Images des Artistes de guerre Canadien maintenant sur Flickr

Artistes de guerre canadiens réunit les portraits de dix-huit artistes de guerre canadiens de la Deuxième Guerre mondiale. Ces portraits, tirés des collections de Bibliothèque et Archives Canada, sont accompagnés de courtes biographies.

Les cahiers de William Redver Stark : ordonner les pages

Dans notre dernier billet sur William Redver Stark, nous avons appris que les 14 cahiers de dessins, en plus d’être incomplets, montraient des signes d’usure structurelle et physique. Il manque aussi de nombreuses pages dans cinq d’entre eux. On ne sait pas si elles ont été enlevées par Stark lui-même ou par quelqu’un d’autre plus tard, mais quoi qu’il en soit, cela a plusieurs effets négatifs :

  • L’autre moitié de l’in‑folio est détachée du bloc de feuillets
  • L’orientation et l’ordre des pages sont modifiés
  • Les bords des pages détachées sont endommagés, car ils dépassent les couvertures des cahiers
  • Le dos et la reliure deviennent instables et se détériorent
Photographie en couleurs de deux pages. On voit, sur le bord droit de la page de gauche, une étroite ligne d’aquarelle qui est la suite du dessin.

Une petite ligne d’aquarelle sur le bord de la page de gauche correspond au dessin de la page de droite et révèle que ces pages se suivent.

Pour résoudre ces problèmes, l’équipe de restauration a revu chaque page des cahiers afin de déterminer leur orientation et leur ordre d’origine. Tous les détails ont été observés et consignés soigneusement : le support, l’aquarelle, l’encre ou le graphite, la reliure et les pages endommagées. L’équipe a examiné le papier sous plusieurs sources de lumière et différents angles, scruté les plus menus détails au microscope et mesuré chaque page avec précision.

Photo en couleur d’un cahier de dessins ouvert montrant une aquarelle à gauche et la matière transférée à droite.

Transfert de matière : la page a été tournée avant que l’aquarelle soit sèche. Des pigments verts et bruns de la page précédente ont donc été transférés sur la page suivante. La page détachée est replacée au bon endroit.

Voici les indices les plus concluants révélant l’ordre d’origine des pages :

  • Les transferts et le chevauchement de la matière
  • Les dommages subis par le papier, comme des taches, des déchirures et des bouts manquants qui se répètent sur plusieurs pages
  • Les traces laissées par les instruments de l’artiste et la reliure
  • Les dimensions et l’ondulation du papier ainsi que l’endroit où sont percés les trous pour la reliure
  • Les notes de l’artiste, dont la date et le lieu
Photographie en couleurs d’un cahier de dessins ouvert. La page de gauche comprend le dessin d’un lion qui a laissé des traces sur la page de droite.

Le lion dessiné au crayon à mine, à gauche, a laissé une image symétrique sur la page de droite, confirmant ainsi que les deux pages détachées se suivent.

Après avoir documenté les preuves établissant l’ordre des pages, on a pu commencer le long processus consistant à réordonner celles-ci. Chaque détail a été catalogué dans un tableau de correspondance, pour bien comprendre l’ordre des pages dans chaque cahier.

Image noir et blanc d’un tableau employé pour cataloguer les dispositions actuelle et originale des pages.

Le plan décrit l’ordre actuel des pages et la disposition d’origine probable des cahiers. Les documents précisent le nombre de pages par signature (des groupes de feuilles pliées et cousues ensemble); le numéro et l’emplacement des pages manquantes, déplacées ou blanches; la pagination; et le type de papier. Les notes de l’artiste sont également inscrites.

La première page du tableau de correspondance donne des exemples de transfert et de chevauchement de la matière. Le chevauchement s’est produit lorsque Stark, en dessinant ou en peignant, a dépassé la page ou la zone prévue pour son œuvre. Le transfert de matière a eu lieu quand l’artiste a terminé son travail : une fois le cahier refermé, les pages sont entrées en contact avec des pigments humides ou friables. Dans les deux cas, la matière est visible sur les pages précédentes ou suivantes, ce qui révèle l’ordre d’origine.

Dans le prochain blogue de cette série, nous examinerons comment les pages endommagées nous aident à déterminer l’ordre des pages.

Les cahiers de dessins de William Redver Stark : quelques détails

Au cours des prochains mois, le blogue présentera une série d’articles visant à faire découvrir le travail de conservation qui se fait en coulisse. Grâce à cette activité, la collection de Bibliothèque et Archives Canada est conservée, préservée et mise à la disposition des générations futures qui pourront continuer d’en jouir. Ce faisant, nous accompagnerons l’équipe de conservation alors qu’elle s’affairera à préserver les cahiers de dessins de William Redver Stark. Cette année, nous avons eu un premier aperçu de la restauration des cahiers de dessins ainsi qu’un balado sur William Redver Stark. Au cours des prochains mois, l’équipe s’emploiera à la conservation des cahiers et à la documentation du processus de conservation sur le blogue, Facebook et Twitter.

Examen des cahiers de dessins : le travail préparatoire

Le papier utilisé dans les 14 cahiers de dessins est soit du papier vélin pour aquarelle soit du papier vélin à dessin. Le papier vélin est fabriqué au moyen d’un laminoir à fil tissé serré ou d’un moule arborant un modèle de tissage délicat. Comme on pouvait s’y attendre, les huit cahiers de dessins composés de papier à dessin ne comportent pas de filigrane. Les filigranes sont un motif ou un symbole, comme le nom du fabricant, imprimé sur un morceau de papier et que l’on peut voir quand on tient le papier devant une source lumineuse. Trois des six cahiers de dessins faits de papier pour aquarelle ont des filigranes de différents fabricants de papier britanniques.

Une photographie en couleur illustrant le dessin à l’aquarelle d’un cheval. Au bas de la feuille, on peut voir l’impression délicate du filigrane « 1915 England » (1915 Angleterre).

Filigrane indiquant « 1915 England » (1915 Angleterre) dans l’un des cahiers de dessins.

Les dimensions des cahiers de dessins varient de 84 x 126 mm à 145 x 240 mm, ce qui correspond approximativement à la taille d’un téléphone intelligent ou d’un jeu de cartes. Aucun des cahiers n’est paginé, mais en les regardant de plus près, on peut voir l’ordre dans lequel l’artiste a utilisé les cahiers; certains ont été utilisés du début à la fin, d’autres à partir de la fin jusqu’aux premières pages ou encore dans une séquence totalement aléatoire.

Une photographie en couleur de trois cahiers de dessins tachés déposés sur une table blanche à côté d’un téléphone intelligent afin de comparer la taille des objets.

Trois cahiers de dessins déposés à côté d’un téléphone intelligent afin de comparer la taille.

Un examen plus approfondi révèle d’autres éléments d’information importants. Certains des livres arborent encore l’étiquette du libraire, des étiquettes des coloristes ou des estampes à l’encre. On peut en retirer d’autre information sur la composition du papier, le format et la provenance du livre. Certaines étiquettes indiquent le nombre de pages, ce qui est particulièrement utile pour déterminer si des pages sont manquantes. L’examen a permis de conclure qu’il manquait de nombreuses pages dans ces cahiers de dessins. Les renseignements sur la provenance montrent aussi que les livres ont été acquis de divers relieurs, de libraires à Londres et en France et que certains étaient vendus à des consommateurs britanniques, français et allemands.

Photographie en couleur d’une étiquette jaune renfermant de l’information sur le relieur du cahier de dessins.

Exemple d’une étiquette d’un coloriste indiquant le fabricant, la provenance du cahier de dessins, le nombre de pages et la qualité du papier.

Les blocs de feuillets (le corps principal du livre) forment un cahier composé de quatre à huit in-folio. Un cahier est un groupe d’in-folio. Un in-folio est une seule page, pliée une fois. Tous les cahiers de dessins, sauf deux, ont été reliés de manière traditionnelle, l’un étant doté au dos de deux anneaux de métal et l’autre d’une reliure agrafée. Ces deux structures à reliure simple ont été fabriquées à la main et n’ont pas été conçues au moyen des méthodes de fabrication commerciale et industrielle communément utilisées dans la conception des livres à l’époque. Tous les cahiers de dessins sont dotés de couvertures de carton rigide. Les reliures sont unies et ont un aspect utilitaire, les couvertures et le dos n’arborant aucune décoration, à l’exception des notes manuscrites à l’encre ou au graphite, possiblement rédigées par l’artiste. Le dos de deux cahiers de dessins est fait de cuir, du tissu recouvrant le carton. Les autres livres ont des reliures de canevas beige dotées d’un fermoir à élastique. La plupart des cahiers de dessins sont munis d’un porte-crayon.

Les cahiers de dessins n’ont jamais fait l’objet de réparation ni de travaux de conservation, et ils présentent de multiples problèmes mineurs ou graves menaçant la stabilité, notamment :

  • des pages qui se détachent du dos
  • du papier déchiré et des morceaux de papier détachés
  • des pages manquantes
  • des pages placées dans un ordre autre que celui à l’origine
  • des fils de reliure brisés
  • un joint faible ou brisé reliant les blocs de feuillets aux couvertures
  • du ruban adhésif sur les couvertures
  • des zones fragilisées sur la couverture de tissu et du carton

Le prochain article de la série, intitulé « The William Redver Stark sketchbooks: page mapping », portera sur les méthodes employées par l’équipe de conservation pour déterminer l’ordre des pages dans les cahiers de dessins.

Visitez Flickr pour consulter d’autres images illustrant l’examen aux fins de la conservation.