Le Théâtre Cercle Molière célèbre ses 100 ans : des traces d’un anniversaire important dans les collections de Bibliothèque et Archives Canada

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Par Ariane Brun del Re

Cette année, le Théâtre Cercle Molière, une compagnie de théâtre professionnelle installée dans le quartier de Saint-Boniface, à Winnipeg, célèbre son centenaire. Cet anniversaire est d’autant plus remarquable qu’il s’agit de la plus ancienne compagnie de théâtre francophone en existence au Canada.

Fondé pour interpréter des classiques du répertoire français, le Cerce Molière se tourne vers le théâtre québécois et canadien dans les années 1950. Au cours de la décennie suivante, il se professionnalise et devient l’un des principaux lieux d’ébullition de la dramaturgie franco-manitobaine, un rôle qu’il assume encore aujourd’hui.

Bien que le fonds d’archives du Cercle Molière soit conservé au Centre du patrimoine de la Société historique de Saint-Boniface, certains documents qui témoignent de l’existence et de l’évolution de cette compagnie de théâtre importante font partie des collections de Bibliothèque et Archives Canada (BAC), notamment le fonds Gabrielle Roy.

Connue pour avoir remporté le prestigieux prix Femina avec son roman Bonheur d’occasion (1945), Gabrielle Roy est originaire de Saint-Boniface. Avant de devenir une écrivaine de renommée internationale, elle foule à plusieurs reprises les planches du Cercle Molière. Elle en devient membre vers 1930-1931, à l’époque où elle enseigne à l’Institut Provencher de Saint-Boniface. Le Cercle est alors dirigé par Arthur Boutal, journaliste et imprimeur de profession, qui monte des pièces de théâtre françaises avec l’aide de sa conjointe Pauline (née Le Goff), artiste peintre et dessinatrice de mode. Après le décès d’Arthur Boutal en 1941, Pauline assume la direction de la compagnie jusqu’en 1968. Le certificat ci-dessous, décerné à Gabrielle Roy par la province du Manitoba à l’occasion du 50e anniversaire de la compagnie, témoigne de son implication au sein du Cercle Molière :

Certificat signé le 1er novembre 1975 par René E. Toupin, ministre du Tourisme, des Loisirs et des Affaires culturelles. Le document arbore le blason du Manitoba et un portrait de Molière.

Certificat remis à Gabrielle Roy par la province du Manitoba en reconnaissance de sa participation au Cercle Molière. (e011271382)

Le fonds Gabrielle Roy contient aussi plusieurs ébauches du texte intitulé « Cercle Molière… porte ouverte… », qu’elle a rédigé vers 1975 pour un album censé marquer le 50e anniversaire de la compagnie. L’article paraît dans l’ouvrage collectif Chapeau bas : réminiscences de la vie théâtrale et musicale du Manitoba français (1980). Gabrielle Roy s’y souvient des défis rencontrés par les membres du Cercle : « La difficulté principale pour nous qui étions sans ressources fut toujours de nous assurer un local gratuit pour nos répétitions. Nous avons erré ça et là jusqu’à aboutir, au cours d’un hiver assez rude, à répéter, foulard au cou, dans la pénombre d’un entrepôt mal éclairé et peu chauffé. En fin de compte, j’obtiens du directeur de l’Académie Provencher, où j’étais institutrice, la permission d’utiliser ma salle de classe à cette fin. »  (p. 117)

L’endo et le verso d’une feuille tirée d’un carnet à spirale. Le texte est écrit en lettres cursives à l’encre bleue et comprend plusieurs ajouts et ratures.

L’endo et le verso de la première page du carnet dans lequel Gabrielle Roy a écrit le texte « Le Cercle Molière… porte ouverte… » paru dans Chapeau bas. (e011271380)

Après avoir assumé diverses fonctions pour la compagnie de théâtre, Gabrielle Roy décroche son premier vrai rôle dans la pièce Blanchette d’Eugène Brieux, dont la première représentation a lieu le 30 novembre 1933. Elle y joue la fille d’un couple d’aristocrates. Grâce à cette pièce, la compagnie se démarque au Festival régional du Manitoba, un concours préliminaire qui lui ouvre les portes du nouveau Festival national d’art dramatique, qui se déroule à Ottawa en avril 1934. Contre toute attente, la compagnie triomphe dans le volet francophone.

Deux ans plus tard, le Cercle Molière remporte de nouveau le Festival régional du Manitoba, avec Les Sœurs Guédonec de Jean-Jacques Bernard. La pièce met en scène deux vieilles filles paysannes, dont l’une, Maryvonne, est jouée par Gabrielle Roy et l’autre, Marie-Jeanne, par Élisa Houde, comme le montre le programme ci-dessous :

La page couverture du programme, imprimée sur un carton bleu-gris, fournit des informations générales sur l’édition 1936 du Festival régional du Manitoba. Les pages intérieures, imprimées sur du papier jauni, présentent la distribution de quatre pièces jouées au Festival, dont Les Sœurs Guédonec, présentée par le Cercle Molière, ainsi qu’une publicité.

Programme de l’édition 1936 du Festival régional du Manitoba lors duquel le Cercle Molière présente Les Sœurs Guédonec, avec Gabrielle Roy dans le rôle de Maryvonne. (MIKAN 5383741)

Le Cercle est ainsi sélectionné pour participer au Festival national d’art dramatique, où il remporte le trophée de la meilleure pièce française pour une deuxième fois. Lors de ce séjour à Ottawa, Gabrielle Roy croise un certain Yousuf Karsh. Le jeune photographe canadien d’origine arménienne collabore avec le Little Theatre, à Ottawa, où il apprend à photographier les acteurs sur scène, comme il le relate dans son livre In Search of Greatness (1962) : « L’expérience de photographier des acteurs sur scène, avec un éclairage de plateau, était électrisante. [Mon mentor, John H.] Garo, m’avait appris à travailler avec la lumière du jour, à attendre que l’éclairage soit idéal. Dans ce nouveau contexte, le metteur en scène avait une maîtrise complète de l’éclairage. Les possibilités infinies de l’éclairage artificiel m’ont subjugué. » [traduction] (p. 48) Ces techniques d’éclairage apprises au théâtre, qui permettait des contrastes importants entre le noir et le blanc, allaient devenir sa marque de commerce.

En raison de son intérêt pour le théâtre, Karsh devient le photographe attitré du Festival national d’art dramatique en 1933. BAC conserve plusieurs photographies qu’il a prises de Gabrielle Roy lors de la représentation des Sœurs Guédonec :

Photographie en noir et blanc de deux femmes assises à une table près d’un foyer. Chacune porte une robe de couleur foncée, un tablier et une coiffe blanche.

Photographie de Yousuf Karsh montrant Élisa Houde (à gauche) et Gabrielle Roy (à droite) dans une représentation de la pièce Les Sœurs Guédonec au Festival national d’art dramatique. (e011069771_s1)

Au moment où leurs chemins se croisent, Gabrielle Roy et Yousuf Karsh ont tous les deux 27 ans. Sans le savoir, ils sont à l’aube d’une carrière de renommée internationale, propulsée par le monde du théâtre. Les deux artistes marqueront leur discipline respective : elle, la littérature; lui, la photographie.

Des années plus tard, en examinant l’une des photographies d’elle et d’Élisa Houde prise par Karsh, Gabrielle Roy écrit : « Je regarde la petite photo jaunie et reçois un bizarre choc au cœur. À la fin, qu’est-ce qui poussait cette femme [Élisa Houde], tranquille institutrice déjà passablement âgée, à tant se démener tout-à-coup [sic]? Au reste, qu’est-ce qui nous poussait tous? Le monde serait-il changé parce que, venue du fond du pays, une troupe d’amateurs allait interpréter, dans la capitale canadienne, une pièce du répertoire français? Dans la bigarrure ethnique du Manitoba presque tout acquise d’avance à l’anglais, qu’étaient-ce que notre poignée de gens parlant français, nos efforts insensés, cet espoir hardi dont aujourd’hui encore je me demande comment il a pu fleurir dans notre solitude? Une fleur au désert! » (1980, p. 120-121)

Ce qui est certain, c’est que Gabrielle Roy allait être changée par cette « fleur au désert », pour reprendre son expression. Son passage au Cercle Molière aurait confirmé son envie d’écrire : « Au cours des répétitions, à me découvrir parfois comprise et exprimée par les mots d’un auteur, il me venait le désir de donner peut-être moi aussi un jour la parole à d’autres. Quelle griserie ce devait être! » (1980, p. 123)

Cent ans après sa fondation, le Théâtre Cercle Molière demeure une porte ouverte, un lieu de rassemblement et d’effervescence pour le théâtre francophone du Manitoba et d’ailleurs. Il a propulsé la carrière d’un grand nombre d’artistes et marqué des générations de spectateurs et de spectatrices. Bon anniversaire, Théâtre Cercle Molière!

Autres ressources :

  • Gabrielle Roy, une vie : biographie, François Ricard (OCLC 35940894)
  • Chapeau bas : réminiscences de la vie théâtrale et musicale du Manitoba français (OCLC 10112702)
  • In Search of Greatness. Reflections of Yousuf Karsh, Yousuf Karsh (OCLC 947443)
  • Site Web du Théâtre Cercle Molière
  • Fonds Gabrielle Roy, Bibliothèque et Archives Canada (MIKAN 3672665)
  • Fonds Yousuf Karsh, Bibliothèque et Archives Canada (MIKAN 6145974)
  • The Dominion Drama Festival – Theatre Canada fonds, Bibliothèque et Archives Canada (MIKAN 99527)
  • Collection des arts du spectacle, Bibliothèque et Archives Canada (MIKAN 99163)

Ariane Brun del Re est archiviste de littérature de langue française au sein de la Division des archives culturelles à Bibliothèque et Archives Canada.

Le Cercle Molière : une institution franco-manitobaine centenaire à découvrir dans les archives de BAC!

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Par Théo Martin

Saviez-vous que Le Cercle Molière, l’une des plus anciennes institutions canadiennes en arts de la scène, célèbre son centenaire cette année? Bibliothèque et Archives Canada (BAC) souligne cet anniversaire en publiant deux billets de blogue mettant en lumière certains éléments de nos fonds d’archives et collections qui témoignent des débuts et de l’évolution de cette compagnie de théâtre franco-manitobaine.

Le Cercle Molière est fondé en 1925 à Saint-Boniface, au Manitoba, par le professeur belge André Castelein de la Lande, le fonctionnaire et administrateur manitobain Raymond Bernier, ainsi que le traducteur et administrateur Louis-Philippe Gagnon, qui en est le premier président. À ses débuts, Le Cercle Molière est un organisme de théâtre amateur qui vise à promouvoir la culture et la langue françaises au Manitoba. Il cherche aussi à faire connaitre la dramaturgie française à la population de langue anglaise de Winnipeg et des environs pour ainsi rapprocher les deux communautés linguistiques. Sa première production, Le monde où l’on s’ennuie d’Édouard Pailleron, présentée au Dominion Theatre de Winnipeg en 1925, a conquis les spectateurs et spectatrices. Tout au long des années 1920, Le Cercle Molière maintient son élan et offre une à plusieurs productions par année, affirmant progressivement sa place dans le paysage culturel.

Les couvertures de deux programmes côte à côte.

À gauche, une image du programme de la production L’échelle cassée de George Berr, 1926. Collection des arts du spectacle, MG28 I 139, volume 18, dossier 14. À droite, une image du programme de la production L’Arlésienne d’Alphonse Daudet, 1928. Collection des arts du spectacle, MG28 I 139, volume 28, dossier 14. (MIKAN 4705232)

Dès ses premières années, Le Cercle Molière dépasse les frontières de Saint-Boniface en organisant des tournées à travers le Manitoba, offrant aux communautés francophones de la province un accès précieux au théâtre. En 1934, la renommée de la compagnie de théâtre franchit un cap important lorsque le 14e gouverneur général du Canada, lord Bessborough, l’invite à participer au Festival national d’art dramatique. La même année, Le Cercle Molière remporte le prix de la meilleure pièce en français, tant au niveau régional que national, pour sa production de Blanchette d’Eugène Brieux.

Cette reconnaissance nationale marque le début d’une longue participation au Festival, jalonnée de nombreux trophées régionaux et nationaux. En démontrant qu’il est possible de faire du théâtre en français en dehors du Québec, où les institutions théâtrales rivalisaient déjà, Le Cercle Molière affirme son rôle d’ambassadeur du théâtre francophone et contribue à son rayonnement à l’échelle canadienne.

Images côte à côte d’un programme du Festival national d’art dramatique ainsi qu’une page qui contient des informations sur une pièce de théâtre intitulée Blanchette.

À gauche, une image du programme de la deuxième finale annuelle du Festival national d’art dramatique, avril 1934. À droite, une page présentant la pièce Blanchette, produite par Le Cercle Molière, qui remportera le prix de la meilleure pièce en français. Collection des arts du spectacle, MG28 I 139, dossier 14. (MIKAN 4705232)

Photographie de 4 personnes debout sur une scène au milieu d’un décor.

Des comédiens du Cercle Molière dans la production Le voyage à Biarritz lors du Festival national d’art dramatique, à Ottawa, en 1937. Cette année-là, Joseph Plante recevait le trophée du meilleur acteur français. Photo : Yousuf Karsh, fonds Yousuf Karsh, 1987-054 NPC. (MIKAN 4332367)

Faire du théâtre en français ne sera cependant pas de tout repos pour Le Cercle Molière et d’autres troupes de théâtre francophones hors Québec. Durant le festival de 1936, certains journalistes et critiques québécois, sans doute heurtés que Le Cercle Molière ait remporté cette année-là le trophée de la meilleure pièce en français, lui reprochent la piètre qualité du français parlé dans ses productions :

« Les acteurs québécois ayant pris part au Festival d’art dramatique d’Ottawa sont de mauvais perdants. C’est du moins sous ce jour que nous les montre une dépêche de la Presse Canadienne parue dans les journaux. Ils ont critiqué la décision de M. Granville-Barker, qui a décerné la place d’honneur au Cercle Molière. Les artistes de l’Ouest, assurent-ils, n’ont pas le pur accent français. Quant au juge il serait incompétent, faute de connaitre suffisamment notre langue […] »
     La Liberté (Saint-Boniface, Manitoba), le 6 avril 1936. (1)

Toutefois, et heureusement, ces reproches s’estompent au cours des décennies suivantes.

Dans les années 1930, un couple dynamique d’origine française, Arthur et Pauline Boutal, produit d’une main de maître les spectacles du Cercle Molière, acclamés partout au Canada français et à l’échelle internationale. Après le décès d’Arthur, Pauline continue de porter le flambeau jusque dans les années 1960. Le Cercle Molière présente un plus grand nombre de productions, dont plusieurs pièces de théâtre jeunesse. En 1961, il lance l’Atelier, un premier volet de formation destiné aux artistes de la relève théâtrale du Manitoba.

À partir des années 1970, Le Cercle Molière devient une compagnie professionnelle sous la direction artistique de Roland Mahé, offrant davantage de place à la dramaturgie contemporaine de langue française, à la dramaturgie expérimentale et au théâtre jeunesse (notamment avec la création du Festival théâtre jeunesse (1970) et du Théâtre du Grand Cercle (1985). Peu à peu, Le Cercle Molière devient un véritable lieu de diffusion de la dramaturgie franco-manitobaine et franco-canadienne. Il présente notamment des œuvres écrites par les artistes et dramaturges Roger Auger, Claude Dorge, Irène Mahé, Jean-Guy Roy, Jean-Pierre Dubé, Janine Tougas et Marc Prescott.

Affiche d’une pièce de théâtre avec des ombrages de mains en haut de la page et de l’écriture occupant le reste de l’espace.

Affiche de la pièce Montserrat, d’Emmanuel Robles, présentée par Le Cercle Molière au Festival national d’art dramatique, en 1971, à Ottawa. Fonds The Dominion Drama Festival – Theatre Canada. R5415 1980-058 NPC. (MIKAN 2979533)

Deux couvertures de pièces de théâtre côte à côte. La première présente une femme tenant un sac, debout devant un magasin à grande surface sur une rue achalandée. La deuxième montre une personne assise sur une chaise, un sac sur la tête, avec des lumières colorées de la tête aux pieds.

À gauche, la pièce Suite manitobaine, du dramaturge Roger Auger. Les Éditions du Blé, Saint-Boniface, 2007. ISBN 9782921347969. (OCLC 86226189) À droite, la pièce Sex, lies et les Franco-manitobains du dramaturge Marc Precott. Les Éditions du Blé, Saint-Boniface, 2013. ISBN 9782923673837, 2923673832. (OCLC 842523879)

Aujourd’hui connue sous le nom de Théâtre Cercle Molière, la compagnie centenaire, dirigée depuis 2012 par la comédienne et metteuse en scène métisse Geneviève Pelletier (qui conclura son mandat le 31 juillet 2025), continue d’explorer de nouveaux horizons artistiques. Œuvrant à promouvoir la diversité culturelle, la compagnie fait fièrement rayonner la dramaturgie franco-canadienne au Manitoba, au Canada et ailleurs dans le monde.

BAC est fier de conserver des traces documentaires de ce joyau incontestable des arts de la scène au pays. La collection nationale comporte des publications imprimées d’œuvres de dramaturges québécois et franco-canadiens qui ont été jouées sur la scène du Cercle Molière. Les fonds d’archives et collections de BAC comptent également plusieurs documents promotionnels (affiches, programmes, feuillets, coupures de presse) du Cercle Molière, notamment le fonds du Festival d’art dramatique du Canada (R5415) et la collection des arts de la scène (R3376). Par ailleurs, BAC conserve les archives de personnalités qui ont œuvré au sein du Cercle Molière dans leur jeunesse, notamment celles de la romancière Gabrielle Roy (R11799) et du journaliste Henri Bergeron (R10049). À cela s’ajoute un certain nombre de photographies prises dans les années 1930 par le photographe de renom Yousuf Karsh (R613) dans le cadre du Festival national d’art dramatique à Ottawa. Au sein de ce corpus photographique se trouvent quelques clichés d’une jeune comédienne alors inconnue, originaire de Saint-Boniface, au Manitoba, qui deviendra l’une des autrices franco-manitobaines les plus célébrées de sa génération (mais cela sera le sujet d’un autre billet de blogue).

Autres ressources

Fonds et collections de BAC :

Autres centres d’archives :

  • Les fonds d’archives du Cercle Molière et de Pauline Boutal se trouvent au Centre du patrimoine (Société historique de Saint-Boniface, Manitoba).

Sources imprimées :

  • Dubé, Jean-Pierre, Lynne Champagne. Le Cercle Molière : 75 ans de théâtre. [Édition] Le Cercle, Winnipeg, Manitoba. [2001] (OCLC 46629181)
  • Le Cercle Molière : cinquantième anniversaire. Éditions du Blé, Saint-Boniface, Manitoba, 1975. (OCLC 2877379)
  • Lee, Betty. Love and Whisky: the story of the Dominion Drama Festival. McClelland and Stewart, Toronto, 1973. (OCLC 786525)
  • The Oxford Companion to Canadian Theatre. Oxford University Press, Toronto, 1989. (OCLC 21293755)

Sites Web (ou publications en ligne) :

Référence

  1. Le Cercle Molière : cinquantième anniversaire. Éditions du Blé, Saint-Boniface, Manitoba, 1975. (OCLC 2877379)

Théo Martin est archiviste des arts de la scène au sein de la Division des archives culturelles à Bibliothèque et Archives Canada.

Œuvres complètes. Tome I de Normand Chaurette

Par Michel Guénette

L’exposition Première : Nouveautés à Bibliothèque et Archives Canada présente un document inédit de Normand Chaurette intitulé Œuvres complètes. Tome I. Cette pièce a été choisie par notre spécialiste Michel Guénette, archiviste des arts de la scène.

Qui est Normand Chaurette?

Avant tout, il semble important de brosser un portrait de l’auteur afin de le situer dans son contexte de création. Normand Chaurette est un dramaturge québécois né à Montréal en 1954. Il fait partie, avec Michel Marc Bouchard et René-Daniel Dubois, de cette génération d’auteurs post-référendaire qui s’est éloignée des productions nationalistes et réalistes ayant marqué le théâtre des années 1960 et 1970 pour créer une dramaturgie orientée sur le renouvellement de l’approche esthétique et du langage. La pièce de Chaurette Provincetown Playhouse, juillet 1919, j’avais 19 ans (1982) remporte un vif succès et fait sa renommée. Il poursuit sa démarche théâtrale entre autres avec La société de Métis (1983), Fragments d’une lettre d’adieu lus par des géologues (1986), Les Reines (1991), Le Passage de l’Indiana (1996), Le Petit Köchel (2000) et Ce qui meurt en dernier (2008). Ses pièces sont aussi jouées à l’étranger, et l’une d’elles, Les Reines, a été montée par la Comédie-Française (1997). Il est aussi connu pour avoir signé le texte de la pièce appréciée d’un large public Edgar et ses fantômes (2010) et de son adaptation française, Patrick et ses fantômes (2018).

Parallèlement à sa carrière de dramaturge, Chaurette a écrit un livre, des nouvelles, des scénarios de film, des traductions, des textes radiophoniques et un essai. L’œuvre de Chaurette, qui a remodelé le paysage théâtral et celui de l’écriture, s’est taillé une place remarquable sur la scène artistique tant au Canada qu’à l’étranger. Elle a été récompensée de très nombreux prix, parmi lesquels quatre Prix littéraires du Gouverneur général, quatre Masques de l’Académie québécoise du théâtre et un Prix Floyd S. Chalmers. Normand Chaurette a également obtenu une bourse d’écriture de l’Association Beaumarchais (Paris) et a été nommé à l’Ordre du Canada à l’automne 2004.

Texte alternatif : Photo en noir et blanc d’un jeune homme assis avec un chandail sur les épaules.

Portrait de Normand Chaurette vers 1976 – photographie prise par Linda Benamou (e011180592)

Œuvres complètes. Tome I

Le fonds Normand Chaurette acquis par Bibliothèque et Archives Canada comprend des documents relatifs à sa carrière et à sa vie personnelle. La majorité des documents regroupe des manuscrits et des tapuscrits annotés, des esquisses, des ébauches, des notes et des mises au net de ses écrits. Parmi ceux-ci se trouve le livre original Œuvres complètes. Tome I, de belle facture.

L’ouvrage ressemble à un livre d’artiste et allie textes calligraphiés à la main, dessins, aquarelle et découpages. Ce magnifique livre divisé en sections comprend entre autres les textes suivants : Les dieux faibles, Orgues, Lettres au superbe, Texte de Londres et Nouveaux textes de Londres. Normand Chaurette entreprend la rédaction de cette œuvre de jeunesse en 1970 à l’âge de 16 ans et la termine en 1975, pour ensuite y ajouter quelques feuillets en 1977 et 1978.

Nous aurions pu croire facilement que Chaurette avait dès cette époque des visées littéraires tant ce livre est à la fois étrange et fascinant avec ses phrases énigmatiques et répétées. Le lecteur pourrait même y voir des affinités avec les automatistes comme Claude Gauvreau et les surréalistes comme Guillaume Apollinaire. Or, il n’en est rien. Chaurette n’a aucune prétention artistique à l’adolescence. Dans un courriel du 19 avril 2018, il souligne qu’il était en décrochage scolaire et qu’il ne rêvait pas de devenir écrivain, du moins pas avant 1976, au moment où il gagne un prix pour le texte radiophonique Rêve d’une nuit d’hôpital diffusé à Radio-Canada.

Images de deux pages du livre de Normand Chaurette Œuvres complètes. Tome I.

Images de deux pages du livre de Normand Chaurette Œuvres complètes. Tome I (MIKAN 4929495)

Images de deux pages du livre de Normand Chaurette Œuvres complètes. Tome I.

Images de deux pages du livre de Normand Chaurette Œuvres complètes. Tome I (MIKAN 4929495)

Pourquoi noircit-il alors de mots tout menus des pages et des pages d’un livre qui ne sera jamais publié? Chaurette traverse une période trouble de son existence. Il abandonne l’école, remet en question son avenir et désire quitter le toit familial. Aidé par certaines substances, il dérive en quête de son identité et se replie dans sa bulle. Comme il le dit dans un échange téléphonique, cette période marquée par la crise d’Octobre, les grèves, les manifestations et les écoles fermées est pour lui une période sombre et très nébuleuse. Il n’arrive pas à parler de ses angoisses à ses parents, à avouer certaines choses, alors il se réfugie dans l’écriture, le dessin et la peinture, où il exprime toutes ses craintes et ses peurs. Il occupe des nuits blanches à bricoler et à écrire dans des livres qui sont en quelque sorte ses journaux intimes.

Le contexte de création permet de poser un nouveau regard sur cette œuvre et d’en éclairer certains passages. Le ton sombre de la prose n’est pas étranger à ce que vit Chaurette, comme le montre l’extrait de son poème L’ode au désespoir :

Ma parole est une prison

Ma parole est carrée comme une prison dont le rebord noir perce les pages de ce recueil…

Le lecteur pénètre ainsi dans son intimité. Il découvre aussi que les titres ne sont pas anodins. Par exemple, Chaurette avait de la famille à Londres, en Grande-Bretagne, où il était invité pour apprendre l’anglais. Il n’est donc pas étonnant que des textes proviennent de cette ville. De même, Chaurette envisage un tome II, mais la facture trop laborieuse du livre lui fait abandonner l’idée, et en vieillissant, il passe à d’autres projets.

Chaurette écrit ses textes en code et en lettres minuscules presque illisibles, effrayé à l’idée que ses journaux soient découverts. Il détruit presque au fur et à mesure la plupart d’entre eux avant que ses parents ne mettent la main sur ses compositions. Ne survit que le livre Œuvres complètes. Tome I. Il est heureux que BAC puisse préserver et rendre accessibles aux chercheurs les confidences d’un adolescent troublé qui deviendra un grand auteur. Déjà, nous pouvons tous remarquer le talent du jeune auteur qui ne demandait qu’à s’épanouir.


Michel Guénette est archiviste des arts de la scène à la Division des archives privées sur la vie sociale et la culture de la Direction générale des archives à Bibliothèque et Archives Canada.

Nouveau balado! Écoutez notre plus récente émission, « Gratien Gélinas : de chez nous »

Notre plus récente émission de baladodiffusion est maintenant en ligne. Écoutez « Gratien Gélinas : de chez nous ».

Photo noir et blanc de Gratien Gélinas, visage dans les mains, avec une cigarette.

Dramaturge, metteur en scène, acteur, cinéaste et administrateur d’organismes culturels, Gratien Gélinas est l’un des fondateurs du théâtre et du cinéma modernes au Canada. Ses œuvres ont donné une voix aux gens du peuple et fait rayonner la culture et la société canadiennes-françaises tant chez nous qu’à l’étranger, pavant le chemin aux plus grands scénaristes québécois. Dans l’émission d’aujourd’hui, nous nous rendons à Saint-Bruno, près de Montréal, pour discuter avec Anne-Marie Sicotte, petite-fille de Gratien Gélinas, qui nous parle de la vie et de l’héritage de son célèbre grand-père.

Abonnez-vous à nos émissions de baladodiffusion sur notre fil RSS, iTunes ou Google Play, ou écoutez-les sur notre site Web à Balados – Découvrez Bibliothèque et Archives Canada : votre histoire, votre patrimoine documentaire.

Pour en savoir plus, écrivez-nous à bac.balados-podcasts.lac@canada.ca.

Le trésor d’un grand artiste de la scène : le fonds Gratien Gélinas

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Par Théo Martin

Il faudra à Bibliothèque et Archives Canada (BAC) plus de vingt ans pour acquérir les archives de l’homme de théâtre et du créateur canadien Gratien Gélinas. En effet, entre 1973 et 1997, plusieurs archivistes nationaux et archivistes des Archives publiques du Canada travailleront avec énergie pour convaincre Gélinas d’offrir ses documents. Ce dernier, demeurant actif jusqu’à la fin de sa vie, n’avait simplement pas le temps de se consacrer pleinement au don de ses archives.

Les documents du fonds Gratien Gélinas ont finalement été acquis en 1997 par les Archives nationales du Canada, soit deux ans avant le décès de l’artiste, par l’intermédiaire d’un de ses fils, Michel Gélinas. Il faut mentionner que c’est aussi un des membres de la famille de Gratien Gélinas qui a assuré un premier classement de ses archives. On les a donc reçues à BAC dans un ordre et une organisation qui étaient à la fois logiques et qui permettaient un accès rapide pour les chercheurs. Le travail final de traitement, de description et de l’établissement des conditions d’accès s’est effectué entre les années 1999 et 2004 par les archivistes de BAC.

Photographie en noir et blanc montrant un homme en complet avec les bras croisés et une main cachant une partie de son visage. Son regard est à la droite du photographe.

Portrait de Gratien Gélinas par Yousuf Karsh, 1942. Crédit: Yousuf Karsh. (MIKAN 3591652)

Une photographie composite en noir et blanc montrant les mains expressives de Gratien Gélinas dans différentes poses. Dans le bas de la photo, on voit un homme tenant ses mains croisées au-dessus de sa tête.

Gratien Gélinas par Yousuf Karsh, 29 mars 1945. Crédit: Yousuf Karsh. (MIKAN 3916385)

Dans le fonds Gélinas, on retrouve seize séries à consulter en lien avec divers aspects de la carrière de Gratien Gélinas, mais aussi de sa vie personnelle.

On y trouve par exemple la série qui concerne ses œuvres littéraires, contenant plusieurs mètres de textes manuscrits ou tapuscrits. Il y a les textes des émissions radiophoniques écrites par Gélinas qui vont divertir toute une génération de Canadiens français durant les années trente telles que le Carrousel de la gaieté, le Train de plaisir sur les ondes de CKAC et de Radio-Canada, desquels émergera son personnage mythique de Fridolin. Ce même Fridolin sera au cœur des Fridolinons, revues de fin d’année produites par Gélinas et son équipe entre 1938 et 1946 (puis reprises en 1956) au Monument National, à Montréal.

Photographie en noir et blanc montrant un homme habillé en pantalon court avec des bretelles et une casquette.

Gratien Gélinas jouant Fridolin dans une scène des « Fridolinons », mars 1945. Photo : Ronny Jacques pour l’Office national du film. (MIKAN 4318078)

Le fonds contient les manuscrits des œuvres phares de théâtre de Gratien Gélinas : Tit-Coq, Bousille et les justes, Hier, les enfants dansaient, La passion de Narcisse Mondoux, sa dernière création dramatique, écrite en 1985, essentiellement pour lui et la comédienne Huguette Oligny (dont le fonds se trouve aussi à BAC).

À cela s’ajoutent des dossiers complets de carnets de notes, d’ébauches annotées qui illustrent parfaitement la manière dont Gélinas concevait et écrivait ses pièces. On y lit tous les ajouts, ratures, impressions, gribouillages d’un artiste sans cesse en création et qui se remet constamment en question.

Une fiche personnelle avec le texte suivant : « Je dois organiser ma vie, ces mois-ci, pour que mes actes, mes paroles, mes pensées tendent vers ce but ultime et magnifique. Une pièce qui sera la plus belle chose que j’aie faite ».

« Tit-Coq » – Notes personnelles pendant la rédaction, vers 1946-1947. (MIKAN 2402016)

Comme Gratien Gélinas assurait le plus souvent lui-même la production et la mise en scène de ses pièces, il a aussi accumulé plusieurs écrits qui documentent son processus créatif. En plus de retrouver ses carnets de production, les chercheurs peuvent aussi découvrir plusieurs versions de textes d’adaptation de ses pièces pour le cinéma, la radio et la télévision et traduites en anglais aussi.

Le fonds comporte une quantité considérable de documents multisupports dont des films très rares, des premiers courts-métrages de production canadienne tels que La dame aux camélias, la vraie (réalisée par Gélinas en 1942) et le long métrage Tit-Coq (réalisé en 1953). BAC a d’ailleurs réussi à transférer la plupart des films de ce fonds sur support numérique. On retrouve aussi plusieurs enregistrements sonores datant d’aussi loin que les années trente, des revues et des émissions radiophoniques ainsi que les spectacles produits par Gratien Gélinas. C’est une véritable mine d’informations pour n’importe quel chercheur qui s’intéresse au théâtre et au cinéma au Canada.

Photographie en noir et blanc d’une scène de tournage montrant plusieurs personnes regroupées autour d’une caméra.

Tournage du film Tit-Coq vers 1952-1953. (MIKAN 3919038)

À ce corpus s’ajoutent plus de 4000 photographies dont certaines documentent les débuts de Gélinas à la radio et sur la scène ainsi que des photos de presque toutes les productions théâtrales dans lesquelles il a participé en plus de soixante ans de carrière. Il y a notamment des photos exceptionnelles de Gratien dans le rôle de Fridolin prises par l’Office national du film en 1945, de belles photos de lui lors de sa participation au Festival de Stratford au courant des années cinquante ainsi que de multiples photographies de sa vie privée et de son univers personnel.

Ce qui est aussi remarquable dans le fonds Gélinas, ce sont les documents d’art visuel : les dessins et les aquarelles de costumes, de maquettes de décors, les dessins publicitaires et les collages qui ajoutent un élément vibrant et visuel à l’ensemble du fonds. On réalise à quel point Gélinas s’est entouré de plusieurs artistes pour produire et promouvoir ses spectacles tout au long de sa carrière. Nous n’avons qu’à penser, par exemple, au dessin très coloré et imagé de Robert LaPalme qui a servi de maquette de décor pour Fridolinons ‘45.

Peinture montrant des figures stylisées et divers objets.

« Bon voyage » (Robert LaPalme), pour Fridolinons ’45. (MIKAN 3926980)

Une aquarelle montrant une silhouette stylisée d’un homme qui fume une cigarette.

« Tit-Coq » dessin-maquette de Robert LaPalme – Dessin original qui a servi pour l’affiche et le programme de la pièce. (MIKAN 3010586)

Il y a par ailleurs bien des documents qui illustrent sa carrière dans les arts et la culture au Canada. On peut de plus retrouver des contrats d’engagement, de la correspondance, plusieurs documents promotionnels. D’autres documents portent sur son travail d’activiste du monde des arts et de la culture, notamment son implication au niveau de l’Union des artistes ou sa carrière d’administrateur d’institutions culturelles telles que la Comédie Canadienne qu’il a fondée en 1957 ou la Société du développement de l’industrie cinématographique canadienne dont il est nommé le président en 1969.

Ce qui ajoute beaucoup de richesse à ce fonds ce sont les documents en lien avec sa vie personnelle. On découvre un côté plus intime de l’artiste multidisciplinaire : carnets de notes, journaux de voyage, correspondance diverse, photographies, œuvres d’art qui permettent de mieux saisir davantage l’être humain et ses liens avec sa famille et ses amis. En plus de sa correspondance avec sa famille, on retrouve plusieurs lettres envoyées ou reçues de personnalités du monde des arts et de la politique telles que Jean-Louis Roux, Lionel Daunais, Émile Legault, Jean Despréz, Robert LaPalme, Jean Drapeau et bien d’autres encore.

Enfin, il faut souligner le fait que BAC possède le fonds de la petite-fille de Gratien Gélinas, la romancière Anne-Marie Sicotte, qui a écrit plusieurs biographies sur Gratien Gélinas (La ferveur et le doute – Éditions Québec/Amérique 1995-1996; Gratien Gélinas, du naïf Fridolin à l’ombrageux Tit-Coq – XYZ éditeur, 2001; Un p’tit comique à la stature de géant – VLB éditeur, 2009) en se servant notamment des archives trouvées à BAC. Lors de ses recherches, Anne-Marie Sicotte a non seulement transcrit plusieurs documents d’archives, mais a produit plusieurs enregistrements sonores et transcriptions d’entrevues avec son grand-père.

Le fonds Gratien Gélinas et les fonds connexes conservés à BAC témoignent de la vie et de l’œuvre d’un des pionniers du théâtre canadien et de la radio-télédiffusion au Canada. C’est un véritable trésor de documents riches et variés, accumulés tout au long de la vie d’un artiste et créateur hors pair. Ce joyau documentaire conservé à BAC appelle à être découvert et redécouvert par les chercheurs et les passionnés des arts de la scène et du spectacle d’ici et d’ailleurs.

Ressources connexes


Théo Martin est archiviste dans la Section de la littérature, de la musique et des arts de la scène [des archives privées] de Bibliothèque et Archives Canada.

Quelques perles d’une dramaturgie oubliée à Bibliothèque et Archives Canada

Par Théo Martin

Bibliothèque et Archives Canada (BAC) possède dans sa collection de documents publiés un certain nombre de textes dramatiques anciens, en français, d’auteurs peu connus des nouvelles générations de Canadiens et Canadiennes. Ces pièces de théâtre, clairement inspirées des mélodrames ou des vaudevilles joués en Europe, représentent néanmoins l’expression des débuts d’une dramaturgie canadienne-française. Parmi ces pièces, on trouve les exemplaires de textes imprimés d’auteurs canadiens-français de la région d’Ottawa-Gatineau (anciennement Ottawa-Hull) qui ont connu un succès tant local que national de 1886 à 1935.

Prenons l’exemple de la pièce Exil et Patrie du père jésuite Édouard Hamon (1841-1904). Si cette œuvre n’a pas été créée par un auteur de l’Outaouais, il n’en demeure pas moins qu’elle fut une des premières pièces de théâtre jouées en 1884 par Le Cercle d’art dramatique de Hull, une des premières troupes de théâtre de Hull (Québec). Cette pièce porte sur un thème très actuel à l’époque, c’est-à-dire l’exode des Canadiens français vers les États-Unis à la fin du 19e siècle. BAC possède un très rare exemplaire de cette œuvre.

Image couleur de la page couverture d’un livre intitulé Exil et Patrie contenant le titre, le nom de l’auteur et de l’éditeur, le tout imprimé en noir sur papier jauni.

Exil et Patrie d’Édouard Hamon, vers 1882 (OCLC 937473541)

Dans la collection de BAC, on trouve par ailleurs les pièces de théâtre du protonotaire hullois Horace Kearney (1848-1940), qui en 1886 va écrire et produire La Revanche de Frésimus. Cette pièce de théâtre, qui marie le vaudeville et la satire, sera une des pièces les plus jouées sur les scènes de l’Outaouais, de l’Est québécois et même des États-Unis dans la première moitié du 20e siècle. D’autres exemplaires des pièces de théâtre de Kearney sont conservés à BAC, dont Amour, Guerre et Patrie (1919).

Image de deux pages côte à côte, celle de gauche est la page couverture avec une photographie en noir et blanc de l’auteur et à droite, la page texte du premier acte.

La revanche de Frésimus d’Horace Kearney, 1886 (OCLC 301447568)

On retrouve aussi plusieurs pièces de théâtre, mélodrames, comédies et vaudevilles écrits par l’auteur ottavien Régis Roy (1864-1945), dont La tête de Martin (1900), Nous divorçons! (1897), L’auberge du numéro trois (1899) ou Consultations gratuites (1924). Il est à noter que, durant sa carrière, Roy a travaillé comme fonctionnaire au ministère de l’Agriculture du Canada ainsi que celui de la Marine.

Photographie en noir et blanc d’un homme d’âge avancé portant un nœud papillon et des lunettes.

Régis Roy, photographié par Joseph Alexandre Castonguay, vers 1930 (a165147-v8)

De rares exemplaires des pièces d’un autre auteur dramatique de Hull, Antonin Proulx (1881-1950), se retrouvent aussi dans la collection de BAC, dont Le cœur est le maître (1930), L’enjôleuse. Dévotion et l’amour à la poste (1916), De l’audace, jeune homme! (1930). Proulx a notamment œuvré comme conservateur de bibliothèque et journaliste au cours de sa carrière.

Page couverture d’une pièce théâtrale contenant le titre, le nom de l’auteur et le prix de 25 cents. Impression en noir sur papier blanc jauni.

De l’Audace, Jeune Homme! d’Antonin Proulx, vers 1930 (OCLC 49107057)

Après les années trente, les auteurs de ces pièces de théâtre, plusieurs décennies de succès plus tard, semblent être passés dans l’oubli. Heureusement, BAC conserve quelques exemplaires de leurs ouvrages, pour la plus grande joie des amateurs de théâtre d’aujourd’hui et de ceux de demain!


Théo Martin est archiviste en littérature, musique et arts de la scène à la Direction générale des archives privées de Bibliothèque et Archives Canada.

Pas facile de mettre le Canada en scène – Le jeu du centenaire

Par Théo Martin

Il y a de cela un peu plus de 50 ans, le romancier et dramaturge canadien Robertson Davies coécrivait la pièce de théâtre de commande Le jeu du centenaire pour célébrer le 100e anniversaire de la Confédération du Canada en 1967. C’est avec le soutien financier de la Commission du centenaire du Canada que Davies, avec la collaboration de quatre autres auteurs canadiens de renom (W.O Mitchell, Arthur L. Murphy, Eric Nicol et Yves Thériault), va écrire à partir de 1965, une pièce de théâtre bilingue qui met en scène le passé du Canada.

Une photo noir et blanc d’un homme souriant qui tient un chat sur son épaule.

Robertson Davies et un chat, 1954. Photo : Walter Curtin. Fonds Walter Curtin (MIKAN 3959842)

La pièce fut divisée en plusieurs scènes représentant chaque région et province du Canada et faisant intervenir des personnages fictifs (et danseurs) représentatifs des diverses communautés linguistiques et culturelles du Canada. La pièce était accompagnée d’une trame musicale originale écrite par le compositeur canadien Keith Bissell.

Page manuscrite avec dessins à l’encre rouge.

Page manuscrite de la page couverture d’une version de l’ébauche de la pièce The Centennial Play (Le jeu du centenaire) avec dessins de Robertson Davies, vers 1965 (MIKAN 128551)

Texte dactylographié avec annotations à l’encre rouge.

Tapuscrit de la pièce de théâtre The Centennial Play (Le jeu du centenaire) annoté par Robertson Davies, vers 1966 (MIKAN 128551)

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Abonnez-vous à la saison théâtrale 1815-1816 de la Société des Jeunes Artistes

Au tournant du 19e siècle, l’activité théâtrale n’est pas des plus florissantes au Canada. Certaines pièces connaissent bien un vif succès, comme Colas et Colinette, jouée entre 1790 et 1807 et écrite par Joseph Quesnel, l’un des premiers dramaturges du pays; mais les coûts sont souvent trop élevés pour maintenir des troupes de théâtre de façon permanente. De surcroît, ces dernières font face à la réprobation de l’Église, qui n’aime guère ce genre de représentations.

Le plus souvent, ce sont des amateurs – membres de l’élite sociale composée de Canadiens français, de militaires et de marchands britanniques – qui aménagent des salles et y présentent des spectacles. Des comédiens américains en tournée font aussi vibrer les planches des grandes villes canadiennes. L’ouverture du Théâtre Royal à Montréal, en novembre 1825, donne un nouvel élan à l’art dramatique au Bas-Canada.

Cette aquarelle d’une scène de rue montre un édifice de quatre étages de style néo-classique. Au loin, on voit des édifices plus modestes.

L’hôtel Mansion House (le Théâtre Royal), rue Saint-Paul, à Montréal, par Henry Bunnett (1888). (MIKAN 2878039)

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Les Prix littéraires du Gouverneur général pour 2013

Les Prix littéraires du Gouverneur général sont décernés chaque année aux meilleurs ouvrages de langue française et de langue anglaise dans chacune des sept catégories suivantes : romans et nouvelles, essais littéraires, poésie, théâtre, littérature jeunesse (texte), littérature jeunesse (illustrations) et traduction.

Chaque année, Bibliothèque et Archives Canada acquiert, catalogue et rend accessibles tous les livres canadiens qui sont mis en nomination avant que les lauréats soient connus. Le dépôt légal est utilisé dans la plupart des cas, mais certains ouvrages ne sont pas publiés au Canada et doivent être acquis par d’autres moyens pour que les générations futures aient accès aux œuvres de tous les candidats aux prix du Gouverneur général.

Félicitations à tous!

Roman
Français
Quand les guêpes se taisent, par Stéphanie Pelletier (AMICUS 40915742)
Anglais
The Luminaries, par Eleanor Catton (AMICUS 41787649)

Poésie
Français
Pour les désespérés seulement, par René Lapierre (AMICUS 40824154)
Anglais
North End Love Songs, par Katherena Vermette (AMICUS 40823688)

Théâtre
Français
Bienveillance, par Fanny Britt (AMICUS 41316358)
Anglais
Fault Lines, par Nicolas Billon (AMICUS 41530643)

Essais
Français
Aimer, enseigner, par Yvon Rivard (AMICUS 40909709)
Anglais
Journey with No Maps: A Life of P.K. Page, par Sandra Djwa (AMICUS 40812690)

Jeunesse – Texte
Français
À l’ombre de la grande maison, par Geneviève Mativat (AMICUS 40696767)
Anglais
The Unlikely Hero of Room 13B, par Teresa Toten (AMICUS 41749214)

Jeunesse – Illustrations
Français
Jane, le renard et moi, par Isabelle Arsenault (AMICUS 41921688)
Anglais
Northwest Passage, par Matt James (AMICUS 40320781)

Traduction
Français
L’enfant du jeudi, par Sophie Voillot (AMICUS 40772400)
Anglais
The Major Verbs, par Donald Winkler (AMICUS 40717619)

Le théâtre à l’affiche!

Bibliothèque et Archives Canada (BAC) possède une collection extraordinaire d’affiches faisant la promotion du théâtre au Canada datant du XIXe jusqu’à aujourd’hui. Ces affiches se retrouvent au sein de fonds et de collections privés et publics très variés, notamment ceux de Vittorio, Theo Dimson, Guy Lalumière et Associés inc., Normand Hudon et Robert Stacey.

On retrouve également des affiches de théâtre dans des fonds de personnalités canadiennes telles que Marshall MacLuhan et Sydney Newman, et même à l’intérieur de collections de documents imprimés très anciens comme en témoignent les affiches de théâtre produites sur les bateaux de l’équipe de sauvetage de l’expédition Franklin (env. 1850 à 1853).

Il ne faut pas oublier non plus les fonds des artistes et artisans de la scène tels que Gratien Gélinas, Jean Roberts et Marigold Charlesworth, John Hirsch, ainsi que ceux des institutions artistiques et culturelles telles que le Centre national des arts, Théâtre Canada, le Magnetic North Theatre Festival, le Globe Theatre et le Stratford Festival.

Mais la grande majorité des affiches en lien avec le théâtre se trouve véritablement dans la série « Affiches » de la collection des arts du spectacle, qui comprend environ 750 affiches et programmes, ainsi qu’au sein de la collection variée d’affiches qui, elle, est composée d’environ 3170 affiches.

On peut dire qu’à Bibliothèque et Archives Canada, le théâtre tient l’affiche!

Pour voir des exemples d’affiches, veuillez consulter notre album Flickr.

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