Nouveau balado! Écoutez notre plus récente émission, « Les premiers ministres et l’art »

Bibliothèque et Archives Canada (BAC) présente sa toute dernière émission de baladodiffusion, « Les premiers ministres et l’art ».

Image en couleur d’un buste en tissu qui ressemble au premier ministre John Diefenbaker.

Bibliothèque et Archives Canada est le principal service d’archives pour tous les documents en lien avec les premiers ministres du Canada. En plus de leurs archives politiques, BAC possède plusieurs objets intrigants et insolites, de nature moins officielle.

L’exposition intitulée Les premiers ministres et l’art : créateurs, collectionneurs et muses, mise sur pied par Meaghan Scanlon, invitée pour la cinquième fois à notre balado, et Madeleine Trudeau, elle aussi employée de BAC, rassemble des œuvres d’art, des artefacts, des documents, des objets, des portraits et des photographies qui révèlent une facette peu connue, mais fascinante, de nos anciens premiers ministres.

L’exposition est en cours au 395, rue Wellington, à Ottawa, jusqu’au 3 décembre 2019.

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Les archives au service des droits de la personne

Par R. L. Gabrielle Nishiguchi

Au moment de nommer l’une des institutions démocratiques fondamentales du Canada, combien penseraient d’emblée à Bibliothèque et Archives Canada (BAC)? Pourtant, c’est dans les archives d’une nation que les preuves de sa gouvernance sont à jamais préservées.

L’histoire du redressement à l’égard des Canadiens japonais nous apprend que les documents conservés par BAC – et l’usage déterminant qu’en ont fait des citoyens engagés – ont contribué à tenir le gouvernement fédéral responsable d’actions qui sont désormais universellement condamnées.

Du silence au mouvement citoyen

Au lendemain de la Deuxième Guerre mondiale, les survivants affligés n’ont d’autre choix que d’étouffer leur traumatisme pour se concentrer à refaire leur vie. Le mutisme enveloppe ainsi la communauté japonaise du Canada.

Ce n’est que vers la fin des années 1970 et le début des années 1980, lors de petites réunions privées où les survivants se sentent à l’aise de raconter leurs malheurs de guerre, qu’un mouvement de redressement local voit le jour.

Aujourd’hui, l’Entente de redressement énonce qu’entre 1941 et 1949, « les Canadiens d’origine japonaise, dont la majorité étaient citoyens du pays, ont souffert d’actions sans précédent menées par le gouvernement du Canada à l’encontre de leur communauté » [traduction]. Ces actions étaient la privation du droit de vote, la détention dans des camps d’internement, la confiscation et la vente des biens personnels et communautaires, la déportation et l’entrave à la liberté de mouvement. Exercées par l’administration fédérale jusqu’en 1949, ces actions témoignent de l’attitude discriminatoire adoptée à l’endroit d’une communauté entière sur la seule base de l’origine ethnique de ses membres.

Photographie en noir et blanc montrant un Canadien japonais, en position accroupie, avec quatre enfants devant un commerce.

Sutekichi Miyagawa et ses quatre enfants, Kazuko, Mitsuko, Michio et Yoshiko, devant son épicerie, le Davie Confectionary, à Vancouver, en Colombie-Britannique, en mars 1933. (a103544)

Photographie en noir et blanc montrant douze Canadiens japonais déchargeant un camion.

Arrivée d’internés canadiens japonais à Slocan, en Colombie-Britannique, en 1942. Source : Tak Toyota (c047396)

L’action citoyenne et la déclassification de documents gouvernementaux

En 1981, Ann Gomer Sunahara épluche les dossiers récemment déclassifiés du gouvernement du Canada, rendus publics par ce qui s’appelait alors les Archives publiques du Canada. Dans son livre The Politics of Racism, Sunahara documente les décisions destructives et pratiquement incontestées qui ont été prises à l’égard de la communauté canadienne japonaise par le premier ministre Mackenzie King, son cabinet et certains fonctionnaires influents.

Photographie en noir et blanc montrant deux hommes debout près d’une haute clôture en fer. Un agent de police londonien est visible derrière eux.

Le très honorable W. L. Mackenzie King (à droite) et Norman Robertson (à gauche) à la Conférence des premiers ministres du Commonwealth, à Londres, en Angleterre, le 1er mai 1944. C’est à cette époque que Norman Robertson, alors sous-secrétaire d’État aux Affaires extérieures, et son adjoint spécial, Gordon Robertson (aucun lien de parenté), élaborent le plan qui mènera à la déportation au Japon de 3 964 Canadiens japonais en 1946. (c015134)

La National Association of Japanese Canadians (NAJC), qui en vient à représenter l’opinion de la communauté sur le redressement, reconnaît avec perspicacité l’importance cruciale de l’accès aux documents gouvernementaux des années 1940, qui peuvent servir de preuve tangible des fautes du gouvernement.

Le 4 décembre 1984, le journal canado-japonais The New Canadian rapporte que la NAJC a passé des mois à fouiller les archives gouvernementales pour produire un rapport intitulé Democracy Betrayed. Selon le résumé de ce rapport : « Le gouvernement a affirmé que le non-respect des droits de la personne [des Canadiens japonais] était nécessaire pour des motifs de sécurité. Les documents gouvernementaux montrent que cette affirmation est complètement fausse » [traduction].

L’action citoyenne et les registres du Bureau du séquestre des biens ennemis

En 1942, tous les Canadiens japonais de plus de 15 ans sont forcés par le gouvernement fédéral de déclarer leurs avoirs financiers à un représentant du Bureau du séquestre des biens ennemis. Les formulaires « JP », qui dressent la liste détaillée des possessions des internés, forment le noyau des 17 135 dossiers des Canadiens japonais.

Pour poursuivre les négociations avec le gouvernement fédéral en vue d’arriver à une entente, la NAJC a besoin d’une estimation crédible et vérifiable des pertes financières subies par la communauté japonaise canadienne. Le 16 mai 1985, elle annonce que le cabinet comptable Price Waterhouse accepte d’effectuer cette étude, par la suite publiée sous le titre Economic losses of Japanese Canadians after 1941: a study.

L’échantillonnage des dossiers du séquestre en 1985

Une équipe de chercheurs d’Ottawa, principalement issus de la communauté japonaise du Canada, est engagée par Bob Elton de Price Waterhouse pour faire l’échantillonnage statistique de 15 630 dossiers du séquestre ayant été conservés par les Archives publiques du Canada. Ces documents gouvernementaux contiennent des informations protégées en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels (L.R.C. 1985, ch. P-21), mais l’alinéa 8(2)j) autorise l’équipe à y accéder pour des « travaux de recherche ou de statistique ».

Le 20 septembre 1985, le journal Ottawa Citizen cite Art Miki, alors président de la NAJC, qui soutient que « les dossiers du séquestre sont la matière première la plus précieuse pour l’étude des pertes financières, car chaque transaction y est méticuleusement inscrite, qu’il s’agisse de la vente d’une ferme, d’un bateau de pêche, d’une maison ou d’une voiture » [traduction].

Photographie en noir et blanc, portrait en buste d’Art Miki.

Art Miki, éducateur, militant pour les droits de la personne et président de la National Association of Japanese Canadians (NAJC) de 1984 à 1992. Il était stratège et négociateur en chef pendant la campagne de redressement, dont le point culminant a été l’Entente de redressement à l’égard des Canadiens japonais, signée le 22 septembre 1988 par la NAJC et le gouvernement du Canada. En 1991, il a été décoré de l’Ordre du Canada. Photographe : Andrew Danson (e010944697)

Molly et Akira Watanabe, des citoyens engagés

Pour le dernier échantillonnage, 1 482 dossiers doivent être examinés : un éreintant travail de moine que certains chercheurs sont incapables de mener à bien, souffrant de nausée et de fatigue oculaire en raison des nombreuses heures passées à scruter des microformes, parfois de piètre qualité.

Un brillant exemple d’action citoyenne est celui d’Akira Watanabe, président du comité de redressement d’Ottawa, et de son épouse Molly. Voyant que des centaines de dossiers doivent encore être traités, que les effectifs fondent et qu’il ne reste que quatre semaines pour finir le travail, ces deux chercheurs dévoués d’Ottawa se rendent aux Archives publiques du Canada, après le travail, pour un total de 20 soirées. Molly Watanabe décédera en 2007.

Le 8 mai 1986, l’étude est rendue publique. Price Waterhouse estime les pertes financières de la communauté canadienne japonaise à 443 millions de dollars (de 1986).

À elles seules, les archives ne protègent pas les droits de la personne

Ce ne sont pas les papiers empilés dans des boîtes de carton sur les tablettes qui protègent les droits de la personne, ni les microfilms rangés dans des contenants dans les tiroirs, mais bien les individus. L’histoire du redressement à l’égard des Canadiens japonais l’illustre bien : il faut des citoyens engagés et motivés à poser des gestes concrets pour repérer ces archives et les exploiter.

C’est ainsi que les archives gouvernementales et privées des années 1940 conservées par BAC, puis utilisées par des citoyens, ont pu jouer un rôle déterminant en faveur des Canadiens japonais demandant un redressement. En préservant les documents qui prouvent la responsabilité de notre gouvernement devant l’injustice, BAC demeure l’une des grandes institutions démocratiques de notre pays.


R.L. Gabrielle Nishiguchi est archiviste à la section Société, emploi, affaires autochtones et gouvernementales de la Division des archives gouvernementales, à Bibliothèque et Archives Canada.

Un registre de déportation et l’histoire d’un déporté canadien japonais

Par R. L. Gabrielle Nishiguchi

Photo noir et blanc d’un groupe de femmes et d’un enfant, se tenant debout devant des bagages et des caisses.

Après leur internement durant la Deuxième Guerre mondiale, des Canadiens japonais attendent d’être déportés par train puis par bateau vers le Japon. Slocan City, Colombie-Britannique, 1946. Source : Tak Toyota (c047398)

Le 20 septembre prochain, Bibliothèque et Archives Canada (BAC) exposera, le temps d’une soirée seulement, un ouvrage bien spécial : un registre datant de 1946, à la reliure bleue usée par le temps. L’exposition se tiendra dans le cadre de l’événement Retour sur le redressement à l’égard des Canadiens japonais : Conférence sur le 30e anniversaire de l’Entente, organisé conjointement par BAC et l’Association communautaire japonaise d’Ottawa.

Mais pourquoi ce registre est-il aussi important? Parce que ses pages roses, imprimées à l’encre violette Gestetner, renferment les noms de 3 964 Canadiens d’origine japonaise déportés en 1946 vers le Japon, un pays ravagé par la guerre; parmi eux, près de 2 000 enfants nés au Canada. Ensemble, ils représentent un cinquième des 20 000 Canadiens d’origine japonaise expulsés de la côte Ouest en 1942.

Pour chaque personne inscrite au registre, on peut aussi voir les renseignements suivants : numéro d’inscription, date de naissance, sexe, état matrimonial, nationalité et lieu de départ, auxquels s’ajoutent une note indiquant si la personne a signé ou non le formulaire de recensement (un aspect dont nous reparlerons plus loin), ainsi que des observations comme mental hospital (hôpital psychiatrique), mentally unbalanced [and] unable to sign (mentalement déséquilibré [et] incapable de signer), New Denver Sanitorium (Sanatorium de New Denver), illeg[itimate] (illégitime), adopted (adopté), common law (union libre) et Canadian Army (armée canadienne).

La couverture du registre porte l’inscription Repatriates (rapatriés) tracée à la plume. Mais le terme Repatriation (rapatriement), utilisé par le gouvernement canadien, ne désignait ni plus ni moins qu’une véritable déportation, comme l’ont démontré universitaires et chercheurs; il était souvent jumelé au mot « volontaire », ce qui n’était pas le cas, comme nous le verrons aussi plus loin. Par ailleurs, on ne pouvait parler de véritable « rapatriement » pour les enfants nés au Canada, et dont le seul lien avec le Japon était leur origine raciale.

Lorsqu’on feuillette les pages à l’encre pâlissante, on peut voir que certains noms sont accompagnés d’annotations manuscrites au stylo ou à la plume. BAC possède d’autres registres semblables, mais ce sont ces annotations qui confèrent à cet exemplaire une telle importance : elles semblent faire référence à des extraits de lois ou de décrets (p. ex., décret P.C. 7356, 15 décembre 1945) précisant comment les agents d’immigration pourraient empêcher certains déportés de revenir au Canada.

Conscient de l’importance historique du registre, BAC a immédiatement numérisé son contenu pour en assurer la préservation, veillant en même temps à ce que le pouvoir évocateur de ces noms demeure dans notre mémoire collective. Couchés sur le papier, les noms des 3 964 déportés et les informations connexes apportent un témoignage silencieux mais puissant des souffrances endurées par ces hommes, ces femmes et ces enfants qui se sont retrouvés au Japon, un pays vaincu et affamé, empêchés de revenir au Canada uniquement en raison de leur origine raciale.

Photo noir et blanc de trois hommes soulevant une caisse.

Trois Canadiens japonais en train de charger une caisse. L’un deux pourrait être Ryuichi Hirahara, 42 ans (no d’inscription 02553). M. Hirahara et sa femme Kazu, âgée de 40 ans (no d’inscription 02554 ), étaient tous deux de nationalité japonaise et ont été internés à Slocan City, en Colombie-Britannique. L’étiquette d’expédition sur la caisse porte le nom de « Ryuichi Hirahara » ainsi qu’une adresse à Wakayama City, au Japon. Ne sachant si sa maison ancestrale avait survécu à la guerre, M. Hirahara avait demandé que ses effets personnels soient retenus en son nom à la gare de Wakayama. Il savait que les gares compteraient parmi les premiers bâtiments à être remis en état, les trains étant essentiels à la reconstruction du Japon. Les Hirahara ont été déportés au Japon en 1946. Source : Tak Toyota [Traduction originale : Henry Shibata, retraduit en français par Bibliothèque et Archives Canada] (c047391)

L’histoire d’un déporté : Henry Shibata

Les participants à la conférence « Retour sur le redressement à l’égard des Canadiens japonais », le 20 septembre prochain, pourront non seulement voir le registre, mais aussi rencontrer l’une des personnes qui y sont inscrites : Henry Shibata. Canadien de naissance, M. Shibata a été déporté au Japon en 1946. Il est aujourd’hui âgé de 88 ans.

Sur l’une des pages du registre, à côté des noms de M. Shibata et de ses six frères et sœurs – tous nés au Canada –, se trouvent des annotations manuscrites qui semblent être des extraits de loi faisant référence au décret 7356 du Conseil privé (qui interdisait le retour des Canadiens japonais naturalisés ayant été déportés). Si tel est bien le cas, cela signifie que le gouvernement canadien avait bel et bien l’intention d’empêcher Henry et ses frères et sœurs de revenir au pays.

Photo noir et blanc de deux hommes debout devant un portail en fer. On aperçoit derrière eux un agent de police londonien.

L’honorable W. L. Mackenzie King et Norman Robertson à la conférence des premiers ministres du Commonwealth, Londres (Angleterre), 1er mai 1944. C’est à cette époque que Norman Robertson, sous-secrétaire d’État aux Affaires extérieures, et son adjoint spécial Gordon Robertson (avec qui il n’a aucun lien de parenté) ont élaboré le plan de déportation approuvé par le premier ministre Mackenzie King. (c015134)

Le recensement qui pouvait faire basculer une vie

Au cours du printemps 1945, le gouvernement du Canada dresse la liste de tous les Canadiens d’origine japonaise âgés de 16 ans et plus (incluant les personnes internées dans des camps et celles traitées à l’hôpital psychiatrique). Ce vaste recensement comprend également un formulaire où les Canadiens japonais doivent choisir le lieu où ils seront supposément « relocalisés » : au Japon ou à l’est des Rocheuses. Mais ce qu’ils ignorent, c’est que ce choix peut faire basculer leur vie.

En effet, les personnes qui décident d’aller au Japon signent en réalité – et à leur insu – leur demande de déportation. Le gouvernement considérant qu’ils sont déloyaux envers le Canada, il en fait un motif automatique de ségrégation et de déportation. Plusieurs annotations du registre arborent même la mention app[lication] for deportation (demande de déportation) écrite par un fonctionnaire.

Le recensement est mené par la Gendarmerie royale du Canada, alors que les Canadiens japonais sont découragés et inquiets pour leur avenir. Plusieurs d’entre eux viennent de survivre à trois longues années dans des camps d’internement dont ils ne pouvaient sortir sans laissez-passer : forcés de travailler sur des fermes de betteraves à sucre dans les Prairies pour éviter que leurs familles soient dispersées; obligés de travailler dans des camps routiers isolés; ou internés dans des camps de prisonniers de guerre parce qu’ils se plaignaient d’être séparés de leur femme et de leurs enfants.

Photo noir et blanc d’un agent de la Gendarmerie royale du Canada assis à une table et examinant des documents, entouré de plusieurs hommes.

Agent de la Gendarmerie royale du Canada vérifiant les documents de Canadiens japonais forcés d’abandonner leur maison et d’aller dans des camps d’internement, 1942. Source : Tak Toyota (c047387)

Photo noir et blanc de rangées de baraques dans un camp d’internement.Pourquoi les déportés ont-ils signé pour aller au Japon?

Camp d’internement pour les Canadiens japonais, Lemon Creek (Colombie-Britannique), juin 1945. (a142853)

Pourquoi les déportés ont-ils signé pour aller au Japon?  

Les pressions commencent à s’exercer sur les Canadiens japonais lorsque la communauté est forcée de quitter la côte Ouest, en 1942, pour aller en camp d’internement. Dès l’année suivante, leurs biens, retenus en fiducie par le Bureau du séquestre des biens ennemis, sont vendus aux enchères sans leur consentement. Les internés doivent vivre du produit de ces ventes, dont l’essentiel sert à payer leur propre internement. De plus, les superviseurs des camps sont évalués en fonction du nombre de formulaires signés qu’ils arrivent à obtenir.

De tous les internés, les Canadiens japonais qui acceptent finalement de signer le formulaire sont les plus vulnérables : il s’agit de personnes ayant des familles piégées au Japon, de familles monoparentales ou de patients en psychiatrie (dont certains sont trop malades pour signer). Certains, maîtrisant mal l’anglais, se sentent trop vieux ou trop démunis pour recommencer leur vie dans les collectivités typiquement hostiles de l’est du pays. Quelques enfants plus âgés, nés au Canada, se sentent obligés d’accompagner au Japon leurs parents malades ou vieillissants.

La famille du jeune Henry Shibata est internée à Lemon Creek, en Colombie-Britannique. Ses parents, Hatsuzo et Tomiko, ont de la famille à Hiroshima, mais ignorent si la bombe atomique a laissé des survivants. À 52 ans, Hatsuzo pense que sa méconnaissance de l’anglais écrit ne lui permettrait pas de recommencer sa vie dans l’est du Canada. Depuis l’arrivée de son dernier-né Hisashi, qui a vu le jour dans le camp d’internement de Lemon Creek, il a maintenant une femme et sept enfants à faire vivre.

Durant l’événement « Retour sur le redressement à l’égard des Canadiens japonais », le 20 septembre, le registre des déportations sera ouvert à la page 394, où se trouve l’inscription concernant la famille Shibata. À cette occasion, M. Shibata, un éminent chirurgien-oncologiste de 88 ans, verra pour la première fois son nom dans ce registre – 62 ans après s’être embarqué à bord du S.S. General Meigs pour être déporté au Japon avec sa famille.

À Hiroshima, une ville réduite en cendres par l’explosion de la première bombe atomique, Henry et sa famille sont confrontés à des épreuves inimaginables. Malgré tout, Henry réussit à obtenir son diplôme de l’École de médecine de Hiroshima. Il passe ensuite quatre ans aux États-Unis, le temps de se spécialiser en chirurgie, et revient au Canada en 1961. Son expertise a permis de sauver la vie de nombreux Canadiens. Professeur émérite à l’Université McGill, il a pris sa retraite en 2015.

Le registre mentionné ci-dessus était un moyen pratique d’empêcher le retour des déportés, particulièrement en raison des annotations qu’il comportait. Leur intention ne fait aucun doute dans cette lettre écrite par Arthur MacNamara, sous-ministre du Travail, à son ministre Humphrey Mitchell le 4 mai 1950 : « Le ministère des Affaires extérieures semble enclin à penser que les hommes nés au Canada et qui (…) ont été envoyés au Japon devraient maintenant être autorisés à revenir. Quant à moi, je suis d’avis que cette affaire devrait être traitée avec une magistrale lenteur; même dans le cas des hommes ou des femmes nés au Canada, il me semble qu’ils devraient ‘souffrir pour leurs péchés’. Après tout, ce sont eux qui ont choisi d’aller au Japon; ils n’y ont pas été forcés. » [Traduction]

Photo noir et blanc de trois hommes debout devant un bateau.

Canadiens japonais déportés vers le Japon après la Deuxième Guerre mondiale à bord du S.S. General Meigs, un navire de l’armée américaine, au quai A du Chemin de fer Canadien Pacifique, Vancouver (Colombie-Britannique). Au premier plan, de gauche à droite : le caporal R. A. Davidson de la Gendarmerie royale du Canada, C. W. Fisher, et T. B. Pickersgill, commissaire au placement des Japonais, ministère du Travail, 16 juin 1946. (a119024)

Défi Co-Lab

Co-Lab, notre nouvel outil de production participative, offre aux Canadiens la chance de collaborer avec BAC à partir de leur ordinateur personnel. Au cours des prochains mois, BAC lancera un défi Co-Lab portant sur les images du registre. Les Canadiens touchés par l’histoire de ces déportations et qui veulent aider à garder vivants les noms des déportés pourront retranscrire les 3 964 noms et renseignements connexes. BAC espère ainsi offrir une version numérisée et consultable du registre, afin que les chercheurs puissent accéder à ses importantes annotations manuscrites et compiler d’autres statistiques sur les déportés. D’ici là, vous pouvez voir dès maintenant les pages du registre en utilisant notre outil Recherche dans la collection(bêta).

Nous ne pouvons pas réécrire l’histoire afin d’empêcher ces déportations, mais nous pouvons résoudre le mystère des annotations du registre. Et nous pouvons aussi veiller à ce que chaque inscription demeure accessible aux déportés, à leurs familles et aux chercheurs du monde entier, afin que tous puissent ressentir le pouvoir évocateur de ces noms et ne jamais oublier le lot de souffrances qu’ils portent, ainsi que tout le talent et le potentiel dont le Canada n’a pas su profiter.

En attendant le défi Co-Lab sur le registre, BAC vous lance un autre défi : il a réuni des photos de l’internement des Canadiens japonais. Nous sollicitons votre aide pour rédiger des descriptions et ajouter des mots-clés qui permettront de mieux mettre en contexte ces images historiques et de les rendre ainsi plus repérables. Participez au défi dès maintenant!

Pour en savoir plus sur Co-Lab et l’outil Recherche dans la collection(bêta), consultez notre précédent billet de blogue : Voici Co-Lab : l’outil qui vous permettra de donner un coup de pouce à l’histoire!

Pour d’autres informations sur le site Web de BAC

Approfondissez vos connaissances sur les déportations vécues par les Canadiens japonais, les camps d’internement au Canada et la campagne de redressement, ou consultez notre vaste collection en visitant notre page Web sur les Canadiens japonais.


R. L. Gabrielle Nishiguchi est archiviste à la section Société, emploi, affaires autochtones et gouvernementales de la Division des archives gouvernementales à Bibliothèque et Archives Canada.

Louis St-Laurent, initiateur d’une politique canadienne internationale

Par Bruno Sauvagnat

Le 25 juillet 2018 marquait le 45e anniversaire du décès de Louis St-Laurent, douzième premier ministre du Canada (1948-1957) et acteur très présent sur la scène internationale.

Louis St-Laurent naît le 1er février 1882 dans le petit village de Compton, au Québec, où il est élevé par ses parents Jean-Baptiste Moīse St-Laurent et Mary Ann Broderick. Durant sa jeunesse, il est initié à la politique par son père, candidat libéral défait aux élections provinciales. Mais il s’intéresse peu à ce domaine et préfère se consacrer au droit. En 1905, il termine ses études à l’Université Laval et entame une prestigieuse carrière d’avocat, qu’il poursuivra jusqu’en 1941.

Cette même année, à la demande du premier ministre canadien Mackenzie King, Louis St-Laurent accepte de quitter sa lucrative position pour devenir ministre de la Justice au sein du gouvernement libéral. Il participe alors de près à l’élaboration de plusieurs politiques pour appuyer l’effort de guerre durant la Deuxième Guerre mondiale. Il joue notamment un rôle crucial dans la mise en place de la Loi sur la mobilisation des ressources nationales, qui rend obligatoire l’enrôlement afin de répondre aux besoins en personnel de l’armée canadienne.

En 1946, il devient ministre aux Affaires extérieures, un mandat au cours duquel il se distingue notamment par son discours intitulé The Foundations of Canadian Policy in World Affairs (les fondements de la politique étrangère du Canada). Présenté aux élèves et aux professeurs de l’Université de Toronto, ce discours, s’il n’a rien de très révolutionnaire, est toutefois le premier qui articule clairement les politiques canadiennes sur la scène internationale.

Photo noir et blanc montrant Louis St-Laurent assis sur un canapé, lisant un journal à deux fillettes assises de chaque côté de lui.

Louis St-Laurent faisant la lecture à des enfants, 1947. Les photos comme celle-ci permettaient de renforcer son image d’homme aimable et accessible. Source : a125907

Deux ans plus tard, Louis St-Laurent succède au premier ministre Mackenzie King à la tête du pays. Il doit en partie sa réussite à un changement d’image : de l’avocat discret qu’il était, il est devenu un homme abordable, près du peuple canadien. C’est d’ailleurs durant cette période qu’il acquiert le surnom d’« Uncle Louis » (oncle Louis) dans les médias anglophones.

Photo noir et blanc de Louis St-Laurent entouré de militaires. Deux soldats sud-coréens se tiennent à sa gauche, et deux autres à sa droite. À l’arrière-plan, on distingue deux soldats canadiens. Au premier plan, à gauche, on aperçoit le profil partiel d’un soldat canadien portant des lunettes et un képi.

Le premier ministre Louis St-Laurent visite les troupes canadiennes du 3e Bataillon du Régiment Royal du Canada dans un champ de tir en Corée, mars 1954. Source : e011185001

Une fois au pouvoir, Louis St-Laurent s’emploie à faire du Canada un acteur important sur la scène internationale, décidant notamment d’appuyer les forces de l’Organisation des Nations Unies qui interviennent en Corée. C’est aussi durant son gouvernement que les Casques bleus verront le jour pour résoudre la crise politique dans le canal de Suez.

Louis St-Laurent n’hésite pas à faire appel aux institutions internationales capables de soutenir ses initiatives. Mais si ses décisions en matière de politique étrangère semblent parfois fondées sur une vision humanitaire, elles reposent plutôt sur une approche pragmatique. En effet, le Canada bénéficie économiquement et politiquement d’un monde plus stable, prêt à acheter ses surplus.

Louis St-Laurent a également à cœur de maintenir l’unité du pays. C’est durant son mandat que Terre-Neuve-et-Labrador rejoint la Confédération. Il cherche aussi à apaiser les tensions entre les communautés anglophones et francophones, très apparentes depuis la conscription.

En 1957, fatigué et âgé de 75 ans, Louis St-Laurent est défait aux élections par le conservateur John Diefenbaker. Il lègue aux Canadiens une nation capable de faire face aux défis de la guerre froide. Il prend alors sa retraite de la politique, mais renoue avec sa carrière d’avocat. Il rend l’âme en 1973.

Si vous désirez en apprendre plus sur Louis St-Laurent, vous pouvez consulter le fonds qui porte son nom à Bibliothèque et Archives Canada.

Sources :


Bruno Sauvagnat est étudiant archiviste à la Division des archives privées du monde de la science et de la gouvernance à Bibliothèque et Archives Canada.

La voie du compromis : Célébrons l’héritage de sir Wilfrid Laurier

Bibliothèque et Archives Canada (BAC), en partenariat avec Parcs Canada, souligne le 175e anniversaire de la naissance de sir Wilfrid Laurier – le 20 novembre 1841 – grâce à l’exposition La voie du compromis : Célébrons l’héritage de sir Wilfrid Laurier. Le coup d’envoi des célébrations a été donné au Fairmont Château Laurier (1, rue Rideau, à Ottawa) ce matin, afin de coïncider avec l’anniversaire de la grande inauguration du fameux hôtel, il y a 104 ans. Une exposition commémorative d’objets historiques de BAC est présentée, ainsi qu’un buste de sir Wilfrid Laurier fourni par Parcs Canada; une merveilleuse occasion de prendre un égoportrait!

Un égoportrait montrant une femme penchée vers un livre que tient une figure en carton.

Le 1er juin 1912, le couple Laurier se dirigeait vers l’hôtel Château Laurier pour assister à son inauguration. Homme modeste, Laurier aurait d’abord refusé qu’on attribue son nom à l’hôtel Grand Trunk Railway.

Photographie en noir et blanc d’un groupe de personnes assises dans une automobile.

Sir Wilfrid Laurier et lady Laurier arrivent, en compagnie de passagers non identifiés, afin d’assister à l’inauguration de l’hôtel Château Laurier, le 1er juin 1912. (MIKAN 3191987)

Ne manquez pas l’exposition principale portant sur cet éminent politicien présentée sur le site du Lieu historique national de la Maison-Laurier au 335, avenue Laurier Est, à Ottawa.

L’exposition met en valeur des photographies, des souvenirs, de la correspondance rattachée à sa vie personnelle et politique, de même que des documents historiques originaux tirés de la collection de Bibliothèque et Archives Canada, dont certains sont exposés pour la première fois. Cette collection d’objets rend hommage à sir Wilfrid Laurier, qui était reconnu pour sa vision claire d’un but commun, son sens du compromis et son intérêt pour une nation unie. Dignitaire grandement admiré, chez qui les valeurs d’inclusion et d’acceptation culturelle étaient bien ancrées, sir Wilfrid Laurier est le député canadien ayant siégé le plus longtemps; il est aussi le premier premier ministre d’origine canadienne-française et bilingue.

Texte centré, encadré avec soin de lignes dorées et fluides rappelant des tiges de roses, de roses de couleur rose et de feuilles dans les coins inférieurs; sous le cadre, reproduction des édifices du Parlement à Ottawa.

Dîner en l’honneur de sir Wilfrid Laurier, 1902 (MIKAN 186966)

Ornement dessiné à la main de roses rouges et de feuilles vertes sur une tige brune dans le coin supérieur gauche, au-dessus du texte.

Menu au Canada Club, 1897 (MIKAN 186966)

Les objets d’archives exposés mettent en valeur une partie du rôle de premier ministre lorsqu’il représentait le Canada à des événements internationaux publics. Souvent conservés dans des albums, les souvenirs, comme des invitations, des billets de pièces de théâtre et des menus servis lors de grands banquets et de dîners officiels, donnent un aperçu de l’aspect social de ses fonctions. Venez voir l’exposition à la Maison-Laurier pour découvrir les plats que l’on servait durant les banquets, il y a plus de 100 ans!

Un trésor de la collection, nouvellement découvert et récemment restauré par des professionnels : une adresse enluminée transcrite sur du papier-parchemin soulignant les efforts considérables déployés par l’administration Laurier pour peupler l’Ouest canadien.

Une adresse enluminée arborant une décoration élaborée à gauche du texte et une charrette de la rivière Rouge dans le coin supérieur droit.

Adresse enluminée présentée par le maire et le conseil de Winnipeg (MIKAN 186966)

Joignez-vous à nous pour célébrer l’un des premiers ministres du Canada les plus pragmatiques et éloquents et venez visiter l’exposition La voie du compromis : Célébrons l’héritage de sir Wilfrid Laurier à Ottawa, présentée jusqu’au 20 novembre, la date d’anniversaire de sir Wilfrid Laurier!

Pour obtenir de plus amples renseignements au sujet de sir Wilfrid Laurier, visionner un album Flickr  et pour découvrir le patrimoine du Canada, consultez la page http://www.bac-lac.gc.ca/

Les lettres d’un politicien passionné : la correspondance de Wilfrid Laurier à Bibliothèque et Archives Canada

Par Théo Martin

Bibliothèque et Archives Canada (BAC) détient la riche correspondance de Wilfrid Laurier, septième premier ministre du Canada et premier Canadien français à accéder au poste. Wilfrid Laurier (1841-1919), né à Saint-Lin, au Québec, connaîtra une carrière exceptionnelle de journaliste, d’avocat, de politicien et bien sûr de premier ministre.

Photographie en noir et blanc montrant un homme âgé regardant au loin.

sir Wilfrid Laurier, v. 1906, photographe inconnu (MIKAN 3623433)

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Les discours des premiers ministres

Êtes-vous intéressé par les discours des premiers ministres canadiens? Bibliothèque et Archives Canada (BAC) met à votre disposition une collection unique d’outils qui vous aideront à trouver tous les discours prononcés par les premiers ministres depuis la fondation du Canada. Les ressources historiques de BAC complètent les ressources du gouvernement du Canada, dans lesquelles on retrouve des discours plus récents.

Le site Web archivé, Premier parmi ses pairs, contient une section entièrement dévouée à certains discours d’anciens premiers ministres. À gauche, sur la page d’introduction de cette exposition virtuelle, cliquez sur la rubrique « discours ». Ceci vous amènera sur une page où figurent des discours classés par thèmes. Pour voir les discours d’un premier ministre en particulier, cliquez sur la rubrique « Profils » sur le menu de gauche. Veuillez prendre note que le site Web est archivé. Par conséquent, il ne sera plus mis à jour.

Parmi les sources sollicitées pour la création du site Web Premier parmi ses pairs figure la collection de discours sur microfiche de BAC, une reproduction de la collection de discours conservée à la Bibliothèque du Parlement. La collection est située dans la salle de lecture, au deuxième étage de l’édifice principal de BAC (395, rue Wellington, à Ottawa). En plus des discours prononcés par les premiers ministres, cette ressource contient les discours des ministres et des chefs de l’opposition, de 1914 à 1993. Lire la suite

Images de Richard Bedford Bennett maintenant sur Flickr 

Résumé des commentaires reçus en anglais entre le 1er juillet 2014 et le 30 septembre 2014

  • Un usager questionne la formulation en anglais de la légende pour l’image no 8 de cet ensemble. Seule Sir George Perley a participé à une conférence à Buenos Aires, et non pas le cabinet en entier.

Lien

 Nous avons le plaisir d’annoncer le lancement d’une nouvelle série d’images sur Flickr mettant en vedette le 9e premier ministre du Canada Arthur Meighen.

Arthur Meighen est né à Anderson (Ontario) le 16 juin 1874. Candidat conservateur représentant Portage-la-Prairie, Meighen est élu à la Chambre des communes en 1908. En 1920, il devient chef du Parti conservateur et premier ministre du Canada et ce jusqu’en 1921. Meighen devient à nouveau premier ministre, mais uniquement pour une période de quatre mois, le 29 juin, 1926 jusqu’au 24 septembre, 1926. M. Meighen démissionne du parti en 1927 et est nommé au Sénat en 1932.
 
Pour en savoir plus sur Arthur Meighen :
 

Renseignez-vous au sujet des nouveautés à BAC, visitez notre section «Nouvelles».

Résumé des commentaires reçus en anglais jusqu’au 30 septembre 2013

  • Un usager a rapporté une erreur pour la durée du mandat d’Arthur Meighen en 1926. On aurait dû lire 4 mois au lieu de 4 jours. BAC a fait la correction.