Salade à l’ananas et au fromage des années 1950

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Par Ariane Gauthier

Les années 1950 ont été une décennie déterminante pour le consumérisme dans le monde occidental, en particulier dans les Amériques. La croissance économique, les progrès technologiques et les médias de masse ont joué un rôle central dans la formation d’une culture axée sur la consommation qui s’est imposée dans l’après-guerre. Cette transformation a jeté les bases de la société de consommation moderne et de l’économie mondiale qui allaient continuer d’évoluer au cours des décennies suivantes.

Dans les années 1950, l’essor des conserves aux États-Unis a marqué un changement clé dans la culture alimentaire américaine et, par extension, canadienne. À mesure que de plus en plus de femmes entraient sur le marché du travail et que les horaires familiaux chargés devenaient la norme, les produits en conserve comme les légumes, les soupes et les viandes offraient une solution rapide et fiable pour la préparation des repas. Ce boum a été alimenté par les progrès des technologies de conservation des aliments, qui ont rendu les produits en conserve abordables et accessibles au ménage moyen. Avec l’avantage supplémentaire d’une longue durée de conservation, ces produits ont contribué à redéfinir la cuisine maison, pour la rendre plus simple et plus efficace, tout en répondant à l’appétit croissant des consommateurs pour des produits pratiques.

C’est dans ce contexte historique que la Kraft Foods Limited a publié le livret 40 famous menus from O.K. Economy & Shop-rite (Quarante menus populaires des magasins O.K. Economy et Shop-rite), une recette duquel fera l’objet de cet article de blogue.

La couverture de 40 famous menus from O.K. Economy & Shop-rite. On y voit des images de certains plats préparés suivant les recettes du livret.

40 famous menus from O.K. Economy & Shop-rite. (OCLC 1006679567)

On y trouve une multitude de recettes mettant en valeur les divers produits Krafts. Mais je m’intéressais surtout aux recettes à base d’aspic ou de gélatine. Ce qui me fascinait, entre autres, c’était que le but premier de plusieurs recettes avec de la gélatine n’était pas tant d’être appétissantes que de vouloir impressionner. À la base, les recettes avec gélatine cherchaient surtout à mettre en valeur la beauté des moules qu’on pouvait se procurer et l’art esthétique d’y figer des crudités. Dans les années 1950, les choses ont changé un peu, il y avait un désir de manger de l’aspic pour le plaisir de son goût, mais l’idée d’impressionner demeurait, comme on peut le voir avec la recette que j’ai choisie.

La recette comprend des images des étapes de cuisson à la droite et une suggestion de menu au haut de la page.

Recette de salade à l’ananas et au fromage. (OCLC 1006679567)

Les ingrédients témoignent d’une volonté sincère de vouloir créer un plat goûteux. En théorie, les saveurs devraient bien se mélanger. Le seul intrus, quelque peu suspect, est le fromage cheddar râpé. Cela dit, on remarque, dans l’avant-dernière phrase de la première étape, le désir d’impressionner que j’ai soulevé plus tôt : Add to lime jelly, then pour a small amount (enough to make a thin layer on the bottom) into a 6-cup star mold, or other fancy-shaped mold. qu’on peut traduire par « Ajouter à la gelée à la lime, ensuite verser une petite quantité (assez pour former une fine couche) dans un moule en forme d’étoile de 6 tasses, ou tout autre moule de forme de fantaisie. »

La précision au sujet du style du moule trahit, à un certain degré, l’intention de créer quelque chose d’impressionnant.

Sur ce, je me suis lancée dans la confection de cette recette en espérant avoir trouvé là quelque chose qui serait savoureux.

Les ingrédients sont les ananas broyés en conserve, le paquet de poudre de gelée à la lime, la brique de fromage à la crème, et le bloc de fromage cheddar.

Les ingrédients pour la recette de salade à l’ananas et au fromage, avec le moule. (Photo par Ariane Gauthier)

Une fois les ingrédients réunis, la recette se fait assez rapidement. Pour commencer, il fallait dissoudre le jello à la lime dans une tasse d’eau chaude, ensuite le mélanger avec le jus d’ananas, puis verser une fine couche du liquide dans le moule. Une fois fait, il fallait laisser reposer le moule au réfrigérateur pour que la gelée fige un peu.

Il faut commencer par égoutter les ananas broyés pour en tirer le jus. Ensuite, mélanger le sachet de poudre de gelée dans une tasse d’eau chaude et y ajouter le jus réservé.

La première étape de la recette, soit la préparation du jello à la lime. (Photos par Ariane Gauthier)

Une fois la première étape accomplie, il faut verser une fine couche du jello liquide dans le moule et laisser figer au réfrigérateur.

Versage à la louche de la première couche de jello dans le moule. (Photo par Ariane Gauthier)

En attendant, j’ai passé à la prochaine étape. J’ai combiné le reste du mélange liquide de jello à la lime et jus d’ananas avec le fromage à la crème. J’ai malaxé le tout jusqu’à ce que ce soit bien lisse et j’ai ensuite mis le bol au réfrigérateur pour une trentaine de minutes.

Il faut combiner le restant du mélange liquide jello-jus avec le fromage à la crème. Une fois bien incorporé, le laisser dans son bol et l’envoyer au frigo pour qu’il épaississe.

La deuxième étape de la recette de salade à l’ananas et au fromage. (Photos par Ariane Gauthier)

Ceci a permis d’épaissir le liquide et de pouvoir intégrer les ananas broyés et le fromage cheddar râpé de manière homogène. Après, il était question d’ajouter ce mélange dans le moule puis qu’il repose au frigo quelques heures.

Une fois le mélange épaissi, il faut intégrer l’ananas et le cheddar râpé avant de tout déposer dans le moule.

La quatrième étape de la recette de salade à l’ananas et au fromage. (Photos par Ariane Gauthier)

Le lendemain, j’ai apporté le produit fini au travail et j’ai eu le plaisir de révéler le plat à mes collègues. Voici le résultat :

La salade à l’ananas et au fromage en trois temps.

Salade à l’ananas et au fromage. (Photos par Mélanie Gauthier)

Au moment de retourner le moule dans une assiette, la révélation s’est faite au son de « oh! » et de « ah! » inquiets, voire quelque peu dégoûtés. Je ne sais pas pourquoi, mais je m’attendais à ce que le produit fini soit plutôt jaunâtre et non vert. Sous le regard de mes collègues, j’ai pris la première bouchée et j’ai été en mesure d’en encourager un autre à essayer ladite « salade ». Son commentaire englobe bien mes propres impressions. Il a dit : « C’est la trinité maudite : température, texture et saveur écœurantes. »

À la fin, nous n’étions que cinq à avoir osé essayer le plat. Les autres se sont contentés de l’odeur intense du fromage à la crème et de l’expérience émétique de trancher la gélatine.

C’est la première recette que je ne vous recommande pas d’essayer. Cependant, je continue à croire malgré cet échec qu’il est possible de créer une recette de gélatine ou d’aspic savoureuse.

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Autres ressources


Recette – Salade à l’ananas et au fromage

1 paquet de gelée en poudre à saveur de lime
1 tasse d’eau chaude
1 tasse d’ananas broyés en conserve
1 paquet de 8 oz de fromage à la crème Philadelphia
1 paquet de 8 oz de fromage cheddar fort de marque Cracker Barrel
Chicorée frisée ou laitue

  1. Dissoudre la gelée en poudre à la lime dans l’eau chaude. Égoutter l’ananas; mesurer le jus et ajouter de l’eau froide pour obtenir 1 tasse. Ajouter à la gelée à la lime, puis verser une petite quantité (assez pour faire une fine couche au fond) dans un moule en étoile de 6 tasses, ou tout autre moule de forme de fantaisie. Laisser refroidir au réfrigérateur.
  2. Pendant ce temps, ramollir le fromage à la crème. Ajouter graduellement le reste du mélange de gelée au fromage à la crème, en mélangeant jusqu’à l’obtention d’une consistance lisse. Réfrigérer jusqu’à ce que le mélange épaississe légèrement.
  3. Râper le fromage cheddar de marque Cracker Barrel.
  4. Intégrer le fromage râpé et l’ananas broyé au mélange de fromage à la crème légèrement épaissi. Verser sur la couche de gelée ferme dans le moule. Laisser refroidir au réfrigérateur jusqu’à ce que la gelée soit ferme.
  5. Démouler sur un plat de service. Garnir avec de la chicorée frisée ou de la laitue.

Donne 6 portions.


Ariane Gauthier est archiviste de référence à la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Salade de légumes en gelée : moins, c’est mieux!

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Par Rebecca Murray

Quand j’ai feuilleté le livre de recettes de l’armée canadienne, je n’ai pas seulement cherché les desserts, mes yeux se sont également posés sur une variété de recettes savoureuses de pains, de pâtés à la viande et de salades. C’est là que la salade de légumes en gelée entre en scène!

Couverture de livre bleue, légèrement usée, qui porte le titre « Canadian Army Recipe Book » en lettres majuscules. Au-dessus du titre figure l’insigne de l’armée canadienne surmonté d’une couronne de saint Édouard. L’insigne représente trois feuilles d’érable sur une même tige et une paire d’épées croisées, le tout en gris argenté.

Couverture d’un livre de recettes de l’Armée canadienne, publié par le ministère de la Défense nationale, 1961 (OCLC 299227447).

Vous avez peut-être déjà vu des salades en gelée ou étagées dans des émissions de cuisine télévisées ou des téléromans qui se déroulent dans les années 1960 ou 1970. Ou peut-être avez-vous eu le « plaisir » d’en faire l’expérience à la maison. Quand on m’a invitée à un barbecue familial l’été dernier, je me suis dit que c’était l’occasion idéale pour préparer cette salade de légumes en gelée. Je devais tout d’abord rassembler les ingrédients et me préparer à cuisiner. Oui, à cuisiner, car cette salade nécessite de la cuisson, ce qui n’est pas toujours agréable dans la chaleur de l’été, mais c’est essentiel pour réussir cette recette!

Page de texte qui présente une recette de salade de légumes en gelée.

Recette de salade de légumes en gelée tirée du livre de recettes de l’Armée canadienne (OCLC 299227447).

Comme la recette originale était destinée à nourrir un grand nombre de personnes, j’ai dû faire des calculs pour ajuster les quantités. Cette fois, j’ai suivi mon propre conseil et j’ai vérifié mes mesures PLUSIEURS fois avant de me mettre aux fourneaux.

Ingrédients Recette originale entière Quart de recette
Gélatine (A) 12 oz 3 oz (90 ml)
Eau froide (A) 2,5 tasses 0,625 tasse (150 ml)
Sucre (A) 12 oz 3 oz (90 ml)
Sel (A) 6 oz 1,5 oz (45 ml)
Vinaigre (A) 3 tasses 3/4 tasse (180 ml)
Eau bouillante (A) 7 pintes 1,75 pinte ou 7 tasses (1,75 litre)
Poivre de Tasmanie (A) 6 1,5
Clous de girofle entiers (A) 4 1
Oignons hachés (A) 6 oz 1,5 oz (45 ml)
Feuilles de céleri hachées (A) 6 oz 1,5 oz (45 ml)
Chou râpé (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Carottes râpées (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Pois verts cuits (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Haricots verts en dés, cuits (B) 2 lb 1/2 lb (250 g)
Piments rouges coupés en petits dés (B) 2 oz 1/2 oz (15 ml)
Poivrons verts coupés en petits dés (B) 4 oz 1 oz (30 ml)
Ingrédients frais et secs présentés sur un linge à vaisselle vert.

Préparation des ingrédients, de gauche à droite : haricots verts, chou, poivron vert, carottes, sachets de gélatine, petits pois surgelés et ingrédients secs (sucre et sel). Photo : Rebecca Murray.

Prochaine étape : les ingrédients! Après avoir calculé les quantités, je devais rassembler les ingrédients. La plupart se trouvaient déjà dans mon garde-manger ou étaient faciles à trouver en épicerie. La seule exception? Le poivre de Tasmanie (pepperberry, en anglais), une épice australienne aux notes fruitées et épicées (à ne pas confondre avec les grains de poivre). Je n’ai pas trouvé de poivre de Tasmanie et j’ai omis les piments rouges, mais j’ai été agréablement surprise de constater que le plat n’en avait pas pâti. Un voisin TRÈS serviable m’a sauvée à la dernière minute en me fournissant des clous de girofle entiers. J’ai également remplacé le chou vert par du chou rouge, ce qui a donné une touche vibrante au plat final. Il n’est donc pas seulement délicieux, mais il a aussi belle allure!

La structure de cette recette m’a vraiment interpellée (ce qui sera peut-être le cas pour d’autres archivistes ou cuisiniers!). En regroupant les ingrédients de chaque catégorie, « A » et « B », il m’a été plus facile de me préparer et de tout garder séparé au fur et à mesure que je travaillais. J’ai hésité à modifier la méthode, même si j’avais modifié les quantités, mais j’ai fait tremper la gélatine plus longtemps que les 10 minutes recommandées et j’ai fait mijoter les autres ingrédients « A » 5 minutes en les surveillant de près (ça sentait vraiment bon!).

J’aurais bien aimé avoir une estimation de la durée de refroidissement, à l’étape 4. J’ai laissé le mélange sur le comptoir environ 45 minutes avant de passer à l’étape suivante, qui était franchement un peu intimidante, mais aussi amusante!

Voici ce à quoi ressemblaient les légumes après que j’ai filtré le bouillon (dans lequel j’ai ajouté la gélatine dissoute) et l’avoir versé dans « B ». J’ai l’habitude d’égoutter les choses au-dessus de l’évier, et non dans un autre bol, et j’ai donc frôlé la catastrophe lorsque je me suis dirigée vers l’évier. Heureusement, j’ai dévié vers le comptoir à temps pour le premier de deux transferts qui risquaient d’être périlleux!

Un bol rempli de légumes colorés dans un liquide vu du dessus.

Une photo de la deuxième partie de l’étape 4. Photo : Rebecca Murray.

Il n’y a eu qu’un seul vrai pépin, comme le montre la photo ci-dessous. Étonnamment, ce n’est pas le transfert risqué du bouillon chaud (ou des ingrédients « A ») dans les ingrédients « B » qui a provoqué un déversement, mais plutôt une tentative maladroite de réarranger les portions pour une photo.

Trois coupes de salade gélifiée violette sur fond vert, à côté d’un plus grand bol du même plat. Une petite partie du liquide et de la garniture s’est répandue sur le fond vert et le comptoir gris.

Ne soyons pas trop tristes d’avoir renversé de la salade en gelée – ça ressemble presque à de l’art abstrait! Photo : Rebecca Murray.

Dans l’ensemble, les réactions ont été positives, mais je retiens surtout qu’avec ce plat, moins c’est mieux! Il s’agit d’un plat relativement facile, qu’on prépare à l’avance, idéal pour toute réunion de famille, quel que soit le temps de l’année.

Une main tient une petite coupe en verre remplie de salade en gelée.

Une portion parfaite de salade en gelée! Photo : Rebecca Murray.

Bon appétit!

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Traduction française de la recette

Méthode

  1. Faire tremper la gélatine dans l’eau froide pendant 10 minutes.
  2. Combiner les autres ingrédients de la liste « A ». Porter à ébullition et laisser mijoter 5 minutes.
  3. Passer au tamis. Ajouter la gélatine trempée [au bouillon obtenu] et mélanger jusqu’à ce que la gélatine soit dissoute.
  4. Laisser tiédir. Ajouter les ingrédients de la liste « B ».
  5. Placer dans des moules humectés d’eau. Réfrigérer.

Vous trouverez les autres recettes de cette série sous #CuisinezAvecBAC.


Rebecca Murray est conseillère en programmes littéraires au sein de la Direction générale de la diffusion et de l’engagement à Bibliothèque et Archives Canada.

Biscuits aux patates de 1917 : Comment la ménagère peut aider à préserver les stocks de blé du pays

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Ariane Gauthier

Le Canada entre dans la Première Guerre mondiale le 4 août 1914, aux côtés de la Grande-Bretagne et de son empire. La guerre de mouvement qui oppose la Triple Alliance à la Triple Entente se transforme rapidement en guerre de tranchées. À partir de 1915, une véritable guerre d’usure se déroule sur le continent européen et dans le bassin méditerranéen.

En Europe, la dévastation des campagnes et l’arrivée d’une foule immense de soldats venus du monde entier compliquent l’approvisionnement en nourriture. La Grande-Bretagne mobilise rapidement les ressources de son empire afin d’appuyer son effort de guerre. Au Canada, les produits agricoles et industriels sont envoyés aux troupes outre-mer. Mais ces efforts ne suffisent pas et, bien vite, tous les ordres de gouvernement cherchent à accroître leur aide, allant jusqu’à rationner des ressources essentielles.

Au début de la troisième année du conflit, les provisions de blé s’épuisent. Prévoyant un rationnement, le ministère ontarien de l’Agriculture publie en août 1917 le livret War Breads: How the Housekeeper May Help to Save the Country’s Wheat Supply. On y affirme notamment que chaque livre de farine économisée donne plus de pain à l’armée. On admet cependant que les substituts de farine de blé proposés ne donnent pas toujours du pain ou des biscuits savoureux. Si ces pains de qualité inférieure ne sont pas au goût de tous, ils ont au moins l’avantage d’être plus sains que le pain blanc.

Page couverture d’un livret avec des photos de plusieurs sortes de pains.

Page couverture du livret War Breads: How the Housekeeper May Help to Save the Country’s Wheat Supply (OCLC 1007482104).

Intriguée par ce livret plutôt particulier, j’ai choisi une recette qui me donnerait une idée des efforts consentis par les ménagères au nom du patriotisme : des biscuits faits avec des patates. J’étais optimiste puisque j’avais déjà mangé et bien aimé des pains et des beignes aux pommes de terre.

La liste d’ingrédients et les instructions pour préparer la recette.

Recette de biscuits aux patates tirée du livret War Breads: How the Housekeeper May Help to Save the Country’s Wheat Supply (OCLC 1007482104).

Je n’ai rien remarqué d’anormal en survolant la liste d’ingrédients. Quand j’ai commencé la préparation, toutefois, la quantité dérisoire de sucre (½ cuillère à soupe) et de beurre (1 cuillère à soupe) m’ont portée à croire que les biscuits seraient fades ou auraient un goût de levure très prononcé. Ce n’était pas étonnant toutefois, car pendant la guerre le rationnement ne touchait pas seulement la farine de blé.

De la levure, trois pommes de terre, du beurre, un œuf, du lait, du sucre et de la farine.

Les ingrédients de la recette de biscuits aux patates. Photo : Ariane Gauthier

J’ai commencé par rassembler les ingrédients. Bizarrement, la recette recommande de cuire et non de faire bouillir les pommes de terre. C’est peut-être pour contrôler le niveau d’humidité? Quoi qu’il en soit, je les ai mises au four de 45 à 60 minutes à 400 °F, jusqu’à ce qu’une fourchette s’insère facilement.

Photo du dessus : trois pommes de terre sur une plaque couverte de papier parchemin, dans un four. Photo du dessous : des pommes de terre pilées grossièrement, dans un bol.

Les pommes de terre cuites au four, puis pelées et pilées. Photos : Ariane Gauthier

L’étape suivante était la préparation du mélange à levure. Comme je n’ai pas trouvé de levure fraîche (yeast cake, dans la recette originale en anglais), je me suis tournée vers la levure sèche. J’ai mélangé le lait tiède, la levure et un peu de farine, puis j’ai réservé le mélange pour qu’il lève.

Le mélange dans un bol de cuisson.

Le mélange de levure, de farine et de lait. On remarque la mousse et les bulles formées par la levure qui s’active. Photo : Ariane Gauthier

J’ai pilé les patates et ajouté le sel, le sucre, le beurre et du lait bouillant, jusqu’à ce que le mélange soit lisse. J’ai ensuite ajouté le mélange à levure, l’œuf et le reste de la farine. Le four avait alors suffisamment refroidi pour que je puisse y laisser la pâte reposer et lever.

Les étapes du mélange des ingrédients pour former la pâte.

Préparation de la pâte à biscuits aux patates. J’ai vigoureusement mélangé les ingrédients à chaque étape pour que le tout soit homogène. Photos : Ariane Gauthier

Je ne m’attendais pas du tout à ce que la pâte soit si collante en raison de la proportion des ingrédients secs par rapport aux ingrédients humides. Ayant bien lu l’avertissement dans la recette, j’ai évité de manipuler la pâte. J’ai donc utilisé des cuillères pour verser le mélange dans un moule à muffins beurré.

Les quatre étapes pour le mélange et le transfert de la pâte, dont le prélèvement d’une partie de la pâte levée dans une cuillère, et le versement de la pâte dans un moule à muffins.

La pâte, avant et après avoir levé pendant quelques heures dans un endroit chaud. Comme la recette l’indique, la pâte était bien trop collante pour être façonnée avec les mains. Photos : Ariane Gauthier

Comme c’est souvent le cas avec les vieilles recettes, la température de cuisson n’est pas précisée. J’ai mis le four à 400 °F et surveillé la cuisson attentivement pendant 15 à 20 minutes, jusqu’à ce que la pâte soit dorée.

Quatre biscuits aux patates dans une assiette. Le premier est garni de confiture de fraises, un autre est farci de baies, et les deux autres sont nature.

Les biscuits aux patates, cuits. Celui de gauche est garni de confiture. J’ai ajouté des baies dans un autre avant la cuisson. Photo : Ariane Gauthier

Et voilà le résultat! Qu’en pensez-vous?

La forte odeur de levure m’a frappée dès que j’ai sorti les biscuits du four. Quant à la saveur, elle est extraordinairement fade. Heureusement, la confiture de fraises traditionnelle que j’avais chez moi a sauvé la mise (un grand merci à mes parents!), car ces biscuits ne semblent pas conçus pour être dégustés nature.

Comme d’habitude, j’ai offert des biscuits à mes collègues pour avoir leur avis. C’est la première fois qu’une de mes recettes polarise autant l’opinion! Personne n’est resté indifférent : on aime ces biscuits ou on les déteste.

Si vous avez le goût de l’aventure, ou si vous voulez juste goûter une tranche d’histoire, je vous recommande d’essayer ces biscuits aux patates. Mais n’oubliez pas la confiture!

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Autres ressources


Ariane Gauthier est archiviste de référence à la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Un gâteau au chocolat de 1961

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Rebecca Murray

Un bon gâteau au chocolat, ça plaît à tout le monde. C’est ce que je me suis dit quand j’ai décidé de relever le défi de préparer une recette tirée d’un livre de cuisine de l’Armée canadienne, paru en 1961.

Livre bleu marine légèrement usé portant le titre « Canadian Army Recipe Book » écrit en lettres majuscules sous les insignes de l’Armée canadienne : la couronne de saint Édouard, un rameau à trois feuilles d’érable et deux épées croisées. Le titre et l’insigne sont d’un gris argenté.

Couverture d’un livre de cuisine de l’Armée canadienne publié par le ministère de la Défense nationale, vers 1961. (OCLC 299227447)

Quand je parcourais les recettes, dont plusieurs ne m’étaient pas inconnues, trois choses m’ont frappée.

D’abord, les quantités. La plupart des recettes offrent un rendement de 100 portions ou plus! J’ai l’habitude de doubler mes recettes ou de les couper de moitié, mais pas de calculer si je dois les diviser par quatre ou par cinq. En général, ma décision dépend du nombre d’œufs, car ils sont plutôt difficiles à diviser en deux! Par ailleurs, tous les ingrédients, dans les recettes, sont donnés en poids plutôt qu’en volume, ce à quoi je suis beaucoup plus habituée. Manifestement, les auteurs de ce livre de cuisine n’étaient pas aux prises avec le rationnement, comme c’était le cas dans le livre de 1943 consulté par ma collègue.

Ensuite, la clarté. Je n’ai jamais vu un livre de cuisine aussi bien organisé. Les descriptions sont détaillées sans être verbeuses. Le chapitre d’introduction définit certains termes, fournit des tables de conversion et explique comment choisir des coupes de viande ou préparer certains ingrédients pour de meilleurs résultats. Comme vous pourrez le constater dans les directives de mon gâteau, il y a aussi des références à d’autres recettes du livre pour éviter les répétitions. La chose n’est pas exceptionnelle, mais dans ce livre, tout est numéroté pour simplifier au maximum les renvois.

Enfin, la simplicité. Ça ne devrait peut-être pas m’impressionner, mais à notre époque où de nombreuses vidéos en ligne présentent des recettes élaborées du type « comment fabriquer un volcan en patates pilées avec de la lave en sauce et des dinosaures », j’étais agréablement surprise de trouver des recettes de base (dans le registre « steak, blé d’Inde, patates », pour les amateurs de La petite vie). On cherche vraiment à optimiser le fruit de nos efforts!

Gâteau au chocolat

 Pain brun

 Fèves au lard

 Beignes

Je pourrais continuer longtemps, mais vous comprenez l’idée. De nombreuses recettes ont des variantes pour les changements de saison ou les fêtes. J’ai aussi copié une section très pratique proposant des « repas à mettre dans un sac à dos », car une mère n’a jamais trop d’idées pour les boîtes à lunch. Mais je m’écarte.

Venons-en à la pièce de résistance : le gâteau au chocolat!

Une page de texte comprenant des notes, des directives et une liste d’ingrédients.

Recette de gâteau au chocolat tirée du livre de cuisine de l’Armée canadienne. (OCLC 299227447)

Il me fallait d’abord choisir un rendement approximatif et ajuster les ingrédients en conséquence. Les plus attentifs remarqueront que j’ai commis une erreur de calcul : la recette prévoit des quantités de sucre et de farine différentes, mais elles sont identiques après ma conversion.

J’ai seulement remarqué l’erreur après avoir mélangé les ingrédients et mis le gâteau au four. Heureusement, cette petite faute n’a eu aucun impact sur le goût. C’est tout de même un bon rappel qu’il vaut mieux vérifier plusieurs fois avant de commencer!

Ingrédient Recette entière Quart de recette
Gras 3 livres, 8 onces ⅞ livre (396 grammes)
Sucre 7 livres 1 ¾ livre (793 grammes)
Œufs 4 ⅔ tasses (environ 24) 6
Vanille 3 cuillères à soupe ¾ cuillère à soupe
Farine à pâtisserie non tamisée 6 livres, 4 onces 1 ¾ livre (793 grammes)
Cacao 1 livre ¼ livre (113 grammes)
Poudre à pâte 5 onces 1 ¼ once
Sel 1 once ¼ once
Lait 2 ½ pintes 2 ½ tasses

Je me suis ensuite lancée dans la préparation des ingrédients. C’était plutôt simple, car ceux-ci sont tout à fait classiques. Pour le corps gras, j’ai choisi du beurre. Je n’ai malheureusement rien vécu qui pourrait justifier la rédaction d’un second billet de blogue sur les emballages de beurre

Ingrédients secs et humides d’un gâteau dans divers récipients sur une nappe verte.

Les ingrédients préparés, de gauche à droite : la farine, la vanille, le sucre, les œufs, le beurre, le mélange de cacao, de poudre à pâte et de sel, et le lait. Photo gracieuseté de l’auteure, Rebecca Murray.

J’ai mélangé certains des ingrédients selon les instructions, puis j’ai incorporé le tout graduellement. Je dois admettre que je n’ai pas l’habitude de suivre rigoureusement les recettes. J’ai tendance à vouloir aller trop vite et j’omets parfois certaines étapes, au début. Je devais aussi composer avec un sous-chef qui n’aimait pas s’arrêter pour prendre des photos et relire la recette! Mais grâce à l’expérience acquise après de nombreux essais et erreurs, je parviens généralement à réussir des recettes simples en atteignant un bon équilibre entre le respect des directives et la petite touche personnelle que j’aime ajouter à mes plats.

J’ai versé la pâte dans trois (oui, trois!) moules à gâteau et j’ai cuit le tout à 350 °F. Ça sentait TRÈS bon! La recette prévoit une cuisson de 30 à 45 minutes. Le gâteau rond était cuit après environ 40 minutes, tandis que le carré a pris près de trois quarts d’heure. Pour le gâteau Bundt, il a fallu attendre entre 50 et 55 minutes. Chaque four est différent, et la présence de trois gâteaux a sûrement eu un effet sur la durée de la cuisson.

Trois gâteaux brun pâle sur des grilles.

Les trois gâteaux cuits en train de refroidir sur le comptoir. Photos gracieuseté de l’auteure, Rebecca Murray.

Sur un des gâteaux, nous avons mis un glaçage maison composé de sucre à glacer, de beurre, d’une touche de lait, d’extrait de menthe et de colorant alimentaire.

Le gâteau sur un plateau en verre.

Vue en coupe du gâteau avec son glaçage. Verdict : il est délicieux! Photo gracieuseté de l’auteure, Rebecca Murray.

Mes cobayes s’entendent pour dire que la recette a bien traversé l’épreuve du temps. J’utilise généralement des préparations du commerce, mais j’ai constaté avec ce gâteau que des recettes à la fois simples et savoureuses ne sont pas beaucoup plus longues à préparer. La prochaine fois, j’essaierai un glaçage plus conventionnel, même si celui à la menthe faisait très bien l’affaire!

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Rebecca Murray est conseillère en programmes littéraires au sein de la Direction générale de la diffusion et de l’engagement à Bibliothèque et Archives Canada.

La tarte à la patate douce : une valeur sûre depuis 1909

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Dylan Roy

Vous ne me connaissez probablement pas, mais si vous avez lu les blogues d’Ariane Gauthier, vous avez déjà vu mes mains! Je lui ai servi de modèle pour les photos de cette série culinaire, que vous devez absolument lire si ce n’est déjà fait. Aux côtés de cette cuisinière passionnée et beaucoup plus compétente que moi, j’ai découvert l’univers complexe et fascinant de la cuisine… et c’est (presque) en solo que je me suis lancé dans la recette de tarte à la patate douce que je vous présente aujourd’hui.

Suivre une recette peu détaillée m’inquiétait un brin : après tout, c’était mon premier projet de cuisine. Malgré mes craintes, le résultat fut tout à fait satisfaisant. Je vous recommande vivement d’essayer cette tarte vous aussi. Mais avant de mettre la main à la pâte, voyons d’où vient la recette.

L’ouvrage Culinary landmarks or Half-hours with Sault Ste. Marie housewives, publié en 1909, est l’œuvre des auxiliatrices de Saint-Luc, dans la région de Sault Ste. Marie (Ontario). C’est la troisième édition du Handy Cook Book, deux éditions revues et augmentées ayant été publiées après le grand succès de la première mouture.

Pour un novice comme moi, la première question est de savoir par où commencer. J’ai trouvé ma réponse avec cette recette de tarte à la patate douce, trouvée dans un livre déniché sur Aurora, le catalogue de bibliothèque de Bibliothèque et Archives Canada (BAC).

Recette proposée par madame P. T. Rowland.

Recette de tarte à la patate douce tirée du livre Culinary landmarks or Half-hours with Sault Ste. Marie housewives (OCLC 53630417).

Rien de compliqué pour la garniture : une livre de patates douces, trois quarts de livre de beurre, autant de sucre, six œufs, de la muscade, un soupçon de whisky et du zeste de citron.

Avez-vous remarqué que la recette n’explique pas comment faire la croûte? Fort heureusement, un des premiers blogues de la série est venu à ma rescousse; nous reparlerons de cette étape plus loin.

Une livre de beurre, une bouteille de whisky, un sac de farine, un sac de sucre, un citron, un pot de muscade, une boîte d’œufs et une patate douce.

Ingrédients utilisés par l’auteur pour la recette de tarte à la patate douce tirée de Culinary landmarks or Half-hours with Sault Ste. Marie housewives. Photo gracieuseté d’Ariane Gauthier.

Pour la garniture, il faut d’abord faire bouillir les patates douces avec leur pelure. N’en faisant qu’à ma tête, j’ai décidé de les éplucher.

Étape suivante : piler les patates encore chaudes dans une passoire. Ça demande un peu d’huile de bras, mais vous avez votre entraînement du jour!

Mosaïque de trois images : des tranches de patates douces sont déposées dans un chaudron d’eau bouillante; des patates douces sont écrasées à l’aide d’une spatule; et la purée de patates passe à travers les trous d’une passoire.

Faire bouillir et piler les patates douces. Photo gracieuseté d’Ariane Gauthier.

Il faut ensuite battre six œufs dans un bol, puis les réserver. On crème ensuite le beurre et le sucre, et on intègre les patates douces sans arrêter de battre. Enfin, on ajoute les œufs et on mélange jusqu’à ce que le tout soit homogène.

Mosaïque de quatre images. Dans les deux premières, du sucre est versé dans le bol d’un batteur sur socle contenant déjà le beurre. Dans la troisième image, les patates douces pilées sont incorporées dans le bol; dans la quatrième image, on ajoute les œufs.

Battage du mélange de beurre, de sucre, de patates douces et d’œufs. Photo gracieuseté d’Ariane Gauthier.

Le mélange ne m’a pas semblé très ragoûtant, mais s’il y a une chose que j’ai apprise avec cette recette, c’est qu’il faut garder confiance et persévérer jusqu’au bout! J’ai donc réservé mon jugement pour le résultat final.

J’ai ajouté les assaisonnements : muscade, whisky et zeste de citron, des ingrédients essentiels pour rehausser le goût. J’ai commencé par une once de whisky, une pincée de zeste et une pincée de muscade, mais ce n’était pas assez. Tout en continuant à mélanger, j’ai rajouté du zeste et de la muscade, un petit peu à la fois. Après quelques minutes, le résultat était parfait. Voilà pour la garniture!

Pour ce qui est de la croûte, je l’ai fait cuire environ 5 minutes avant d’y verser la garniture. Je vous laisse essayer pour savoir si l’idée est bonne ou mauvaise…

Deux images côte à côte : le whisky est versé dans un bol contenant la garniture; et la garniture est versée dans la croûte.

Ajout d’une once de whisky à la garniture, et versement de la garniture dans la croûte. Photo gracieuseté d’Ariane Gauthier.

Une cuisson d’environ 30 minutes à 400 °F semble adéquate. Cependant, la garniture a beaucoup gonflé : on aurait dit un ballon prêt à exploser. Un peu inquiet, j’ai tout de même poursuivi la cuisson.

Avec les retailles de pâte, j’ai ajouté des décorations sur le dessus de la tarte. J’ai même pu faire un pouding avec le restant de garniture. Ma collègue Ariane a aussi fait sa propre tarte. Et voici le résultat :

Deux tartes aux patates douces décorées avec des retailles de pâte; un pouding aux patates douces; et une paire de mitaines de four rouges.

Deux tartes aux patates douces et un pouding. La tarte de l’auteur est à droite, et celle d’Ariane, à gauche. Photo gracieuseté d’Ariane Gauthier.

Pour une première expérience, je suis assez fier du résultat. Ma tarte était délicieuse, en tout cas selon mes collègues. Et grâce aux leçons apprises en préparant la première tarte, j’ai mieux réussi ma deuxième, malgré quelques faux pas. Je vous recommande vivement d’essayer cette recette et de nous raconter comment s’est passé votre voyage au siècle dernier.

Je termine en vous offrant un cadeau : ce petit poème sur les pâtisseries, tiré du livre de cuisine.

Poème en anglais dont voici une adaptation : « La Reine de Cœur fit des tartes, Par un beau jour d’été; Le Valet de cœur mangea une tarte, Et puis, tout étonné; Se sentit perdre la carte – Son cœur s’était arrêté. »

Poème tiré du livre Culinary landmarks or Half-hours with Sault Ste. Marie housewives (OCLC 53630417).

La Reine de Cœur fit des tartes
Par un beau jour d’été;
Le Valet de cœur mangea une tarte
Et puis, tout étonné
Se sentit perdre la carte –
Son cœur s’était arrêté.
[Traduction]

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Dylan Roy est archiviste de référence à la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Pain au fromage et aux noix de 1924

English version

Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Ariane Gauthier

Le livret Mangeons du fromage canadien : Recettes et menus a été publié par le ministère de l’Agriculture en 1924. Il met en valeur les aspects sains, nutritifs et économiques du fromage, en particulier le fromage québécois. Bien sûr, les connaissances sur la valeur nutritionnelle de cet aliment ont beaucoup évolué depuis. À l’époque, le livret affirmait : « Il n’y a point de repas où le fromage n’aît [sic] sa place avec profit, et celui qui va à son travail fortifié par cet aliment nutritif accomplira avec le même entrain la même somme d’ouvrage que s’il avait pris un copieux repas à base de viande. »

J’ai trouvé cet ouvrage dans notre outil en ligne Recherche dans la collection plutôt que dans notre catalogue Aurora. J’espérais ainsi dénicher quelque chose d’un peu plus personnalisé; par exemple, une recette de famille glissée dans une lettre archivée! C’est alors que j’ai découvert un dossier du ministère de l’Agriculture portant sur l’exportation du fromage canadien. Surprise : il dissimulait le livret Mangeons du fromage : Recettes et menus, en français et en anglais.

Page couverture d’un livret avec l’inscription "Mangeons du fromage : Recettes et menus".

Page couverture du livret Mangeons du fromage : Recettes et menus, publié en 1924 (OCLC 937533172). Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

(Finalement, on peut aussi trouver ce livret dans Aurora, OCLC 937533172. C’est la voie d’accès la plus simple.)

Ce tout petit ouvrage était coincé au milieu d’une pile d’entretiens, de comptes rendus économiques et d’enveloppes de photos portant sur le fromage canadien entre 1920 et 1924. Il a tout de suite piqué ma curiosité.

Mais cela ne m’a pas empêchée de lire tout le dossier. Ainsi, j’ai appris qu’à l’époque, l’industrie des produits laitiers était assez instable au Canada. L’exportation en Grande-Bretagne demeurait bonne (surtout pour le fromage) grâce à une prime particulièrement généreuse, mais la consommation de fromage déclinait. Les Britanniques – nos plus grands acheteurs – ne favorisaient plus autant cet aliment, et les Canadiens non plus.

Au ministère de l’Agriculture et parmi les producteurs, l’inquiétude régnait : le Canada perdrait-il sa place à l’international? C’est dans ce contexte que Mangeons du fromage canadien a été conçu.

J’ai feuilleté le livret en quête d’une recette. Mon seul critère : trouver quelque chose d’inédit. J’ai donc jeté mon dévolu sur une recette de pain au fromage et aux noix.

Texte présentant les ingrédients et les étapes de la recette de pain au fromage et aux noix.

Photo de la recette du pain au fromage et aux noix (OCLC 937533172). Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

J’ai commencé par rassembler les ingrédients, prenant bien soin de choisir un fromage canadien. Mon choix s’est porté sur un cheddar local, fabriqué près d’Ottawa.

Ingrédients utilisés pour la recette de pain au fromage et aux noix : pâte de tomates, sauce piquante, fromage cheddar, chapelure, huile d’olive, citron, poivre, sel et noix. (L’oignon ne figure pas sur la photo.)

Les ingrédients de la recette. Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

La recette demandait une tasse de mie de pain. Ça m’a semblé bizarre; j’ai regardé le livret en anglais pour comparer. À ma grande surprise, Cheese Recipes for Every Day présentait des recettes complètement différentes. Aucune trace de recette de pain au fromage et aux noix! Pour ne pas gaspiller un bon pain, j’ai choisi d’y substituer de la chapelure.

Première constatation : l’absence d’instructions. On présente les ingrédients, puis on dit simplement de mettre le tout dans un moule bien graissé et de « rôtir au four doux ».

Ingrédients côte à côte dans un bol : du fromage cheddar, des noix, de la pâte de tomates, des oignons, de la sauce piquante et de la chapelure.

Les ingrédients dans un bol. La recette ne dit pas de les mélanger, mais on devine que c’était l’intention. Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

Bref, on semble faire appel au gros bon sens du lecteur. J’ai donc bien mélangé le tout. Le résultat était assez sec, sans doute en raison de la chapelure. J’ai rajouté un peu d’eau, mais ça n’a guère aidé. Je m’en suis toutefois tenue à cela, n’osant pas trop modifier la recette.

Trois plans rapprochés, côte à côte, montrant le mélange des ingrédients et le transfert dans un plat de cuisson.

Assemblage et mélange des ingrédients. Le résultat est plus ou moins homogène. Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

J’ai ensuite versé le mélange dans un moule bien graissé, dont j’avais recouvert le fond de papier parchemin pour faciliter le démoulage. Aucune température de cuisson n’étant précisée, j’ai décidé d’enfourner le tout à 400 oF tout en gardant un œil sur le pain. Au bout d’une quinzaine de minutes, il avait pris une belle coloration et dégageait une odeur de grillé; je l’ai retiré du four. Voici le résultat :

Pain au fromage et aux noix sur une planche de bois.

Le pain au fromage et aux noix de 1924, qui tient de justesse en un morceau. Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

Le pain tenait de justesse; il était visiblement très sec. Il n’a d’ailleurs pas survécu au trajet entre mon domicile et le 395, rue Wellington, se transformant en une espèce de pâté. Malgré tout, je crois que mes collègues ont apprécié son petit goût surprenant, que je comparerais à celui de boulettes à spaghetti sans viande.

Qu’en pensez-vous?

Si c’était à refaire, je sacrifierais un bon pain pour en retirer la mie : elle absorberait sûrement mieux le mélange que la chapelure. Je prendrais aussi un fromage local avec un taux d’humidité plus élevé.

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Autres ressources :


Ariane Gauthier est archiviste de référence à la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Un gâteau néerlandais aux pommes de 1943

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Ariane Gauthier

Le livre de cuisine The Cook’s Recipe Manual, publié en 1943, contient 300 recettes à l’intention des cuisiniers dans la marine, l’armée de terre, l’armée de l’air, les usines de munitions, les camps et les écoles militaires. Il a été conçu dans un but bien précis : exploiter au maximum les rations militaires grâce à des recettes toutes simples, adaptées aux cuisines les plus modestes et ne nécessitant aucun appareil électrique. Chaque recette donne entre 100 et 125 portions, calculées en onces.

Ça vous intrigue? Sachez que vous pouvez emprunter ce livre par l’entremise d’Aurora, le catalogue des collections publiées de Bibliothèque et Archives Canada, sous le nOCLC 3231635.

L’automne était déjà bien avancé quand je l’ai moi-même parcouru. Je venais d’aller cueillir une quantité impressionnante de pommes, et je parcourais l’index à la recherche d’une recette pour les utiliser. C’est alors que je suis tombée sur un gâteau néerlandais aux pommes.

La recette du gâteau, incluant une liste d’ingrédients et la méthode de préparation.

Photo de la recette de gâteau néerlandais aux pommes tirée du Cook’s Recipe Manual (OCLC 3231635). Remarquons la division des ingrédients en trois catégories (A, B et C) ainsi que le rendement de la recette : 100 portions de quatre onces!

Et quelle quantité de pommes! J’étais très curieuse d’y goûter, ignorant tout de ce dessert néerlandais. La recette semblait simple, toutefois. Alors même si je n’avais aucune idée du résultat, je me suis lancée.

J’ai d’abord rassemblé les ingrédients.

Des pommes, des œufs, du beurre, de la poudre à pâte, du sel, de la farine, du sucre, du lait d’avoine, de la muscade et de la cannelle.

Les ingrédients employés par l’auteure pour cuisiner la recette de gâteau néerlandais aux pommes tirée du Cook’s Recipe Manual. Photo gracieuseté de l’auteure, Ariane Gauthier.

Je suis ensuite passée à l’étape du calcul, pour éviter de me retrouver avec 100 portions sur les bras. Je me suis plutôt contentée de 10, ce qui a donné les quantités suivantes :

Pâte
  • 2,6 tasses de farine
  • 25 ml de poudre à pâte
  • 4,5 ml de sel
  • 50 ml de beurre
  • 50 ml de sucre
  • 2 œufs
  • 150 ml de lait (j’ai pris du lait d’avoine)
Pommes
  • 900 grammes
Mélange de sucre et d’épices
  • 50 ml de sucre
  • Une pincée de cannelle
  • Une pincée de muscade
Beurre
  • 50 ml

Les ingrédients de la pâte sont présentés en trois sections : A, B, et C, selon l’ordre dans lequel ils doivent être incorporés. Il faut d’abord mélanger les ingrédients secs et le corps gras (j’ai choisi du beurre). On dit de procéder comme si on faisait une pâte à « tea biscuits » – des petits gâteaux secs pour le thé. Un peu nébuleux, tout ça! Clairement, cette recette ne s’adressait pas aux néophytes. J’ai donc ignoré cette remarque. Je n’ai pas compris davantage pourquoi il fallait ajouter le sucre séparément, mais j’ai fidèlement suivi les instructions.

Un fouet mélangeant des ingrédients secs dans un bol.

Tous les ingrédients secs des sections A et B mélangés au fouet. Photo gracieuseté de l’auteure, Ariane Gauthier.

Il faut ensuite mélanger les ingrédients humides (section C) avant de les incorporer aux ingrédients secs (sections A et B). Le fouet est à éviter, la pâte étant beaucoup trop dense : je parle par expérience! J’y suis plutôt allée avec mes mains. (Je me suis souvenue plus tard que le livre suggérait d’utiliser un mélangeur électrique lorsque possible.)

Deux photos côte à côte : un œuf cassé en deux au-dessus d’un bol, et une pâte pétrie à la main.

Mélange des ingrédients humides de la section C avec les ingrédients secs des sections A et B pour former la pâte. L’auteure a fait le tout à la main, mais recommande d’employer un batteur sur socle si possible. Photos gracieuseté de l’auteure, Ariane Gauthier.

J’ai versé la pâte dans un moule recouvert de papier parchemin, avant de passer à la prochaine étape : éplucher les pommes, les couper en huit morceaux et insérer chacun d’eux dans la pâte, en commençant par le côté le plus mince. J’ai trouvé ça vraiment étrange, mais encore là, j’ai suivi les instructions à la lettre.

Deux photos côte à côte. Sur la première, on voit la pâte dans le plat de cuisson couvert de papier parchemin. Sur la deuxième, les tranches de pommes ont été insérées dans la pâte. À côté du plat de cuisson, on voit des bols avec du beurre fondu et le mélange de sucre et d’épices.

La pâte dans un plat de cuisson couvert de papier parchemin, et les pommes insérées dans la pâte. Photos gracieuseté de l’auteure, Ariane Gauthier.

La dernière étape consiste à mélanger le sucre et les épices, puis à saupoudrer le tout uniformément sur les pommes. J’ai ensuite fait fondre 50 ml de beurre, que j’ai versé sur le gâteau avant de l’enfourner pendant 25 minutes à 400 ⁰F.

Deux photos côte à côte. Sur la première, un mélange de sucre et d’épices est saupoudré sur des tranches de pommes. Sur la seconde, du beurre fondu est versé sur les pommes.

Ajout du mélange de sucre et d’épices et du beurre fondu sur le gâteau. Cette étape donne à la recette une bonne partie de sa saveur. Photos gracieuseté de l’auteure, Ariane Gauthier.

Comme c’était une première, je ne savais pas à quoi m’attendre. J’avoue que lorsque j’ai sorti le gâteau du four, j’ai bien pensé avoir échoué. Le beurre et le jus de pommes bouillonnaient, un peu comme le sirop d’un pouding chômeur. (Si vous n’êtes pas familiers avec ce grand classique québécois, c’est un gâteau cuit dans du sirop.) Ce n’était peut-être pas normal? Mais le plaisir d’essayer de vieilles recettes vient avec certains risques, et le lendemain, j’ai organisé une dégustation avec mes collègues.

Deux photos côte à côte. La première montre le gâteau néerlandais aux pommes dans le moule. Sur la seconde, un morceau a été découpé pour montrer l’intérieur du gâteau.

Le produit final dans le moule, et une vue en coupe (avec un morceau enlevé). Photos gracieuseté de l’auteure, Ariane Gauthier.

Le verdict?

Hé bien, j’ai été agréablement surprise! Le gâteau était moelleux, parfaitement cuit et pas trop sucré, et les pommes avaient bien compoté. J’ai aussi servi le gâteau à d’autres collègues aux Services de référence. Conclusion : c’est confirmé une fois de plus, certaines recettes traversent avec brio l’épreuve du temps!

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Autres ressources


Ariane Gauthier est archiviste de référence au sein de la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Des choux à la crème de 1898

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Ariane Gauthier

The New Galt Cook Book (1898) est une édition révisée d’un livre populaire au Canada anglais, surtout aux environs de Galt, dans le Sud-Ouest de l’Ontario. Les éditeurs auraient soi-disant envoyé des exemplaires du livre en Chine, en Égypte, en Inde, en Afrique du Sud, en Australie et aux États-Unis. Comme bon nombre d’anciens livres de cuisine, ce recueil présentait des recettes, des suggestions visant à simplifier le travail ménager ainsi qu’une liste de remèdes pour les maladies courantes.

Vous pouvez consulter ce livre en ligne dans le catalogue des collections publiées de Bibliothèque et Archives Canada, Aurora : OCLC 1049883924.

En tant que cuisinière amatrice qui s’intéresse aux vieilles recettes et à l’histoire de la cuisine, j’ai décidé de mettre mes compétences à l’épreuve en essayant de préparer des choux à la crème. Pour voir la dernière recette d’antan que j’ai préparée, consultez mon billet de blogue Une tarte à la citrouille de 1840.

Il est intéressant de savoir que le format des recettes aussi vieilles que celle-ci diffère grandement de celui des recettes modernes. Un peu comme dans La cuisinière canadienne, un livre de cuisine de langue française publié en 1840, les recettes sont classées par type de plats. Au début de chaque section, on retrouve un texte qui explique les principes de base de chaque type de recettes. Les auteures Margaret Taylor et Frances McNaught ont décidé de classer leur recette de choux à la crème dans la section Biscuits.

Page du livre The New Galt Cook Book présentant la recette de choux à la crème suivie de deux autres recettes.

Page 354 du livre The New Galt Cook Book par Margaret Taylor et Frances McNaught, Toronto : G. J. McLeod, 1898 (OCLC 5030366).

Durant la cinquantaine d’années qui s’est écoulée entre la publication de La cuisinière canadienne et celle de The New Galt Cook Book, la cuisine canadienne a beaucoup évolué. On peut d’ailleurs le remarquer dans la liste d’ingrédients. La recette de choux à la crème nécessite de la farine, du beurre et des œufs pour créer la pâte, puis de la farine ou de la fécule de maïs, du lait, du sucre et d’autres œufs pour préparer la garniture. À la dernière ligne de la recette, on suggère d’ajouter du citron ou de la vanille pour aromatiser la crème.

J’aimerais attirer votre attention sur deux choses. La première concerne l’utilisation de sucre granulé, un ingrédient que ne pouvaient pas se permettre les classes inférieures, car les droits d’importations en gonflaient le prix. Dans mon article de blogue sur la tarte à la citrouille de 1840, je mentionne que La cuisinière canadienne proposait plusieurs édulcorants de remplacement, y compris du sirop et de la mélasse. Il s’agissait des principaux édulcorants que les cuisiniers canadiens utilisaient dans les années 1800, jusqu’à ce que la Tariff Act de 1885 entre en vigueur et élimine les droits d’importation sur le sucre de canne. Au cours des cinq années suivantes, le coût du sucre est progressivement devenu comparable à celui du sirop et de la mélasse. Après 1890, le sucre est devenu l’édulcorant le plus populaire, car il s’agissait de l’option la moins chère.

Le deuxième élément d’intérêt concerne l’utilisation du citron comme substance aromatisante. Dans mon article sur la recette de tarte à la citrouille, je mentionne que La cuisinière canadienne suggère d’utiliser du zeste d’orange dans la garniture à la citrouille. Il s’agit d’une suggestion un peu étrange, car à l’époque, les oranges n’étaient pas importées partout au Canada comme c’est le cas aujourd’hui. Or, La cuisinière canadienne a été publié à Montréal, qui était alors le principal port commercial du Canada, ce qui explique le choix de cet ingrédient, plus facile à trouver dans cette ville. À titre de comparaison, Toronto commençait alors tout juste à se développer. Durant les 50 ans qui ont suivi la publication de La cuisinière canadienne, Toronto est devenue une métropole, notamment grâce au développement ferroviaire reliant la ville aux villes nord-américaines importantes, comme Montréal et New York. L’ajout progressif d’autres lignes de chemin de fer à Toronto a entraîné une diversification des activités commerciales de la ville. Dans ce cas-ci, le citron comme substance aromatisante témoigne du développement global de Toronto et du Canada. On peut donc en conclure que l’amélioration des technologies de transport a permis aux Canadiens qui résidaient au centre du pays de trouver plus facilement du citron, car ce fruit pouvait maintenant parcourir de grandes distances pour atteindre des endroits où le climat n’en permettait pas la production locale.

En gardant à l’esprit ces faits intéressants, j’ai réuni les ingrédients nécessaires et me suis mise au travail.

Des œufs, de l’extrait de vanille, du lait, du sucre, de la margarine et du citron.

Ingrédients de la recette. Courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

J’ai commencé par la pâte à choux. Heureusement, contrairement à la recette de tarte à la citrouille, j’ai eu à formuler beaucoup moins de suppositions cette fois-ci, car le livre The New Galt Cook Book donne des mesures assez précises : « Une tasse et demie de farine, deux tiers de tasse de beurre, un demiard d’eau bouillante. Faire bouillir le beurre et l’eau ensemble, puis incorporer la farine pendant que le mélange continue de bouillir. Lorsque le mélange est refroidi, ajouter cinq œufs battus; déposer sur une plaque, puis faire cuire pendant 30 minutes dans un four à cuisson rapide. »

Six photos montrant les étapes à suivre pour préparer la pâte : casser des œufs dans un bol, remuer la farine dans un autre bol, ajouter la farine au mélange d’eau et de beurre bouillant dans une casserole, mélanger les ingrédients qui se trouvent dans la casserole, ajouter les œufs battus à la pâte refroidie dans la casserole, puis mélanger la pâte dans la casserole.

Préparation de la pâte à choux comme décrite dans The New Galt Cook Book. Courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

Je devais ensuite former les choux sur une plaque à pâtisserie tapissée à l’aide d’une poche à douille. Puisque je n’avais pas de poche à douille, j’ai utilisé un sac réutilisable dont j’ai coupé l’extrémité. Pour transférer plus facilement la pâte dans le sac réutilisable, j’ai utilisé ma cafetière comme récipient. Comme je n’étais pas certaine de ce que les auteures voulaient dire par « four à cuisson rapide », j’ai réglé mon four à convection à 400 °F et, comme pour la tarte à la citrouille, j’ai utilisé mon nez et mes yeux pour déterminer la fin de la cuisson.

Trois photos qui montrent les étapes de formation des choux : remplir un sac réutilisable de pâte, pousser la pâte dans un coin du sac de manière à former une poche hermétique, puis former les choux sur une plaque à pâtisserie à l’aide de la poche à douille.

Formation des choux à l’aide d’une poche à douille. Courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

Après la stressante étape de préparation de la pâte à choux, j’ai commencé à préparer la crème. Comme j’avais déjà fait de la crème pâtissière, j’étais beaucoup plus confiante pour cette étape. Encore une fois, The New Galt Cook Book est précis : « Garniture à la crème – Une cuillerée à soupe de farine ou de fécule de maïs, un demi-litre de lait, une tasse de sucre, deux œufs. Battre les œufs, la farine et le sucre, puis incorporer le mélange au lait pendant qu’il bout. Lorsque le mélange est presque refroidi, aromatiser avec du citron ou de la vanille. »

Trois photos montrant les étapes de préparation de la garniture à la crème : verser le sucre dans le bol contenant le mélange d’œufs et de farine, verser le mélange dans une casserole contenant du lait, remuer la garniture dans la casserole.

Préparation de la garniture à la crème comme décrite dans The New Galt Cook Book. Courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

Si je me fie à mon expérience précédente, il faut faire attention au moment de verser le mélange d’œufs, de farine et de sucre dans le lait. Il vaut mieux tempérer le mélange en y ajoutant une petite quantité de lait bouillant d’abord, tout en fouettant vigoureusement. Cela permet d’élever graduellement la température du mélange et d’éviter de créer un choc thermique. Une fois que le mélange est incorporé au lait bouillant, il est important de fouetter constamment le mélange jusqu’à ce qu’il épaississe; autrement, vous vous retrouverez avec des œufs brouillés sucrés!

Pour ce qui est de la saveur, j’ai choisi de diviser la crème afin d’essayer l’extrait de vanille et le zeste de citron.

Pour terminer, The New Galt Cook Book ne mentionne pas comment assembler les choux. Le fait de savoir à quoi ressemble un chou à la crème s’est avéré très utile ici. Comme la pâte doit être remplie de crème, j’ai versé la crème dans un sac réutilisable dont j’ai coupé l’extrémité. Avant de remplir les choux de crème, j’ai fait une incision en X au bas de chaque chou afin de faciliter l’insertion du sac.

Une photo montrant le remplissage d’un chou et une photo montrant le produit final : un chou à la crème.

Un chou rempli de crème. Courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.

Qu’en pensez-vous?

Je suis assez satisfaite de mes choux à la crème. Ils sont beaucoup plus légers que les choux à la crème contemporains et peuvent contenir une grande quantité de crème. Je les ai apportés à un rassemblement des services de référence, et mes collègues les ont bien aimés. Encore une fois, cela prouve que ces vieilles recettes peuvent résister au passage du temps!

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Autres ressources


Ariane Gauthier est archiviste de référence à la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

Une tarte à la citrouille de 1840

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Bannière Cuisinez avec Bibliothèque et Archives CanadaPar Ariane Gauthier

La cuisinière canadienne, paru en 1840, est un des premiers livres de cuisine, peut-être même le tout premier, écrit et publié au Canada. Son auteur le destinait autant aux cuisiniers professionnels qu’au grand public. Ce livre marque le début de la cuisine canadienne-française proprement dite. Pour ce qui est du style et du contenu, il vise l’efficacité, cherchant à encourager « une sage économie domestique […] proportionnée aux moyens des familles Canadiennes [sic] ».

Ce livre est accessible en ligne par le biais du catalogue Aurora de Bibliothèque et Archives Canada (OCLC 1140071596). Vous n’avez qu’à cliquer sur le bouton « Accès en ligne » à droite de la page, dans la case « Options de retrait ».

La page titre de La cuisinière canadienne (OCLC 1140071596).

Pour accompagner l’ouvrage, j’ai trouvé très utile le compte rendu de Yannick Portebois sur La cuisinière canadienne (qui peut être lu gratuitement sur Érudit). Il aide à comprendre les mesures employées à l’époque et le langage technique qui n’est plus utilisé aujourd’hui. Il présente également le contexte historique dans lequel ce livre s’inscrit. C’était un moment clé pour la formation de l’identité culturelle québécoise, à cheval entre son passé français et la nouvelle réalité d’une population anglophone toujours grandissante. Yannick Portebois note la francisation de certains mots anglais ainsi que l’emploi de termes bourgeois qui marqueront entre autres le vocabulaire de la cuisine québécoise naissante.

Le défi

À titre de cuisinière amateure, j’ai décidé de relever le défi de cuisiner une recette d’antan proposée dans ce livre.

Ce qu’il faut d’abord comprendre, c’est que les recettes d’autrefois, surtout celles qui remontent au milieu du 19e siècle, ne sont pas rédigées comme dans les livres actuels. Il n’y a pas de listes complètes des ingrédients, les quantités sont approximatives et les recettes sont présentées sous forme de texte suivi. La cuisinière canadienne fournit des ingrédients de substitution, au besoin. Le but n’était pas de créer des recettes comme le désirent les lecteurs d’aujourd’hui, mais de communiquer les principes de base afin que les cuisiniers puissent se débrouiller seuls. D’une certaine manière, La cuisinière canadienne établit la destination, mais c’est à nous de choisir le chemin pour y arriver, c’est-à-dire les ingrédients, les quantités et la technique.

Trois pages du livre La cuisinière canadienne qui expliquent certains termes de cuisine.

Les pages de La cuisinière canadienne qui m’ont été les plus utiles dans la préparation de ma recette (OCLC 1140071596).

Mon premier défi était de composer la recette puisque La cuisinière canadienne ne fournit aucune recette complète de tarte à la citrouille. Le chapitre X contient une recette de pâte à tarte (ou pâte brisée) n’offrant que l’indication vague d’y ajouter de la confiture de notre choix pour cuisiner une tarte.

Pour ce faire, il fallait lire le chapitre XI sur les confitures. Originellement, j’espérais faire une bonne tarte au sucre, mais La cuisinière canadienne ne donne aucune recette de sucre à la crème ou de garniture à l’érable. Je me suis donc contentée d’une tarte à la citrouille, un bon remplacement à mes yeux.

Lait d’amandes, courge, oranges, beurre, farine, sirop d’érable, tasse à mesurer, moule à tarte et rouleau à pâte.

Ingrédients et matériel utilisés par l’auteure pour faire la tarte à la citrouille du livre La cuisinière canadienne. Crédit : Ariane Gauthier.

Une fois la recette composée, il fallait réunir les ingrédients. La pâte à tarte nécessitait de la farine, du beurre (fondu) et du lait (chaud). La cuisinière canadienne indique de mélanger le tout jusqu’à l’obtention d’une pâte. À défaut d’informations plus spécifiques, je me suis fiée à mes connaissances. Dans les recettes que j’ai suivies antérieurement, les pâtes à tarte étaient très sèches. Donc, à une tasse de beurre fondu et une tasse de lait chaud, j’ai ajouté de la farine jusqu’à l’obtention d’une pâte sèche.

J’avoue ne pas avoir mesuré la quantité. L’idée est que la pâte doit à peine tenir ensemble.

Ensuite, j’ai travaillé la pâte pour que le tout soit bien incorporé. Je l’ai laminée, c’est-à-dire que je l’ai aplatie avec un rouleau avant de la replier sur elle-même, et j’ai répété la manœuvre encore et encore jusqu’à ce que la pâte devienne lisse et uniforme. Après quoi, j’ai délicatement déposé la pâte dans un moule à tarte et découpé l’excès. D’habitude, il faut perforer la pâte pour s’assurer qu’elle ne gonfle pas et la cuire un peu pour éviter que la garniture ne la détrempe. C’est ce que j’ai fait avant de la mettre au four pendant cinq minutes à 350 °F.

Sirop d’érable, courges coupées en dés et pelures d’orange dans un chaudron sur le feu.

Assemblage des ingrédients pour la confiture à la citrouille. Il faut faire bouillir des cubes de citrouille dans du sirop avec de la pelure d’orange pendant trois heures. Crédit : Ariane Gauthier.

Entre-temps, j’ai suivi les indications de La cuisinière canadienne pour une confiture à la citrouille. En gros, je devais faire mariner de la citrouille dans une quantité égale de sirop (ou de mélasse) pendant trois heures. Je pouvais aussi ajouter de la pelure d’orange ou de citron pour enrichir le goût. Malheureusement, comme ce n’était pas la saison des citrouilles à tartes, je me suis contentée d’une courge. J’ai choisi du sirop d’érable, car c’était l’option abordable pour les cuisiniers de l’époque. Ce n’est qu’après 1885 et l’adoption de la Tariff Act que le sirop d’érable est devenu un produit de luxe, le prix du sucre de canne ayant soudainement chuté. Dans les années qui ont suivi, des lois et mesures protégeant l’industrie des produits d’érable et la pureté de la qualité ont également eu des répercussions sur le prix du sirop.

Grâce aux avancées technologiques survenues depuis la publication de La cuisinière canadienne, je n’ai eu qu’à attendre à peu près une heure et demie avant que la courge soit tendre. J’ai malaxé le tout pour obtenir une confiture plus uniforme, gardant la pelure d’orange pour le goût. C’était pour le meilleur ou pour le pire, selon les goûts, car ce choix a fait en sorte que la tarte goûtait plus l’orange qu’autre chose. Mise en garde pour les braves qui vont tenter de cuisiner leur propre tarte à la citrouille de 1840 : il vaut peut-être mieux enlever les pelures!

Trois photos démontrant l’assemblage de la tarte : le plat avec la pâte seulement, la garniture versée sur la pâte et le plat final avant la cuisson.

Assemblage de la tarte. Une fois que la pâte a été précuite pendant quelques minutes, on y ajoute la confiture à la citrouille et on remet le tout au four pour terminer la cuisson. Crédit : Ariane Gauthier.

Enfin, j’ai versé la confiture sur la pâte et j’ai mis la tarte au four, toujours à 350 °F. Pour savoir quand la pâte était cuite, je me suis fiée à mon nez et mes yeux. Voici le résultat final. Qu’en pensez-vous?

Photo de la tarte qui vient de sortir du four. Des feuilles, une plume, un livre et les mots BAC et LAC en pâte sont posés sur le dessus de la tarte.

La tarte une fois cuite. Après son passage aux Services de référence le lendemain, il n’en restait plus une miette. Crédit : Ariane Gauthier.

Mes collègues l’ont manifestement aimée, surtout mon superviseur qui en a pris trois pointes. Cette recette, bien que très différente de nos recettes contemporaines, semble toujours appréciée!

The New Galt Cook Book – 1898

Page couverture avec le titre The new Galt cook book et une illustration d’une femme avec un tablier tenant un plat contenant de la nourriture.

Page couverture du livre de cuisine The new Galt cook book (OCLC 1049883924).

Bien que j’aie traité d’une recette tirée de La cuisinière canadienne, son équivalent canadien anglais est également digne de mention. The new Galt cook book était un incontournable dans les cuisines canadiennes-anglaises. C’est une nouvelle édition d’un livre populaire, surtout aux environs de Galt, dans le sud-ouest de l’Ontario. Les éditeurs affirmaient que des exemplaires du livre ont été envoyés en Chine, en Égypte, en Inde, en Afrique du Sud, en Australie et aux États-Unis. Comme plusieurs anciens livres de cuisine, ce recueil présente des recettes, des suggestions visant à simplifier le travail ménager et une liste de remèdes pour les maladies courantes.

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Ariane Gauthier est archiviste de référence au sein de la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.