Centenaire de l’Aviation royale canadienne : honneur aux femmes militaires

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Par Rebecca Murray

Remarque : Comme la plupart des photos présentées dans ce blogue proviennent de microfiches numérisées, leur qualité varie. De plus, certaines d’entre elles ne sont pas décrites au niveau de la pièce dans le catalogue.

L’Aviation royale canadienne (ARC) célèbre son centenaire en 2024. Bibliothèque et Archives Canada (BAC) a le privilège de conserver des documents de l’ARC qui vont des débuts de l’organisation jusqu’au 21e siècle. Celle-ci tient une place importante dans l’histoire militaire du pays en raison de son rôle dans le développement de l’aviation canadienne et de ses opérations à l’étranger.

Le présent billet est consacré aux collections photographiques de l’ARC conservées à BAC, et tout particulièrement aux photos de femmes militaires à l’époque de la Deuxième Guerre mondiale. Le découblogue propose également des billets sur des infrastructures de l’ARC, comme l’aéroport à Fort St. John, et sur des événements marquants, comme la saga de l’Avro Canada CF-105 Arrow.

Une femme en uniforme debout devant un mur nu.

HC 11684-A-2, Long manteau avec chapeau et gants, 4 juillet 1941 (MIKAN 4532368).

Une de mes collègues a déjà raconté l’histoire de la Division féminine de l’Aviation royale du Canada. Je me contenterai donc de rappeler que cette division a vu le jour le 2 juillet 1941, sous le nom de Corps auxiliaire féminin de l’Aviation canadienne, qu’elle a été rebaptisée au début de 1942 et que plus de 17 000 femmes ont joint ses rangs.

Deux femmes vêtues de combinaisons assises de part et d’autre d’une hélice.

PBG-3143, Division féminine – Mécaniciennes de moteurs d’avion, 23 octobre 1942 (MIKAN 5271611).

Le fonds du ministère de la Défense nationale (RG24/R112) contient des photographies sur la Division féminine qui nous renseignent sur le service militaire des femmes à l’époque de la Deuxième Guerre mondiale. Cette collection de plus de 500 000 images est une mine d’or pour quiconque s’intéresse à cette période, car on y trouve des photos prises au Canada et à l’étranger. Depuis six ans, je tente activement de repérer les femmes sur ces photos. Si certaines femmes sont explicitement identifiées et mises en évidence, d’autres, figurant en bordure sur les photos de groupe, sont très difficiles à distinguer de leurs homologues masculins, surtout au premier coup d’œil.

Un homme en uniforme (au centre de la photo), assis et portant des lunettes, regarde une femme en uniforme debout (en bordure droite de la photo).

RE-1941-1, Service des comptes de paie, revue Crosswinds, 25 septembre 1944 (MIKAN 4740938).

Le centenaire est l’occasion idéale de faire connaître les résultats du travail effectué sur la sous-série de photographies de l’ARC, et de mettre en évidence le rôle joué par les femmes qui ont joint ses rangs pendant la période visée. Les 53 sous-sous-séries se distinguent généralement les unes des autres par le lieu. Les photos sont très variées : on y trouve par exemple des vues aériennes du Canada; des portraits officiels; ou des photos de la vie sur des bases établies en Europe après la guerre, comme à North Luffenham ou à Grostenquin. Toutefois, plusieurs s’intéresseront surtout aux images de cette sous-série qui documentent les activités courantes et la vie quotidienne des militaires pendant la Deuxième Guerre mondiale, tant au pays qu’à l’étranger.

Quatre femmes en uniforme, debout ou agenouillées près d’un sapin de Noël posé sur une table. Des cadeaux emballés se trouvent sur le plancher et au pied de l’arbre.

NA-A162, Sapin et danse de Noël à la Division féminine, 25 décembre 1943 (MIKAN 4532479).

Avec plus de 160 000 images, cette sous-série est un véritable trésor! Environ 1 900 d’entre elles (1 %) montrent des membres de la Division féminine ou des infirmières militaires de l’ARC. Les femmes sont surtout représentées sur les photos prises à Ottawa, à Rockcliffe ou au quartier général, ainsi que sur des bases régionales comme celles à Terre-Neuve, à l’Île-du-Prince-Édouard et en Colombie-Britannique.

La collection nous montre les membres de la Division féminine en train de travailler ou de s’amuser. On les voit célébrer des fêtes en groupe ou partager des moments de plaisir, oubliant pendant quelques instants les horreurs de la guerre en cours. Il y a des images où l’ambiance semble décontractée (voir les photos NA-A162 ci-dessus et SS-230B ci-après), et d’autres qui témoignent des importants travaux accomplis (image PBG-3143, plus haut). Les photos de groupe officielles sont monnaie courante, comme en témoigne l’image ci-dessous (G-1448) montrant des infirmières militaires. Pour de nombreuses bases en milieu éloigné ou rural, surtout pendant les premières années de la guerre, les seules femmes présentes sur les photos sont des infirmières militaires.

Photo officielle d’un groupe de 41 militaires comprenant 12 femmes, dont cinq portent le voile blanc distinctif des infirmières militaires. Le groupe est divisé en trois rangées; les personnes à l’avant sont assises.

G-1448, Personnel hospitalier à l’École d’artillerie aéronavale no 1, Royal Navy, Yarmouth (Nouvelle-Écosse), 5 janvier 1945 (a052262).

Groupe de 15 femmes, la plupart habillées en civil, profitant d’un moment de loisir dans ce qui ressemble à un salon. Bon nombre d’entre elles semblent faire de la broderie.

SS-230B, Cercle de couture de la Division féminine, officières du renseignement, 4 avril 1943 (MIKAN 5285070).

Vous avez une tante ou une grand-mère qui a servi dans la Division féminine de l’ARC et vous cherchez de l’information sur son service militaire? Pour en savoir plus, consultez les nombreuses ressources de BAC sur la Deuxième Guerre mondiale. Vous y apprendrez entre autres comment avoir accès à des dossiers de service militaire. Les dossiers de service des victimes de guerre, 1939 à 1947 – Deuxième Guerre mondiale peuvent être consultés à l’aide de notre base de données en ligne.

BAC met bien d’autres collections photographiques à votre disposition, par exemple la sous-sous-série PL prefix – Public Liaison Office (Bureau des relations publiques). Cette fabuleuse ressource regorge de photos de l’ARC et se trouve, du point de vue du classement archivistique, juste à côté de l’acquisition 1967-052, qui fait l’objet de notre projet de recherche. Toute personne souhaitant trouver un proche ayant servi dans l’ARC devrait inclure ces photos dans sa recherche.

Vous trouverez aussi de l’information sur le centenaire de l’Aviation royale canadienne sur le site officiel de l’ARC.


Rebecca Murray est conseillère en programmes littéraires au sein de la Direction des programmes à Bibliothèque et Archives Canada.

Les femmes à la guerre : un défi Co-Lab

Rebecca Murray

Les Canadiennes sont bien présentes dans les archives photographiques de la Deuxième Guerre mondiale, et notamment dans le fonds du ministère de la Défense nationale (RG 24/R112). Celui-ci comprend plus de deux millions de photos prises à divers endroits sur le globe, de Comox, en Colombie-Britannique, jusqu’à Naples, en Italie. On peut y voir nos arrière-grands-mères, nos grands-mères, nos mères, nos tantes, nos sœurs, nos cousines et nos amies en uniforme.

Le défi Co-Lab Les femmes à la guerre vous invite à identifier sur des photos d’archives des femmes et des infirmières militaires qui ont servi au Canada et à l’étranger de 1942 à 1945. On y trouve autant des portraits individuels que des photos de groupe, prises dans diverses situations : au travail, dans les loisirs, sur des navires, dans des cuisines ou des bibliothèques, sur un terrain de sport ou une piste de danse.

Les femmes y sont rarement identifiées, comme en témoigne la mention « unidentified » dans les titres. Or, connaître leurs noms est essentiel pour mieux comprendre le rôle qu’elles ont joué pendant la Deuxième Guerre mondiale. Jumelé à d’autres efforts pour identifier des femmes et des infirmières militaires dans les archives, ce défi Co-Lab nous aidera à raconter une histoire plus complète.

Voici quelques-unes des photos du défi. Pouvez-vous nous aider à trouver qui sont ces femmes?

Photo noir et blanc d’une femme en uniforme militaire regardant l’objectif. Elle est assise derrière un bureau et tient un stylo dans sa main droite. Un téléphone de type chandelier est posé sur le bureau, à sa gauche.

Membre non identifiée du Service féminin de l’Armée canadienne, Angleterre, 19 juillet 1944. Photo : Jack H. Smith, capitaine (a162428-v6)

Photo noir et blanc d’un groupe de femmes en uniforme souriant à l’objectif. Deux des femmes portent un costume plus sombre. Celles au premier rang sont assises et se tiennent par la main. Les autres sont debout derrière; plusieurs se tiennent par le bras.

Membres du Service féminin de la Marine royale du Canada, août 1943. (e011180809)

Photo noir et blanc d’un atelier avec trois grandes fenêtres. On y voit quatre femmes et un homme entourés d’outils, de tables et d’un établi. Un panneau au haut d’un mur indique « YMCA ».

Atelier de la Division féminine de l’Aviation royale du Canada, Rockcliffe (Ontario), 11 avril 1944. (a064867-v8)

Pour trouver d’autres photos de femmes et d’infirmières militaires dans les fonds de Bibliothèque et Archives Canada, utilisez l’outil Recherche dans la collection et explorez l’acquisition 1967-052. Les photos y sont classées par branches des Forces armées canadiennes. Vous pouvez aussi faire une recherche par mot-clé (p. ex. « 1967-052 Halifax Women Royal Canadian Naval Service », pour le Service féminin de la Marine royale du Canada à Halifax).

Pour plus de renseignements sur les divisions féminines dans les trois branches des Forces armées canadiennes pendant la Deuxième Guerre mondiale, lisez ces articles de blogue :

Ces photos ne montrent qu’un échantillon des multiples fonctions remplies par les militaires canadiennes pendant la Deuxième Guerre mondiale. Il est important d’identifier ces femmes dans nos archives pour bâtir un récit plus représentatif. Ainsi, plusieurs générations de femmes militaires, leurs familles et tous les Canadiens pourront souligner leur rôle extraordinaire.

Utilisez notre outil Co-Lab pour transcrire, étiqueter, traduire et décrire les documents numérisés pour ce défi. Vous pouvez aussi faire de même avec n’importe quelle image numérisée de notre collection, grâce à notre outil Recherche dans la collection.


Rebecca Murray est archiviste de référence principale à la Division des services de référence de Bibliothèque et Archives Canada.

Les infirmières militaires décédées en service pendant la Première Guerre mondiale, deuxième partie

Par Alex Comber

Les infirmières militaires du Canada devaient s’acquitter de leurs tâches dans des circonstances pénibles et dangereuses. Quelque 40 infirmières membres du Corps expéditionnaire canadien (CEC) sont mortes à la Première Guerre mondiale de maladies contractées durant leur service actif. D’autres sont décédées après l’Armistice de maladies attribuables à ce service. Ce qui a toutefois révolté le plus les Canadiens, c’est le sort des 21 infirmières tuées directement par l’ennemi. Le présent billet décrit brièvement ces événements et aide les lecteurs à explorer une sélection d’archives sur les infirmières militaires.

Photo noir et blanc d’un cortège funèbre de soldats et d’infirmières militaires marchant derrière un chariot-brancard sur lequel est déposé un cercueil drapé d’un drapeau, au milieu d’un grand cimetière hérissé de croix tombales temporaires.

Les funérailles de l’infirmière militaire G.M.M. Wake, qui a succombé à ses blessures à la suite d’un raid aérien allemand sur l’hôpital où elle travaillait,  (a002562)

Les infirmières militaires servaient dans les hôpitaux du Corps médical de l’armée canadienne (CMAC) et les postes d’évacuation sanitaire, et dans d’autres installations censées être hors de portée de l’artillerie ennemie. Cependant, l’introduction d’une artillerie de précision à longue portée et de nouvelles techniques, comme les guerres aérienne et sous-marine, exposent directement ces femmes au feu de l’ennemi. Plusieurs fois, à compter de mai 1918, des infirmières sont tuées dans l’exercice de leurs fonctions lors d’attaques ennemies. Au Canada, les médias s’empressent d’exploiter ces terribles événements pour mousser la propagande en faveur de l’effort de guerre et promouvoir de nouvelles campagnes de recrutement.

Affiche couleur représentant un soldat en uniforme avec « Canada » brodé sur une épaulette, qui soutient dans la mer une infirmière militaire inconsciente, habillée d’un tablier arborant une grande croix rouge. Le soldat lève le poing en signe de colère contre un sous-marin allemand, sur lequel des marins semblent tirer dans d’autres directions. Une bouée de sauvetage portant l’inscription « Llandovery Castle » flotte tout près. On peut lire « VICTORY BONDS WILL HELP STOP THIS » dans le haut de l’affiche et « Kultur vs. Humanity », dans le bas de celle-ci.

Affiche d’obligations de la Victoire illustrant de manière saisissante les suites du naufrage du navire-hôpital Llandovery Castle (e010697267)

En mai 1918, deux hôpitaux canadiens sont bombardés par l’aviation allemande. Katherine Macdonald, de Brantford, en Ontario, devient la première infirmière militaire canadienne à périr aux mains de l’ennemi pendant la Grande Guerre, lors du bombardement par un avion allemand de l’Hôpital général canadien no 1 situé à Étaples, en France, le 19 mai 1918. Deux de ses collègues blessées meurent peu après.

Photo noir et blanc d’infirmières militaires et de soldats en uniforme dégageant les débris d’un hôpital endommagé.

Vue de l’Hôpital général canadien no 1, à Étaples, en France, après le bombardement qui a coûté la vie à trois infirmières militaires canadiennes, (a003747)

Des photographes officiels ont capté les scènes de dévastation et les sinistres cortèges funèbres derrière les cercueils d’infirmières et d’autres membres du personnel médical et de patients tués lors des raids. À la fin du mois, l’Hôpital militaire fixe canadien no 3, à Doullens, en France, est à son tour bombardé. Trois autres infirmières meurent. Deux d’entre elles, les infirmières Agnes MacPherson et Eden Pringle sont tuées ainsi que des médecins, des préposés aux soins médicaux et un patient lors d’une intervention chirurgicale.

Photo noir et blanc de soldats en uniforme travaillant au milieu des décombres d’un grand bâtiment de briques lourdement endommagé par un bombardement.

Scène après le bombardement de l’Hôpital militaire fixe canadien no 3 à Doullens, en France, dans lequel trois infirmières militaires canadiennes ont trouvé la mort,  (a003746)

Moins d’un mois plus tard, le 27 juin, au large de la côte méridionale d’Irlande, le sous-marin allemand U-86 torpille le navire-hôpital canadien Llandovery Castle, qui rentre en Angleterre avec seulement du personnel médical à bord. Cet ancien paquebot naviguait de nuit avec des feux spéciaux pour illuminer sa coque blanche et ses grandes croix rouges distinctives, signes manifestes d’un navire-hôpital et donc, d’une cible interdite à tout belligérant. Après avoir été frappé, le navire gîte dangereusement, ce qui gêne la mise à l’eau des bateaux de sauvetage. Un grand nombre d’infirmières dormaient au moment de l’impact, et elles ont du mal à évacuer le navire en train de sombrer. Tout le groupe d’infirmières monte à bord d’un bateau de sauvetage en compagnie du sergent Arthur Knight, du CMAC. Tragiquement, le tourbillon causé par la violence du naufrage engloutit leur bateau. Seul Knight réussit tant bien que mal à gagner un autre bateau de sauvetage.

Photo noir et blanc d’un patient en uniforme de convalescence allongé sur un lit d’hôpital.

Le sergent A. Knight, du Corps médical de l’armée canadienne, se rétablit sur un lit d’hôpital après le naufrage du NHSM Llandovery Castle, (a007471)

Les agissements de l’équipage du sous-marin ont aggravé cette tragédie. Des survivants ont témoigné avoir vu le sous-marin poursuivre des bateaux de sauvetage et tirer sur leurs occupants, tuant encore plus de membres d’équipage et de personnel médical. Un seul bateau a pu échapper aux événements de la nuit. Les corps des 14 infirmières militaires n’ont jamais été retrouvés, et aujourd’hui, le monument commémoratif de Halifax rend hommage à ces femmes courageuses. Des documents contenus dans leurs dossiers de service militaire révèlent que certaines infirmières, par exemple Christina Campbell, de Victoria, en Colombie-Britannique, étaient des infirmières d’expérience qui avaient été soignées auparavant pour des problèmes de neurasthénie (choc consécutif à un bombardement), de débilité nerveuse, d’insomnie et d’épuisement général à la suite de leur service près des lignes de front.

Portrait noir et blanc de studio d’une infirmière militaire en uniforme coiffée d’un chapeau, s’appuyant contre une table.

L’infirmière militaire Christina Campbell, qui a péri avec le reste du contingent d’infirmières dans le torpillage du Llandovery Castle le 27 juin 1918 (a008112)

Canada ainsi que des inscriptions dans les Livres du Souvenir qu’abrite la Tour de la Paix, à Ottawa, rendent hommage aux infirmières de la Première Guerre mondiale qui ont perdu la vie au service du Canada en soignant les blessés.

Découvrez la vie des infirmières militaires canadiennes de la Première Guerre mondiale

Grâce à la numérisation des dossiers de service du Corps expéditionnaire canadien (CEC), les visiteurs du site Web de Bibliothèque et Archives Canada (BAC) peuvent consulter rapidement et facilement une mine de renseignements généalogiques et historiques, et se faire une idée par eux-mêmes du service de ces femmes et de tous les membres du CEC durant la Première Guerre mondiale. Les liens ci-dessous vous permettront de consulter les dossiers de service récemment rendus accessibles en ligne. Ils s’accompagnent, le cas échéant, du lien vers les registres de circonstances du décès.

Tableau d’honneur : infirmières militaires du CMAC tuées par l’ennemi durant la Première Guerre mondiale

Hôpital général canadien no 1, Étaples, France, bombardé le 19 mai 1918

Hôpital militaire fixe canadien no 3, Doullens, France, bombardé le 30 mai 1918

Navire-hôpital de Sa Majesté Llandovery Castle, coulé le 27 juin 1918

Navire de la poste royale Leinster, coulé le 10 octobre 1918

  • Henrietta Mellett, de London, en Ontario, est décédée en mer le 10 octobre 1918 lors du naufrage du NPR Leinster alors qu’elle retournait à l’Hôpital général canadien no 15 au terme d’une permission militaire. Infirmière militaire d’expérience, elle avait auparavant servi avec la Croix-Rouge en France, en Égypte et en Angleterre. Elle a péri avec plus de 500 autres passagers en mer d’Irlande lors du torpillage du Leinster par le sous-marin allemand UB-123.

Ressources connexes

En avril dernier, Bibliothèque et Archives Canada a lancé le nouvel outil de collaboration Co-Lab qui vous permet de contribuer en transcrivant, étiquetant et interagissant avec des documents historiques. Voici maintenant un nouveau défi, où l’on met en lumière les dossiers personnels de quelques-unes des infirmières militaires ayant servi lors de la Première Guerre mondiale. Commencez dès maintenant!


Alex Comber est un archiviste militaire au sein de la Division des archives gouvernementales.

 

Première partie : Les infirmières militaires du Corps médical de l’armée canadienne (CMAC) pendant la Première Guerre mondiale

Par Laura Brown

Alice Isaacson, 41 ans, a déjà une feuille de route bien remplie lorsqu’elle se joint au Corps médical de l’armée canadienne (CMAC) du Corps expéditionnaire canadien (CEC) en 1916. Née en Irlande et formée aux États-Unis, Alice possède alors huit années d’expérience comme infirmière surveillante et une année de service à l’Hôpital général n° 23 de la British Expeditionary Force (BEF) à Étaples, en France. Une lettre de recommandation rédigée par un médecin militaire, vraisemblablement en vue de sa mutation du BEF au CEC, la décrit comme une personne « compétente, dynamique et fiable », qui ne se laisse pas intimider par l’ampleur d’une tâche. Il lui est arrivé de veiller presque seule sur 120 patients gravement malades. L’une des rares choses qu’elle ne sait faire, c’est d’aller à vélo, une lacune qu’elle cherchera à combler avec détermination avant son retour au bercail, à la fin de la guerre.

Alice tient plusieurs journaux personnels pendant son service outre-mer, y compris pendant ses affectations en France, à l’Hôpital général canadien n° 2 à Le Tréport et à l’Hôpital général canadien n° 6 à Troyes. Ses écrits et son album photo particulièrement révélateur font maintenant partie de son fonds, conservé à Bibliothèque et Archives Canada (BAC). Ces documents ainsi que d’autres collections privées et gouvernementales, dont le fonds du ministère de la Défense nationale, sont quelques exemples des précieuses ressources archivistiques de BAC qui documentent l’histoire militaire des femmes au Canada.

Photo noir et blanc d’hommes et de femmes en uniforme faisant du vélo. Les femmes sont vêtues d’uniformes de couleur pâle avec des ceintures foncées et des chapeaux alors que les hommes portent des uniformes militaires et des chapeaux. Ils pédalent le long d’une route bordée à gauche par un grand mur de briques. Un grand bâtiment aux façades fenêtrées est bien visible à l’arrière-plan. La légende « Cycle Parade » (Défilé à vélo) est inscrite au bas de l’image.

Membres du personnel à vélo, Hôpital général canadien n° 6, Troyes (France), le 2 juin 1917. Album photo d’Alice E. Isaacson, R11203-01-E (e002283123)

Seules quelques infirmières font partie du Corps médical de l’armée canadienne en 1914, au début de la Première Guerre mondiale. Leur nombre augmente toutefois rapidement, puisque les infirmières civiles sont impatientes de mettre à profit leurs compétences dans un contexte militaire. En tout, plus de 3 000 infirmières se joignent au CMAC, y compris 2 504 dans des régions d’outre-mer, soit en Angleterre, en France, ainsi qu’en Méditerranée orientale (dans la péninsule de Gallipoli, à Alexandrie et à Salonique).

La pratique des soins infirmiers est la seule porte d’entrée offerte aux femmes voulant servir sous le drapeau pendant la Première Guerre mondiale. Pour s’enrôler, une infirmière doit être célibataire, sujet britannique (ce qui est le cas des Canadiens à cette époque) et en bonne santé; son âge doit se situer entre 21 et 38 ans, et elle doit être diplômée d’une école de sciences infirmières reconnue. Si elles sont acceptées, les recrues sont nommées officiers avec le grade de lieutenant, un fait notable puisque le Canada est alors le seul pays du monde à considérer les infirmières comme des officiers. Les infirmières canadiennes portent le titre traditionnel d’infirmières militaires et elles profitent de plusieurs avantages liés à leur poste, dont un bon salaire et des congés. Toutes les infirmières relèvent de l’infirmière en chef de leur service, surnommée la matrone en chef. Margaret Macdonald, du CMAC, obtient ce titre, ce qui fait d’elle la première femme à être élevée au grade de major dans tout l’Empire britannique.

Photo noir et blanc d’infirmières militaires portant des tabliers et des voiles blancs, soignant de nombreux patients dans une tente. Une des infirmières est assise sur une chaise, les pieds et les mains croisés, fixant l’appareil photo. Les deux autres infirmières sont debout, en train de panser les blessures de soldats. Les patients sont pour la plupart vêtus en civil, mais certains sont en uniforme. Du matériel médical, dont des pansements et des seaux, est visible au premier plan et au centre de la photo.

Infirmières militaires soignant des soldats dans une tente de campagne de l’Hôpital général canadien n° 7 à Étaples, en France, vers 1917. Collection W. L. Kidd (e002712847)

Les infirmières sont exposées à bon nombre d’expériences militaires qui contrastent avec leur travail au civil : dormir sous la tente, changer d’affectations à court préavis ou s’accommoder de matériel limité. Elles doivent pouvoir improviser et s’adapter à des circonstances changeantes, que ce soit une journée tranquille à l’infirmerie suivie le lendemain d’un déferlement de patients qui entrent et sortent. Ces femmes voient directement le genre de blessures corporelles qu’infligent les nouvelles armes de cette guerre moderne, que ce soit les shrapnels ou les gaz toxiques, et elles sont témoins de pertes humaines d’une ampleur que peu auraient pu soupçonner au moment de leur enrôlement.

Il est interdit aux infirmières de servir dans les tranchées. Si la plupart d’entre elles sont affectées loin des lignes de front, dans des hôpitaux généraux ou des centres pour convalescents, certaines se retrouvent toutefois plus près du feu de l’ennemi. Alice Isaacson évoque en septembre 1917 les affectations convoitées dans les postes d’évacuation sanitaire (les unités avancées situées le long des routes d’évacuation entre les lignes de front et les hôpitaux) dans son journal alors qu’elle est en poste à l’Hôpital général canadien n° 2 : « Quel après-midi excitant aujourd’hui! […] Les IM Jean Johnston, S.P. Johnson et Riddle se rendront au poste d’évacuation sanitaire demain matin! Les IM Hally et Villeneuve sont chagrinées à l’idée de rester ici. Mais nous sommes toutes ravies que ces infirmières militaires puissent enfin avoir la chance d’aller travailler dans ce poste. » [traduction]

Photo noir et blanc de trois personnes assises sur les marches d’une baraque en bois. Deux hommes portant des chemises légères et des pantalons dont le bas est roulé sont assis de chaque côté d’une infirmière en uniforme. Tous sourient pour la photo.

L’infirmière Lillias Morden avec des patients à l’extérieur d’une baraque médicale de l’Hôpital général canadien n° 2 à Le Tréport, en France, 1917. Album photo d’Alice E. Isaacson, R11203-01-E. (e007150684)

Les infirmières contribuent largement à l’effort de guerre en soignant les soldats malades et blessés, une tâche qui se prolonge après l’armistice du 11 novembre 1918. La pandémie de « grippe espagnole » qui éclate à la fin de la guerre et se propage dans les camps militaires occupe énormément les infirmières. Près de 1 500 infirmières militaires servent toujours dans le CMAC au milieu de l’année 1919. Lillias Morden, une infirmière de Hamilton, en Ontario, en fait partie. Elle se joint au CMAC en 1916, sert en Angleterre et en France, et contribue aux efforts de démobilisation à la fin de la guerre. Morden ne quittera son poste militaire qu’en novembre 1920.

Alors que des infirmières comme Alice Isaacson et Lillias Morden reviennent au Canada après la Première Guerre mondiale, d’autres n’auront pas cette chance. La deuxième partie de ce billet de blogue portera sur les conditions parfois dangereuses dans lesquelles travaillaient les infirmières militaires en temps de guerre, alors que certaines y feront le sacrifice de leur vie.

Ressources connexes

En avril dernier, Bibliothèque et Archives Canada a lancé le nouvel outil de collaboration Co-Lab qui vous permet de contribuer en transcrivant, étiquetant et interagissant avec des documents historiques. Voici maintenant un nouveau défi, où l’on met en lumière les dossiers personnels de quelques-unes des infirmières militaires ayant servi lors de la Première Guerre mondiale. Commencez dès maintenant!


Laura Brown est une archiviste des affaires militaires au sein de la Division des archives gouvernementales.