Quelque chose à déclarer ? Oui, c’est d’intérêt canadien

Par Louise Tousignant

Dans le cadre de son mandat, Bibliothèque et Archives Canada (BAC) acquiert des documents publiés dits canadiens et d’intérêt canadien, afin de développer la collection nationale Canadiana qui se veut la plus exhaustive possible. Les premiers sont ceux publiés au Canada et reçus en vertu du dépôt légal, alors que ceux d’intérêt canadien représentent des publications parues dans d’autres pays, mais dont le créateur ou le sujet est canadien. Le créateur inclut l’auteur, l’illustrateur, le traducteur ou l’artiste. Ces œuvres, publiées à l’étranger, sont acquises par don ou par achat ciblé.

Parmi ces titres d’intérêt canadien, récemment reçus, on retrouve des études et des analyses portant sur le Canada : Canada/États-Unis : les enjeux d’une frontière, Comparative North American Studies: Transnational Approaches to American and Canadian Literature and Culture, et Canadian Perspectives on Immigration in Small Cities.

Quant aux titres relatifs au Canada, Negotiations in the Indigenous World: Aboriginal Peoples and the Extractive Industry in Australia and Canada et Indian Agents: Rulers of the Reserves, ils témoignent de la recherche sur les affaires autochtones.

Des personnalités canadiennes ont aussi fait l’objet de recherches : le peintre Alex Colville avec le livre The Mystery of the Real: Letters of the Canadian Artist Alex Colville and Biographer Jeffrey Meyers, la biographie de la journaliste et auteure Jane Jacobs reflétée dans Becoming Jane Jacobs, et l’analyse du travail de la chanteuse et musicienne Alanis Morissette documentée dans The Words and Music of Alanis Morissette. La carrière des Canadiens exilés à Hollywood passe également par la parution de livres. Pensons entre autres au Montréalais de naissance et ambassadeur des fêtes du 375e de Montréal, William Shatner, bien connu pour son rôle du capitaine James T. Kirk dans la série télévisée Star Trek, et son plus récent livre Leonard: My Fifty-Year Friendship with a Remarkable Man, et au réputé acteur Martin Short, né à Hamilton, et connu pour son travail au sein de l’émission Saturday Night Live, avec ses mémoires I Must Say: My Life as a Humble Comedy Legend.

Une photo en noir et blanc d’une femme avec des cheveux long debout devant une clôture en fer forgé.

Portrait d’Alanis Morissette par Bryan Adams. Photographie signée par Alanis Morissette. 1999 (MIKAN 3614421)

Plus près de nous, des Canadiens d’ici font également leur marque par la parution d’œuvres publiées à l’extérieur du Canada : le Québécois Guy Delisle avec sa bande dessinée S’enfuir : récit d’un otage parue chez Dargaud, l’illustrateur Yanick Paquette, l’homme derrière Wonder Woman, avec la bande dessinée Wonder Woman, Earth One. Volume 1, et Louise Penny chez Minotaur Books avec The Long Way Home, qui s’est classé numéro 1 au palmarès du New York Times.

Enfin, certains titres d’intérêt canadien présents dans la collection nationale sont en lien direct avec des fonds d’archives de BAC; ils permettent une étude plus approfondie de l’auteur et de son rayonnement à l’étranger, et de soutenir la recherche en littérature canadienne. C’est le cas, par exemple, des traductions de l’auteure et illustratrice de littérature jeunesse Marie-Louise Gay, et du cinéaste, poète et romancier canadien d’origine srilankaise Michael Ondaatje. Mentionnons au sujet de Marie-Louise Gay, une traduction en espagnol du titre Un million de questions!, ¿Alguna pregunta?, parue au Mexique en 2015, un titre en néerlandais, Angela en de ijsbeer pour Angèle et l’ours polaire, ou encore, Bolle-Bertils sirkus pour Le cirque de Charlie Chou en norvégien. Quant à Michael Ondaatje, BAC possède pas moins de 20 traductions de son œuvre la plus connue, Le patient anglais, dont celles en bulgare, en japonais, et en italien. Faut-il le rappeler, le livre a remporté en 1992 les prix littéraires du Booker Prize et du Gouverneur général alors que le film s’est vu décerner neuf Oscars aux Academy Awards de 1997.

Photo en couleur d’une femme assise et souriante. On aperçoit dans l’avant plan des crayons de couleurs flou.

Marie-Louise Gay. Auteure et illustratrice canadienne de littérature jeunesse. @Groundwood Books

Photo en couleur d’un livre ouvert à la page titre écrit en bulgare.

Le patient anglais publié en bulgare par Delfi, en 2000 (AMICUS 32172817)

Photo en couleur d’un livre ouvert à la page titre écrit en japonais

Le patient anglais publié en japonais par Shinch⁻osha, en 1996 (AMICUS 15875585)

Photo en couleur d’un livre ouvert à la page titre : Michael Ondaatje Il Paziente Inglese.

Le patient anglais publié en italien par Garzanti, en 2004 (AMICUS 32785464)

Ce bref tour d’horizon ne représente qu’un échantillon de publications de toutes sortes relatives au Canada et d’intérêt canadien. Le travail de dépistage minutieux se poursuit afin d’assurer l’enrichissement du patrimoine documentaire canadien et le développement des collections pour faire en sorte que la collection nationale Canadiana soit la plus importante au monde.


Louise Tousignant est bibliothécaire aux acquisitions à la Direction générale du patrimoine publié à Bibliothèque et Archives Canada

Anne à la bibliothèque : La collection Cohen

Par Meaghan Scanlon

Entre 1999 et 2003, l’avocat, cinéaste et bibliographe canadien Ronald I. Cohen a fait don, en cinq lots, de son imposante collection d’ouvrages de Lucy Maud Montgomery à Bibliothèque et Archives Canada (voir la description de la collection à AMICUS 44572655 [en anglais]). La collection renferme des documents liés aux adaptations de l’œuvre de Lucy Maud Montgomery, ainsi que des anthologies et des périodiques dans lesquelles l’auteure est mise en vedette. L’essentiel de la collection consiste toutefois en diverses éditions des romans de Lucy M. Montgomery qui ont été publiés dont, bien sûr, le plus célèbre, Anne of Green Gables (Anne… la maison aux pignons verts).

Parmi les quelque 420 articles qui composent la collection Cohen, on trouve pas moins de 46 exemplaires d’Anne of Green Gables. Trois sont en japonais, deux en français, un en coréen, un en finlandais, un en norvégien et un en suédois. Les 37 autres sont en anglais.

On peut se poser des questions sur l’utilité de posséder 37 exemplaires en anglais d’Anne of Green Gables. En effet, l’histoire est toujours la même, n’est‑ce pas? Eh bien pour les collectionneurs de livres, ce n’est pas nécessairement l’histoire qui est racontée qui importe. Posséder de nombreux exemplaires d’un livre est plutôt un moyen, par exemple, de découvrir l’histoire du livre lui‑même, de sa publication et de la façon dont il a été mis sur le marché et acquis. Nombreux sont les collectionneurs de livres qui entreprennent de documenter l’histoire d’un auteur ou d’un titre dans ses moindres détails grâce à leurs collections. Certains se procurent à cet effet de nombreux exemplaires d’un même ouvrage.

La collection Cohen retrace la propagation du roman Anne of Green Gables dans le monde anglophone, car elle renferme les premières éditions américaine, britannique, australienne et canadienne. Le roman fut d’abord publié à Boston en avril 1908 (AMICUS 9802890). Cette première édition a connu un succès fulgurant. C’est pourquoi l’éditeur de Lucy Maud Montgomery, L. C. Page, l’a réimprimée au moins 12 fois avant la fin de 1909. La collection Cohen renferme des exemplaires des sixième (novembre 1908) et onzième (août 1909) impressions.

Page des droits d’auteur de l’exemplaire de la collection Cohen de la sixième impression de la première édition du roman Anne of Green Gables

Page des droits d’auteur de l’exemplaire de la collection Cohen de la sixième impression de la première édition du roman Anne of Green Gables (AMICUS 9802890, exemplaire 5).

La première édition britannique d’Anne of Green Gables fut également publiée en 1908 (AMICUS 21173240). Anne est ensuite arrivée en Australie en 1925 (AMICUS 26942864). Il est intéressant de constater que, malgré la notoriété de Lucy Maud Montgomery et de son œuvre au Canada, la première édition canadienne d’Anne of Green Gables (AMICUS 1706899) ne fut pas publiée avant 1942. Cette édition connut, elle aussi, plusieurs impressions; l’exemplaire le plus ancien de la collection Cohen date de 1948.

Si l’histoire reste la même édition après édition, ce n’est pas le cas de la représentation visuelle de l’héroïne, Anne Shirley, qui figure sur la couverture. Selon le lieu et l’époque, le public a pu voir Anne sous divers visages, allant de la femme d’âge mûr représentée dans la première édition aux illustrations de type bande dessinée de certaines éditions plus récentes.

En réalité, lorsque Ronald I. Cohen a commencé à collectionner les livres de Lucy Maud Montgomery, un de ses principaux objectifs était de trouver des exemplaires avec jaquette. Depuis toujours, les jaquettes sont en général jetées par les lecteurs (et les bibliothèques!) et les premiers exemplaires peuvent être très difficiles à trouver. C’est pourquoi les nombreuses jaquettes rares que renferme la collection Cohen sont une source très précieuse de renseignements pour les chercheurs qui étudient l’histoire d’un des classiques littéraires canadiens préférés.

Pour en savoir davantage sur la collection d’ouvrages de L. M. Montgomery de Ronald I. Cohen, écoutez la toute dernière émission de baladodiffusion de Bibliothèque et Archives Canada intitulée « Des âmes sœurs après tout ».

Autres sources d’information


Meaghan Scanlon est la bibliothécaire des collections spéciales à la Direction générale du patrimoine publié de Bibliothèque et Archives Canada.