John Colin et Kenneth Keith Forbes, portraitistes officiels en série!

Par Geneviève Couture

Les carrières des peintres John Colin Forbes (1846-1925) et de son fils Kenneth Keith Forbes (1892-1980) illustrent brillamment en quoi certains premiers ministres ont été leurs muses et leurs mécènes. En effet, à eux deux, ils ont peint sept premiers ministres canadiens, deux gouverneurs généraux, cinq juges en chef de la Cour suprême, onze présidents de la Chambre des communes et quatorze présidents du Sénat. Ils ont également peint un roi et une reine d’Angleterre au nom du gouvernement canadien. On peut affirmer sans gêne que sur une période de plus de 90 ans, le père et le fils ont contribué à édifier le patrimoine artistique et visuel représentant les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire du gouvernement canadien.

John Colin Forbes

John Colin Forbes est né à Toronto en 1846. Dans les années 1860, il étudie la peinture à Paris et à Londres avant de revenir au Canada. Il est un membre fondateur de l’Ontario Society of Artists (1872) et de l’Académie royale des arts du Canada (1880).

Rapidement reconnu comme portraitiste, John Colin reçoit de nombreuses commandes. Il peint lord Dufferin et le marquis de Lansdowne, tous deux gouverneurs généraux du Canada. Entre 1878 et 1893, il réalise les portraits de sir John A. Macdonald, d’Alexander Mackenzie, de sir Charles Tupper et de Wilfrid Laurier. Aucun de ces tableaux ne sera un portrait officiel, mais celui de Tupper se trouve au Parlement du Canada, alors que celui de Macdonald et un portrait de Laurier se trouvent aujourd’hui au Musée des beaux-arts du Canada. On commande également à John Colin Forbes quatre portraits officiels de présidents de la Chambre des communes et six portraits officiels de présidents du Sénat.

L’artiste entretient une relation privilégiée avec sir Wilfrid Laurier, que ce dernier appelle son « ami ». Il le peint une première fois en 1885, d’après une photo prise vers 1882 par le studio de William Topley à Ottawa.

Photo noir et blanc d’un homme assis, vêtu d’un complet.

Wilfrid Laurier, député. Studio Topley, 1882. (a013133-v8 )

Le second tableau de Laurier peint par John Colin est offert au premier ministre par ses amis et admirateurs du Parti libéral le 15 mai 1902. Dans son discours à la Chambre des communes (en anglais), Laurier déclare : « C’est avec un cœur très sincère que j’accepte de la part d’amis inconnus, en mon propre nom et au nom de ma femme, ce souvenir, qui est l’œuvre d’un grand artiste canadien. »

Déplorant qu’à cette époque Forbes ait choisir d’aller exercer son art aux États-Unis, Laurier ajoute :

« Malheureusement, le Canada, qui est encore un jeune pays, n’a pas offert aux artistes toute l’aide qu’il aurait pu donner par le passé. J’espère qu’à l’avenir, les artistes et les talents canadiens seront davantage encouragés par la population canadienne qu’ils ne l’ont été jusqu’à présent. Pour ma part, je reconnais avec un certain regret que le gouvernement aurait peut-être pu en faire davantage pour encourager les talents artistiques du Canada. » [Traduction]

Enfin, regrettant ne pas avoir d’enfant à qui léguer ce tableau, Laurier fait le vœu suivant : « J’espère qu’un jour, ce tableau sera conservé dans un musée national, non pour me rappeler à la postérité, mais pour la gloire de M. Forbes, l’artiste qui l’a peint. » [Traduction] Quelques années plus tard, en 1906, Laurier offre lui-même le tableau au Musée des beaux-arts du Canada.

Une commande royale

C’est grâce à ses bonnes relations avec le premier ministre Laurier que John Colin Forbes obtient sa commande la plus prestigieuse : peindre le roi Edward VII et la reine Alexandra. Forbes sera le premier peintre canadien à obtenir une séance de pose avec un souverain britannique, et les portraits officiels d’Edward VII orneront la Chambre des communes.

Les échanges de correspondance entre Forbes et Laurier à ce sujet font partie du fonds sir Wilfrid Laurier  conservé à Bibliothèque et Archives Canada. On y constate que Forbes demande la commande à Laurier, avec qui il en a préalablement discuté.

Photo noir et blanc d’une page dactylographiée.

Lettre de John Colin Forbes à Wilfrid Laurier datée du 14 avril 1904, dans laquelle il lui demande d’obtenir la commande pour peindre le roi et la reine au nom du gouvernement canadien. (Fonds Wilfrid Laurier, MG26 G 1(A), vol. 312, page 84516, microfilm C-810)

Laurier accepte, après avoir reçu une pétition à cet effet signée par 92 des 214 députés fédéraux.

Image noir et blanc d’une page numérisée tirée d’un microfilm.

Première des trois pages de la pétition adressée par des députés de la Chambre des communes au premier ministre Wilfrid Laurier, afin qu’une commande soit faite au peintre John Colin Forbes pour réaliser un portrait du roi destiné à la Chambre des communes. (Fonds Wilfrid Laurier, MG26 G 1(A), vol. 312, page 84518, microfilm C-810)

Il fait suivre la requête au gouverneur général, lord Minto, qui facilitera l’accès de Forbes aux souverains.

Image noir et blanc d’une page numérisée tirée d’un microfilm.

Lettre du premier ministre Wilfrid Laurier au gouverneur général lord Minto, recommandant que la commande soit faite au peintre John Colin Forbes et que des démarches soient entreprises à cet effet auprès du roi. (Fonds Wilfrid Laurier, MG26 G 1(A), vol. 326, page 87632, microfilm C-813)

La séance de pose est accordée, et John Colin Forbes se rend en Angleterre afin de peindre les tableaux. Malheureusement, ceux-ci seront détruits lors de l’incendie du Parlement en 1916, moins de douze ans après leur création. Cependant, les quatre portraits officiels des présidents de la Chambre des communes et les six portraits officiels des présidents du Sénat peints par Forbes échappent à l’incendie.

Photo noir et blanc d’un édifice en proie aux flammes.

La partie Est de l’Édifice du Centre en proie aux flammes, Ottawa, 1916. (a052822-v8 )

Sir John A. Macdonald et sir Wilfrid Laurier : des portraits inspirants

Deux des portraits de premiers ministres peints par John Colin Forbes seront à leur tour une source d’inspiration pour leurs successeurs. En effet, dans un article du Winnipeg Free Press publié le 20 mars 1965 (en anglais), le journaliste Peter C. Newman relate que chaque nouveau premier ministre en poste à Ottawa s’empresse de faire installer, dans son bureau de l’édifice de l’Est, soit le tableau de sir John A. Macdonald, soit le tableau de sir Wilfrid Laurier – dépendamment de ses allégeances politiques. Cette pratique change toutefois sous Lester B. Pearson, alors que le premier ministre demande à ce que les deux tableaux ornent les murs de son bureau.

Quelques photographies prises par Duncan Cameron (dont nous avons récemment parlé dans un billet de blogue sur les photographes de presse et les premiers ministres) confirment que John Diefenbaker, Lester B. Pearson et Pierre E. Trudeau ont eu des tableaux de Forbes dans leurs bureaux. Le bureau de Paul Martin, quant à lui, était orné du premier tableau de Laurier par Forbes, datant de 1885.

Photo noir et blanc d’un homme en train de photographier un photographe qui le photographie en retour.

Pierre Elliott Trudeau prenant une photographie avec l’appareil du journaliste de presse Duncan Cameron, 28 juin 1968. Photo : Duncan Cameron (a175919 )

Kenneth Keith Forbes

Le fils de John Colin, Kenneth Keith Forbes, devient également un portraitiste de renom. Né à Toronto en 1892, il commence à dessiner dès l’âge de quatre ans sous la gouverne de son père. Entre 1908 et 1913, il étudie les arts en Angleterre et en Écosse. Au déclenchement de la Première Guerre mondiale, en 1914, Kenneth Keith s’enrôle dans l’armée britannique comme simple soldat. Il combat en France, où il est blessé et gazé. Promu capitaine, il est transféré en 1918 au sein de l’armée canadienne (plus précisément au Bureau canadien des archives de guerre) en tant que peintre de guerre. Il y peint des scènes de batailles ainsi que quelques portraits d’officiers canadiens, comme celui du brigadier général D. Draper.

BAC détient le dossier militaire récemment numérisé de Kenneth Keith Forbes.

Peinture à l’huile réalisée par Kenneth Keith Forbes en 1918. La scène montre la défense du Bois du Sanctuaire par les militaires canadiens, près d’Ypres, en Belgique, en 1916.

La défense du Bois du Sanctuaire (1916), Kenneth K. Forbes, 1918. (e010751163-v8 )

Portraitiste officiel

Quelques années plus tard, Kenneth Keith revient s’établir à Toronto où, poursuivant la tradition familiale, il réalise principalement des portraits.

Il peint, entre autres, les portraits officiels de sept présidents de la Chambre des communes, de huit présidents du Sénat et de cinq juges en chef de la Cour suprême.

Il effectuera également les portraits des premiers ministres Robert Borden, Richard B. Bennett et John Diefenbaker. Le premier tableau de R. B. Bennett peint en 1938 par Kenneth Keith sera d’ailleurs offert au premier ministre par les députés, les sénateurs et les membres du Parti conservateur à son départ de la vie politique. Il se trouve aujourd’hui au Musée du Nouveau-Brunswick, à qui R. B. Bennett l’a légué par testament.

Par la suite, Kenneth Keith réalise le portrait officiel de sir Robert Borden pour la Chambre des communes. Le tableau est commandé par le président de la Chambre, Gaspard Fauteux, dont Forbes avait peint le portrait l’année précédente. L’objectif est de compléter la collection de tableaux officiels représentant les premiers ministres du Canada à la Chambre des communes. Ce tableau est dévoilé au Parlement le 11 juin 1947, dix ans après le décès de Borden, en même temps que lui de William Lyon Mackenzie King et en présence du président américain Harry Truman.

Dans son journal intime (en anglais), Mackenzie King explique comment il en est venu à suggérer que l’on dévoile son portrait ainsi que celui de Borden, tous deux premiers ministres lors des grandes guerres, à l’occasion d’une même cérémonie.

Image noir et blanc d’une page dactylographiée du journal intime de William Lyon Mackenzie King datée du 19 mai 1947.

Extrait du journal intime de William Lyon Mackenzie King daté du 19 mai 1947, dans lequel il explique comment il en est venu à suggérer qu’on dévoile son portrait ainsi que celui de Borden, tous deux premiers ministres lors des grandes guerres, à l’occasion d’une même cérémonie. (Fonds William Lyon Mackenzie King, MG 26 J 13, 19 mai 1947)

Une décennie plus tard, Forbes peint deux portraits de John Diefenbaker. Le premier est offert au politicien par les membres de son conseil des ministres et orne les murs du 24, Sussex, puis de Stornoway, la résidence officielle du chef de l’opposition. Le second est commandé par des francs-maçons de Washington et se trouve à Arlington, en Virginie.

En 1962, Kenneth Keith peint le portrait officiel de Bennett pour la Chambre des communes. La commande survient près de 25 ans après qu’il ait réalisé un premier tableau du politicien, et 15 ans après le décès de celui-ci. Elle émane du premier ministre John Diefenbaker et du président de la Chambre, Roland Michener. Une fois encore, on cherche à combler les lacunes de la collection de tableaux officiels représentant les premiers ministres du Canada à la Chambre.

Conclusion

Les carrières de portraitistes de John Colin et de Kenneth Keith Forbes révèlent les liens parfois insoupçonnés entre les arts et la politique. Les Forbes ont clairement tiré profit de leurs bonnes relations avec les parlementaires, particulièrement avec les premiers ministres, en obtenant de nombreuses commandes très prestigieuses.

Les premiers ministres ont également bénéficié du travail de peintres tels que les Forbes, dont les tableaux ont aidé à commémorer et à glorifier ces hommes qui ont détenu la plus haute fonction politique au pays ainsi qu’à inspirer leurs successeurs. Aussi, on l’a vu, c’est sans égard à la couleur politique qu’on a demandé aux Forbes de contribuer à cette entreprise de mémoire en produisant les portraits de premiers ministres en fonction ainsi que de leurs prédécesseurs. Ce faisant, ils ont contribué à asseoir la fonction de premier ministre dans la mémoire politique du pays.

Par ailleurs, le talent pour le portrait ne s’est pas arrêté à John Colin et à son fils Kenneth Keith. En effet, la fille de Kenneth, Laura June McCormack (1921-1961), dont la mère Jean Mary Edgell est également peintre, a réalisé quelques portraits qui se retrouvent à l’Assemblée législative de l’Ontario, et notamment un tableau représentant Louis-Hippolyte La Fontaine.

Pour en savoir plus sur les portraits de premiers ministres, voyez la thèse d’Andrew Kear, Governing Likenesses: The Production History of the Official Portraits of Canadian Prime Ministers, 1889-2002.


Geneviève Couture est archiviste au sein du projet des Archives du premier ministre, à la Division des archives privées du monde de la science et de la gouvernance de Bibliothèque et Archives Canada.

Les premiers ministres canadiens dans l’objectif des photographes de presse

Par Maude-Emmanuelle Lambert

L’exposition de Bibliothèque et Archives Canada (BAC) Les premiers ministres et l’art explore les liens parfois inusités entre différentes expressions artistiques et nos premiers ministres canadiens. On y découvre notamment les photographies d’éléments architecturaux de Pierre Elliott Trudeau (1958), le selfie cabotin de Jean Chrétien (Andrew Danson, Unofficial Portraits, 1985) ou bien encore la grande toile en tons jaune et orangé de l’artiste Carl Beam (2000) inspirée par Lester B. Pearson.

Ces œuvres permettent d’entrevoir une sensibilité artistique — parfois insoupçonnée — chez nos premiers ministres, mais aussi de quelle manière la fonction, voire la personnalité d’un premier ministre a inspiré, sans égard à sa couleur politique, un ou plusieurs artistes. Le portraitiste Yousuf Karsh par exemple, dont les photographies sont conservées par BAC, a vu défiler devant son objectif des premiers ministres d’allégeances et de générations différentes comme William Lyon Mackenzie King, Robert Borden, Pierre Elliott Trudeau et Joe Clark.

Photographie en noir et blanc montrant le premier ministre William Lyon Mackenzie King à son bureau. À l’arrière-plan, par une fenêtre, on aperçoit un des édifices du Parlement.

William Lyon Mackenzie King à son bureau, 15 mars 1947. King a été le mécène de Yousuf Karsh à partir de 1936. Photographie de Yousuf Karsh (e010752289).

Toutefois, les photographies les plus célèbres, voire « iconiques » de nos premiers ministres ne sont pas que l’œuvre de photographes portraitistes. Plusieurs d’entre elles ont été prises par des photographes de presse dont le nom est moins bien connu du grand public. Contrairement aux portraitistes qui ont tout le temps voulu pour planifier la composition de leur arrière-plan ou pour étudier leur sujet, les photographes de presse doivent faire preuve à la fois de patience et de rapidité. En effet, il n’est pas rare qu’ils doivent faire le pied de grue pendant des heures afin de prendre « le cliché » qui permettra de raconter un événement, de transmettre une émotion ou encore de croquer sur le vif un aspect de la personnalité d’un premier ministre.

Peut-être avez-vous déjà vu la photographie de Pierre Elliott Trudeau glissant comme un enfant sur une rampe d’escalier? Prise en 1968, lors du congrès à la chefferie du Parti libéral du Canada, elle est l’une des photos marquantes de la carrière du photographe de presse Ted Grant. Dans un livre consacré à son œuvre, signé Thelma Fayle, le photographe précise que s’il n’avait pas entendu les rires des gens sur place, il aurait probablement raté ce moment : « Je me suis retourné, car des éclats de rire ont attiré mon attention. J’ai pu prendre rapidement trois clichés avant que Trudeau n’atterrisse presque sur moi » [traduction] (Thelma Fayle, Ted Grant: Sixty Years of Legendary Photojournalism, Victoria, Heritage House Publishing, 2013, p. 67-68).

Né en 1929 à Toronto, Ted Grant entreprend sa carrière de photographe au milieu des années 1950. Vu par plusieurs comme un véritable pionnier de la photographie de presse au Canada (certains le présentent même comme le « père du photojournalisme canadien »), il travaille, entre autres, comme contractuel pour différents imprimés (dont l’Ottawa Citizen), l’Office national du film et l’Office de tourisme du gouvernement canadien. Au cours de sa carrière, il photographie plusieurs courses à la direction, élections (tant fédérales que provinciales) et conférences des premiers ministres. Invité à suivre sur la route Robert Stanfield, chef du Parti progressiste-conservateur, il en vient à tisser des liens étroits avec le jeune et futur premier ministre Joe Clark, son entourage politique et sa famille. Conservées dans le fonds Joe Clark et dans le fonds Ted Grant, de nombreuses photographies en noir et blanc nous montrent Joe Clark lors de ses apparitions publiques telles que sa cérémonie d’assermentation ou encore dans des moments plus privés comme des réunions de travail avec ses principaux conseillers.

Photographie en noir et blanc de Joe Clark, debout, prêtant serment à titre de premier ministre du Canada. On peut voir à ses côtés, assis, le gouverneur général Edward Schreyer.

Assermentation de Joe Clark à titre de 16e premier ministre du Canada, 4 juin 1979. Photographie de Ted Grant (e010764766).

La relation privilégiée qu’entretient Ted Grant avec les Clark lui donne accès à la vie privée et familiale du premier ministre. Celui qui a pris les tout premiers clichés de Catherine, seule enfant du couple, est aussi des fêtes familiales en plein air et dans l’intimité du salon. Bien que Ted Grant soit dans la pièce avec eux, les Clark semblent ne pas remarquer sa présence. Selon l’épouse de Joe Clark, Maureen McTeer, le photographe était patient et discret : « Si vous étiez conscient de sa présence, il attendait que vous ne le soyez plus [avant de prendre une photo] » [traduction] (Fayle, p. 75). Mais à ces moments joyeux où le photographe regarde à travers sa lentille le premier ministre détendu, assis sur le plancher du 24 Sussex avec sa fille et son épouse, se greffent des instants où la déception est manifeste sur les visages, comme à l’occasion de la soirée électorale de 1980.

Photographie en noir et blanc sur laquelle on voit le premier ministre Joe Clark, son épouse et sa fille assis par terre dans le salon devant le foyer.

Le premier ministre Joe Clark et sa famille (son épouse Maureen McTeer et sa fille Catherine) à la résidence du 24 Sussex (e002712822). Cette photographie est un bon exemple de la relation exceptionnelle et de la confiance qui se sont établies entre la famille Clark et le photographe Ted Grant. Ce dernier a documenté de nombreux moments importants de la carrière de Joe Clark, mais aussi des moments intimes de la famille sur plusieurs décennies.

Puisque les photographes de presse sont appelés à saisir l’instant, il n’est guère surprenant de voir dans leurs collections des clichés montrant les premiers ministres dans le feu de l’action politique. On pense notamment à la photographie réalisée par Louis Jaques d’un jeune John Diefenbaker intervenant en chambre alors qu’il est député et aspire à devenir le chef du Parti conservateur, ou bien à celle prise par Robert Cooper de John Turner qui s’adresse à une foule pendant la course à la chefferie du Parti libéral du Canada.

Photographie en noir et blanc qui montre le député John Diefenbaker, debout, s’adressant à la Chambre des communes. Autour de lui, on peut voir des députés assis à leurs pupitres.

John Diefenbaker, député, intervenant en chambre en 1948. Photographie de Louis Jaques (C-080883).

Photographie en noir et blanc montrant John Turner qui s’exprime au micro devant une foule. On peut apercevoir le drapeau du Canada.

John Turner s’adressant à la foule à Ottawa, lors du congrès à la chefferie du Parti libéral du Canada en 1984. Photographie de Robert Cooper (a152415).

Fait intéressant, près de la moitié des photographies conservées par BAC font partie de collections photojournalistiques. À elle seule, la collection du photographe Ted Grant comprend près de 216 000 photographies en noir et blanc et en couleurs, négatifs et planches-contacts, alors que celle de Duncan Cameron en compte 175 000. Tout comme Ted Grant, Duncan Cameron a commencé sa carrière de journaliste de presse dans les années 1950. Né à Glasgow en Écosse, il a immigré au Canada en 1954 et a couvert la Colline parlementaire pendant de nombreuses années, photographiant différentes personnalités politiques et nouant des liens avec elles. Duncan Cameron a aussi été photographe contractuel pour Time Life Inc. de 1963 à 1976 et a terminé sa carrière aux Archives publiques du Canada, auxquelles il a fait don de sa collection.

Photographie en noir et blanc sur laquelle on peut voir quatre anciens premiers ministres canadiens, soit Pierre Elliott Trudeau, John Turner, Jean Chrétien et Lester B. Pearson.

Pierre Elliott Trudeau, John Turner, Jean Chrétien et le premier ministre Lester B. Pearson après un remaniement ministériel, 4 avril 1967. Photographie de Duncan Cameron (a117107).

En somme, les collections constituées par les photographes de presse documentent de manière exceptionnelle l’histoire politique canadienne, mais aussi des facettes plus intimes des premiers ministres canadiens dans l’exercice de leur fonction. En les photographiant dans le feu de l’action ou dans leurs moments de détente, en pleine ascension ou en situation d’échec, ces artistes ont réussi à capter un ou plusieurs aspects de la personnalité des premiers ministres.

Photographie en noir et blanc du premier ministre Pierre Elliott Trudeau en train de prendre une photographie.

Pierre Elliott Trudeau prenant une photographie avec l’appareil du journaliste de presse Duncan Cameron, 28 juin 1968. Photographie de Duncan Cameron (a175919).


Maude-Emmanuelle Lambert est archiviste à la Division des archives privées du monde de la science et de la gouvernance à Bibliothèque et Archives Canada.

L’armée de zombies du Canada

Par Andrew Horrall

Le 24 octobre 1944 en matinée, une semaine avant l’Halloween, le premier ministre Mackenzie King rêve à des amis proches. Fasciné par le spiritisme, il croit y voir une signification précise : « Des personnes intéressées par des questions qui me touchent souhaitent me faire ressentir leur présence. » [Traduction du journal de William Lyon Mackenzie King, p. 1]. La journée passe, et King remarque d’autres signes lui faisant croire qu’il est guidé par l’autre monde.

À l’époque, King tente de résoudre un problème qui divise non seulement son gouvernement, mais le Canada tout entier. Au début de la Deuxième Guerre mondiale, en septembre 1939, il avait promis de ne pas imposer la conscription. Toutefois, cinq années ont passé, et l’armée canadienne a désespérément besoin de renforts en Europe. L’après-midi du 24 octobre 1944, King préside une discussion animée du Cabinet sur l’enrôlement obligatoire. Il devient particulièrement irrité lorsque Thomas Crerar, ministre des Mines et des Ressources, insiste pour que « les zombies soient envoyés à l’étranger » pour tenter de mettre un terme à la guerre. [Traduction du journal de William Lyon Mackenzie King, p. 8]

Affiche couleur d’un soldat souriant, avec la légende « Come On, pal … ENLIST! » [Allez, mon ami... ENRÔLE-TOI!].

Affiche de recrutement : « Come On, pal … ENLIST! » [Allez, mon ami… ENRÔLE-TOI!], vers 1942. (c087427k)

Vous vous demandez sans doute pourquoi le gouvernement parlait d’envoyer au front des morts-vivants cannibales! Mais la discussion du Cabinet reflète une toute autre réalité : le terme « zombie » était alors populaire au Canada, et la guerre lui avait donné un tout nouveau sens.

Bien que les zombies apparaissent aujourd’hui dans de nombreux films, livres et émissions télévisées, ils étaient beaucoup moins connus dans les années 1940, et faisaient surtout partie du folklore haïtien. Le terme désigne un automate sans cervelle et sans voix, ressuscité des morts pour effectuer des tâches manuelles.

La plupart des Nord-Américains découvrent les zombies pour la première fois dans L’Île magique : Les mystères du vaudou, un succès de librairie de 1929 dans lequel l’auteur affirme avoir rencontré de véritables zombies en Haïti. Trois ans plus tard, Hollywood adapte ce roman pour en faire un film intitulé Les Morts-vivants. Les barmans de l’époque, suivant la tendance, concotent des « zombies » : des cocktails à base de rhum, qui rendent les buveurs aussi confus que ces créatures d’outre-tombe.

L’histoire des zombies dans l’armée canadienne est plus complexe. Comme nous le disions, King avait promis en 1939 de ne pas imposer la conscription, un enjeu qui avait déjà divisé le pays en 1917, lors de la Première Guerre mondiale. Son gouvernement commence donc par recruter des volontaires pour combattre outre-mer.

En 1940, cependant, l’adoption de la Loi sur la mobilisation des ressources nationales permet d’imposer la conscription, mais seulement pour servir au Canada. Les soldats enrôlés peuvent alors demander, s’ils le souhaitent, de faire partie du service général et d’aller combattre en Europe.

Dans les camps d’entraînement militaires partout au Canada, les tensions entre les hommes du service général et les autres deviennent rapidement apparentes. Ceux qui refusent de servir à l’étranger sont ridiculisés, et surnommés « les merveilles de la feuille d’érable » (les Maple Leaf Wonders) puisqu’ils refusent de faire face au danger : ils s’occupent plutôt de tâches administratives et de la protection des côtes canadiennes.

Photo couleur de trois hommes franchissant une palissade en bois, vêtus de casques, de chemises à manches courtes, de culottes courtes, de longues chaussettes et de bottes, et portant des fusils.

Des troupes à l’entraînement, parc Lansdowne, Ottawa. (e010778708)

Les tensions politiques, sociales et militaires entourant la conscription mènent à un référendum national sur la question en avril 1942. Les Canadiens anglais votent pour, alors que les Canadiens français s’y opposent en aussi grand nombre. King, percevant cette profonde division, essaie de trouver un terrain d’entente avec le slogan « La conscription si nécessaire, mais pas nécessairement la conscription ».

Photo noir et blanc d’un homme debout derrière un lutrin, devant une foule de travailleurs. Le lutrin est recouvert d’un drapeau de l’Union royale. Des policiers font face à la foule.

James S. Duncan, président-directeur général de l’entreprise Massey-Harris, incite les travailleurs à voter en faveur de la conscription lors du référendum national, en 1942. (a164429)

Et c’est ici que nous revenons à nos morts-vivants. Au début de 1943, le terme « zombie » prend un tout nouveau sens : les hommes du service général, les femmes en uniforme et la population en général l’utilisent pour se moquer des hommes qui refusent d’aller se battre à l’étranger. On les fait passer pour des personnes lâches, passives et incapables de penser par elles-mêmes. L’image est reprise par les journaux et les magazines canadiens-anglais, qui publient des articles et des blagues sur les zombies en les associant aux éléments prétendument subversifs de la société canadienne, et qui affirment que les femmes refusent de sortir avec eux.

Une photo publiée dans le Toronto Star en janvier 1943 montre toutefois un groupe de soudeurs, sur un chantier naval, qui ont peint des visages de zombie sur leurs masques. Leur geste suggère que certains assumaient avec fierté leur décision de ne pas aller au front, et qu’ils avaient fait leur ce terme dégradant. (« Shots behind scenes in Canada’s war factories » [Photos des coulisses de l’industrie canadienne de la guerre], Toronto Star, 13 janvier 1943, p. 17).

Au Canada, les zombies s’inscrivent dans l’imaginaire collectif en juillet 1943, lorsqu’éclate une émeute sur une base militaire de Calgary. Des hommes du service général se moquent alors d’eux avec la chanson « Salute to a Zombie » [Remerciements à un zombie], une rengaine populaire dans tout le Canada. Les esprits s’échauffent, et une bataille s’ensuit. Bibliothèque et Archives Canada conserve la copie de la chanson envoyée au colonel J. L. Ralston, ministre de la Défense nationale (qui, pour sa part, recommandait vivement d’envoyer les zombies outre-mer).

Poème dactylographié, avec l’empreinte d’un timbre de caoutchouc sur le côté et du texte manuscrit au bas.

Salute to a Zombie » [Remerciements à un zombie], RG24, vol. 2197, dossier AC 54-27-63-38.

Au moment où King préside la réunion du Cabinet, une semaine avant l’Halloween de 1944, il fait face à d’intenses pressions de la part des ministres, des commandants militaires et d’une grande partie de la population. Tous veulent qu’il envoie les zombies au combat, puisque les volontaires ne suffisent pas à remplacer les soldats tombés. King résiste jusqu’en novembre, puis décide d’envoyer outre-mer 17 000 zombies. Sa décision entraîne une désertion massive, de même qu’une courte mutinerie en Colombie-Britannique. Au bout du compte, environ 2 500 zombies seront envoyés en Europe, et 69 d’entre eux y perdront la vie.

Pour toute une génération de Canadiens, surtout au Canada anglais, les zombies sont associés à une amère division sociale causée par la Deuxième Guerre mondiale. La signification moderne du terme et la présence de la créature dans la culture populaire ne feront leur apparition qu’en 1968, à la sortie du film La Nuit des morts-vivants.


Andrew Horrall est archiviste principal à la Division des archives privées de Bibliothèque et Archives Canada.

La première déclaration de guerre du Canada

Par J. Andrew Ross

Les documents signés par les souverains du Canada sont parmi les archives les plus rares conservées à Bibliothèque et Archives Canada, et témoignent de certains moments clés de l’histoire du pays. Dans le cadre de notre programme de numérisation, nous avons récemment traité l’un de ces documents, tiré du fonds Ernest Lapointe : une simple feuille de papier qui marque l’entrée du Canada dans la Deuxième Guerre mondiale.

Document dactylographié d’une page, daté du 10 septembre 1939 et demandant au roi d’autoriser le Canada à émettre une proclamation pour déclarer la guerre au Reich allemand.

Lettre demandant l’approbation du roi pour émettre une proclamation déclarant l’état de guerre avec le Reich allemand, 10 septembre 1939. (Fonds Ernest Lapointe, e011202191)

Le premier ministre William Lyon Mackenzie King y demande au roi l’autorisation d’émettre une proclamation afin que le Canada déclare la guerre au Reich allemand. On peut voir, directement sur la lettre, la réponse du roi : il a inscrit de sa main le mot “ Approved  » (Approuvé), puis signé “ George R[ex]. I[mperator]  ».

Malgré la simplicité du document, sa date – le 10 septembre 1939 – pose cependant problème : c’est bien celle où le Canada a déclaré la guerre à l’Allemagne, mais comme l’observait Lester Pearson, alors en poste au haut-commissariat du Canada à Londres : “ Certains historiens du futur se demanderont comment George VI et Mackenzie King pouvaient être ensemble le 10 septembre 1939.  » [Traduction, d’après Lester B. Pearson, Memoirs, p. 139]

En effet, à cette époque qui ne connaissait ni les vols transatlantiques en avion supersonique, ni la transmission sans fil, il était impossible pour Mackenzie King (alors à Ottawa) et le roi George VI (à Londres) de signer le même document le même jour!

La réponse à cette énigme se trouve dans les collections de Bibliothèque et Archives Canada : une recherche plus poussée révèle que la lettre fait partie d’une série de documents qui ont dû être créés pour résoudre une situation jusque-là inédite pour les fonctionnaires canadiens, soit déclarer la guerre.

En 1939, la perspective de voir l’Allemagne envahir ses voisins se dessine. Le Canada s’attend à jouer un rôle dans le conflit qui en résultera. Le pays peut maintenant prendre ses propres décisions, ce qui n’était pas le cas lors du déclenchement de la Première Guerre mondiale : les dominions britanniques –dont le Canada – s’étaient alors retrouvés automatiquement inclus dans la déclaration de guerre faite par l’Angleterre aux Empires centraux. La situation change en 1926, la Déclaration Balfour établissant l’autonomie des dominions du Royaume-Uni en matière de questions internes et externes. (Cette autonomie sera par la suite officiellement enchâssée dans le Statut de Westminster de 1931.)

Mais revenons au mois de septembre 1939. Le blitzkrieg déferle sur la Pologne, poussant le Royaume-Uni à déclarer la guerre au Reich allemand le 3 septembre. Le Canada doit maintenant prendre sa propre décision : participer au conflit ou rester neutre. La plupart des Canadiens comprennent que leur pays jouera un rôle dans ce conflit, sinon sur le plan militaire, du moins sur le plan économique. Cependant, le premier ministre William Lyon Mackenzie King souhaite que le Parlement entérine officiellement la décision d’entrer en guerre. Ce sera chose faite le samedi 9 septembre.

Les décisions politiques d’une telle importance exigent l’émission d’une proclamation officielle par le gouverneur général. Mais ce dernier doit d’abord recevoir une requête du Cabinet du Canada, elle aussi officielle et signée par un ministre. Or, dans le cas qui nous intéresse ici, deux obstacles se posent.

Tout d’abord, malgré l’autonomie dont jouit le Canada depuis le Statut de Westminster, il s’avère que le gouverneur général n’a pas le pouvoir d’autoriser la déclaration de guerre : le gouvernement doit obtenir l’accord de George VI, souverain du Canada. Après le vote à la Chambre des Communes, le 9 septembre, le ministère des Affaires extérieures demande donc à Vincent Massey, haut-commissaire du Canada pour la Grande-Bretagne, de solliciter une audience auprès du roi afin d’obtenir sa signature pour approuver l’émission de la proclamation annonçant l’entrée en guerre du Canada.

Le matin du 10 septembre, Massey prend place dans la voiture sport de son fils Hart et va rencontrer George VI au Royal Lodge, sa maison de campagne dans le parc du château de Windsor. Il y obtient la signature royale et transmet la nouvelle par télégramme à Ottawa, où Mackenzie King attend la réponse avec impatience, craignant que l’ennemi n’ait détruit le câble transatlantique permettant les communications entre le Canada et l’Angleterre. (Source : Journal de William Lyon Mackenzie King)

Se pose ensuite un autre obstacle : le document de deux pages approuvé par le roi est une transcription manuscrite d’un télégramme. Il n’est donc pas signé par un ministre, comme l’exige la procédure. Par conséquent, le ministère des Affaires extérieures le considère comme un document officieux seulement. Il promet toutefois de faire suivre rapidement la version officielle signée.

Par ailleurs, une déclaration avait déjà été rédigée et signée par le gouverneur général lord Tweedsmuir au nom du roi, ainsi que par le premier ministre Mackenzie King et le ministre de la Justice, Ernest Lapointe, avant même que le roi n’ait retourné le document approuvé et signé de sa main.

Proclamation portant le Grand sceau du Canada, annonçant que le Canada est en guerre contre le Reich allemand.

Déclaration de guerre au Reich allemand, 10 septembre 1939. Le jour (“ tenth », soit le dixième jour) y est écrit à la main. (Sous-fonds du Registraire général, e011202192)

L’imprimerie du gouvernement a quant à elle publié une proclamation dans une édition spéciale de la Gazette du Canada, l’organe officiel de diffusion des annonces gouvernementales. Pour garantir le secret, un huis clos complet a été imposé au personnel, qui a travaillé le samedi 9 et le dimanche 10 septembre et n’a été libéré qu’une fois la Gazette livrée aux bureaux des Affaires extérieures (alors situés dans l’édifice de l’Est, sur la colline du Parlement). Cette livraison ayant été effectuée à 12 h 35, heure normale de l’Est (une autre source indique 12 h 40), ce moment est considéré comme celui où le Canada est officiellement entré en guerre contre le Reich allemand.

Mais est-ce bien le cas?

Déclaration de guerre au Reich allemand, imprimée et bilingue, avec trois signatures manuscrites.

Édition spéciale de la Gazette du Canada, 10 septembre 1939 (version publiée de la déclaration de guerre au Reich allemand). Fait étrange, cet exemplaire porte les signatures de Tweedsmuir, Lapointe et Mackenzie King. (Fonds Arnold Danford Patrick Heeney, e011198135)

Le 24 octobre, soit six semaines plus tard, la lettre officielle signée par un ministre se fait toujours attendre. Massey envoie donc un télégramme aux Affaires extérieures pour savoir quand elle arrivera. Le secrétaire particulier du roi, sir Alexander Harding, lui avait déjà confié sa crainte que le document signé par le roi et basé sur des déclarations télégraphiées n’ait aucune validité constitutionnelle parce qu’il ne portait pas – et ne pouvait pas porter – la signature du ministre. La question se posait : techniquement, le Canada était-il en guerre ou non?

Pour remédier à la situation, les Affaires extérieures expédient un document signé par le premier ministre, avec effet rétroactif à la date du 10 septembre. Le roi George VI le signe le 27 novembre et le renvoie au Canada. Il aura fallu attendre deux mois et demi après l’entrée en guerre du Canada pour que les documents officiels reflètent la réalité!

Au bout du compte, il existe quatre documents importants qui témoignent de cette première déclaration de guerre du Canada : l’approbation non officielle rédigée à partir d’un télégramme et signée par le roi George VI; la proclamation émise par le gouverneur général; l’édition spéciale de la Gazette du Canada; et la demande officielle à effet rétroactif signée par Mackenzie King et le roi. Trois de ces documents sont conservés dans les collections de Bibliothèque et Archives Canada et sont reproduits ci-dessus. On ignore toutefois ce qui est advenu du premier (l’approbation non officielle du roi.) Mais un indice subsiste : nous savons qu’au cours de l’automne 1939 et de l’hiver 1940, Massey a refusé plusieurs fois de renvoyer le document au Canada, répondant que le Palais de Buckingham ne voulait pas qu’il soit “ intégré dans les documents du gouvernement canadien  » en raison de sa validité constitutionnelle incertaine (Lester B. Pearson, Memoirs, p. 140). Pearson, alors numéro deux après Massey, écrira plus tard qu’il avait compris que le document était demeuré à Londres, “ entre les mains de Sa Majesté ou du haut-commissaire canadien, je ne l’ai jamais su  ». [Traduction, ibid.]


Par J. Andrew Ross, archiviste à la Division des archives gouvernementales, avec la contribution de Geneviève Couture, adjointe en archivistique à la Direction générale des archives privées, Bibliothèque et Archives Canada.

Bibliothèque et Archives Canada diffuse sa plus récente émission de baladodiffusion, « Mackenzie King : contre sa volonté »

Bibliothèque et Archives Canada diffuse sa plus récente émission de baladodiffusion, « Mackenzie King : contre sa volonté ».

Photo noir et blanc de William Lyon Mackenzie King assis sur son perron.

William Lyon Mackenzie King est le premier ministre du Canada qui est demeuré le plus longtemps en poste. De plus en plus, on s’entend aussi pour dire qu’il fut l’un des plus grands premiers ministres de notre histoire. Les réalisations de King ne se sont pas limitées au domaine de la politique. Correspondant prolifique, il a aussi tenu un journal presque quotidien, de 1893 jusqu’aux jours ayant précédé sa mort en 1950. King y fait un compte rendu minutieux de sa vie en politique, en plus d’y consigner des détails fascinants sur sa vie personnelle.

Dans l’épisode d’aujourd’hui, nous discutons avec Christopher Dummitt, professeur et auteur dont le plus récent livre raconte l’histoire de ce journal et de sa publication.

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À la découverte d’une vie : la force des documents privés

Les documents privés sont un champ d’études fascinant. Qu’est ce que les gens choisissent de garder? Qu’est-ce qu’ils écartent au cours de leur vie? Et qu’est-ce qui reste pour leur postérité? Bibliothèque et Archives Canada (BAC) détient non seulement un grand nombre de documents, mais aussi de simples éléments, notamment des photos et des lettres. Le fonds Oscar Douglas Skelton présente un aperçu sur la vie privée d’un fonctionnaire public important. En 1992 et 1993, la fille de Skelton offre la majeure partie de cette collection à BAC. Depuis lors, les documents sont décrits et analysés, et l’instrument de recherche (en anglais seulement) est numérisé pour permettre un accès plus facile.

Photo en noir et blanc de trois personnes assises sur les marches d’escalier d’un chalet et regardant en direction du photographe.

Le très honorable William Lyon Mackenzie King avec sa sœur Jennie (Mme H.M. Lay) et O.D. Skelton, le 29 juillet 1923, à Kingsmere, Québec (MIKAN 3217554)

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