Martha Louise Black : Première dame du Yukon

Par Katie Cholette

Photographie en noir et blanc signée, doublée d’un passe-partout et arborant une femme qui sourit, datée de 1932.

Martha Louise Black, 1932. Photographe : Pierre Brunet (e011154526)

Cachée derrière les millions d’objets dans la collection de Bibliothèque et Archives Canada se trouve une série de 10 cartes postales arborant des fleurs. De taille plutôt sobre et portant sur un sujet modeste, ces cartes ont été réalisées par une femme exceptionnelle et aventureuse se nommant Martha Louise Black (née Munger). Surnommée « première dame du Yukon » et deuxième femme élue comme députée à la Chambre des communes du Canada, Martha Black était une femme d’affaires astucieuse, une experte des fleurs sauvages du Yukon et de la Colombie-Britannique, une auteure et une conférencière, et récipiendaire de plusieurs marques de distinction. Nous célébrons, le 24 février 2016, son 150anniversaire de naissance.

Reproduction en couleur d’une plante avec quatre fleurs pourpres et une fleur montée en graines. Dans le bas, au centre, se trouvent les initiales « MLB » et « GB ». L’œuvre est datée de 1955.

« Pasque Flower » (fleur de pâques) par Martha Louise Black. Impression par procédés photomécaniques, 1955. (e011154530)

Quand Martha est venue au monde à Chicago, en Illinois, personne n’aurait pu prédire qu’elle allait mener une vie aussi palpitante. En 1898, à l’âge de 23 ans, elle laisse derrière elle, à Chicago, le confort d’un foyer (et un premier mari) pour répondre à l’appel de la ruée vers l’or du Yukon. Financés par des membres de la famille, Martha et son frère George franchissent le col Chilkoot en direction de la rivière Yukon. Ils poursuivent leur route jusqu’au Klondike où elle aborne des concessions minières en quête d’or. La première fois, elle demeurera au Yukon un peu plus d’un an, mais Martha est fascinée par le Nord. Quand elle y retourne en 1901, elle jalonnera encore plus de concessions, fondera et exploitera avec succès un moulin à scie et prendra un deuxième mari, George Black. Elle passera presque tout le reste de sa vie au Yukon.

Reproduction en couleur d’une plante avec trois fleurs jaunes et de larges tiges foliacées. Arbore les initiales « MB » et est datée de 1930.

« Cyprepedium, Large Yellow Lady Slipper » (cypridide, gros sabot de Notre-Dame jaune) par Martha Louise Black. Impression par procédés photomécaniques, 1955 (e011154531)

Martha et George s’établissent au Yukon, où elle a élevé trois fils issus de son premier mariage. Avocat de profession, George est devenu le septième commissaire du Yukon en 1912. Ensemble, la famille Black a joué un rôle déterminant dans la ville de Dawson, puis de Whitehorse.

Reproduction en couleur d’une plante avec de petites fleurs pourpres et de larges feuilles à lobes profondes. Elle arbore les initiales « MB » et est datée de 1930.

« Crane’s Bill – Wild Geranium » (géranium de Bicknell – géranium sauvage) par Martha Louise Black. Impression par procédés photomécaniques (e011154532)

L’intérêt que portera Martha toute sa vie pour la botanique s’épanouit dans le Nord. En 1909, elle commence à collectionner les fleurs sauvages et à les faire sécher à plat, peignant à l’aquarelle l’arrière-plan — une pratique qu’elle appelle la « botanique artistique ». Ses travaux font l’objet d’éloges et, au cours des deux étés qui suivent, elle est mandatée pour recueillir des fleurs sauvages dans les montagnes Rocheuses et d’en faire un montage en vue d’une exposition dans les gares et les hôtels du Canadien Pacifique Limitée. Une série de ses œuvres est publiée sous la forme de cartes postales, tandis qu’elle est nommée « fellow » par la Royal Geographical Society.

Reproduction en couleur d’une plante aux longues tiges lignifiées, portant des groupes serrés de minuscules fleurs roses et de petites feuilles. L’impression arbore les initiales « MB » et est datée de 1920.

« Heather » (bruyère commune) par Martha Louise Black. Impression par procédés photomécaniques (e011154538)

En 1935, à l’âge de 69 ans, Martha est élue à la Chambre des communes. Elle agira en tant que députée du Yukon jusqu’en 1940. En 1948, on lui décerne l’Ordre de l’Empire britannique pour l’aide qu’elle apporte aux militaires du Yukon. Martha meurt à Whitehorse le 31 octobre 1957 à l’âge de 91 ans.

Pour en apprendre davantage sur sa vie et son œuvre :

L’affaire « personne » (1929)

L’affaire « personne » marque un tournant dans la lutte des femmes pour obtenir l’égalité politique au Canada. Elle a joué un rôle clé à deux égards : d’abord en établissant que la Constitution canadienne pouvait être interprétée en tenant compte des besoins changeants de la société, puis en déterminant que les femmes comptaient parmi les « personnes ayant les qualités requises » selon l’Acte de l’Amérique du Nord britannique de 1867 (devenu la Loi constitutionnelle de 1867). Ces étapes ont ouvert la voie aux femmes en leur reconnaissant le droit de jouer un rôle actif en politique.

La série d’événements ayant mené à l’affaire « personne » débute en 1916, avec la nomination d’Emily F. Murphy à titre de première juge municipale de l’Empire britannique. Défiant son autorité, des avocats contestent sa nomination, qu’ils jugent contraire à la loi : selon eux, les femmes n’étant pas considérées comme des personnes selon l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, elles sont inaptes à siéger en tant que magistrates. La cour provinciale de l’Alberta rejette cet argument et confirme la nomination de Mme Murphy, déclarant que les femmes sont bel et bien des personnes; toutefois, cette décision ne fait l’objet d’aucune proclamation fédérale.

Au cours des dix années suivantes, des groupes de femmes font pression sur le gouvernement fédéral pour qu’il admette les femmes au Sénat. On leur répond que c’est impossible, en invoquant une fois de plus l’Acte de l’Amérique du Nord britannique qui précise que seules les « personnes ayant les qualités requises » peuvent occuper une telle fonction.

Mme Murphy découvre toutefois qu’en vertu de l’article 60 de la Loi sur la Cour suprême, cinq personnes peuvent présenter une pétition au gouvernement en vue de légiférer sur une question constitutionnelle, à la condition qu’elles soient visées par cette question. Elle se tourne alors vers Henrietta Muir Edwards, Nellie Mooney McClung, Louise Crummy McKinney et Irene Marryat Parlby, connues pour leur engagement politique et social visant l’égalité des droits pour les femmes. Le groupe forme ce qu’on appelle aujourd’hui les « Célèbres cinq » (traduction littérale de l’anglais The Famous Five).

Photo en noir et blanc montrant cinq femmes debout aux côtés d’un homme.

(Devant, de g. à dr.) : Mme Muir Edwards, bru d’Henrietta Muir Edwards; Mme J. C. Kenwood, fille de la juge Emily Murphy; l’honorable Mackenzie King; Mme Nellie McClung. (Derrière, de g. à dr.) : les sénatrices Iva Campbell Fallis et Cairine Wilson. Cette photo souligne le dévoilement d’une plaque commémorant les efforts des cinq Albertaines à l’origine de l’affaire « personne », grâce à laquelle les femmes se sont vu accorder le droit d’occuper une charge publique au Canada. Elle a été prise par Eugene M. Finn, de l’Office national du film, le 11 juin 1938, à Ottawa (Ontario). (no MIKAN 3193154)

Lire la suite

Ai-je le droit de voter? Courrier des femmes envoyé au gouvernement canadien, 1918-1919

Les Canadiennes ont obtenu le droit de vote fédéral à la suite de trois vagues de législation. Tout a commencé par l’initiative du premier ministre Robert Borden qui fait adopter la Loi des électeurs militaires, 1917, un acte législatif permettant aux femmes en service actif de voter. La même année, Borden instaure la Loi des élections en temps de guerre, une mesure permettant aux femmes ayant un lien de parenté avec un soldat des forces militaires de voter. Finalement, le 24 mai 1918, une sanction royale a été accordée au projet de loi qui permet d’étendre le droit de vote aux femmes ayant les mêmes qualifications que les hommes pouvant voter. Ces mesures adoptées rapidement et successivement ont semé la confusion auprès du public.

La collection de Bibliothèque et Archives Canada (BAC) comprend plusieurs lettres, rédigées par des Canadiennes, qui témoignent de l’impact du vote et qui font part du questionnement qu’ont ces femmes à propos de leur propre admissibilité à déposer un bulletin de vote. En quête d’informations à la source, elles s’adressent directement par courrier au premier ministre Robert Borden et aux autres représentants gouvernementaux.

Dans une lettre datant de décembre 1919, Mme King of Colonsay (Saskatchewan) demande si elle est en droit de voter en tant que citoyenne canadienne mariée à un citoyen américain. Sa demande est envoyée au ministère de la Justice. Celui-ci, en fonction des informations personnelles qui lui sont fournies, lui confirme qu’elle devrait être en mesure de voter en tant que femme canadienne et joint une copie de la Loi. Le ministère de la Justice fait également remarquer qu’il n’a pas l’habitude de traiter ce genre de demande.

La confusion entre la Loi des élections fédérales et la Loi des élections en temps de guerre est évidente dans une lettre de Mme Lillian Dill (Oshawa, Ontario) datée du 17 février 1919. Dans sa lettre, Mme Dill demande un exemplaire de la Loi afin qu’elle puisse comprendre les répercussions et déterminer sa propre admissibilité à voter lors d’élections. Lire la suite

Laissez-les hurler : 100 ans de lutte pour les droits de la femme—Une exposition à Ottawa et à Winnipeg

L’année 2016 marque le 100e anniversaire de la première victoire des femmes pour leur droit de vote au Canada. Le 28 janvier, jour où le Manitoba devint la première province à adopter la loi permettant aux femmes de voter, Bibliothèque et Archives Canada (BAC), en collaboration avec le Musée canadien pour les droits de la personne, lancera officiellement une exposition en plein air intitulée : Laissez-les hurler : 100 ans de lutte pour les droits de la femme.

L’exposition présentera des reproductions de portraits de certaines femmes ayant lutté pour l’égalité et le droit de vote des Canadiennes. Ne manquez pas les expositions, du 28 janvier au 15 février 2016, sur la patinoire du canal Rideau, à Ottawa (présentées en collaboration avec le Bal de Neige) et du 12 au 21 février 2016, au Festival du Voyageur de Winnipeg.

L’exposition présente des reproductions de portraits issues de la collection de personnalités historiques de BAC, telles Nellie McClung et Agnes Macphail, et de femmes modernes ayant surmonté les barrières des sexes, telles Adrienne Clarkson et Beverley McLachlin.

Une photographie en noir et blanc d’Agnes Macphail, de profil, lisant le journal

Agnes Macphail par Yousuf Karsh, 1934 (MIKAN 3256551)

Lire la suite

Images sur le droit de vote des femmes maintenant sur Flickr 

Étape par étape, les femmes ont pu participer au suffrage, les provinces de l’Ouest ayant ouvert la voie. Toutefois, ce n’est qu’en 1960 que la majorité des femmes canadiennes ont obtenu le droit de vote. Le droit de vote est un des premiers et des plus importants droits accordés aux femmes au Canada.

Tempérance, réformes sociales et droit de vote des femmes

Au début du 19e siècle, beaucoup de gens voyaient l’industrialisation et l’urbanisation comme la source de tous les maux. Cette vision donna naissance au mouvement de tempérance, qui prônait la sobriété en raison des effets néfastes de l’alcool sur la société.

Des associations de tempérance virent le jour, militant pour l’abolition de la consommation d’alcool afin d’assurer l’harmonie des foyers. Dans leur lutte contre la pauvreté, le travail des enfants et les inégalités, elles appuyaient aussi plusieurs réformes sociales : éducation, services sociaux et droit de vote des femmes. Parmi ces associations figurait l’Union chrétienne des femmes pour la tempérance, qui avait compris l’importance d’influencer les politiques gouvernementales (et donc d’obtenir le droit de vote) pour être un moteur de changements sociaux.

Le mouvement de tempérance incita les femmes à prendre leur place dans la sphère publique et à s’engager dans les réformes politiques et sociales. Ce fut entre autres le cas de Nellie McClung, qui s’intéressa d’abord à la politique au sein de l’Union chrétienne des femmes pour la tempérance, et qui joua par la suite un rôle crucial dans l’obtention du droit de vote pour les femmes manitobaines, en 1916.

Photo en noir et blanc d’une femme assise, accoudée sur une table, la tête appuyée sur sa main droite, un livre dans sa main gauche. Elle regarde l’objectif.

Nellie McClung, par Jessop Cyril (MIKAN 3622978)

Lire la suite