De l’eau dans les collections!

Mais ce n’est pas ce que vous croyez…

Nous avons récemment dû déménager deux exemplaires de l’œuvre intitulée Venise undersee, qui se trouvent dans la Réserve (livres rares).

Nous avons retiré les objets de leur sac de soie d’origine et découvert des traces de rouille sur le métal. Alerte!

Les œuvres font partie de la collection de livres d’artistes de Bibliothèque et Archives Canada (BAC). La surface de ces globes de bronze de la taille approximative d’une boule de bowling à cinq quilles est parsemée d’extraits de poème en braille. Daniel Hogue a produit dix exemplaires de son œuvre en 1998. Il était inquiétant de voir les premières traces de rouille sur un des globes et une tache assez grande sur une autre de ces magnifiques pièces.

Photographie couleur d’un globe en métal sur un brocart. Une patine de rouille est très visible à la surface du globe.

De la rouille… Que se passe t il?

Notre première idée était de fabriquer de nouveaux contenants et de déménager les pièces au Centre de préservation de BAC, dans une chambre forte avec un faible taux d’humidité, et de vérifier si la corrosion se poursuivait.

Toutefois, la fiche AMICUS a révélé que le taux d’humidité n’y était pour rien puisque les globes de bronze contiennent de l’eau prélevée des canaux de Venise! En effet, en secouant les globes, on entend l’eau s’agiter.

Nous avons là un parfait exemple de « vice propre », c’est‑à‑dire une caractéristique inhérente du document original ayant un effet nuisible à long terme. Il est parfois possible d’en ralentir les effets. À titre d’exemple, la fraîcheur ralentit la détérioration du papier causée par l’acide. Dans le cas présent toutefois, le seul moyen d’arrêter la détérioration serait de modifier la structure de l’objet en y perçant un trou afin de retirer l’eau.

Pour compliquer encore un peu les choses, il est important de tenir compte de l’intention de l’artiste avant de prendre ce type de décisions. La corrosion est‑elle un effet recherché par l’auteur? L’artiste sera‑t‑il mécontent du sort réservé à ses œuvres? Nous avons communiqué avec lui pour en avoir le cœur net. Son verdict est qu’il vaut mieux laisser aller les choses : l’eau érode les structures à Venise et fait la même chose avec cette œuvre.

Photographie couleur d’un globe de bronze et du brocart dans lequel il est emballé (à sa droite) dans un contenant matelassé. Une couche de polyester placée sous la pièce métallique recueillera les éventuelles fuites d’eau.

La pièce est prête à reprendre sa place. Le temps fera son œuvre.

Pour répondre à votre question, nous ne craignons pas qu’une fuite endommage les autres pièces de la collection, car la petite quantité d’eau serait vraisemblablement absorbée par les contenants de carton dans lesquels les globes sont entreposés.

Nous continuerons d’évaluer la vitesse du processus de corrosion pour décider comment gérer ce qu’il restera de l’œuvre.