Pourquoi les déclarations du recensement de 1931 sont-elles organisées géographiquement?

À Bibliothèque et Archives Canada (BAC), nous recevons souvent des questions sur les raisons pour lesquelles les documents de nos collections sont organisés comme ils le sont.

En ce qui concerne les déclarations de recensement, nous expliquons généralement qu’en tant que dépôt d’archives, nous les acquérons telles qu’elles sont – même lorsque l’écriture est floue ou illisible – puisque ce sont des documents historiques. Nous nous efforçons également de maintenir l’ordre et le contexte de création des documents.

Ce n’est pas très compliqué de maintenir le classement d’origine des déclarations du recensement de 1931, car nous avons reçu 187 bobines de microfilm plutôt que 234 678 feuilles de papier. Sur les microfilms, les images des déclarations de recensement sont classées par province (d’est en ouest), puis par région nordique (d’ouest en est). L’explication est simple : le Bureau fédéral de la statistique a microfilmé les déclarations de recensement dans l’ordre des numéros de district du recensement et, à l’intérieur de chaque district, dans l’ordre des numéros de sous-district.

Quand BAC a numérisé ces documents d’archives, nous nous sommes assurés de respecter autant que possible le classement d’origine et le contexte de création. Par exemple, les images numérisées ont été regroupées en fonction des fiches de titre présentes dans les microfilms. Pour chaque groupe d’images numérisées, BAC a ajouté des métadonnées extraites de listes, compilées par le Bureau fédéral de la statistique, qui accompagnaient les déclarations du recensement.

Une fiche écrite à la main.

Exemple de fiche de titre qui a servi à classer les déclarations du recensement de 1931 sur microfilm. Cette fiche de titre concerne les huit pages de déclarations pour le sous-district 10 du district 3 (Queens) de l’Île-du-Prince-Édouard (MIKAN 5788729).

Cependant, cette explication ne répond pas à la question d’origine : pourquoi les déclarations du recensement de 1931 ont-elles été classées géographiquement (par districts et sous-districts de recensement) au départ?

Pour éclairer notre lanterne, tournons-nous vers le rapport administratif du Bureau fédéral de la statistique inclus dans le Septième recensement du Canada, 1931 – Volume 1 : Sommaire.

Premier élément de réponse : la finalité initiale du recensement du Canada. Les déclarations du recensement sont classées géographiquement parce que le recensement décennal déterminait la représentation à la Chambre des communes :

« Au Canada, le recensement a pour raison d’être immédiate et légale de déterminer la représentation à la Chambre des Communes fédérale. En vertu des dispositions de [la Constitution], la province de Québec doit toujours avoir le même nombre fixe de 65 représentants […] tandis que le nombre des députés attribués aux autres provinces est au prorata, en prenant comme base le chiffre de la population fixé par le recensement […] Le recensement canadien a donc pour objet essentiel de permettre au Parlement d’adopter une loi de remaniement des circonscriptions électorales. » [Page 32; c’est nous qui soulignons]

Ici, des précisions quelque peu techniques s’imposent. Au début du 20e siècle, des projets de loi sur la répartition modifient le nombre et les limites des circonscriptions fédérales, à la lumière des changements observés depuis le dernier recensement décennal et d’autres facteurs prévus dans la législation.

Carte des circonscriptions électorales fédérales dans les provinces des Prairies. Les frontières sont représentées par d’épais traits bleus, tandis que les noms sont écrits en lettres majuscules bleues. Les circonscriptions sont dessinées sur une carte montrant les cours d’eau, les lacs, les chemins de fer, les villes et les lignes du quadrillage.

Carte des circonscriptions électorales fédérales du Manitoba, de la Saskatchewan et de l’Alberta, tirée d’un atlas créé en 1924 par le ministère de l’Intérieur (e011315903)

Les nouvelles limites des circonscriptions électorales fédérales ont influencé les frontières des districts utilisés lors du recensement décennal suivant. Autrement dit, le lien entre une circonscription électorale fédérale et un district de recensement ressemble un peu à celui entre l’œuf et la poule.

L’œuf : Les limites des circonscriptions électorales fédérales établies dans la Loi sur la représentation de 1924.

La Loi sur la représentation de 1924, parfois appelée Loi sur la répartition, définit les circonscriptions pour l’élection fédérale suivante. La nouvelle répartition des circonscriptions est en partie fondée sur le dénombrement de la population et sur la répartition établie dans le plus récent recensement décennal (dans le cas présent, le sixième recensement du Canada, en 1921).

La Loi sur la représentation décrit les frontières officielles des circonscriptions électorales fédérales, sans les dessiner sur des cartes.

  • Pour lire ces descriptions, veuillez consulter la section « Élections et candidats » de la 17e législature sur le site de la Bibliothèque du Parlement. Il suffit de cliquer sur le nom de la circonscription désirée pour les élections générales du 28 juillet 1930, puis de défiler vers le bas jusqu’à la section « Information », et de lire la sous-section « S.C. 1924, c.63 », qui fait référence à la Loi sur la représentation.
  • Si la Loi sur la représentation ne comprend aucune carte, le ministère de l’Intérieur a réuni dans un atlas en 12 volumes les cartes des nouvelles circonscriptions électorales fédérales. Il y a deux manières de consulter les images numérisées de l’atlas : d’abord, la notice de catalogue sur les cartes des circonscriptions électorales fédérales de 1924, qui affiche des vignettes des cartes; ensuite, un outil de recherche dans les cartes du recensement de 1931, qui comprend des liens vers des cartes en haute résolution.

La poule : Les districts de recensement utilisés au recensement de 1931

Les districts de recensement de 1931 qui ont servi au dénombrement correspondent généralement aux circonscriptions électorales fédérales établies dans la Loi sur la représentation de 1924 :

« Pour les fins du recensement, la Loi de la statistique exige que le pays soit d’abord divisé en “districts de recensement” correspondant, autant que possible, aux circonscriptions électorales fédérales de l’époque, étant donnée l’association du recensement avec la représentation parlementaire. » [Page 51]

Par contre, au moins huit circonscriptions électorales sont « trop vastes ou d’une nature physique ou économique trop variée » pour que le dénombrement soit réalisable. Chacune d’entre elles a donc été divisée en deux ou trois districts de recensement (au Québec, Charlevoix-Saguenay, Gaspé, Labelle et Pontiac; en Ontario, Port Arthur-Thunder Bay; en Alberta, Peace River; et en Colombie-Britannique, Cariboo et Comox-Alberni). D’autres régions à dénombrer ne faisaient partie d’aucune circonscription électorale fédérale (par exemple les Territoires du Nord-Ouest et les navires de la Marine royale canadienne).

La population dénombrée grâce au septième recensement du Canada, en 1931, a ensuite servi à déterminer la nouvelle répartition des circonscriptions électorales fédérales.

L’œuf : Circonscriptions électorales fédérales établies dans la Loi sur la représentation, 1933

C’est en raison de cette influence mutuelle – l’œuf ou la poule! – que BAC remplace souvent des cartes de districts de recensement par des cartes de circonscriptions électorales fédérales quand vient le temps de consulter les déclarations de recensement du début du 20e siècle. Pour le recensement de 1931, les cartes des circonscriptions électorales fédérales fixées dans la Loi sur la représentation de 1924 sont utilisées. En 2028, nous nous servirons probablement des cartes des circonscriptions fédérales électorales établies dans la Loi sur la représentation, 1933 pour parcourir les déclarations du recensement réalisé en 1936 dans les provinces des Prairies, une fois ces déclarations transférées à BAC.

Second élément de réponse : La logistique était une autre raison de classer géographiquement les déclarations de recensement.

Comme la plupart des recensements de la population, celui du Canada de 1931 visait à dénombrer une seule fois chaque personne vivant à l’intérieur des frontières du pays. À cette fin, le territoire du Dominion du Canada et les navires de la Marine ont été divisés en 15 167 unités de dénombrement. Une unité géographique de dénombrement, appelée sous-district de recensement, était affectée à un seul énumérateur (dans la plupart des cas) chargé de dénombrer chaque personne vivant dans ce sous-district de recensement.

Quatre personnes interagissent dans un paysage hivernal.

Réalisation du dénombrement en 1961 : un membre de la GRC discute avec trois personnes d’une communauté inuite pour recueillir des renseignements pour le recensement (e011177562)

« [L’énumérateur est] le seul fonctionnaire du recensement qui soit en contact direct avec la population. Il [ou elle] va de maison en maison et de ferme en ferme. C’est lui [ou elle] qui est responsable, en premier lieu, des renseignements inscrits sur les formules du recensement. Afin qu’un travail suffisant mais pas trop accablant soit confié à chaque énumérateur (l’expérience a démontré que la population à recenser doit être de 600 à 800 âmes dans les régions rurales ordinaires, et de 1,200 à 1,800 dans les agglomérations urbaines), […] il faut s’écarter en plusieurs cas des limites électorales […] et les arrondissements de scrutin ne conviennent pas toujours pour les fins des sous-districts de recensement. Dans tous ces cas, cependant, la division est effectuée de façon à permettre la compilation des résultats sous la forme requise pour les fins de la loi. » [Page 51]

L’établissement des frontières géographiques n’est pas une mince tâche :

« La délimitation et la définition des districts et sous-districts de recensement représentent un labeur considérable; cette tâche est entreprise environ deux ans avant la date du dénombrement. On ne se contente pas des conditions révélées par le recensement antérieur, mais on consulte les fonctionnaires locaux afin que nulle région habitée ne soit oubliée ou laissée sans l’organisation qui lui convient le mieux. » [Page 51]

La tâche de trouver une déclaration particulière 92 ans après le recensement de 1931 peut sembler intimidante, surtout dans des déclarations classées géographiquement (par districts et sous-districts de recensement). Pour vous donner un coup de main, les billets de blogue « Les sous-districts du recensement de 1931 : comment s’y retrouver? » (partie 1 et partie 2) décrivent les approches utilisées à BAC pour parcourir les 15 167 sous-districts utilisés pour le dénombrement lors du recensement de 1931.