Le livret Mangeons du fromage canadien : Recettes et menus a été publié par le ministère de l’Agriculture en 1924. Il met en valeur les aspects sains, nutritifs et économiques du fromage, en particulier le fromage québécois. Bien sûr, les connaissances sur la valeur nutritionnelle de cet aliment ont beaucoup évolué depuis. À l’époque, le livret affirmait : « Il n’y a point de repas où le fromage n’aît [sic] sa place avec profit, et celui qui va à son travail fortifié par cet aliment nutritif accomplira avec le même entrain la même somme d’ouvrage que s’il avait pris un copieux repas à base de viande. »
J’ai trouvé cet ouvrage dans notre outil en ligne Recherche dans la collection plutôt que dans notre catalogue Aurora. J’espérais ainsi dénicher quelque chose d’un peu plus personnalisé; par exemple, une recette de famille glissée dans une lettre archivée! C’est alors que j’ai découvert un dossier du ministère de l’Agriculture portant sur l’exportation du fromage canadien. Surprise : il dissimulait le livret Mangeons du fromage : Recettes et menus, en français et en anglais.

Page couverture du livret Mangeons du fromage : Recettes et menus, publié en 1924 (OCLC 937533172). Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.
(Finalement, on peut aussi trouver ce livret dans Aurora, OCLC 937533172. C’est la voie d’accès la plus simple.)
Ce tout petit ouvrage était coincé au milieu d’une pile d’entretiens, de comptes rendus économiques et d’enveloppes de photos portant sur le fromage canadien entre 1920 et 1924. Il a tout de suite piqué ma curiosité.
Mais cela ne m’a pas empêchée de lire tout le dossier. Ainsi, j’ai appris qu’à l’époque, l’industrie des produits laitiers était assez instable au Canada. L’exportation en Grande-Bretagne demeurait bonne (surtout pour le fromage) grâce à une prime particulièrement généreuse, mais la consommation de fromage déclinait. Les Britanniques – nos plus grands acheteurs – ne favorisaient plus autant cet aliment, et les Canadiens non plus.
Au ministère de l’Agriculture et parmi les producteurs, l’inquiétude régnait : le Canada perdrait-il sa place à l’international? C’est dans ce contexte que Mangeons du fromage canadien a été conçu.
J’ai feuilleté le livret en quête d’une recette. Mon seul critère : trouver quelque chose d’inédit. J’ai donc jeté mon dévolu sur une recette de pain au fromage et aux noix.

Photo de la recette du pain au fromage et aux noix (OCLC 937533172). Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.
J’ai commencé par rassembler les ingrédients, prenant bien soin de choisir un fromage canadien. Mon choix s’est porté sur un cheddar local, fabriqué près d’Ottawa.
La recette demandait une tasse de mie de pain. Ça m’a semblé bizarre; j’ai regardé le livret en anglais pour comparer. À ma grande surprise, Cheese Recipes for Every Day présentait des recettes complètement différentes. Aucune trace de recette de pain au fromage et aux noix! Pour ne pas gaspiller un bon pain, j’ai choisi d’y substituer de la chapelure.
Première constatation : l’absence d’instructions. On présente les ingrédients, puis on dit simplement de mettre le tout dans un moule bien graissé et de « rôtir au four doux ».

Les ingrédients dans un bol. La recette ne dit pas de les mélanger, mais on devine que c’était l’intention. Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.
Bref, on semble faire appel au gros bon sens du lecteur. J’ai donc bien mélangé le tout. Le résultat était assez sec, sans doute en raison de la chapelure. J’ai rajouté un peu d’eau, mais ça n’a guère aidé. Je m’en suis toutefois tenue à cela, n’osant pas trop modifier la recette.

Assemblage et mélange des ingrédients. Le résultat est plus ou moins homogène. Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.
J’ai ensuite versé le mélange dans un moule bien graissé, dont j’avais recouvert le fond de papier parchemin pour faciliter le démoulage. Aucune température de cuisson n’étant précisée, j’ai décidé d’enfourner le tout à 400 oF tout en gardant un œil sur le pain. Au bout d’une quinzaine de minutes, il avait pris une belle coloration et dégageait une odeur de grillé; je l’ai retiré du four. Voici le résultat :

Le pain au fromage et aux noix de 1924, qui tient de justesse en un morceau. Image courtoisie de l’auteure, Ariane Gauthier.
Le pain tenait de justesse; il était visiblement très sec. Il n’a d’ailleurs pas survécu au trajet entre mon domicile et le 395, rue Wellington, se transformant en une espèce de pâté. Malgré tout, je crois que mes collègues ont apprécié son petit goût surprenant, que je comparerais à celui de boulettes à spaghetti sans viande.
Qu’en pensez-vous?
Si c’était à refaire, je sacrifierais un bon pain pour en retirer la mie : elle absorberait sûrement mieux le mélange que la chapelure. Je prendrais aussi un fromage local avec un taux d’humidité plus élevé.
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Autres ressources :
- Dans la même série, sur le blogue de Bibliothèque et Archives Canada :
- Une tarte à la citrouille de 1840 par Ariane Gauthier
- Des choux à la crème de 1898 par Ariane Gauthier
- Un gâteau néerlandais aux pommes de 1943 par Ariane Gauthier
- 12 jours de cuisine d’antan, chaîne YouTube de Bibliothèque et Archives Canada
- Éplucher la collection des livres de recettes de BAC, épisode de baladodiffusion, Bibliothèque et Archives Canada
Ariane Gauthier est archiviste de référence à la Direction générale de l’accès et des services à Bibliothèque et Archives Canada.

