Costumes : bals costumés et carnavals de patinage d’Ottawa (1876-1896)

Par : Emma Hamilton-Hobbs

Aimez-vous vous costumer après avoir passé des heures à choisir, à rechercher et à créer une tenue impressionnante pour une activité costumée unique? Eh bien, de nombreux Canadiens de la fin du dix-neuvième siècle adorent cela!

Les bals costumés sont des soirées costumées privées dont les organisateurs et les invités sont surtout des membres privilégiés de la société. Leur popularité ne cesse de croître au cours du dix-neuvième siècle. Les hommes et les femmes invités à ces soirées passent des semaines à choisir avec soin leur déguisement. Ils étudient de près des revues et des livres portant sur les costumes, jetant même un coup d’œil à des livres et à des peintures historiques pour y puiser leur inspiration. Parmi les idées populaires, on observe des vêtements historiques, des personnages mythologiques et allégoriques ainsi que des personnages de terres « exotiques ».

Les journaux d’Ottawa, de Toronto et de Montréal publient de longs articles sur les bals costumés organisés au Canada, fournissant des descriptions détaillées des divers costumes portés par les invités de marque. De nombreux participants se massent rapidement dans les studios de photographie dans les jours ou les mois suivants ces occasions spéciales pour y obtenir un portrait costumé. Parfois, ces portraits servent à créer des photographies multiples impressionnantes, y compris celle réalisée par le photographe ottavien William James Topley (1845–1930) du Grand bal costumé organisé par le gouverneur général lord Dufferin et sa femme lady Dufferin dans la salle de bal de Rideau Hall le 23 février 1876.

Un groupe de photos de centaines d’invités costumés à un bal costumé. Une peinture de la salle de bal de Rideau Hall se trouve à l’arrière-plan.

Photographies multiples du Grand bal costumé de Dufferin à Rideau Hall le 23 février 1876. La photographie finale est terminée en mai ou en juin. (e008295343)

Cette photographie multiple est réalisée en collant des centaines de portraits individuels pris dans le Studio Topley sur une scène peinte de la salle de bal de Rideau Hall, puis en prenant une nouvelle photo du résultat. Topley apprend l’art de la photographie multiple de son ancien mentor et employeur William Notman (1826–1891), qui possède un studio de photographie populaire à Montréal. Topley, comme Notman, est un homme d’affaires astucieux qui exploite de façon optimale ces activités vice-royales. En effet, les invités ne peuvent s’empêcher de préserver leurs costumes dans un format photographique qu’ils peuvent ensuite montrer à leur famille et à leurs amis, ou coller dans leurs albums personnels comme souvenir mémorable.

De nombreuses personnes mettent leur personnage en valeur dans le studio de photographie en prenant plusieurs poses et en utilisant divers accessoires dans leurs faux portraits. M. Campbell, costumé en fou du Roi, prend une pause théâtrale lorsqu’il visite le Studio Topley peu après le grand bal costumé des Dufferin. William Campbell est le secrétaire particulier de lord Dufferin et un membre apprécié du personnel.

Photo noir et blanc d’un homme costumé en fou du Roi prenant la pose dans un studio de photographie. Il tient une marionnette sur pied dans sa main droite.

William Campbell, secrétaire particulier de lord Dufferin, costumé en fou du Roi, par William Topley, mars 1876. (e011091709)

Mlles Maggie Jones et Zaidee Cockburn, toutes les deux costumées en « Bonnie Fishwives of New Haven [poissonnières de New Haven] » au grand bal costumé des Dufferin. Elles attirent l’attention pendant la soirée, probablement en raison de la longueur de leurs jupes, beaucoup plus courtes que celles des robes victoriennes acceptables de l’époque.

Photo noir et blanc d’une jeune femme costumée en poissonnière et prenant la pose dans un studio de photographie. Sa main gauche est posée sur sa hanche, sa main droite tenant un poisson en papier mâché et son pied droit soulevé, appuyé sur un baril en bois.

Mlle Maggie Jones costumée en « Bonnie Fishwife of New Haven [poissonnière de New Haven] » au grand bal costumé des Dufferin. (e011091718)

Les carnavals de patinage costumés sont aussi très populaires à cette époque et, contrairement aux bals costumés, sont beaucoup plus accessibles pour les citoyens canadiens ordinaires. Dans son studio, Topley recrée les scènes extérieures de patinage pour ses modèles à l’aide d’un arrière-plan enneigé, de neige artificielle et d’une surface réfléchissante imitant la glace. Les femmes aiment porter des robes paysannes ou pastorales lors des carnavals de patinage puisqu’elles peuvent patiner plus librement avec des jupes plus courtes.

Photo noir et blanc d’une femme costumée en bergère chaussée de patins à glace dans un studio de photographie. L’arrière-plan est un paysage enneigé peint.

Mlle Fraser en bergère par William Topley, février 1889 (a138398)

Des personnages allégoriques sont aussi souvent représentés à l’occasion des bals costumés et des carnavals de patinage. Les femmes se costument en la « Nuit », la « Guêpe », l’« Alphabet » ou encore le « Dominion du Canada » comme le fait Mme Juschereau de St. Denis LeMoine au bal des Dufferin.

Photo noir et blanc d’une femme costumée en Dominion du Canada dans un studio de photographie. Sur le devant de sa robe, on aperçoit les armes du Dominion entourées de feuilles d’érable brodées. Des raquettes miniatures se trouvent sur la traîne de sa robe.

Mme Juschereau de St. Denis LeMoine costumée en Dominion du Canada par William Topley, mars 1876. (e011091705)

Photo noir et blanc d’un homme costumé en l’explorateur Jacques Cartier dans un studio de photographie.

M. Juschereau de St. Denis LeMoine costumé en l’explorateur Jacques Cartier, mars 1876. (e011091707)

Le bal costumé historique tenu le 17 février 1896 par le gouverneur général, le comte d’Aberdeen, et sa femme, lady Aberdeen, dans la salle du Sénat du Parlement original est un autre événement médiatisé. Ce bal éducatif met en scène neuf périodes de l’histoire canadienne, des Vikings aux loyalistes. Deux cent cinquante personnes exécutent une série de danses à cette occasion.

Une photographie d’un groupe représentant les voyages des Vikings à l’occasion du bal des Aberdeen illustre l’évolution de l’art photographique depuis le bal des Dufferin, tenu vingt ans plus tôt. Topley, qui photographie encore une fois les groupes dans son studio après le bal, peut enfin prendre une photo d’un groupe entier grâce aux durées d’exposition rapides. La scène est également illuminée par la lumière naturelle provenant de la fenêtre de toit aperçue dans le coin supérieur gauche de l’image.

Photo noir et blanc d’un groupe de dix-sept hommes, femmes et filles vêtus de costumes de Vikings dans un studio de photographie.

Un groupe historique représentant les voyages des Vikings en direction du Nord-Est de l’Amérique du Nord photographié au Studio Topley. Il est le premier groupe à danser — une polka énergétique — à l’occasion du bal costumé historique organisé par lord et lady Aberdeen en février 1896. La jeune fille assise au milieu est lady Marjorie Gordon, fille des hôtes vice-royaux, portant une robe blanche et dorée ainsi que les bijoux celtiques de sa mère. (a137981)

Un album souvenir est par la suite produit et vendu aux invités. Il comprend les photos des groupes historiques prises par Topley (à l’exception d’une photo) et les textes rédigés par l’historien et fonctionnaire John George Bourinot. Ce dernier avait fourni des conseils et des recommandations à lady Aberdeen dans les mois ayant précédé l’événement. Bibliothèque et Archives Canada possède une copie de cet album souvenir dans sa collection.

Toutes les images numérisées ci-dessus ont été reproduites à partir des négatifs originaux sur plaque de verre du fonds Studio Topley de BAC. Ces images, et de nombreuses autres photos prises par Topley des invités ayant pris part aux bals costumés et aux carnavals de patinage d’Ottawa, sont disponibles sur le site Web de BAC.

Les reproductions de ces négatifs originaux sur plaque de verre sont exposées dans les salles d’art canadien et autochtone du Musée des beaux-arts du Canada.


Emma Hamilton-Hobbs est archiviste en photographie à la Division des archives gouvernementales de Bibliothèque et Archives Canada.

Les enfants de Topley – Petits portraits de la collection William Topley

La collection William Topley à Bibliothèque et Archives Canada est une ressource précieuse pour ceux qui s’intéressent au portrait photographique canadien du XIXe siècle. Composée de plus de 150 000 négatifs sur plaque de verre ainsi que d’épreuves d’atelier et d’albums de comptoir, la collection Topley couvre de 1868 à 1923 et illustre la carrière prolifique de M. Topley, originaire de la région de Montréal, qui a commencé sa carrière de travailleur autonome en ouvrant une succursale du studio William Notman sur la rue Wellington à Ottawa. Même si M. Topley photographiait d’autres sujets que les personnes, les portraits étaient sa spécialité, et la collection est un merveilleux exemple des débuts de la photographie en studio au Canada.

Au début des années 1870, M. Topley achetait le studio qu’il avait géré pour William Notman et il attirait plus de 2 300 clients par année. L’emplacement prestigieux de son studio au centre-ville d’Ottawa (il déménagea plusieurs fois au fil des ans, mais toujours à une distance de marche du Parlement) faisait en sorte qu’il attirait une grande partie de l’élite de la ville, y compris des politiciens et d’autres personnages importants, qui se rendaient au studio du photographe pour se faire prendre en portrait.

Les enfants faisaient souvent l’objet de ces portraits, posant seul ou avec leurs frères et sœurs. En regardant ces images, on remarque, non seulement, des noms connus, identifiant certains sujets comme les enfants de personnages influents de la capitale, mais aussi quelque chose d’inchangé malgré l’époque. En regardant au-delà de la formalité, des vêtements inconfortables et des poses statiques, on voit que ces portraits ne sont pas tellement différents de ceux que l’on pourrait prendre aujourd’hui. On reconnaît des enfants habillés spécialement pour l’occasion, essayant de rester assis, ayant l’air tantôt impatient, tantôt ennuyé.

Photographie en noir et blanc d'une petite fille dans une robe blanche.

Mademoiselle McLaren, 1873 (MIKAN 3461050)

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Portraits de la capitale : Les visages de la collection Topley

La collection de photographies de William James Topley acquise en 1936 fait partie des collections les plus populaires de Bibliothèque et Archives Canada. La collection comprend plus de 150 000 négatifs sur plaque de verre et support de nitrate, 68 albums préparés par le studio, des journaux des affectations quotidiennes et des livres comptables.

La grande collection comprend des pièces datant de 1868 à 1923. Elle documente la prolifique carrière de Topley, un Montréalais d’origine qui a commencé sa carrière de travailleur autonome en ouvrant une succursale du studio William Notman à Ottawa, sur la rue Wellington, après avoir travaillé comme apprenti du célèbre photographe à Montréal pendant plusieurs années. Il abandonne plus tard le nom de Notman pour exploiter son propre studio à divers endroits d’Ottawa, déménageant de la rue Wellington au coin des rues Metcalfe et Queen avant de s’établir à deux endroits de la rue Sparks.

Les photographies produites pendant la longue carrière de Topley constituent une source de référence visuelle fascinante sur la vie à Ottawa et dans d’autres villes canadiennes. Parmi les images se trouvent des scènes de la vie quotidienne, des photographies de vitrines de magasins qui ont été commandées au studio, la Colline du Parlement avant, pendant et après l’incendie de 1916 et, plus intéressant peut‑être encore, des portraits de citoyens célèbres et ordinaires.

En 1872, le studio de Topley attire plus de 2 300 clients par année, dont des premiers ministres, des gouverneurs généraux, des membres de la haute société d’Ottawa, des hommes d’affaires et des citoyens ordinaires. Il a créé la célèbre image composite du premier grand bal costumé canadien, qui est organisé par le comte de Dufferin et son épouse en 1876.

Les clients de Topley sont souvent les familles des personnes influentes d’Ottawa. Dans la capitale, les parents des politiciens, des propriétaires fonciers et des barons du bois se rendent fréquemment au studio Topley pour se faire prendre en portrait. Au début du XIXe siècle, cette pratique revêt encore un certain prestige, si bien que des épouses, des enfants et même des animaux de compagnie sont photographiés au studio, dans certains cas plusieurs fois par année.

Ces merveilleux portraits sont captivants puisqu’ils permettent de voir les vêtements, les coiffures et les expressions des citoyens ottaviens du passé. Il est également intéressant de voir les visages des personnes qui ont donné leurs noms aux rues, parcs et écoles d’Ottawa.

Mademoiselle Powell, 1870

Mademoiselle Powell, 1870 (MIKAN 3479280)

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