À la recherche du capitaine Evans

Par Rebecca Murray

À l’époque où j’étais encore une nouvelle acquisition de Bibliothèque et Archives Canada (vous reconnaîtrez l’humour des archivistes pour décrire un nouvel employé!), j’ai répondu à une question d’un chercheur qui voulait connaître les prénoms d’un capitaine de milice canadien des années 1890. Optimiste et enthousiaste, je me suis lancée à la recherche de l’insaisissable capitaine.

Le chercheur savait qu’Evans était alors en poste au Manitoba et faisait partie d’une équipe de hockey amateur. Après quelques recherches (infructueuses) par mots-clés dans notre catalogue, j’ai changé de stratégie et décidé de « suivre l’argent ». Ce n’est pas là une expression galvaudée : les documents et rapports financiers, comme les registres de paie ou d’achat, font partie des nombreuses sources pouvant dépanner lorsque des personnes ou des projets sont introuvables à l’aide de recherches courantes.

Pendant cette période de l’histoire canadienne, la milice constituait une force substantielle, bien que relativement petite comparée à l’armée actuelle. Je pensais donc être en mesure de trouver quelques mentions du capitaine Evans, d’autant plus que je connaissais les renseignements mentionnés dans les rapports annuels du vérificateur général et des ministères de l’époque.

J’ai parcouru les sources des années 1890, obtenant rapidement des résultats. Dans un rapport annuel du vérificateur général produit vers 1893 et couvrant l’année 1891-1892, j’ai trouvé une référence au lieutenant T. D. B. Evans, de l’École d’infanterie à cheval, à Winnipeg, au Manitoba (district militaire no 10).

Page tapuscrite comprenant du texte et des chiffres. Un cercle rouge attire l’attention sur les termes « École d’infanterie à cheval » et sur le nom « Evans, T. D. B., Lieutenant ».

Documents parlementaires du Dominion du Canada : volume 1, troisième session de la septième législature, session 1893, page 1-C-48. [Ottawa : S. E. Dawson, 1893]. (OCLC 858498599).

J’ai ensuite consulté le rapport de 1894, qui porte sur l’exercice 1892-1893. J’y ai trouvé une référence semblable au capitaine Evans. J’ai parcouru la liste des noms pour voir si d’autres militaires avaient le même nom de famille (Evans étant un patronyme assez répandu), mais il n’y en avait pas. J’ai donc cherché plus de détails à l’aide des mêmes initiales.

Page tapuscrite comprenant du texte et des chiffres. Des cercles rouges attirent l’attention sur les termes « École d’infanterie à cheval » et sur le nom « Capitaine Evans ».

Documents parlementaires du Dominion du Canada : volume 1, quatrième session de la septième législature, session 1894 [Ottawa : S. E. Dawson, 1894]; page 1-47. (OCLC 858498599).

Des recherches dans les sources secondaires (dont j’ai déjà vanté les mérites dans un blogue) complètent toujours bien les fouilles dans les archives, surtout pendant les étapes préliminaires. Quelques requêtes Web avec les termes « Winnipeg Mounted Infantry School » m’ont menée à des pages de la Direction de l’histoire et du patrimoine. Celles-ci fournissent des renseignements fiables faisant autorité sur l’histoire des unités militaires canadiennes.

À l’époque, le régiment que l’on connaît aujourd’hui sous le nom de Royal Canadian Dragoons s’appelait le Canadian Mounted Rifle Corps. Comme c’est la meilleure correspondance que j’ai trouvée, j’ai fait une tentative.

Cette étape est extrêmement importante, car elle nous donne de nouveaux mots-clés pour interroger le catalogue d’archives. Voici une capture d’écran montrant l’interface de recherche, les termes utilisés et quelques résultats préliminaires. Ce n’est là qu’une des nombreuses variantes employées. Par exemple, je n’ai pas mentionné le grade, car mes recherches secondaires ont démontré que, pendant cette période, le lieutenant Evans a été promu au grade de capitaine. Je ne voulais pas exclure de résultats intéressants en ajoutant les mots-clés « Capt » ou « Captain ».

L’outil Recherche dans la collection de Bibliothèque et Archives Canada. Le terme « Evans » et plusieurs autres mots-clés et filtres ont été utilisés pour la requête.

La recherche de l’auteure dans Collections et fonds (une base de données de l’outil Recherche dans la collection).

Ces résultats aident à répondre à la question du chercheur sur les prénoms du capitaine. Le premier d’entre eux (Thomas) apparaît dans le titre du premier résultat de recherche – un document du Bureau du Conseil privé relatant sa promotion au grade de major, vers 1895.

J’étais ravie de ces résultats, mais rien jusqu’alors ne me permettait de faire un lien avec le hockey amateur. Je me suis de nouveau tournée vers les sources publiées. Dans la base de données des éditions du Globe and Mail, j’ai trouvé un article à la une annonçant le décès d’Evans. Ses trois prénoms (Thomas, Dixon et Byron) y sont mentionnés, ainsi que son rôle de président de l’Association de hockey du Manitoba.

Article de journal annonçant le décès du colonel T. D. B. Evans.

DÉCÈS DU COLONEL T. D. B. EVANS : IL A SUCCOMBÉ À UNE INSOLATION APRÈS UNE COURTE MALADIE – Ancien commandant des Canadian Mounted Rifles pendant la guerre d’Afrique du Sud, où il a été décoré pour ses services — Ancien commandant du district de Winnipeg, The Globe (1844-1936), Toronto (Ontario), 24 août 1908 : 1. (OCLC 1775438).

Ces détails m’ont permis de trouver d’autres sources primaires et secondaires intéressantes. Par exemple, des décrets conservés à Bibliothèque et Archives Canada suivent l’évolution de la carrière militaire du colonel Evans. On trouve aussi des photos de son passage au Manitoba.

Cinq hommes autour d’une table couverte d’une nappe blanche. Une plante se trouve au centre de la table, sur laquelle sont aussi posées des bouteilles, des assiettes et de la vaisselle.

Dîner en 1893. De gauche à droite : H. J. Woodside, capitaine T. D. B. Evans, Hosmer, Thibodeau et Elphinstone, 1893. Acquisition 1967-025, article 167. Source : Henry Joseph Woodside/Bibliothèque et Archives Canada/PA-016013.

Cette recherche m’a vraiment fait comprendre l’importance de consulter à la fois les archives et les sources publiées conservées à Bibliothèque et Archives Canada. Elle montre aussi qu’il faut se fier à des sources secondaires externes fiables pour que les recherches soient exhaustives. Avec le recul, je me rends compte que de nombreuses autres sources auraient été utiles, comme les recensements (qui contiennent probablement de très nombreuses personnes portant le patronyme Evans), la Canada Gazette et les listes de la milice. C’est un cas où j’ai eu la chance de trouver assez facilement ce que je cherchais. En tout cas, c’est souvent l’impression qu’on a lorsqu’on analyse une recherche après coup.


Rebecca Murray est archiviste de référence principale à la Division des services de référence de Bibliothèque et Archives Canada.