Par Katie Cholette
La bataille de la crête de Vimy a frappé l’imagination de nombreux artistes, tant professionnels qu’amateurs. Certains de ces artistes étaient des soldats et participèrent à la bataille. D’autres, qui n’étaient pas présents sur les lieux, ont peint les champs de bataille après l’événement ou les ont imaginés. Des artistes canadiens et d’origine britannique, masculins et féminins, ont représenté dans un large éventail de styles et de médias, de nombreuses facettes de la bataille : l’héroïsme des soldats, le nombre incroyable de morts et de blessés, la destruction massive des bâtiments et la dévastation des paysages.

Un cratère de mine – Un cimetière dans le vieux « no man’s land » sur la crête de Vimy, 1917, une lithographie de Frederick Thwaites Bush (Bibliothèque et Archives Canada – MIKAN 4014020)
Le soldat canadien Frederick Thwaites Bush, natif de Grande-Bretagne, a créé quelques-unes des images les plus évocatrices de la bataille. Architecte de formation avant la guerre, Bush servit comme lieutenant dans le 29e bataillon et avec les ingénieurs canadiens. Alors qu’il était en Belgique et en France, il dessina plusieurs des sites de combat, notamment Ypres, Passchendaele et la crête de Vimy. Réalisée à partir d’un dessin au crayon esquissé sur les lieux, cette lithographie couleur d’un cratère de mine et cimetière placé au milieu d’un paysage dévasté dégage une impression de désolation et de perte.

La ferme Berthonval par le lieutenant C. H. Barraud, vers 1917-1918 (Bibliothèque et Archives Canada – MIKAN 4936627)
Le lieutenant Cyril Henry Barraud travaillait comme artiste et graphiste avant la Première Guerre mondiale. Né en Angleterre, Barraud émigra au Canada en 1913. Quand la guerre éclata, il s’enrôla dans les Grenadiers de Winnipeg. Il fut envoyé outremer en août 1915 avec le 43e bataillon, et en novembre 1917, il fut engagé officiellement comme artiste de guerre. Alors qu’il était en France et en Belgique, Barraud réalisa des dessins sur la ligne de front. À partir de ces dessins, il exécuta plus tard de nombreuses gravures pour le Fond de souvenirs de guerre canadiens. Des images telles que La ferme de Berthonval sont représentatives de son style, caractérisé par une composition soignée, associant des bâtiments détruits par la guerre à des paysages romantiques. Cette œuvre d’art a été présentée à Londres en 1919, lors de la Canadian War Memorials Exhibition.

Position allemande détruite durant la bataille de Vimy, 1917 par Reuben Alvin Jukes, 1917 (Bibliothèque et Archives Canada – MIKAN 3838519)
Reuben Alvin Jukes (Jucksch) est né à Hanover, en Ontario. Il s’enrôla dans le 20e bataillon canadien en 1914, indiquant comme profession qu’il était artiste. Il fut transporté en Angleterre pour s’y entraîner et envoyé au front en janvier 1916. Même s’il n’était pas officiellement artiste de guerre, un commandant compréhensif lui accorda du temps pour peindre des scènes alors qu’il était au front. En raison d’un épisode de ce qu’on appelait alors un traumatisme dû aux bombardements, Jukes n’a pu participer à la bataille de la crête de Vimy; cependant, il reprit du service en mai 1917. Plus tard, il peignit plusieurs aquarelles extrêmement détaillées, presque surréalistes, telles que Position allemande détruite durant la bataille de Vimy, 1917, représentant les lendemains de la bataille.

Emplacements de canons, bois de Farbus, crête de Vimy par Mary Riter Hamilton, 1919 (Bibliothèque et Archives Canada – MIKAN 2836031)
Certaines des peintures les plus expressives de la crête de Vimy ont été réalisées par Mary Riter Hamilton, une artiste professionnelle née au Canada. Bien qu’elle n’ait pas réussi à se faire engager officiellement comme artiste de guerre, l’Association des amputés de guerre de Colombie-Britannique lui a commandé des illustrations pour le magazine The Gold Stripe, destiné aux vétérans. Mary Riter Hamilton avait hâte de peindre les sites où tant d’hommes étaient morts, avant que ne soient entrepris les travaux de reconstruction. Elle se rendit donc en Europe peu après la fin de la guerre pour y peindre. De 1919 à 1922, elle réalisa plus de 300 tableaux, notamment Emplacements de canons, bois de Farbus, crête de Vimy et Petit Vimy et le village de Vimy vus de la route entre Lens et Arras. Dans ces deux œuvres, le style spontané et léger de l’artiste, et une palette de couleurs claires témoignent d’un certain optimisme malgré les circonstances. Hamilton refusa de vendre ses peintures de guerre. Elle les exposa plusieurs fois lors d’activités de financement organisées pour venir en aide aux hommes qui ont combattu, et à leurs familles. En 1926, elle offrit 227 peintures, dessins et gravures aux Archives publiques du Canada (maintenant Bibliothèque et Archives Canada).

Petit Vimy et le village de Vimy vus de la route entre Lens et Arras par Mary Riter Hamilton, 1919 (Bibliothèque et Archives Canada – MIKAN 2836011)

Cede Nullis, les grenadiers du 8e bataillon d’infanterie du Canada sur la crête de Vimy, 9 avril 1917 par Lady Elizabeth Southerden Butler, 1918 (Bibliothèque Archives Canada – MIKAN 2883480)
La bataille de la crête de Vimy a capté l’imagination d’une autre artiste professionnelle, Lady Elizabeth Southerden Butler. Lady Butler (née Elizabeth Thompson) était une artiste anglaise diplômée en art, spécialiste de la peinture réaliste des champs de bataille. À la fin du 19e siècle, elle jouit d’une grande popularité grâce à ses représentations romantiques et héroïques de la guerre de Crimée et des guerres napoléoniennes. Semblable à ses œuvres antérieures, au point de vue du style, Les grenadiers du 8e bataillon d’infanterie du Canada sur la crête de Vimy, 9 avril 1917 représente le 8e bataillon de la 3e division d’infanterie du Canada le jour où les Canadiens se sont emparés de la crête. L’aquarelle a été peinte alors que l’artiste vivait en Irlande; elle fut exposée en mai 1919 à Londres. L’œuvre fut achetée lors d’une vente aux enchères en 1989.
La victoire à la bataille de la crête de Vimy est l’un des événements les plus marquants de l’histoire canadienne. Immortalisés par des œuvres d’art, le courage des soldats et les sacrifices consentis lors de cette bataille font partie intégrante de notre mythologie nationale.
Biographie
Katie Cholette détient un baccalauréat en histoire de l’art, une maîtrise en histoire de l’art canadien et un doctorat en études canadiennes. Elle a travaillé auparavant comme conservatrice des acquisitions et chercheuse au Musée du portrait du Canada; elle a obtenu deux bourses de recherche en art canadien au Musée des beaux-arts du Canada et enseigne en histoire de l’art, en études canadiennes et en lettres et sciences humaines depuis 14 ans à l’Université Carleton. Elle a aussi réalisé plusieurs projets de conservation et de recherche en tant que travailleuse autonome, et elle siège au comité de rédaction de la revue Underhill Review.
Ce blogue a été créé dans le cadre d’une entente de collaboration entre The National Archives et Bibliothèque et Archives Canada.