ce que j’avais bien pu lui raconter pour qu’elle se mette si spontanément à rire, mais j’ai gardé la raison pour moi pendant de nombreuses années. » (Source)

Vous pouvez voir le moment de la signature et la réaction de la reine ici, sur CBC (après 7 min 45 s), ou ici, sur Radio‑Canada (environ 0 min 47 s).

Deux stylos noir et or debout sur un socle noir et or posé sur un bloc en velours et présenté dans un coffret en bois.

Stylos utilisés par la reine Elizabeth II et les signataires de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982. © Gouvernement du Canada. (MIKAN 4105375)

Bien que les stylos aient été achetés chez Birks, bijouterie haut de gamme d’Ottawa, on n’a apparemment pas pensé à la durabilité de l’encre, et les expositions fréquentes des proclamations à la lumière font craindre que les signatures pâlissent au fil du temps. On a estimé de façon prudente qu’il était possible d’exposer chaque document à des sources de lumière d’intensité et de sources variées pendant environ 4 000 heures. En 2011, le test de microvieillissement à la lumière effectué sur l’encre des signatures par l’Institut canadien de conservation a indiqué que les colorants synthétiques utilisés dans l’encre pouvaient pâlir et qu’ils avaient probablement pâli depuis 1982.

L’encre d’importantes signatures a pâli sur plusieurs documents historiques détenus par BAC, mais alors que certains restent très peu exposés, les deux exemplaires de la proclamation sont très importants. Il a donc fallu fabriquer un caisson d’entreposage sur mesure pour leur conservation ainsi qu’une vitrine sécurisée pour les expositions afin de prévenir toute dégradation ultérieure des documents.

On a décidé de concevoir et de construire deux caissons d’entreposage permanents, un pour chaque exemplaire de la proclamation. De plus, une vitrine sécurisée serait fabriquée pour les expositions (on a prévu qu’un seul exemplaire de la proclamation serait exposé à la fois). Les caissons d’entreposage peuvent être scellés de façon hermétique lorsque l’environnement est faible en oxygène (dispositif qui pourrait être ajouté à l’avenir pour ralentir le pâlissement de l’encre), et sont vitrés à l’aide de verre antireflet comportant des filtres UV. En plus des dispositifs de sécurité, la vitrine comprend également des éléments qui limitent et surveillent les niveaux d’exposition à la lumière. Avec ces nouvelles vitrines, les Canadiens pourront voir les proclamations en montre pendant de nombreuses années.

Proclamation dans son caisson monté sur quatre pieds et doté d’une vitrine en verre.

Caisson d’entreposage d’un exemplaire de la proclamation fabriqué en vue de sa préservation. © Gouvernement du Canada.

Gros plan du caisson de préservation exposant un exemplaire de la proclamation, sous verre dans un cadre noir.

Gros plan sur le caisson de préservation. © Gouvernement du Canada.

Le cas de la proclamation a également incité BAC à revoir son approche en ce qui concerne la préservation des signatures. Bien que bon nombre de documents du gouvernement du Canada soient dorénavant signés de façon numérique, la plupart des documents de prestige sont encore signés à l’encre. Les préoccupations relatives à la pérennité de ces signatures ont amené Guy Berthiaume, bibliothécaire et archiviste du Canada, à rédiger un courriel daté du 14 avril 2016 dans lequel il conseille aux ministères d’utiliser des stylos à encre pigmentée, indélébile et résistant à la lumière, pour signer les documents officiels et de prestige. Il a mentionné le cas de la proclamation de la Loi constitutionnelle de 1982 comme un parfait exemple du risque de pâlissement de l’encre, et conseillé d’être particulièrement méticuleux quant au choix des stylos utilisés pour signer les documents officiels, « surtout les documents d’importance nationale destinés à nos archives […] afin de s’assurer que les documents placés sous notre responsabilité restent lisibles pour les prochaines générations. »

Biographies


Michael Smith est le gestionnaire des collections textuelles et cartographiques (non reliées) de Bibliothèque et Archives Canada. J. Andrew Ross est un archiviste des Documents gouvernementaux à Bibliothèque et Archives Canada.

Ressources connexes

Quel est le poids de votre collection?

Par Lisa Hennessey

Ce n’est pas une question que les archives et les bibliothèques se posent souvent, mais Bibliothèque et Archives Canada (BAC) a dû le faire en 2009, lorsque l’institution se préparait à déménager sa collection de pellicule de nitrate.

À première vue, la solution la plus simple était de placer chacune des boîtes sur une balance. Toutefois, BAC devait calculer le poids des pellicules de nitrate, mais pas celui des contenants, des enveloppes, des boîtes de film ou des albums. Comment déterminer le poids d’une collection sans la peser? Tout un défi!

La collection de pellicule de nitrate de BAC comprend 5 575 bobines de film, dont les plus anciennes datent de 1912, et près de 600 000 négatifs. Depuis le début des années 1970, elle était conservée à la base aérienne Rockcliffe d’Ottawa, en Ontario, dans un édifice construit durant les années 1940 pour entreposer les photos aériennes du ministère de la Défense nationale. À la fin des années 1990 germa l’idée de construire un nouvel édifice afin de remplacer l’ancien entrepôt vieillissant. La construction du Centre de préservation de pellicule de nitrate s’est terminée en 2011.

Photographie couleur de l’entrée d’un édifice gris, avec une rangée de fleurs jaunes à l’avant-plan.

Le Centre de préservation de pellicule de nitrate

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La Haggadah d’Altona : conservation et réparation de la reliure d’un manuscrit enluminé du 18e siècle

Par Doris St-Jacques, Lynn Curry et Maria Trojan-Bedynski

Le manuscrit de la Haggadah datant de 1763 fait partie de la collection de documents hébraïques et judaïques Jacob M. Lowy conservée à Bibliothèque et Archives Canada (BAC). L’ouvrage a été réalisé à Altona, en Allemagne. À l’époque, cette ville portuaire était l’une des plus importantes de la monarchie danoise et était reconnue comme un centre important de la vie et des études de tradition juive. On pourrait décrire le manuscrit comme une forme raffinée d’art populaire et un important document social témoignant des célébrations de la Pâque dans les familles de Juifs ashkénazes de classe moyenne. La Haggadah renferme 97 miniatures enluminées; on en faisait la lecture durant le repas du séder, à la Pâque juive.

L’Institut canadien de conservation (ICC) a analysé les 48 pages du bloc de feuilles fabriquées à la main et découvert que le texte manuscrit a été écrit à l’aide d’encre ferro-gallique. De plus, les pigments utilisés dans les peintures miniatures sont principalement le vermillon (rouge), le bleu de Prusse et l’atacamite, ou vert-de-gris (un pigment vert à base de cuivre). Une peinture jaune à effet de glaçage a aussi été détectée, et on a découvert que les couleurs de ton or contenaient des paillettes de laiton.

Le papier, les encres et de nombreuses surfaces peintes étaient dans un état fragile à cause de la corrosion des encres ferro-galliques et des pigments à base de cuivre. Il y a aussi de grosses taches brunes sur plusieurs pages attribuables à des éclaboussures de vin rouge, probablement durant le repas du séder.

En plan rapproché, deux images en couleurs de pages du manuscrit. À gauche, un texte hébreu, dont les lettres rédigées à l’encre sont parsemées de fissures et, à droite, des peintures miniatures colorées de rouge et de vert.

Deux exemples de fissures et de lacunes apparaissant sur le manuscrit, elles ont été causées par la nature corrosive des encres ferro-galliques et des pigments à base de cuivre.

Il y a plus de 20 ans, on a enlevé les couvertures de la Haggadah afin de désacidifier le bloc-texte et de réparer les fissures et les déchirures. Un récent examen du manuscrit a révélé de nouvelles fissures et lacunes dans le papier, les encres et les pigments (les médias). Manifestement, la désacidification précédente n’avait pas arrêté la détérioration du papier. Les dégâts causés par la corrosion des médias à base de cuivre sont un problème dans les collections archivistiques du monde entier. BAC et l’ICC ont donc entrepris un projet de recherche mixte visant à faire l’essai d’antioxydants connus pour trouver un traitement qui permettrait d’éviter que les médias de la Haggadah continuent de se corroder. En raison de la sensibilité à l’eau des médias constituant la Haggadah, seuls des antioxydants à base de solvants ont été retenus aux fins du projet de recherche.

Des encres et des pigments préparés en laboratoire et similaires à ceux utilisés dans la Haggadah — de l’encre ferro-gallique, de l’encre contenant du fer et du cuivre, de l’atacamite et des pigments vert-de-gris — ont été appliqués sur des bandes de papier. Artificiellement, on a fait vieillir les échantillons afin d’imiter le papier et les médias anciens de la Haggadah. Les échantillons vieillis ont ensuite été traités avec l’une des six combinaisons utilisées dans le cadre de l’étude, puis on leur a fait subir un autre vieillissement thermique dans le but de vérifier l’efficacité des divers traitements après de nombreuses années. Parmi les tests effectués sur les échantillons, mentionnons l’analyse de couleurs, la détermination du pH et l’essai de résistance du papier qui ont été menés avant et après les traitements et le vieillissement.

Photographie en couleur du matériel de laboratoire : quatre contenants de verre transparent placés côte à côte et renfermant chacun une feuille de papier et, en arrière-plan, des bouteilles de produits chimiques.

Des échantillons d’encre et de pigments déposés dans des bacs en verre sont traités avec des antioxydants à base de solvants.

Nous validerons les résultats du projet en les comparant à d’autres études avant de retenir un traitement aux antioxydants pour la Haggadah. Entre-temps, les fissures et les lacunes dans le papier ont été stabilisées mécaniquement au moyen d’un papier transparent ultra-mince que l’on détrempe dans du solvant, appelé « tissu Berlin », lequel avait préalablement été enduit de gélatine. La gélatine est reconnue pour empêcher la progression des ions de fer corrosifs dans le papier accolé.

Des images juxtaposées en plan rapproché d’une vieille réparation opaque et d’une nouvelle réparation transparente, la dernière permettant de lire facilement le texte sous-jacent.

À gauche, en plan rapproché, une ancienne réparation qui a obscurci le texte sous-jacent. À droite, une nouvelle réparation avec du tissu Berlin ultra-mince, qui permet de lire facilement le texte.

Afin d’éviter le transfert des encres, des pigments ou des produits corrosifs sur la page adjacente, il a fallu utiliser des intercalaires. Bien que nous n’ayons pas appliqué directement un antioxydant sur la Haggadah, nous avons décidé d’améliorer indirectement les propriétés du manuscrit contre le vieillissement en imprégnant les feuillets intercalaires d’un tamponnage alcalin et d’un antioxydant.

Pour diverses raisons, il n’a pas été possible de réutiliser la couverture originale endommagée de la reliure. Nous avons plutôt fait des recherches sur la composition des reliures et avons fabriqué et mis à l’essai de nombreux échantillons. Nous avons conclu qu’une reliure de carton avec couture répondait aux besoins de la Haggadah. La reliure s’ouvre à plat, sans résistance, et elle fournit un soutien optimal durant la manipulation. L’utilisation de cartons souples et de très peu d’adhésif permet à la reliure de bien s’adapter au tissu intercalé et de demeurer stable du point de vue dimensionnel. De plus, grâce à cette technique réversible, il sera possible de soumettre la Haggadah, à l’avenir, à d’autres traitements. La reliure de carton avec couture est aussi mentionnée dans la documentation et figure parmi les techniques de reliure favorisant la conservation des volumes fabriqués entre le 17e et le 19e siècle, il s’agissait donc d’une technique appropriée pour la Haggadah.

À gauche, en plan rapproché, une main tenant la page d’un livre et une aiguille qui transperce la page. À droite, en plan rapproché, la tranche inférieure du livre qui est déposé, ouvert sur une table.

À gauche, une restauratrice coud l’intercalaire au bloc de feuillets composés. À droite, la reliure de carton avec couture est ouverte afin de montrer que le manuscrit peut être consulté sans résistance.

Dans le but d’assurer l’uniformité des éléments ayant servi à fabriquer les couvertures de la précédente reliure, on a décoré les nouvelles couvertures de cuir avec de la dorure à froid, une méthode consistant à imprimer un texte ou un dessin sur la couverture d’un livre sans employer de couleurs ni de feuilles d’or. On a gaufré à froid cinq petits fleurons sur le dos afin d’illustrer, visuellement, la nature du livre, qui s’ouvre de gauche à droite.

Doté de sa nouvelle reliure, le manuscrit de la Haggadah, ainsi que les couvertures originales, est actuellement entreposé dans une coquille fabriquée sur mesure qui offre un milieu contrôlé à une température de 18 °C et à un taux d’humidité relative de 40 %. L’état du manuscrit est nettement mieux, et on peut dorénavant le manipuler en toute sécurité en attendant un prochain traitement aux antioxydants.

Pour plus de renseignements historiques, lisez le blogue précédent, « Un trésor de la collection Lowy : le splendide manuscrit de la Haggadah d’Altona ».

Liens vers des articles liés à la conservation de la Haggadah d’Altona datant de 1763

TSE, Season, Maria Trojan-Bedynski et Doris St-Jacques. « Treatment Considerations for the Haggadah Prayer Book: Evaluation of Two Antioxidants for Treatment of Copper-Containing Inks and Colorants ». The Book and Paper Group Annual (en ligne), American Institute for Conservation, vol. 31, 2012, p. 87 à 97.

ST-JACQUES, Doris, Maria Bedynski, Lynn Curry, Season Tse. « A 1763 Illuminated Haggadah Manuscript: How Ineffective Past Treatments Resulted in an Antioxidant Research Project, Impacting Current Treatment Decisions ». Paper Conservation: Decisions and Compromises (en ligne), Vienne, du 17 au 19 avril 2013, p. 17 à 20.

BEDYNSKI, Maria, Doris St-Jacques, Lynn Curry, Season Tse. « The Altonah Haggadah: The History, Conservation and Rebinding of an Eighteenth-Century Illuminated Manuscript ». Care and Conservation of Manuscripts 14: Proceedings of the thirteenth international seminar held at the University of Copenhagen, du 17 au 19 octobre 2012, Museum Tusculanum Press, éd. par M.J. Driscoll, p. 157 à 176.

« Recherche conjointe sur les antioxydants et incidence sur les décisions de traitement de la Haggadah d’Altona datant de 1763 ». Revue annuelle 2012–2013 (en ligne), Institut canadien de conservation, p. 6 et 7.


Doris St-Jacques est restauratrice de papier à la Direction générale de la préservation à Bibliothèque et Archives Canada.

Lynn Curry est restauratrice de livres à la Direction générale de la préservation à Bibliothèque et Archives Canada.

Maria Trojan-Bedynski est restauratrice de papier à la Direction générale de la préservation à Bibliothèque et Archives Canada

Miroirs riches en souvenirs : conservation de daguerréotypes dans la collection de Bibliothèque et Archives Canada – Partie I

Par Tania Passafiume et Jennifer Roger

Le daguerréotype, un type de photographie unique en son genre, a été très populaire de 1839 à 1864. Il s’agit du premier procédé photographique accessible au public et son succès découle de la clarté des images qu’il permet d’obtenir.

Les photographies produites sont très susceptibles à la perte d’image, à l’accumulation de corrosion et à d’autres formes de détérioration causées par la manipulation et par l’environnement.

Pour protéger l’image, la plaque photographique était délicatement placée sous du verre dont elle était séparée par un intercalaire protecteur. Elle était ensuite scellée avec du ruban adhésif et recouverte d’une feuille de laiton appelée préservateur. L’ensemble était mis dans un petit boîtier, souvent décoratif, fait de cuir, de bois, de papier mâché ou de plastique moulé, avec un revêtement intérieur en soie ou en velours.

Marques des daguerréotypes

Les marques d’origine ou marques de plaque sont des marques poinçonnées que l’on trouve sur beaucoup de daguerréotypes, sans pour autant en trouver sur tous. Quand elles sont présentes, les marques sont souvent en bordure de la plaque et, par le fait même, invisibles lorsque le daguerréotype est scellé. Il s’agit habituellement d’initiales, de symboles et de chiffres. Le nombre le plus couramment utilisé était « 40 » et celui-ci indiquait la composition physique de la plaque, soit un ratio d’une part d’argent pour 39 parts de cuivre. Les marques de plaque peuvent fournir des indices quant à l’endroit où les plaques de cuivre ont été fabriquées et où le photographe a obtenu son matériel. Elles peuvent parfois aussi aider à dater une image.

Lors de la préparation des daguerréotypes en vue de l’exposition au Musée des beaux-arts du Canada, on a découvert plusieurs marques de plaque. Lire la suite

Les documents originaux et les copies sur microfilm

L’accès est un aspect important du mandat de Bibliothèque et Archives Canada. Le personnel s’efforce de donner accès aux documents originaux chaque fois que c’est possible, mais que se passe‑t‑il lorsque les documents ont été retirés de la circulation et que vous devez les consulter?

Capture d’écran du système de gestion interne des collections de Bibliothèque et Archives Canada où est mis en évidence le message suivant : « Veuillez consulter les exemplaires des documents que vous essayez de commander; veuillez vous référer aux renseignements sur les exemplaires de MIKAN. »

Capture d’écran du système de gestion interne des collections de Bibliothèque et Archives Canada.

On peut retirer un document de la circulation pour diverses raisons, notamment :

  • Le document a été copié et il est disponible dans un autre format (habituellement sur microfilm)
  • Il a été désigné comme nécessitant un traitement de conservation
  • Il est fragile ou risque d’être endommagé
  • Pour des raisons de santé (p. ex. le document contient des moisissures)

Quand vous demandez un document qui a été retiré de la circulation, un employé du comptoir de consultation communiquera avec un gestionnaire des collections ou un adjoint de gestion des collections pour l’informer qu’un chercheur désire consulter l’original et la raison de sa demande.

Voici quelques raisons fréquemment invoquées pour consulter le document original :

  • Pour régler un litige
  • Les copies sur microfilm sont illisibles
  • Les copies sur microfilm sont incomplètes (pages manquantes)
  • Pour des raisons de santé (p. ex. l’utilisation du lecteur de microfilms cause le vertige)

Le gestionnaire des collections ou l’adjoint de gestion des collections évaluera le document demandé et déterminera s’il peut être déplacé en toute sécurité au 395, rue Wellington aux fins de consultation.

Un contenant ouvert dans lequel se trouvent des documents textuels prêts à être évalués

Documents textuels prêts à être évalués.

Raisons fréquemment invoquées pour refuser une demande de consultation du document original :

  • Le document est trop fragile pour être transporté hors de l’installation d’entreposage
  • L’accès au document est limité par la loi (vous devez d’abord obtenir les droits d’accès)
  • Le document pose un risque pour la santé et doit au préalable faire l’objet d’un traitement (p. ex. des moisissures)
  • Le document a été demandé dans le cadre d’un prêt ou d’une exposition

De plus, les documents suivants ne peuvent sortir du Centre de préservation :

    • Traités
  • Atlas datant d’avant 1899, cartes anciennes, documents encadrés surdimensionnés

 

  • Peintures à l’huile, pastels, œuvres au fusain, miniatures
  • Médailles, globes
  • Négatifs sur plaque de verre, grandes photos panoramiques, objets photographiques présentés en coffret
  • Certains documents de philatélie

Si le document est jugé trop fragile ou d’une valeur exceptionnelle, le gestionnaire des collections précisera que la consultation doit se faire sous supervision.

Le personnel de Bibliothèque et Archives Canada fait tout son possible pour faciliter l’accès, mais dans certains cas, les documents ne peuvent tout simplement pas être déplacés. Lorsque cette situation se produit, vous pouvez prendre un rendez-vous afin de consulter les documents originaux au Centre de préservation à Gatineau, sous la supervision d’un archiviste de référence et d’un membre de l’équipe de gestion des collections.

Bien plus que des livres

Grâce au dépôt légal, Bibliothèque et Archives Canada (BAC) reçoit une grande variété de publications à valeur patrimoniale telles que des livres, des périodiques ou des documents gouvernementaux. À l’occasion, BAC reçoit des trousses multimédias que les Services de conservation doivent réemballer. En plus de contenir des livres, ces trousses renferment des articles de toute sorte qui, dans la mesure du possible, doivent être conservés ensemble. Un coffret didactique destiné aux écoles est un bon exemple de trousse multimédia. Un tel coffret peut comprendre des manuels reliés, des reliures à feuillets mobiles, des affiches, des dépliants, des CD et des DVD. Des coffrets moins récents peuvent contenir des cassettes audio ou vidéo, des diapositives et des bandes de film — ces dernières étaient populaires au moment de la diffusion de ce type de coffret.

Pour chaque trousse, on fabrique un boîtier et des séparateurs afin de conserver les éléments ensemble pour faciliter la recherche et pour immobiliser les articles de tailles différentes dans le boîtier. Ce dernier protège aussi le contenu de la lumière, de l’eau et d’autres éléments naturels.

Avant

Photographie couleur du contenu d’une trousse multimédia éparpillé sur une table de travail.

Exemple de contenu didactique d’une trousse multimédia.

Après

Photographie couleur d’une chemise sur mesure pour une affiche et d’un boîtier sur mesure.

Exemple d’une chemise faite sur mesure pour conserver une affiche et d’un boîtier fabriqué pour une trousse multimédia didactique. Chacun des articles de la trousse multimédia est rangé dans un espace bien défini, ce qui en facilite l’accès et la conservation.

Les grandes affiches roulées sont déroulées et défroissées, puis placées dans une chemise sur mesure et classées dans un tiroir de rangement plat. Pour les CD et les DVD, on fabrique un boîtier distinct, dans lequel un séparateur sur mesure les maintiendra en place lors de la manutention.

Tous les matériaux entrant dans la fabrication de ces boîtiers sont de qualité archivistique, c’est-à-dire qu’ils sont exempts d’acide et qu’ils satisfont à des normes rigoureuses en matière de composition et de durée de vie.

Voilà un autre exemple du travail du personnel de la division Gestion de la collection qui, grâce à ses compétences, son doigté et son dévouement, assure la conservation des éléments de la collection.

Entretien et soins préventifs : Laura Secord et la butte gazonnée

Chris Smith, commis à la gestion des collections à Bibliothèque et Archives Canada, s’est récemment vu confier un projet de changement de contenant qui présentait son lot de difficultés. Chris a reçu une boîte de chocolat Laura Secord dans laquelle 27 dictabelts avaient été placés pêle‑mêle.

Les dictabelts ont été créés par la Dictaphone Corporation dans les années 1940. Ce système permet d’enregistrer des sons sur une mince courroie de plastique souple. Le Dictabelt Re-Recording Service (en anglais seulement) décrit le processus d’enregistrement : une sorte d’aiguille trace un sillon dans le plastique pour y imprimer l’information. Cette technologie est surtout utilisée dans les milieux des affaires, de la médecine et de la science. Après l’utilisation, les dictabelts sont souvent rangés à plat dans des boîtes ou dans des dossiers, ce qui fait plier le plastique et endommage les enregistrements.

La plus célèbre utilisation des dictaphones, connue de tous les conspirationnistes, est sans doute celle de la commission d’enquête sur l’assassinat du président John F. Kennedy, survenu le 22 novembre 1963. La commission a analysé un dictabelt fourni par la police de Dallas et conclu qu’au moins quatre coups de feu avaient été tirés ce jour‑là, dont un en provenance d’une butte gazonnée. Lire la suite

Quelques-uns de nos sites préférés

Les gestionnaires de collection à Bibliothèque et Archives Canada (BAC) se font souvent poser des questions sur la préservation d’objets de toutes sortes. En outre, chaque fois que nous offrons des séances de formation interne au personnel, nous ajoutons aussi des références et des suggestions de lectures.

Comme vous le savez, il est parfois difficile de faire le tri parmi l’énorme quantité d’informations disponibles sur Internet; c’est pourquoi nous avons eu l’idée de partager certaines de nos ressources en ligne. Ces ressources sont fiables et mises à jour en fonction de l’évolution de l’information et des pratiques exemplaires témoignant des plus récents développements scientifiques. En général, elles comprennent des références aux sources d’information, telles que des fournisseurs ou des publications.

Notez bien : aucun traitement invasif ne devrait être entrepris sans avoir au préalable suivi une formation sur le type de support en question. On en convient, toute personne capable de manier un couteau et une règle peut facilement confectionner un contenant protecteur, mais lorsqu’il s’agit d’effectuer une réparation, il est préférable de consulter un restaurateur.

Les sites suivants fournissent des renseignements sur plusieurs supports documentaires. Nous vous suggérons de consulter les index afin de voir si l’information que vous recherchez s’y trouve.

Institut canadien de conservation (ICC)

Le site de l’ICC contient beaucoup d’informations sur la préservation d’une diversité d’objets : livres, documents papier, photos, instruments de musique ou œuvres d’art extérieures.

http://canada.pch.gc.ca/fra/1443109395421/1443109429411

Centre de conservation du Québec (CCQ)

Le site du CCQ héberge Preserv’Art, une base de données de produits jugés appropriés. C’est une importante source de renseignements sur les fournitures pouvant être utilisées en toute sécurité avec certains supports ou objets. Elle contient également des informations sur les produits NON sécuritaires, ce qui peut s’avérer tout aussi utile.

http://preservart.ccq.gouv.qc.ca/index.aspx

Northeast Document Conservation Centre (NEDCC)

La série de notes sur la préservation du NEDCC constitue une autre excellente source d’information. Ces publications sont constamment revues, et mises à jour au besoin. (En anglais seulement)

https://www.nedcc.org/free-resources/preservation-leaflets/overview

National Park Service (NPS)

Le Service des parcs nationaux américains publie une série de notes d’information, appelées Conserve O Grams; ce sont d’excellentes publications qui traitent d’une large gamme de sujets. Bien qu’elles s’adressent davantage aux professionnels des musées, elles représentent néanmoins une source d’information utile sur une variété de sujets, notamment les contenants protecteurs. Les nouveaux Conserve O Grams portant sur la création, l’entretien et le stockage des documents numériques sont particulièrement intéressants. (En anglais seulement)

http://www.nps.gov/museum/publications/conserveogram/cons_toc.html