Visite au Mémorial de Vimy : la boucle est bouclée (troisième partie)

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Par Rebecca Murray

En 2022, j’ai parlé de la recherche que j’ai faite pour déterminer si mon arrière-grand-père avait été présent à l’inauguration du Mémorial de Vimy, en 1936. L’année suivante, j’ai écrit la suite de l’histoire. Aujourd’hui, je conclus (probablement) cette trilogie sur mon histoire familiale.

Nous nous sommes laissés après avoir fait une formidable découverte : Thomas C. Phillips était effectivement tout près du Mémorial de Vimy en juillet 1936. Cependant, un point important demeurait à éclaircir : comment s’était-il rendu en France?

À l’époque, la traversée de l’Atlantique se faisait généralement par la mer. Selon un document familial, Thomas serait embarqué à bord du navire à vapeur Alaunia. Une recherche en ligne confirme que ce bateau a quitté Montréal le 20 juillet 1936. Thomas aurait donc pu arriver à temps (de justesse!) pour l’inauguration du 26 juillet. C’est donc ici que nous reprendrons notre recherche.

J’ai porté mon attention sur des listes de passagers et des documents semblables. Mon premier arrêt fut au comptoir de généalogie. J’ai en effet appris deux choses : un problème partagé est à moitié résolu, et mes collègues de la généalogie sont formidables! Je leur ai donc posé une question (vous le pouvez aussi) et j’ai appris que les listes de passagers ultérieures à 1935 sont conservées par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada. Une demande d’accès à l’information est nécessaire pour les consulter. Quant aux documents antérieurs, ils font partie d’ensembles de données consultables sur le site de Bibliothèque et Archives Canada (BAC). Il faut utiliser des mots-clés comme « passager », « immigration » ou « frontière ».

J’ai longtemps tergiversé. Les passionnés de recherche parmi vous comprendront sans peine que je préférais ne pas céder les rênes de mon enquête. Pour éviter d’être entièrement dépendante, j’ai choisi une nouvelle approche toute simple : je suis allée voir de l’autre côté de l’océan et, plutôt que de chercher des documents sur les arrivées, j’ai cherché des départs (autrement dit, le voyage de retour de Thomas). Cette idée m’a menée aux Archives nationales du Royaume-Uni. Dans leurs archives numériques sur Findmypast, j’ai découvert non pas un, mais deux Thomas Phillips partis vers Montréal à l’été 1936. Je remercie de nouveau mes précieux collègues de la généalogie, dont l’expertise s’est avérée essentielle à cette étape de ma recherche.

Pour filtrer les résultats, j’ai cherché une date de départ à la fin de l’été et indiqué l’année de naissance de Thomas (1877). J’ai rapidement trouvé ce que je cherchais : une liste de passagers du navire à vapeur Antonia, de la compagnie Cunard, construit dans les années 1920. Quand j’y ai vu le nom de Thomas, j’ai eu envie de crier et de partager ma découverte avec quelqu’un, comme on le fait quand on est dans la salle de référence, mais quand on travaille de la maison, on obtient seulement les grommellements du chien dérangé pendant sa sieste.

La liste nous renseigne sur le voyage et sur Thomas. L’Antonia a quitté Liverpool le 28 août 1936 à destination de Québec et de Montréal. La plupart des données n’ont rien d’inhabituel, mais la colonne 8 (le dernier pays de résidence permanente) est particulièrement intéressante. On y trouve des régions du Royaume-Uni, d’autres parties de l’Empire britannique et des pays étrangers. Sans surprise, la plupart des passagers provenaient d’autres parties de l’Empire britannique. Peut-être que d’autres pèlerins canadiens étaient allés en France le mois précédent pour assister à l’inauguration du Mémorial de Vimy.

Page jaunie dressant la liste de quelques dizaines de passagers d’un paquebot.

Liste de passagers de l’Antonia, un navire de la compagnie de navigation Cunard White Star, qui a quitté Liverpool, en Angleterre, le 28 août 1936. L’information sur Thomas Phillips est encerclée en rouge. Source : Archives nationales du Royaume-Uni.

Nous y apprenons que la dernière adresse de Thomas au Royaume-Uni était « c/o 88 Leadenhall St, London ». Vous vous doutez bien que je me suis demandé ce qu’il y avait au 88, rue Leadenhall en 1936. Une petite recherche sur le Web a révélé qu’il s’agissait de la Cunard House, un édifice à huit étages où se trouvaient les bureaux de la compagnie de navigation Cunard et de ses succursales. J’ai aussi appris que les passagers donnaient souvent une adresse avec la mention « aux soins de » (care of, ou c/o), probablement pour faciliter la correspondance pendant leur voyage.

Armée de ces renseignements nouveaux, j’ai pu retourner dans les archives de BAC pour voir ce que je pourrais trouver au sujet de l’Antonia et du voyage de Thomas. Les collections d’archives à BAC donnent beaucoup d’information sur le navire, de ses origines en tant que paquebot de ligne à ses fonctions de transporteur de troupes pendant la Deuxième Guerre mondiale. Évidemment, je me suis surtout intéressée aux documents sur le pèlerinage à Vimy!

BAC possède aussi des images de l’Antonia, dont cette magnifique photo prise pendant sa traversée vers l’Europe plus tôt cet été-là.

Le paquebot bicolore Antonia en mer. Le pont Jacques-Cartier et plusieurs navires à quai se trouvent à l’arrière-plan.

Pèlerins pour Vimy à bord de l’Antonia en partance de Montréal (Québec), 1936. Source : Clifford M. Johnston/Bibliothèque et Archives Canada/PA-056952.

J’ai ensuite épluché les journaux montréalais du début septembre pour voir si le retour de Thomas était mentionné dans les nouvelles maritimes. L’arrivée de l’Antonia est bel et bien documentée, mais mon arrière-grand-père n’est pas nommé. J’ai alors une fois de plus constaté que le plus difficile, dans une recherche archivistique, est parfois de savoir quand s’arrêter.

Je voulais d’abord savoir si mon arrière-grand-père avait assisté à l’inauguration du Mémorial de Vimy, et j’ai fini par me renseigner sur son voyage à l’aller et au retour. La recherche a été ponctuée de grandes découvertes et d’amères déceptions, ce qui est courant lorsqu’on fouille dans les archives. En plus d’obtenir de l’information, j’ai acquis de précieuses aptitudes en recherche, ce qui n’est vraiment pas à dédaigner. Bien loin de me décourager, je suis déjà prête à m’attaquer au prochain mystère familial! Vive les défis!


Rebecca Murray est conseillère en programmes littéraires au sein de la Direction générale de la diffusion et de l’engagement à Bibliothèque et Archives Canada.

Salade de légumes en gelée : moins, c’est mieux!

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives Canada

Par Rebecca Murray

Quand j’ai feuilleté le livre de recettes de l’armée canadienne, je n’ai pas seulement cherché les desserts, mes yeux se sont également posés sur une variété de recettes savoureuses de pains, de pâtés à la viande et de salades. C’est là que la salade de légumes en gelée entre en scène!

Couverture de livre bleue, légèrement usée, qui porte le titre « Canadian Army Recipe Book » en lettres majuscules. Au-dessus du titre figure l’insigne de l’armée canadienne surmonté d’une couronne de saint Édouard. L’insigne représente trois feuilles d’érable sur une même tige et une paire d’épées croisées, le tout en gris argenté.

Couverture d’un livre de recettes de l’Armée canadienne, publié par le ministère de la Défense nationale, 1961 (OCLC 299227447).

Vous avez peut-être déjà vu des salades en gelée ou étagées dans des émissions de cuisine télévisées ou des téléromans qui se déroulent dans les années 1960 ou 1970. Ou peut-être avez-vous eu le « plaisir » d’en faire l’expérience à la maison. Quand on m’a invitée à un barbecue familial l’été dernier, je me suis dit que c’était l’occasion idéale pour préparer cette salade de légumes en gelée. Je devais tout d’abord rassembler les ingrédients et me préparer à cuisiner. Oui, à cuisiner, car cette salade nécessite de la cuisson, ce qui n’est pas toujours agréable dans la chaleur de l’été, mais c’est essentiel pour réussir cette recette!

Page de texte qui présente une recette de salade de légumes en gelée.

Recette de salade de légumes en gelée tirée du livre de recettes de l’Armée canadienne (OCLC 299227447).

Comme la recette originale était destinée à nourrir un grand nombre de personnes, j’ai dû faire des calculs pour ajuster les quantités. Cette fois, j’ai suivi mon propre conseil et j’ai vérifié mes mesures PLUSIEURS fois avant de me mettre aux fourneaux.

Ingrédients Recette originale entière Quart de recette
Gélatine (A) 12 oz 3 oz (90 ml)
Eau froide (A) 2,5 tasses 0,625 tasse (150 ml)
Sucre (A) 12 oz 3 oz (90 ml)
Sel (A) 6 oz 1,5 oz (45 ml)
Vinaigre (A) 3 tasses 3/4 tasse (180 ml)
Eau bouillante (A) 7 pintes 1,75 pinte ou 7 tasses (1,75 litre)
Poivre de Tasmanie (A) 6 1,5
Clous de girofle entiers (A) 4 1
Oignons hachés (A) 6 oz 1,5 oz (45 ml)
Feuilles de céleri hachées (A) 6 oz 1,5 oz (45 ml)
Chou râpé (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Carottes râpées (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Pois verts cuits (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Haricots verts en dés, cuits (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Piments rouges coupés en petits dés (B) 2 oz 1/2 oz (15 ml)
Poivrons verts coupés en petits dés (B) 4 oz 1 oz (30 ml)
Ingrédients frais et secs présentés sur un linge à vaisselle vert.

Préparation des ingrédients, de gauche à droite : haricots verts, chou, poivron vert, carottes, sachets de gélatine, petits pois surgelés et ingrédients secs (sucre et sel). Photo : Rebecca Murray.

Prochaine étape : les ingrédients! Après avoir calculé les quantités, je devais rassembler les ingrédients. La plupart se trouvaient déjà dans mon garde-manger ou étaient faciles à trouver en épicerie. La seule exception? Le poivre de Tasmanie (pepperberry, en anglais), une épice australienne aux notes fruitées et épicées (à ne pas confondre avec les grains de poivre). Je n’ai pas trouvé de poivre de Tasmanie et j’ai omis les piments rouges, mais j’ai été agréablement surprise de constater que le plat n’en avait pas pâti. Un voisin TRÈS serviable m’a sauvée à la dernière minute en me fournissant des clous de girofle entiers. J’ai également remplacé le chou vert par du chou rouge, ce qui a donné une touche vibrante au plat final. Il n’est donc pas seulement délicieux, mais il a aussi belle allure!

La structure de cette recette m’a vraiment interpellée (ce qui sera peut-être le cas pour d’autres archivistes ou cuisiniers!). En regroupant les ingrédients de chaque catégorie, « A » et « B », il m’a été plus facile de me préparer et de tout garder séparé au fur et à mesure que je travaillais. J’ai hésité à modifier la méthode, même si j’avais modifié les quantités, mais j’ai fait tremper la gélatine plus longtemps que les 10 minutes recommandées et j’ai fait mijoter les autres ingrédients « A » 5 minutes en les surveillant de près (ça sentait vraiment bon!).

J’aurais bien aimé avoir une estimation de la durée de refroidissement, à l’étape 4. J’ai laissé le mélange sur le comptoir environ 45 minutes avant de passer à l’étape suivante, qui était franchement un peu intimidante, mais aussi amusante!

Voici ce à quoi ressemblaient les légumes après que j’ai filtré le bouillon (dans lequel j’ai ajouté la gélatine dissoute) et l’avoir versé dans « B ». J’ai l’habitude d’égoutter les choses au-dessus de l’évier, et non dans un autre bol, et j’ai donc frôlé la catastrophe lorsque je me suis dirigée vers l’évier. Heureusement, j’ai dévié vers le comptoir à temps pour le premier de deux transferts qui risquaient d’être périlleux!

Un bol rempli de légumes colorés dans un liquide vu du dessus.

Une photo de la deuxième partie de l’étape 4. Photo : Rebecca Murray.

Il n’y a eu qu’un seul vrai pépin, comme le montre la photo ci-dessous. Étonnamment, ce n’est pas le transfert risqué du bouillon chaud (ou des ingrédients « A ») dans les ingrédients « B » qui a provoqué un déversement, mais plutôt une tentative maladroite de réarranger les portions pour une photo.

Trois coupes de salade gélifiée violette sur fond vert, à côté d’un plus grand bol du même plat. Une petite partie du liquide et de la garniture s’est répandue sur le fond vert et le comptoir gris.

Ne soyons pas trop tristes d’avoir renversé de la salade en gelée – ça ressemble presque à de l’art abstrait! Photo : Rebecca Murray.

Dans l’ensemble, les réactions ont été positives, mais je retiens surtout qu’avec ce plat, moins c’est mieux! Il s’agit d’un plat relativement facile, qu’on prépare à l’avance, idéal pour toute réunion de famille, quel que soit le temps de l’année.

Une main tient une petite coupe en verre remplie de salade en gelée.

Une portion parfaite de salade en gelée! Photo : Rebecca Murray.

Bon appétit!

Si vous essayez cette recette, n’hésitez pas à partager les photos de vos résultats avec nous en utilisant le mot-clic #CuisinezAvecBAC et en étiquetant nos médias sociaux : FacebookInstagramX (Twitter)YouTubeFlickr et LinkedIn.

Traduction française de la recette

Méthode

  1. Faire tremper la gélatine dans l’eau froide pendant 10 minutes.
  2. Combiner les autres ingrédients de la liste « A ». Porter à ébullition et laisser mijoter 5 minutes.
  3. Passer au tamis. Ajouter la gélatine trempée [au bouillon obtenu] et mélanger jusqu’à ce que la gélatine soit dissoute.
  4. Laisser tiédir. Ajouter les ingrédients de la liste « B ».
  5. Placer dans des moules humectés d’eau. Réfrigérer.

Vous trouverez les autres recettes de cette série sous #CuisinezAvecBAC.


Rebecca Murray est conseillère en programmes littéraires au sein de la Direction générale de la diffusion et de l’engagement à Bibliothèque et Archives Canada.

Créez votre propre exposition sur le patrimoine militaire!

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Par Sacha Mathew

Saviez-vous qu’avec les outils et les documents numérisés du site de Bibliothèque et Archives Canada (BAC), vous pouvez facilement créer votre propre exposition sur le patrimoine militaire? Je vous présente ici la marche à suivre pour réaliser votre projet, à l’école ou à la maison!

Pour les besoins de la cause, j’utiliserai l’exposition conçue pour les portes ouvertes de BAC, tenues en mai dernier. Lors de l’événement, qui a connu un franc succès, plus de 3 000 personnes ont visité nos édifices à Gatineau et admiré des trésors habituellement cachés dans nos chambres fortes.

Ces quelques photos et documents textuels, choisis avec soin dans notre vaste collection militaire, ont retenu l’attention des visiteurs. Beaucoup ont d’ailleurs voulu savoir comment nous avions fait nos choix.

Vitrine d’exposition en verre comprenant des photos et des documents textuels sur l’histoire militaire.

Exposition militaire organisée pour les portes ouvertes de BAC. Photo gracieuseté d’Alex Comber, archiviste.

Une exposition peut porter sur une personne, un anniversaire ou une unité militaire. Nous avons choisi de souligner le centenaire de l’Aviation royale canadienne (ARC), célébré en 2024, mais il fallait circonscrire le sujet afin de construire un récit. Les documents communiquent des faits, mais ils ne racontent pas une histoire. C’est à nous de les interpréter!

L’événement se tenant à Gatineau, nous avons pensé que le public s’intéresserait à des militaires de la région. Nous avons choisi une unité de l’ARC : le 425e Escadron (les Alouettes). Cet escadron de bombardement composé de Canadiens français a été créé au début de la Deuxième Guerre mondiale. En comparant la liste du personnel du 425e avec une liste des pertes subies par l’ARC, fournie par l’Association de l’ARC, nous avons réussi à trouver un aviateur de Montréal et un d’Ottawa.

Au bord d’une piste d’atterrissage, en Angleterre, trois officiers de la Force aérienne planifient les opérations en examinant des cartes sur une table.

Le sous-lieutenant d’aviation J. W. L. Tessier; le sous-lieutenant d’aviation J. A. Longmuir (Croix du service distingué dans l’Aviation), de la Royal Air Force (RAF), affecté à l’escadron des Alouettes en tant qu’officier de l’instruction de la section des bombardiers; et le capitaine d’aviation Claude Bourassa (Croix du service distingué dans l’Aviation), commandant de la section des bombardiers de l’escadron canadien-français. 425e Escadron, 24 avril 1945, PL-43647, e011160173.

Pour votre exposition, vous pouvez choisir un militaire qui a vécu dans votre ville ou fréquenté votre école. Plus simple encore : vous pourriez choisir un membre de votre famille qui pique votre curiosité. Le dossier du personnel du militaire choisi est un bon point de départ, puisqu’il contient une foule d’information et de renseignements personnels. Par exemple, aimeriez-vous connaître l’adresse de votre arrière-grand-père en 1914?

Vous trouverez les dossiers du personnel de la Première Guerre mondiale sur le site Web de BAC. Tous ont été numérisés et peuvent être consultés librement. En ce qui concerne la Deuxième Guerre mondiale, seuls les dossiers des membres qui sont morts en service sont ouverts et peuvent être consultés en ligne. Pour les dossiers des militaires qui ont survécu à la Deuxième Guerre mondiale ou qui ont participé à des conflits ultérieurs, vous devrez soumettre une demande d’accès à l’information.

Maintenant que vous avez trouvé le dossier de service, vous devez choisir ce qui vous intéresse. Pour notre exposition, nous étions limités par l’espace disponible dans la vitrine. Tant mieux si vous n’avez pas les mêmes contraintes : vous pourrez sélectionner tous les documents que vous voulez!

Un dossier de service contient toutes sortes de documents. Dans celui du sous-lieutenant d’aviation J. Dubois, nous avons choisi quelques ressources particulièrement intéressantes : une lettre de recommandation de son employeur (T. Eaton & Co), ses feuilles d’engagement, sa fiche de médailles, son livret de solde, la correspondance (en français) avec ses parents et le rapport de son décès. Après avoir parcouru le dossier de service numérisé, vous pourrez choisir ce que vous voulez présenter. N’oubliez pas de citer vos sources, notamment les numéros de référence des archives.

Comme je le disais plus haut, en interprétant des documents, vous racontez une histoire. Vous ne vous contentez pas d’exposer les résultats de vos recherches. Dans le cas du sous-lieutenant d’aviation Dubois, nous avons fouillé les documents de son escadron remplis le jour de son décès afin de mieux comprendre le contexte de son dernier vol. Chacune des trois armées documente officiellement ses opérations quotidiennes :

  • l’Armée de terre a des journaux de guerre (War Diaries)
  • la Marine a des journaux de bord (Ship’s Logs)
  • l’ARC a des registres des opérations (Operations Record Books)

Le dossier du personnel donne des renseignements biographiques, tandis que le journal de l’unité explique le contexte et aide à comprendre le rôle d’un militaire dans les opérations collectives. Examinez les deux ressources pour obtenir un portrait général de la situation. Ce portrait est l’histoire que vous raconterez, oralement ou par écrit.

Il ne vous reste plus qu’à ajouter des photos pour rendre l’exposition attrayante. Certains dossiers de service comprennent une photo du militaire, mais c’est plutôt rare en ce qui concerne les guerres mondiales. Pour étoffer vos résultats, je recommande de chercher des images avec Recherche dans la collection. Entrez le nom de l’unité et choisissez des photos correspondant à l’époque qui vous intéresse. Pour notre exposition, nous n’avons eu aucun mal à trouver des photos du 425e Escadron en Angleterre dans les années 1940. À l’instar des documents textuels, les photos exigent une mention de source précise.

Capture d’écran du site Web de BAC montrant une recherche du terme "425 squadron" dans la catégorie "Images".

Recherche dans la collection, sur le site Web de BAC.

En exploitant les outils et les ressources dans la collection en ligne de BAC, vous pourrez créer votre propre exposition sur une personne ou une unité. Libre à vous d’en déterminer le format : vous pouvez imprimer les documents et les photos pour les encadrer ou les insérer dans un album de coupures, ou vous pouvez concevoir une exposition numérique. C’est un excellent moyen d’apprendre à connaître ses ancêtres et d’étudier le patrimoine militaire canadien à sa manière. C’est aussi un projet de recherche idéal pour des élèves, par exemple à l’occasion du jour du Souvenir.


Sacha Mathew est archiviste à la Division des archives gouvernementales de Bibliothèque et Archives Canada.

Premier sur les Lacs : le NCSM Griffon

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Par Dylan Roy

On tombe parfois sur des documents qui, au premier coup d’œil, semblent ne faire aucun sens. C’est ce que je me suis dit quand j’ai lu la description archivistique de la série HMCS Griffon. Comme le sigle anglais HMCS, en français NCMS, signifie « Navire canadien de Sa Majesté » (vous le trouverez tout comme bien d’autres abréviations militaires utilisées dans les dossiers de service sur le site Web de Bibliothèque et Archives Canada, un outil merveilleux pour ceux qui ne sont pas familiers avec ces termes), il n’est pas surprenant que j’aie supposé que ces dossiers parlaient d’un navire.

Contre toute attente, chers moussaillons, j’ai appris à la lecture des dossiers que le « navire » était en fait une installation à Port Arthur, aujourd’hui Thunder Bay.

Photographie en noir et blanc de deux longs bâtiments situés l’un en face de l’autre et séparés par une rue. Au bout de la rue, un camion passe devant un autre bâtiment, qui ressemble à une maison.

Photo du NCSM Griffon. Source : gouvernement du Canada, Sécurité nationale et défense, Historique des navires – NCSM Griffon. Crédit : Courtoisie de la Marine royale canadienne.

Comme il est indiqué dans la série : « Au début de la Seconde Guerre mondiale, des membres de la Réserve navale ont loué un garage inoccupé. Une politique de mise en service de toutes les “frégates en pierre” est entrée en vigueur, et le garage est ainsi devenu le NCSM Griffon en 1941. » (traduction). Cette information m’a incité à chercher des sources secondaires pour en savoir plus sur les frégates en pierre.

En termes clairs, une frégate en pierre est un navire militaire établi sur la terre ferme. L’utilisation inaugurale de ce terme officieux est attribuable aux Britanniques, qui souhaitaient se soustraire à des obligations légales les empêchant de gouverner « sur terre ». Donc, pendant l’une de leurs nombreuses guerres avec les Français, les Britanniques ont décidé de mettre en service en tant que navire l’île Diamond Rock. On comprend maintenant un peu mieux le titre si déconcertant du NCSM Griffon.

Insigne en forme d’anneau surmonté d’une couronne. Le mot GRIFFON est inscrit sous la couronne. À l’intérieur de l’anneau, il y a un griffon (créature mythique) qui fait face à la gauche.

Insigne officiel du NCSM Griffon. Source : gouvernement du Canada, Sécurité nationale et défense, Liste des navires en service – NCSM Griffon. Crédit : Courtoisie du ministère de la Défense nationale.

En consultant l’Historique des navires dans la section « Sécurité nationale et défense » du site Web du gouvernement du Canada, j’ai appris que la création du NCSM Griffon découle de différents facteurs, notamment de l’association de l’établissement avec le programme des Cadets de la Marine et de l’influence de l’industrie du transport maritime sur la région des Grands Lacs. Le NCSM Griffon a été mis en service en 1940 et installé dans son emplacement actuel, à Thunder Bay, en 1944. Pendant la Seconde Guerre mondiale, les marins nouvellement recrutés qui quittaient les Prairies en route vers l’est passaient par le NCSM Griffon, ce qui montre l’importance géographique de cette installation au Canada.

Après avoir pris connaissance de cette information, j’ai pu faire une meilleure contextualisation des documents de notre collection d’archives à Bibliothèque et Archives Canada – un autre exemple de l’aide que les sources secondaires peuvent procurer aux chercheurs pour mieux comprendre les documents d’archives (sources primaires).

Le premier document sur lequel je suis tombé concernant le NCSM Griffon était une description au niveau de la série, grâce à laquelle j’ai découvert que ladite série ne comportait que cinq descriptions au niveau du dossier ainsi qu’une acquisition connexe.

À l’exception de l’acquisition, tous les dossiers étaient ouverts. J’ai donc décidé de les examiner. Par chance, tous les dossiers étaient dans la même boîte d’archives, le volume 11469 (une boîte d’archives et un volume d’archives désignent la même chose).

Une fois le volume commandé, j’ai pu y fouiller pour découvrir les trésors archivistiques que je vous décrirai maintenant.

Le premier dossier, HMCS GRIFFON : Ceremonies and functions, Official opening of HMCS GRIFFON, a été un bon point de départ, puisqu’il présente des discussions intéressantes sur l’ouverture de l’installation, en 1944, et sur l’origine de son nom. Le NCSM Griffon doit son nom à un navire, Le Griffon, qui a été construit par le célèbre explorateur français René-Robert Cavelier, Sieur de La Salle.

Gravure de personnes construisant un bateau près d’un plan d’eau entouré d’arbres, avec une montagne à l’arrière-plan.

Construction du navire Le Griffon de Cavelier de La Salle (c001225).

Dessin en noir et blanc d’un homme aux longs cheveux bouclés tombant sur ses épaules.

René-Robert Cavelier, Sieur de La Salle (c007802).

Le Griffon a levé l’ancre en 1679 pour participer au commerce des fourrures alors florissant. Il a été le premier grand bateau à voiles à naviguer dans le secteur supérieur des Grands Lacs, une réalisation qui a inspiré la devise du NCSM Griffon, Prima in lacubus (« Premier sur les Lacs »). Pour son voyage inaugural, Le Griffon est parti d’une île près de Green Bay, dans le Wisconsin; le navire n’a jamais été revu par la suite, et ce mystère a piqué la curiosité de nombreuses personnes, y compris le commandant du NCSM Griffon, H. S. C. Wilson.

On a remis à Wilson un boulon provenant d’une épave, présumée être Le Griffon, découverte en 1931 dans le détroit de Mississagi près de l’île Manitoulin. Toutefois, un récit oral autochtone a aussi fait surface, selon lequel la véritable épave du navire se trouvait à proximité de l’île Birch, près de « Lescheneaux » ou « Les Cheneaux ». C. H. J. Snider, du Toronto Evening Telegram, a répondu à un télégramme de Wilson, en réfutant les affirmations au sujet de cette dernière épave. Cet échange montre tout l’intérêt que certains militaires du NCSM Griffon portaient à l’histoire du navire lié au nom de leur installation. À ce jour, l’endroit où se trouve l’épave du navire Le Griffon reste un mystère.

Ces télégrammes ne constituent qu’une partie du dossier, qui contient d’autres renseignements dignes de mention, comme la liste des invités à l’inauguration du NCSM Griffon et des détails sur les préparatifs pour cet événement.

Autre dossier fascinant de la série : HMCS GRIFFON : Reports of proceedings. Ces comptes rendus vraiment remarquables témoignent des activités quotidiennes des différents services d’un établissement militaire. Par exemple, grâce à l’information fournie par le service des sports, j’ai pu déterminer que les sports les plus populaires sur le NCSM Griffon étaient le basketball, le volleyball et le badminton. Dans un compte rendu de mai 1955, j’ai lu que le baseball était moins populaire : « On a tenté d’organiser des parties de baseball, mais le niveau d’intérêt était insuffisant » (traduction).

Dans un compte rendu affiché par les services de santé en février 1955, on constate l’impact que pouvait avoir le mariage sur la carrière de certaines militaires : « Wren Kingsley a été libérée du service à la suite de son récent mariage […] La lieutenante Reta Pretrone s’est mariée ce mois-ci; pour cette raison, elle a manqué plusieurs exercices. » (traduction).

Ces comptes rendus peuvent nous éclairer sur la gestion opérationnelle de l’établissement naval ainsi que sur des activités plus banales qui s’y sont déroulées.

Comme beaucoup de militaires ont servi au NCSM Griffon, les accidents étaient inévitables. L’extrait suivant, tiré du dossier HMSC GRIFFON : General information, RN personnel, nous raconte avec d’horribles détails une commission d’enquête menée en 1945 à la suite d’un malheureux accident dans l’installation :

« Commission : Que faisiez-vous, c’est-à-dire, que s’est-il passé?

Réponse : Du travail de machiniste. Je découpais et je rainurais quelques pièces de bois pour faire des boîtes. C’était une scie mécanique de deux pouces. Du bois a été mis en travers du banc; il dépassait d’environ trois pieds sur le côté et il y avait environ un pied entre l’extrémité du bois et le mur. Presque tout le bois était mouillé. Ce morceau était assez mouillé tout du long mais le bout était sec. Pendant que je sciais la pièce, un jeune garçon a voulu passer derrière moi. J’ai tourné la tête pour m’assurer qu’il ne me bousculerait pas, et c’est alors que la scie est arrivée à la partie sèche du morceau de bois qu’elle a coupé très rapidement, entraînant ma main et sectionnant mes doigts. » (traduction)

Voici la conclusion de la commission, à l’issue de l’enquête :

« Le conseil d’administration est d’avis que le soutier BLACKMORE E a subi cet accident lors d’un congé, et que l’accident n’est donc pas lié au service naval. Les autorités navales canadiennes autorisent les matelots à travailler pendant leurs congés en raison de la pénurie de main-d’œuvre. Il est déterminé qu’il était justifié pour le matelot d’accepter ce travail comme il est lié à sa profession civile et que l’accident n’est pas dû à l’inexpérience du matelot, mais plutôt, en grande partie, au fait qu’aucun dispositif de protection ou de sécurité n’a été fourni pour cette machine. » (traduction)

Les procédures de la commission d’enquête donnent un aperçu de certaines des pratiques aux Forces navales, par exemple l’embauche de matelots (jeunes militaires) au lieu de militaires en service en cas de pénurie de main-d’œuvre. Cela révèle également certaines des mesures de sécurité, ou lacunes de sécurité, au NCSM Griffon.

Les dossiers de la série sur le NCSM Griffon dévoilent des faits intéressants sur la frégate en pierre. Ils donnent des descriptions générales et vivantes de plusieurs événements survenus dans l’installation au fil du temps, et montrent comment il peut être utile d’amalgamer des sources secondaires et des sources primaires. Cela étant dit, dans mon esprit, le NCSM Griffon restera toujours le « Premier sur les Lacs »!


Dylan Roy est archiviste de référence à la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Un gâteau au chocolat de 1961

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Rebecca Murray

Un bon gâteau au chocolat, ça plaît à tout le monde. C’est ce que je me suis dit quand j’ai décidé de relever le défi de préparer une recette tirée d’un livre de cuisine de l’Armée canadienne, paru en 1961.

Livre bleu marine légèrement usé portant le titre « Canadian Army Recipe Book » écrit en lettres majuscules sous les insignes de l’Armée canadienne : la couronne de saint Édouard, un rameau à trois feuilles d’érable et deux épées croisées. Le titre et l’insigne sont d’un gris argenté.

Couverture d’un livre de cuisine de l’Armée canadienne publié par le ministère de la Défense nationale, vers 1961. (OCLC 299227447)

Quand je parcourais les recettes, dont plusieurs ne m’étaient pas inconnues, trois choses m’ont frappée.

D’abord, les quantités. La plupart des recettes offrent un rendement de 100 portions ou plus! J’ai l’habitude de doubler mes recettes ou de les couper de moitié, mais pas de calculer si je dois les diviser par quatre ou par cinq. En général, ma décision dépend du nombre d’œufs, car ils sont plutôt difficiles à diviser en deux! Par ailleurs, tous les ingrédients, dans les recettes, sont donnés en poids plutôt qu’en volume, ce à quoi je suis beaucoup plus habituée. Manifestement, les auteurs de ce livre de cuisine n’étaient pas aux prises avec le rationnement, comme c’était le cas dans le livre de 1943 consulté par ma collègue.

Ensuite, la clarté. Je n’ai jamais vu un livre de cuisine aussi bien organisé. Les descriptions sont détaillées sans être verbeuses. Le chapitre d’introduction définit certains termes, fournit des tables de conversion et explique comment choisir des coupes de viande ou préparer certains ingrédients pour de meilleurs résultats. Comme vous pourrez le constater dans les directives de mon gâteau, il y a aussi des références à d’autres recettes du livre pour éviter les répétitions. La chose n’est pas exceptionnelle, mais dans ce livre, tout est numéroté pour simplifier au maximum les renvois.

Enfin, la simplicité. Ça ne devrait peut-être pas m’impressionner, mais à notre époque où de nombreuses vidéos en ligne présentent des recettes élaborées du type « comment fabriquer un volcan en patates pilées avec de la lave en sauce et des dinosaures », j’étais agréablement surprise de trouver des recettes de base (dans le registre « steak, blé d’Inde, patates », pour les amateurs de La petite vie). On cherche vraiment à optimiser le fruit de nos efforts!

Gâteau au chocolat

 Pain brun

 Fèves au lard

 Beignes

Je pourrais continuer longtemps, mais vous comprenez l’idée. De nombreuses recettes ont des variantes pour les changements de saison ou les fêtes. J’ai aussi copié une section très pratique proposant des « repas à mettre dans un sac à dos », car une mère n’a jamais trop d’idées pour les boîtes à lunch. Mais je m’écarte.

Venons-en à la pièce de résistance : le gâteau au chocolat!

Une page de texte comprenant des notes, des directives et une liste d’ingrédients.

Recette de gâteau au chocolat tirée du livre de cuisine de l’Armée canadienne. (OCLC 299227447)

Il me fallait d’abord choisir un rendement approximatif et ajuster les ingrédients en conséquence. Les plus attentifs remarqueront que j’ai commis une erreur de calcul : la recette prévoit des quantités de sucre et de farine différentes, mais elles sont identiques après ma conversion.

J’ai seulement remarqué l’erreur après avoir mélangé les ingrédients et mis le gâteau au four. Heureusement, cette petite faute n’a eu aucun impact sur le goût. C’est tout de même un bon rappel qu’il vaut mieux vérifier plusieurs fois avant de commencer!

Ingrédient Recette entière Quart de recette
Gras 3 livres, 8 onces ⅞ livre (396 grammes)
Sucre 7 livres 1 ¾ livre (793 grammes)
Œufs 4 ⅔ tasses (environ 24) 6
Vanille 3 cuillères à soupe ¾ cuillère à soupe
Farine à pâtisserie non tamisée 6 livres, 4 onces 1 ¾ livre (793 grammes)
Cacao 1 livre ¼ livre (113 grammes)
Poudre à pâte 5 onces 1 ¼ once
Sel 1 once ¼ once
Lait 2 ½ pintes 2 ½ tasses

Je me suis ensuite lancée dans la préparation des ingrédients. C’était plutôt simple, car ceux-ci sont tout à fait classiques. Pour le corps gras, j’ai choisi du beurre. Je n’ai malheureusement rien vécu qui pourrait justifier la rédaction d’un second billet de blogue sur les emballages de beurre

Ingrédients secs et humides d’un gâteau dans divers récipients sur une nappe verte.

Les ingrédients préparés, de gauche à droite : la farine, la vanille, le sucre, les œufs, le beurre, le mélange de cacao, de poudre à pâte et de sel, et le lait. Photo gracieuseté de l’auteure, Rebecca Murray.

J’ai mélangé certains des ingrédients selon les instructions, puis j’ai incorporé le tout graduellement. Je dois admettre que je n’ai pas l’habitude de suivre rigoureusement les recettes. J’ai tendance à vouloir aller trop vite et j’omets parfois certaines étapes, au début. Je devais aussi composer avec un sous-chef qui n’aimait pas s’arrêter pour prendre des photos et relire la recette! Mais grâce à l’expérience acquise après de nombreux essais et erreurs, je parviens généralement à réussir des recettes simples en atteignant un bon équilibre entre le respect des directives et la petite touche personnelle que j’aime ajouter à mes plats.

J’ai versé la pâte dans trois (oui, trois!) moules à gâteau et j’ai cuit le tout à 350 °F. Ça sentait TRÈS bon! La recette prévoit une cuisson de 30 à 45 minutes. Le gâteau rond était cuit après environ 40 minutes, tandis que le carré a pris près de trois quarts d’heure. Pour le gâteau Bundt, il a fallu attendre entre 50 et 55 minutes. Chaque four est différent, et la présence de trois gâteaux a sûrement eu un effet sur la durée de la cuisson.

Trois gâteaux brun pâle sur des grilles.

Les trois gâteaux cuits en train de refroidir sur le comptoir. Photos gracieuseté de l’auteure, Rebecca Murray.

Sur un des gâteaux, nous avons mis un glaçage maison composé de sucre à glacer, de beurre, d’une touche de lait, d’extrait de menthe et de colorant alimentaire.

Le gâteau sur un plateau en verre.

Vue en coupe du gâteau avec son glaçage. Verdict : il est délicieux! Photo gracieuseté de l’auteure, Rebecca Murray.

Mes cobayes s’entendent pour dire que la recette a bien traversé l’épreuve du temps. J’utilise généralement des préparations du commerce, mais j’ai constaté avec ce gâteau que des recettes à la fois simples et savoureuses ne sont pas beaucoup plus longues à préparer. La prochaine fois, j’essaierai un glaçage plus conventionnel, même si celui à la menthe faisait très bien l’affaire!

Si vous essayez cette recette, n’hésitez pas à partager les photos de vos résultats avec nous en utilisant le mot-clic #CuisinezAvecBAC et en étiquetant nos médias sociaux : FacebookInstagramX (Twitter)YouTubeFlickr et LinkedIn.


Rebecca Murray est conseillère en programmes littéraires au sein de la Direction générale de la diffusion et de l’engagement à Bibliothèque et Archives Canada.

Centenaire de l’Aviation royale canadienne : honneur aux femmes militaires

English version

Par Rebecca Murray

Remarque : Comme la plupart des photos présentées dans ce blogue proviennent de microfiches numérisées, leur qualité varie. De plus, certaines d’entre elles ne sont pas décrites au niveau de la pièce dans le catalogue.

L’Aviation royale canadienne (ARC) célèbre son centenaire en 2024. Bibliothèque et Archives Canada (BAC) a le privilège de conserver des documents de l’ARC qui vont des débuts de l’organisation jusqu’au 21e siècle. Celle-ci tient une place importante dans l’histoire militaire du pays en raison de son rôle dans le développement de l’aviation canadienne et de ses opérations à l’étranger.

Le présent billet est consacré aux collections photographiques de l’ARC conservées à BAC, et tout particulièrement aux photos de femmes militaires à l’époque de la Deuxième Guerre mondiale. Le découblogue propose également des billets sur des infrastructures de l’ARC, comme l’aéroport à Fort St. John, et sur des événements marquants, comme la saga de l’Avro Canada CF-105 Arrow.

Une femme en uniforme debout devant un mur nu.

HC 11684-A-2, Long manteau avec chapeau et gants, 4 juillet 1941 (MIKAN 4532368).

Une de mes collègues a déjà raconté l’histoire de la Division féminine de l’Aviation royale du Canada. Je me contenterai donc de rappeler que cette division a vu le jour le 2 juillet 1941, sous le nom de Corps auxiliaire féminin de l’Aviation canadienne, qu’elle a été rebaptisée au début de 1942 et que plus de 17 000 femmes ont joint ses rangs.

Deux femmes vêtues de combinaisons assises de part et d’autre d’une hélice.

PBG-3143, Division féminine – Mécaniciennes de moteurs d’avion, 23 octobre 1942 (MIKAN 5271611).

Le fonds du ministère de la Défense nationale (RG24/R112) contient des photographies sur la Division féminine qui nous renseignent sur le service militaire des femmes à l’époque de la Deuxième Guerre mondiale. Cette collection de plus de 500 000 images est une mine d’or pour quiconque s’intéresse à cette période, car on y trouve des photos prises au Canada et à l’étranger. Depuis six ans, je tente activement de repérer les femmes sur ces photos. Si certaines femmes sont explicitement identifiées et mises en évidence, d’autres, figurant en bordure sur les photos de groupe, sont très difficiles à distinguer de leurs homologues masculins, surtout au premier coup d’œil.

Un homme en uniforme (au centre de la photo), assis et portant des lunettes, regarde une femme en uniforme debout (en bordure droite de la photo).

RE-1941-1, Service des comptes de paie, revue Crosswinds, 25 septembre 1944 (MIKAN 4740938).

Le centenaire est l’occasion idéale de faire connaître les résultats du travail effectué sur la sous-série de photographies de l’ARC, et de mettre en évidence le rôle joué par les femmes qui ont joint ses rangs pendant la période visée. Les 53 sous-sous-séries se distinguent généralement les unes des autres par le lieu. Les photos sont très variées : on y trouve par exemple des vues aériennes du Canada; des portraits officiels; ou des photos de la vie sur des bases établies en Europe après la guerre, comme à North Luffenham ou à Grostenquin. Toutefois, plusieurs s’intéresseront surtout aux images de cette sous-série qui documentent les activités courantes et la vie quotidienne des militaires pendant la Deuxième Guerre mondiale, tant au pays qu’à l’étranger.

Quatre femmes en uniforme, debout ou agenouillées près d’un sapin de Noël posé sur une table. Des cadeaux emballés se trouvent sur le plancher et au pied de l’arbre.

NA-A162, Sapin et danse de Noël à la Division féminine, 25 décembre 1943 (MIKAN 4532479).

Avec plus de 160 000 images, cette sous-série est un véritable trésor! Environ 1 900 d’entre elles (1 %) montrent des membres de la Division féminine ou des infirmières militaires de l’ARC. Les femmes sont surtout représentées sur les photos prises à Ottawa, à Rockcliffe ou au quartier général, ainsi que sur des bases régionales comme celles à Terre-Neuve, à l’Île-du-Prince-Édouard et en Colombie-Britannique.

La collection nous montre les membres de la Division féminine en train de travailler ou de s’amuser. On les voit célébrer des fêtes en groupe ou partager des moments de plaisir, oubliant pendant quelques instants les horreurs de la guerre en cours. Il y a des images où l’ambiance semble décontractée (voir les photos NA-A162 ci-dessus et SS-230B ci-après), et d’autres qui témoignent des importants travaux accomplis (image PBG-3143, plus haut). Les photos de groupe officielles sont monnaie courante, comme en témoigne l’image ci-dessous (G-1448) montrant des infirmières militaires. Pour de nombreuses bases en milieu éloigné ou rural, surtout pendant les premières années de la guerre, les seules femmes présentes sur les photos sont des infirmières militaires.

Photo officielle d’un groupe de 41 militaires comprenant 12 femmes, dont cinq portent le voile blanc distinctif des infirmières militaires. Le groupe est divisé en trois rangées; les personnes à l’avant sont assises.

G-1448, Personnel hospitalier à l’École d’artillerie aéronavale no 1, Royal Navy, Yarmouth (Nouvelle-Écosse), 5 janvier 1945 (a052262).

Groupe de 15 femmes, la plupart habillées en civil, profitant d’un moment de loisir dans ce qui ressemble à un salon. Bon nombre d’entre elles semblent faire de la broderie.

SS-230B, Cercle de couture de la Division féminine, officières du renseignement, 4 avril 1943 (MIKAN 5285070).

Vous avez une tante ou une grand-mère qui a servi dans la Division féminine de l’ARC et vous cherchez de l’information sur son service militaire? Pour en savoir plus, consultez les nombreuses ressources de BAC sur la Deuxième Guerre mondiale. Vous y apprendrez entre autres comment avoir accès à des dossiers de service militaire. Les dossiers de service des victimes de guerre, 1939 à 1947 – Deuxième Guerre mondiale peuvent être consultés à l’aide de notre base de données en ligne.

BAC met bien d’autres collections photographiques à votre disposition, par exemple la sous-sous-série PL prefix – Public Liaison Office (Bureau des relations publiques). Cette fabuleuse ressource regorge de photos de l’ARC et se trouve, du point de vue du classement archivistique, juste à côté de l’acquisition 1967-052, qui fait l’objet de notre projet de recherche. Toute personne souhaitant trouver un proche ayant servi dans l’ARC devrait inclure ces photos dans sa recherche.

Vous trouverez aussi de l’information sur le centenaire de l’Aviation royale canadienne sur le site officiel de l’ARC.


Rebecca Murray est conseillère en programmes littéraires au sein de la Direction des programmes à Bibliothèque et Archives Canada.

La vie du soldat Marcel Gauthier (partie 2)

English version

Par Ariane Gauthier

J’ai appris l’existence de Marcel Gauthier il y a quelques années, alors que je visitais le cimetière militaire canadien de Bény-sur-Mer, en France. Bien que nous ayons le même nom de famille, Marcel n’est pas mon ancêtre. J’ai cependant toujours conservé le souvenir de ce jeune homme – l’unique Gauthier reposant dans ce grand cimetière. Avec le lancement du recensement de 1931, j’ai enfin eu l’occasion d’en apprendre plus sur lui. Je souhaite maintenant vous faire découvrir comment les multiples ressources de Bibliothèque et Archives Canada (BAC) permettent de reconstituer la vie d’une personne, par exemple un ancêtre ou encore un soldat.

Cette deuxième partie du blogue traitera de la vie de Marcel Gauthier, de son enrôlement militaire jusqu’à sa mort.

Photo noir et blanc d’un jeune homme vêtu de son uniforme militaire.

Photo du soldat Marcel Gauthier alors âgé de 21 ans, publiée dans un journal d’Ottawa pour annoncer son décès outremer (Mémorial virtuel de guerre du Canada).

Le soldat Marcel Gauthier (Joseph Jean Marcel Gauthier)

  • C/102428
  • Le Régiment de la Chaudière, R.C.I.C.
  • Date de naissance : 18 novembre 1922
  • Date de décès : 15 juillet 1944
  • Âge au moment du décès : 21 ans

Son dossier militaire est disponible à BAC sur la base de données des Dossiers de service des victimes de guerre, 1939 à 1947.

Peu de temps après s’être enrôlé, le 29 janvier 1943, Marcel quitte Ottawa pour commencer son entraînement à Cornwall, sans se douter qu’il ne reverra jamais sa ville natale.

Malgré les convictions qui l’ont poussé à s’engager dans l’armée, Marcel n’est pas un soldat modèle. À Cornwall, il quitte son lieu d’affectation, l’hôpital du camp, sans permission officielle. Son absence de sept jours fait qu’on lui impose des mesures disciplinaires sous forme de sanctions pécuniaires, soit la perte de trois jours de salaire, pour avoir été AWOL (absent without official leave ou « absent sans permission officielle »). Le reste de son entraînement se déroule sans autre incident. Le 1er avril 1943, Marcel est transféré à la base de Valcartier, où il intègre l’unité d’infanterie des Voltigeurs de Québec. Le 11 juillet 1943, Marcel embarque sur un bateau à destination de l’Angleterre, où il va s’entraîner aux côtés de 14 000 autres soldats canadiens en prévision du débarquement de Normandie. Le 3 septembre 1943, il est transféré au Régiment de la Chaudière avec lequel il prendra d’assaut Juno Beach, en ce jour fatidique du 6 juin 1944.

L’entraînement en prévision du débarquement de Normandie est très bien documenté, grâce surtout aux journaux de guerre. Ces documents produits par chacun des régiments de l’armée canadienne permettent de suivre leurs faits et gestes. Par exemple, le journal de guerre du Régiment de la Chaudière nous apprend que peu de temps après l’affectation de Marcel, soit le 4 septembre 1943, l’ordre a été donné de se déplacer au camp Shira, en Écosse, pour effectuer des exercices en vue du débarquement. En ce même mois, le journal de guerre décrit l’entraînement et le progrès des quatre différentes compagnies du Régiment, les Cies A, B, C et D, pour atteindre leurs cibles, ainsi que les incidents survenus en chemin.

Le journal du Régiment de la Chaudière inclut également les ordres régimentaires, assez précis pour tracer le parcours de Marcel au moment du débarquement et pendant la bataille de Normandie, puisqu’on y donne sa compagnie et ses déplacements. Selon les ordres régimentaires de septembre 1943, Marcel a été affecté à la Cie D. Le jour J, Marcel va donc rester sur la barge d’assaut jusqu’à ce que les Cies A et B atteignent leurs objectifs dans le secteur Nan White, avant de débarquer sur la plage en renfort. À cet effet, le journal donne le syllabus d’entraînement et décrit les exercices effectués en prévision du débarquement.

Le 6 juin 1944, Marcel embarque avec la Cie D sur le vaisseau Clan Lamont qui s’apprête à faire la traversée de la Manche. Le dernier déjeuner est pris à 4 h 30 et ensuite, dès 6 h 20, tous sont à bord de du vaisseau qui se lance sur les flots houleux en direction de Bernières-sur-Mer. Plusieurs sont malades, un mélange d’angoisse et de mal de mer. À 8 h 30, le Régiment de la Chaudière débarque pour se joindre au combat dans lequel est déjà engagé le régiment des Queen’s Own Rifles. Mais une tempête, la veille au soir, qui a déréglé les courants de marée, combinée à la résistance farouche des Allemands, a retardé l’arrivée et la progression des Queen’s Own Rifles. Alors qu’ils auraient dû avoir déjà pris Bernières-sur-Mer avant l’arrivée du Régiment de la Chaudière, ils sont coincés sur la plage sous le feu de l’artillerie ennemie, incapables d’avancer.

Plan rapproché d’une carte de Juno Beach, divisée en secteurs.

Détail d’une carte des environs de Juno Beach (e011297133). Le Régiment de la Chaudière est débarqué dans le secteur Nan White, à la hauteur de Bernières-sur-Mer.

Finalement, la défense allemande cède sous la pression, permettant ainsi à l’armée canadienne de pénétrer Bernières-sur-Mer et de sécuriser les environs. À la fin de la journée, les compagnies du Régiment de la Chaudière se regroupent à Colomby-sur-Thaon. Elles contribuent ainsi à l’établissement d’une tête de pont pour les Alliés en France. C’est une importante victoire, mais elle ne marque que le début de la bataille de Normandie qui durera plus de deux mois encore et fauchera beaucoup d’autres vies.

Les avancées se poursuivent tout au long du mois de juin. Le Régiment de la Chaudière se rapproche peu à peu de la ville de Caen, en vue de sa prise. Cependant, il reste un objectif vital à conquérir : Carpiquet. Ce village muni d’un aérodrome a été fortifié par les Allemands qui en dépendent largement pour résister aux Alliés. Prendre Carpiquet et son aérodrome correspondrait à démanteler le point stratégique de la force aérienne des Allemands à proximité des Alliés. Cela ouvrirait aussi les portes pour la conquête de Caen.

L’offensive sur Carpiquet commence le 4 juillet à 5 h. Les Cies B et D font partie du premier groupe d’assaut des Alliés, avançant sous le couvert d’un énorme barrage fourni par 428 canons et les canons de 16 pouces des cuirassés HMS Rodney et HMS Roberts de la Royal Navy. En revanche, la défense ennemie est féroce. Les Allemands sont mieux placés et mieux organisés; ils ont même eu le temps de fortifier leurs positions avec des murs de béton d’au moins six pieds d’épaisseur. Ce matin-là, ils font pleuvoir un véritable déluge d’obus d’artillerie et de bombes de mortier. Cette première journée fait beaucoup de morts et de blessés au sein du Régiment de la Chaudière.

Des soldats canadiens assistent à un breffage dans l’aérodrome de Carpiquet.

Breffage de fantassins canadiens près d’un hangar à l’aérodrome de Carpiquet, en France, le 12 juillet 1944 (a162525). Cette photo prise après la conquête de ce point vital révèle les ravages de ce combat sanglant.

Le 8 juillet 1944, Marcel Gauthier est atteint par les éclats d’un obus. L’explosion le laisse gravement blessé à la tête, et son régiment le mène rapidement au poste de secours du Corps médical de l’armée canadienne le plus près. On le confie à la 22e Ambulance de campagne canadienne, on l’envoie ensuite au poste d’évacuation sanitaire no 34, et il est finalement admis au 81e Hôpital général britannique. Malgré les efforts du personnel, Marcel succombe à ses blessures le 15 juillet 1944. Pour ses services rendus, une médaille lui sera attribuée à titre posthume : l’Étoile France-Allemagne.

Des soldats embarquent un soldat blessé sur une civière dans une ambulance militaire.

Un soldat du Régiment de la Chaudière blessé le 8 juillet 1944 lors de la bataille de Carpiquet est pris en charge par la 14e Ambulance de campagne du Corps médical de l’armée canadienne (a162740). Il ne s’agit pas de Marcel Gauthier, mais d’un de ses confrères.

Marcel Gauthier repose dans le lot IX.A.11 du cimetière militaire canadien de Bény-sur-Mer. Sur sa pierre tombale on peut lire l’inscription soumise par son père Henri : « Notre cher Marcel si loin de nous à toi on pense toujours repose en paix », là où son nom restera vivant pour toutes les générations.

Autres ressources


Ariane Gauthier est archiviste de référence au sein de la Direction générale des Accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

La vie du soldat Marcel Gauthier (partie 1)

English version

Par Ariane Gauthier

J’ai appris l’existence de Marcel Gauthier il y a quelques années, alors que je visitais le cimetière militaire canadien de Bény-sur-Mer, en France. Bien que nous ayons le même nom de famille, Marcel n’est pas mon ancêtre. J’ai cependant toujours conservé le souvenir de ce jeune homme – l’unique Gauthier reposant dans ce grand cimetière. Avec le lancement du recensement de 1931, j’ai enfin eu l’occasion d’en apprendre plus sur lui. Je souhaite maintenant vous faire découvrir comment les multiples ressources de Bibliothèque et Archives Canada (BAC) permettent de reconstituer la vie d’une personne, par exemple un ancêtre ou encore un soldat!

Cette première partie du blogue traitera de la vie de Marcel Gauthier, de son enfance à son enrôlement militaire.

Photo noir et blanc d’un jeune homme vêtu de son uniforme militaire.

Photo du soldat Marcel Gauthier alors âgé de 21 ans, publiée dans un journal d’Ottawa pour annoncer son décès outremer (Mémorial virtuel de guerre du Canada).

Le soldat Marcel Gauthier (Joseph Jean Marcel Gauthier)

  • C/102428
  • Le Régiment de la Chaudière, R.C.I.C.
  • Date de naissance : 18 novembre 1922
  • Date de décès : 15 juillet 1944
  • Âge au moment du décès : 21 ans

Son dossier militaire est disponible à BAC dans la base de données des Dossiers de service des victimes de guerre, 1939 à 1947.

Né le 18 novembre 1922 à Ottawa, en Ontario, Marcel Gauthier est le septième enfant d’une grande famille canadienne-française qui en compte neuf. En cherchant les Gauthier dans les recensements, on apprend qu’Henri, le père de famille, est originaire de Rigaud, au Québec. Lorsqu’il arrive à Ottawa, il s’établit dans la Basse-Ville avec sa famille. C’est donc là que Marcel bâtit sa vie avant de s’enrôler.

À cette époque, la Basse-Ville d’Ottawa attire de nombreux Franco-Ontariens. Le recensement de 1931 démontre justement que les maisons et logements du sous-district Quartier By – Quartier Saint Georges sont en grande partie habités par des Canadiens français. Certains d’entre eux sont nés en Ontario, d’autres sont venus du Québec. Plusieurs études historiques indiquent que la population de la Basse-Ville se compose alors principalement de francophones et que la présence d’Irlandais y est également significative. C’est l’une des raisons pour lesquelles ce lieu a été le théâtre de beaucoup d’enjeux linguistiques dans l’histoire des Franco-Ontariens, notamment sur la question du règlement 17, adopté en 1912.

Capture d’écran du recensement de 1931, avec une flèche indiquant où se trouve l’information de Marcel Gauthier.

Capture d’écran du recensement de 1931. On retrouve Marcel Gauthier à la 48e ligne du sous district Quartier By – Quartier Saint Georges, n° 74 (Basse-Ville), soit à la 7e page du document (article 8 de 13). Il est alors âgé de 9 ans (MIKAN 81022015).

La Basse-Ville d’Ottawa est alors considérée comme un quartier défavorisé avec une population majoritairement ouvrière. On présume donc que Marcel n’est pas né dans le luxe et l’opulence. Sa grande famille a vécu à l’étroit dans des appartements, d’abord au 199, rue Cumberland, avec au moins sept enfants (recensement de 1921), puis au 108, rue Clarence, avec neuf enfants (recensement de 1931).

L’absence de sa mère, Rose Blanche Gauthier (née Tassé), du recensement de 1931 indique qu’elle était probablement décédée à ce moment. Nous pouvons supposer, en nous référant à la 8e page du document (ou à l’article 9 de 13), qu’elle serait décédée entre 1928 et 1931. C’est l’inscription du petit dernier de la famille, Serge Gauthier, alors âgé de 3 ans, qui nous permet d’émettre cette hypothèse. Le dossier militaire de Marcel valide cette théorie et confirme le décès de Mme Gauthier en date du 6 octobre 1928, peut-être dû à des complications liées à la naissance de son dernier enfant. Elle repose aujourd’hui au cimetière Notre-Dame, à Carleton Place, en Ontario, où elle est née.

En 1931, le père de Marcel et huit de ses enfants habitent dans un appartement de neuf chambres au 108 ½, rue Clarence. N’eût été l’aide des plus vieux, le salaire de porteur de courrier d’Henri n’aurait pas été suffisant pour subvenir aux besoins de ses enfants et assumer leurs frais de scolarité. On suppose donc qu’Yvette (âgée de 24 ans et célibataire), la plus vieille de la maisonnée, s’occupait d’entretenir la maison et de veiller sur les plus jeunes. On sait aussi que Léopold (âgé de 22 ans) travaillait comme chauffeur et que Marie-Anne (âgée de 21 ans) était vendeuse. Il est fort probable qu’ils aidaient financièrement leur père, tout comme l’avait surement fait leur sœur aînée, Oraïda (âgée de 27), dix ans plus tôt. Celle-ci était maintenant déménagée et mariée à un monsieur Homier.

En 1931, Marcel est donc étudiant à son tour et sait lire, écrire et communiquer en anglais. À 16 ans, il a terminé son éducation. Il fait son entrée sur le marché du travail comme cuisinier, puis déménage seul au 428, rue Rideau.

Photo d’un bâtiment à deux étages. Le restaurant Bowles Lunch est situé au rez-de-chaussée.

Restaurant Bowles Lunch où Marcel Gauthier a travaillé avant de s’enrôler dans l’armée en 1943 (a042942).

En Europe, les tensions avec l’Allemagne d’Hitler s’accentuent et aboutissent au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, en 1939. Contrairement à beaucoup de jeunes hommes, Marcel ne ressent pas immédiatement le besoin de se joindre au conflit, probablement parce qu’il est satisfait de son emploi comme cuisinier chez Bowles Lunch. Il attend jusqu’au 11 janvier 1943 avant de se présenter au bureau d’enrôlement n° 3, à Ottawa. On peut penser qu’il voulait aider à changer le cours de la guerre ou suivre l’exemple de deux de ses frères, Conrad et Georges Étienne.

Peu de temps après, le 29 janvier 1943, il quitte Ottawa pour commencer son entraînement à Cornwall, sans se douter qu’il quittait sa ville natale pour toujours.

Autres ressources


Ariane Gauthier est archiviste de référence au sein de la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Sergent Robert Spall, VC

Dans sa série de blogues sur les récipiendaires de la Croix de Victoria canadienne, Bibliothèque et Archives Canada présente un portrait de valeureux soldats à l’occasion du 100e anniversaire du jour où ils ont accompli les actes de bravoure pour lesquels ils ont reçu cette distinction. Aujourd’hui, nous nous souvenons du sergent Robert Spall, qui a fait preuve les 12 et 13 août 1918 d’un courage et d’une abnégation de soi dignes de la Croix de Victoria.

Une photographie en noir et blanc d’un soldat.

Le sergent Robert Spall, VC, sans date. Source : Wikimedia

Né à Ealing, dans l’Essex, en Angleterre, le 5 mars 1890, Spall immigre au Canada avec ses parents, qui s’installent à Winnipeg, au Manitoba. Avant la guerre, il est courtier en douanes et membre de la milice active. Le 28 juillet 1915, Spall s’enrôle à Winnipeg dans le 90e bataillon du Corps expéditionnaire canadien (CEC). Il débarque en France avec les Winnipeg Rifles le 13 février 1916 à l’âge de 26 ans. Plus tard, le 90e bataillon sera intégré au 11e bataillon de réserve pour prêter main-forte au CEC. Éventuellement, Spall aboutira avec le Princess Patricia’s Canadian Light Infantry (PPCLI).

Le 12 août 1918, une pluie d’obus allemands s’abat sur le PPCLI ainsi que sur les 116e et 42e bataillons canadiens, les obligeant à se terrer dans leurs tranchées respectives. L’objectif leur est transmis à midi : conjointement avec le 42e bataillon, le PPCLI devra repousser les Allemands de Parvillers à partir du sud. Le plan consiste à avancer jusqu’aux positions tenues par le 9e bataillon canadien d’infanterie au sud de Parvillers et à s’en servir comme point de départ, tout en bombardant les tranchées sur l’ancienne ligne de front allemande et les tranchées menant à Parvillers.

Cependant, lorsque la compagnie arrive aux positions qui lui ont été assignées, elle découvre que le 9e bataillon d’infanterie ne les contrôle pas, et qu’elles sont toujours aux mains des Allemands. En dépit de ce contretemps, l’attaque est lancée. À 20 h, les Canadiens ont fait peu de progrès après avoir rencontré une forte résistance. Mais les pertes s’alourdissent chez les Allemands à mesure que la compagnie gagne du terrain, avec une section de bombardiers s’avançant dans la tranchée allemande.

Une page d’un document textuel avec, à gauche, des trous de poinçon déchirés.

Journal de guerre du PPCLI décrivant l’attaque durant laquelle Spall tira sur des soldats allemands qui chargeaient, en août 1918, page 18 (en anglais seulement) (MIKAN 2005881)

À 6 h, le 13 août 1918, les Allemands contre-attaquent en force à partir de Parvillers et Damery; surgissant des bois en formation serrée, ils avancent à découvert. Cette soudaine et vigoureuse offensive force la compagnie à battre en retrait en direction de l’ancienne ligne de front allemande. Dans le chaos qui s’ensuit, deux pelotons sont séparés de la compagnie.

Spall participe vraisemblablement à cet assaut et contribue à dégager son peloton de sa fâcheuse position. Isolé avec son peloton du reste de la compagnie, Spall grimpe sur le parapet armé d’un fusil-mitrailleur Lewis et tire sur les soldats allemands qui s’approchent. De retour dans la tranchée, il entraîne ses hommes vers une sape à 75 verges seulement de l’ennemi. Il grimpe de nouveau sur le parapet et continue son assaut. C’est à ce moment-là qu’il est tué. Sa bravoure et son dévouement exceptionnels ont permis à ses hommes de rejoindre les autres, et son habileté à manier le fusil-mitrailleur Lewis a entraîné de lourdes pertes chez les Allemands.

Un document beige avec des cases séparées par des lignes, marqué d’une coche rouge et estampillé « Vimy Memorial » en violet.

Inscription du sergent Robert Spall dans les Registres de sépultures de guerre du Commonwealth, vol. 31830_B034454, page 845, 22 août 1918.

Sa citation se lit comme suit :

[…] dans le cadre d’une contre-attaque ennemie, lorsque son peloton se retrouve isolé. Le Sgt Spall s’empare d’une mitrailleuse Lewis et, debout sur le parapet, il fait feu sur l’ennemi qui progresse, lui infligeant de lourdes pertes. Il descend ensuite dans la tranchée et dirige ses hommes vers une sape à 75 verges de l’ennemi. S’emparant d’une autre mitrailleuse Lewis, ce brave sous-officier monte de nouveau sur le parapet et réussit, grâce à ses tirs, à contenir l’adversaire. C’est en accomplissant ce geste qu’il est tué.

Le Sgt Spall a délibérément fait le sacrifice de sa vie pour sortir son peloton d’une situation très difficile et c’est grâce à sa bravoure que ses hommes ont été sauvés. [traduction du ministère de la Défense et des Forces canadiennes]

London Gazette, numéro 30975, 25 octobre 1918 (en anglais seulement)

Le corps du sergent Spall n’a jamais été retrouvé. Son nom est inscrit sur le Mémorial national du Canada à Vimy ainsi que sur un monument commémoratif du Parc du patrimoine militaire de Barrie, en Ontario.

Bibliothèque et Archives Canada possède le dossier de service numérisé du sergent Robert Spall.

George Burdon McKean, VC

Par John Morden

Aujourd’hui, dans la série des récipiendaires canadiens de la Croix de Victoria, du blogue de Bibliothèque et Archives Canada, nous nous souvenons de George Burdon McKean, qui a mérité la Croix de Victoria il y a de cela cent ans aujourd’hui pour l’héroïsme dont il a fait preuve sur le champ de bataille.

Photographie en noir et blanc d’un officier souriant.

Lieutenant George Burdon McKean, VC, juin 1918 (MIKAN 3218939)

Né le 4 juillet 1888 à Willington, en Angleterre, McKean a immigré au Canada en 1909, s’établissant à Edmonton, en Alberta. Avant de s’enrôler, le 23 janvier 1915, McKean était enseignant. Il se joindra au 51e Bataillon du Corps expéditionnaire canadien et arrivera en Angleterre en avril 1916. Le 8 juin 1916, McKean est transféré au 14e Bataillon.

C’est dans la nuit du 27 au 28 avril 1918, alors que le 14e Bataillon était stationné près de Gavrelle, en France, que McKean mérite la Croix de Victoria, la plus prestigieuse décoration militaire de Grande-Bretagne. Au cours d’une mission de reconnaissance, le groupe d’hommes dirigé par McKean se heurte à une position allemande vigoureusement défendue. Alors que le reste du détachement est coincé sous le feu des mitrailleuses, McKean s’élance dans la tranchée allemande avec « un courage remarquable et un grand dévouement ». McKean y tue deux soldats allemands, tient bon et demande de nouvelles munitions. Une fois réapprovisionné, McKean s’empare d’une autre position et tue à lui seul deux autres soldats allemands et en capture quatre autres. Inspirés par l’exemple de McKean, ses hommes le rejoignent et la mission réussit. Comme le rapporte la London Gazette deux mois plus tard :

« La grande bravoure et l’audace de cet officier ont sans aucun doute sauvé de nombreuses vies, car n’eût été de la prise de cette position, ce sont tous les attaquants qui auraient été exposés aux dangereux tirs d’enfilade lors du repli. Le leadership dont il a toujours fait preuve est au‑dessus de tout éloge. » [Traduction]

London Gazette, no 30770, 28 juin 1918 (en anglais)

McKean recevra ensuite la Médaille militaire, le 28 mars 1917, et la Croix militaire, le 1er février 1919. Il survivra à la guerre, non sans avoir été blessé à la jambe droite le 2 septembre 1918 pendant l’offensive des Cent-Jours. Il restera en Angleterre jusqu’à la fin du conflit. Après avoir obtenu son congé de l’hôpital, McKean devient capitaine intérimaire à la Khaki University of Canada à Londres, en Angleterre, et le demeure jusqu’à sa retraite, le 19 juillet 1919.

Il choisit de rester en Angleterre après avoir quitté l’armée et perd la vie dans un accident de travail le 28 novembre 1926. Le dernier lieu de repos de McKean est le cimetière Brighton Extra-Mural de Sussex, en Angleterre.

Aujourd’hui, sa Croix de Victoria est conservée au Musée canadien de la guerre à Ottawa. Une montagne a été nommée en son honneur dans la cordillère Victoria Cross des Rocheuses canadiennes.

Photographie en noir et blanc d’un soldat, en uniforme d’officier avec des gants et une canne, debout devant des escaliers et une fenêtre.

Lieutenant George Burdon McKean, VC, sans date (MIKAN 3218943)

Photographie en noir et blanc d’un groupe de soldats debout et assis devant des arbres en hiver.

Officiers du 14e Bataillon, France, février 1918 (MIKAN 3406029)

Bibliothèque et Archives Canada possède le dossier de service du lieutenant George Burdon McKean.


John Morden est un étudiant émérite en histoire de l’Université Carleton faisant un stage au sein de la Division des expositions et du contenu en ligne de Bibliothèque et Archives Canada.