À la découverte de mon grand-père, Robert Roy Greenhorn : sa vie au Canada (partie 4)

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Groupe de garçons travaillant dans un champ à la ferme école de la Philanthropic Society

Par Beth Greenhorn

Cet article renferme de la terminologie et des contenus à caractère historique que certains pourraient considérer comme offensants, notamment au chapitre du langage utilisé pour désigner des groupes raciaux, ethniques et culturels. Pour en savoir plus, consultez notre Mise en garde – terminologie historique.

J’ai conclu la troisième partie de cette série sur mon grand-père, Robert Roy Greenhorn, en évoquant son départ pour la maison Fairknowe à Brockville, en Ontario, au printemps 1889. Il s’agit du foyer, exploité par le philanthrope écossais William Quarrier, qui assurait la répartition des enfants au Canada.

Feuille de papier à en-tête en noir et blanc comportant deux rangées de texte anglais en lettres majuscules noires dans la partie supérieure indiquant : « Maison de répartition pour les enfants écossais et orphelinat canadien, Fairknowe, Brockville (Ontario) ». Il y a une illustration d’une maison à deux étages avec une grande véranda au milieu. L’image est encadrée par un texte dactylographié en noir en écriture cursive. Un cachet indiquant la date de réception de la lettre est apposé dans le coin supérieur droit. La date d’envoi de la lettre figure en bas à droite.

En-tête de lettre de la maison Fairknowe, Brockville, Ontario, Direction de l’immigration, RG 76, vol. 46, dossier 1381, partie 6, Dossiers du service central, 1892-1950. Source : Immigration Program : Headquarters central registry files – Image 378 – Héritage (canadiana.ca).

Avant que les groupes de jeunes ne quittent l’Écosse, des familles de l’Ontario faisaient une demande pour obtenir un enfant aux orphelinats de Quarrier. Lors de la cérémonie d’adieu organisée à l’occasion du départ de mon grand-père, à Glasgow, William Quarrier a assuré aux personnes présentes que l’on avait pris soin de « choisir des foyers convenables pour [les enfants] dans le nouveau pays. Les garçons et les filles étaient encadrés jusqu’à leurs 18 ans. » (sans titre [iriss.org.uk], p. 23, 15 mars 1889, North British Daily Mail (en anglais)).

Sur le formulaire de demande (en anglais), les familles avaient la possibilité de choisir un garçon ou une fille, ainsi qu’une tranche d’âge. Si la demande concernait un garçon, une section était consacrée à des informations comme le type d’exploitation agricole de la famille, le nombre d’heures de travail par jour, la superficie de la terre ainsi que le nombre de vaches à traire. En outre, chaque demandeur devait fournir les noms de cinq personnes de référence : son ministre du culte, son préfet, son médecin et deux autres personnes influentes.

Le placement des enfants était régi par des contrats d’engagement juridiquement contraignants. Selon une exposition en ligne du Musée canadien de l’histoire, les formulaires d’engagement :

… établissaient clairement les responsabilités du foyer d’accueil, de l’enfant, du maître et de la maîtresse. Pour un enfant de moins de dix ans, le maître ou la maîtresse recevait 5 $ par mois de l’agence pour loger, nourrir, scolariser et habiller l’enfant, qui devait effectuer de menus travaux à la maison et à la ferme. De 11 à 14 ans, les enfants ne recevaient en échange de leur travail que le gîte, le couvert et un peu d’éducation. De 14 ans à la fin de l’engagement, soit 18 ans, les enfants étaient censés effectuer le travail d’un adulte à temps plein et avaient donc droit à une rémunération. (Civilisations.ca – À la croisée des cultures – Instruments de musique (museedelhistoire.ca)).

Feuille de papier blanche avec du texte anglais dactylographié en noir. Sur le côté gauche supérieur de la lettre se trouve un cachet noir indiquant la date de sa réception.

Formulaire d’engagement, estampillé par le ministère de l’Intérieur, 24 mars 1900, Direction de l’immigration, RG 76, vol. 46, dossier 1532, partie 1. Source : Immigration Program : Headquarters central registry file – Image 379 – Héritage (canadiana.ca).

Mon grand-père, comme la majorité des enfants du foyer, venait d’une zone urbaine industrielle du Royaume-Uni. Il avait sans doute effectué quelques tâches quotidiennes pendant son séjour à l’orphelinat situé à Bridge of Weir. Cependant, cela ne l’avait sûrement pas préparé à la vie sur une ferme de l’Ontario ni aux rudes hivers canadiens (Société historique de l’immigration canadienne [cihs-shic.ca] (en anglais)). Si certains ont vécu des expériences positives et ont été traités comme des membres de la famille, d’autres ont connu de grandes souffrances, notamment des abus physiques et sexuels et de la négligence (Compensation offered for surviving British Home Children and Child Migrants | Ups and Downs – British Home Children in Canada [wordpress.com] (en anglais)). Les organismes d’émigration, y compris les orphelinats de William Quarrier, devaient effectuer des visites annuelles pour s’assurer que les enfants recevaient des soins adéquats. Selon un livret souvenir de 1907 publié par l’organisation de Quarrier, les enfants qui émigraient au Canada étaient « sous une supervision attentive [leur permettant] de devenir de dignes citoyens de la grande colonie » (William Quarrier – Brockville, Ont., 7,200 immigrated – BRITISH HOME CHILDREN IN CANADA [weebly.com], diapositive 2 (en anglais)).

Mais, comme l’a fait remarquer la regrettée Sandra Joyce, auteure et cofondatrice du British Home Child Group International :

C’est à ce moment-là que le système commençait à s’effondrer. Les frères et sœurs étaient séparés dès leur arrivée et, bien que certains fermiers se souciaient sincèrement des enfants, beaucoup les considéraient simplement comme une main-d’œuvre bon marché. D’autres leur faisaient subir des sévices atroces. Le suivi des enfants placés était généralement laissé au hasard (British Home Children – SANDRA JOYCE (en anglais)).

Chaque année, des inspecteurs de l’enfance étaient chargés de vérifier la situation de plus de 2 000 enfants dans le sud de l’Ontario, une tâche pratiquement impossible. (Société historique de l’immigration canadienne [cihs-shic.ca] (en anglais)).

À leur arrivée au Canada, mon grand-père et son frère ont été confiés à deux familles d’agriculteurs différentes. Le recensement du Canada de 1891 indique que mon grand-oncle, John, âgé de 15 ans, travaillait comme domestique pour Robert et Mary Parker dans une ferme près de Brockville, en Ontario. Selon ma tante Anna, Robert a ensuite perdu la trace de John, qui est parti vers le nord et s’est finalement installé dans l’Ouest canadien. J’ai trouvé sur Ancestry la notice nécrologique d’un certain John Greenhorn, né vers 1877 en Écosse, et décédé le 31 mars 1961 à l’âge de 84 ans à Victoria, en Colombie-Britannique. Je crois qu’il s’agit de mon grand-oncle.

Comme je l’ai fait remarquer dans la troisième partie de la série, j’espérais trouver des documents concernant mon grand-père après son arrivée à la maison Fairknowe, à Brockville. Malheureusement, ces documents ont été détruits. En discutant avec mon père, Ralph, j’ai appris que son père avait d’abord vécu chez une famille habitant près du hameau de Philipsville, en Ontario, à environ 46 kilomètres de Brockville. Je ne sais pas combien de temps mon grand-père a vécu avec cette famille. J’ai cependant cru comprendre qu’il y avait été maltraité, avant d’être recueilli par les King, qui habitaient sur une ferme voisine. En 1891, mon grand-père, âgé de 12 ans, était enregistré comme domestique et vivait avec Aulga (sic) [Auldjo] et Mary (Ann) King ainsi que leurs enfants adultes, William et Christine (Recensement du Canada de 1891). Lors du recensement du Canada de 1901, Robert vivait toujours avec Anldfo (sic) [Auldjo] et Mary Ann King, ainsi que leur petite-fille, Gladys Marshall. J’ai été soulagée de savoir que sa relation avec les King avait changé : il n’était plus un domestique, mais avait été adopté par la famille King. Ma tante Anna se souvient que Robert parlait en termes élogieux des King qui, selon lui, « ont toujours été bons avec [lui] ». (conversation, 22 août 2023) Les données du recensement du Canada de 1901, combinées aux souvenirs de ma tante, laissent penser que le sort de mon grand-père s’est amélioré et qu’il a vécu dans une famille bienveillante.

La partie suivante peut sembler hors sujet, mais je vous assure qu’elle concerne aussi l’histoire de mon grand-père. J’ai vécu ma plus belle expérience d’emploi étudiant durant deux étés, au début des années 1980. J’ai notamment eu l’occasion de participer à un projet de recherche historique sur les bâtiments patrimoniaux et les familles des cantons de Bastard et de South Burgess, qui comprennent le hameau de Philipsville. Le projet, mené par l’historienne Diane Haskins, a abouti à la publication de My Own Four Walls: heritage buildings and the family histories in Bastard and South Burgess Township (en anglais), en 1985. Cet emploi m’a permis de passer une semaine aux Archives nationales du Canada, aujourd’hui Bibliothèque et Archives Canada (BAC), pour effectuer des recherches sur les documents de recensement de l’Ontario conservés sur microfilms. Je ne me doutais pas alors que je travaillerais à BAC un jour, mais je m’écarte du sujet. Revenons à l’histoire de mon grand-père.

En août 2023, ma tante Anna m’a montré son exemplaire de My Own Four Walls. Le chapitre consacré à Philipsville comprend une photographie de la meunerie et scierie de Reuben Haskin, prise vers 1900. L’homme en haut à gauche, agenouillé sur une poutre avec une hache à la main, est identifié comme étant Bill Greenhorn. Je me souvenais avoir vu cette photographie lors de mes recherches en tant qu’étudiante, mais je n’avais pas fait le lien. J’avais supposé que la personne qui avait inscrit les noms des personnes sur cette photographie avait mal identifié l’homme tenant la hache et s’était trompée de nom de famille. À ma connaissance, il n’y avait que trois personnes dénommées Greenhorn dans le Sud-Est de l’Ontario au début du siècle : mon grand-père, Robert, et ses frères, John et Norval. En fait, avant 2018, je n’avais jamais vu de portrait de jeune homme de mon grand-père. C’est ma cousine Joyce Madsen, la fille de ma tante Jenny, qui m’avait alors montré une photo lors d’une visite. Lorsque j’ai commencé à travailler sur l’histoire de notre grand-père, Joyce m’a généreusement donné le portrait de Robert pris au début de sa vingtaine (voir partie 1).

Groupe composé de sept hommes, de deux femmes et de deux enfants posant sur le sol, sur une poutre et sur une échelle devant un bâtiment ouvert en bois.

Meunerie et scierie de Reuben Haskin, Philipsville (Ontario), vers 1900. Dernière rangée, de gauche à droite : Robert Greenhorn et deux autres hommes non identifiés. Rangée centrale, de gauche à droite : Joe Halladay, Kenneth Haskin, un enfant non identifié, Allan Haskin et Philo Haskin. Première rangée, de gauche à droite : Helen Haskin, Bertha Haskin, Miss Shire et M. McCollum. Fournie gracieusement par Bruce Haskins. (OCLC 16752352, p. 96)

En travaillant sur la présente série, j’ai appris, grâce aux données du recensement du Canada de 1911, que mon grand-père était employé comme ouvrier dans une scierie et qu’il logeait chez Reuben et Bertha Haskin à Philipsville. Je n’aurais jamais fait le lien si ma tante Anna ne m’avait pas remis en mémoire cette photographie publiée dans My Own Four Walls.

Le 14 juillet 1916, les registres d’accès au cadastre de l’Ontario pour le comté de Leeds indiquent qu’Auldjo et Mary Ann King ont concédé à Robert des parties des lots 21 et 22, les terres voisines de leur ferme, pour 10 $, selon certaines conditions non spécifiées liées à l’espérance de vie de Mary Ann. Deux mois plus tard, le 16 septembre 1916, Robert a épousé ma grand-mère, Blanche Carr (Ancestry.ca -Mariages, Ontario, Canada, 1826 à 1939). Née en mai 1898, elle était de 19 ans la cadette de mon grand-père, mais elle l’avait connu toute sa vie, puisqu’elle avait grandi juste à côté de la ferme des King.

Mes grands-parents possédaient une ferme laitière et bovine ainsi qu’une érablière, que ma famille appelle affectueusement « la ferme ». Ils ont eu huit enfants, dont sept ont survécu jusqu’à l’âge adulte : Jennie, Roy, Josephine (Jo), John, Jean, Arnold et mon père, Ralph. Nellie, née en 1924, est décédée l’année suivante. Elle est enterrée avec mes grands-parents au cimetière Halladay à Elgin, en Ontario.

Un groupe composé d’hommes, de femmes et d’enfants, sur deux rangées, debout sur la neige en tenue d’intérieur devant un bâtiment à ossature en bois, à droite, et un arbre, à gauche.

Devant la maison de ferme, à Philipsville (Ontario), vers 1940. Première rangée, de gauche à droite : mon oncle Arnold, Alex Morrison (le mari de ma tante Jo), ma grand-mère Blanche, ma tante Jo, ma tante Jean, mon grand-père Robert et mon oncle John. Deuxième rangée, de gauche à droite : mon oncle Roy, Mary et Hugh (les enfants de ma tante Jo) et mon père, Ralph. Fournie gracieusement par l’auteure du billet de blogue, Beth Greenhorn.

La vie de mes grands-parents n’était pas facile, surtout durant les premières années de leur mariage. Leur première maison, située à quelques propriétés de la ferme familiale des King, présentait son lot de défis. Ma tante Anna se souvient que la sage-femme de Blanche a décrit leur maison comme étant « une pauvre cabane », dans laquelle des seaux recueillaient les eaux de pluie qui traversaient le toit (courriel d’Anna Greenhorn à Beth Greenhorn, 19 janvier 2024). Après avoir reçu le courriel de ma tante, j’ai relu les mémoires non publiés de mon père. Il y évoque brièvement Margaret (Meg) Nolan, la sage-femme qui a mis au monde tous les enfants de Blanche. Au moment du recensement du Canada de 1931, Margaret Nolan, âgée de 62 ans, était employée comme infirmière auxiliaire et vivait toujours à Philipsville.

Le recensement du Canada de 1921 indique que Blanche et Robert Greenham (sic) avaient acheté un terrain à côté de celui de la famille King, où ils ont finalement construit leur maison. Robert était agriculteur. Le couple avait trois enfants : Jennie, âgée de cinq ans, Roy, âgé de trois ans et Jo, âgée de deux ans à l’époque.

Lors d’une conversation avec tante Anna en août dernier, elle m’a raconté la façon dont mes grands-parents ont d’abord construit la grange pour loger la famille pendant la construction de la maison. La priorité était de subvenir à leurs besoins et il leur fallait un abri pour traire les vaches. Dès que la construction de la maison le permit, ma grand-mère et mes tantes, Jennie et Jo, et peut-être Nellie et Jean, s’y sont installées. Mon grand-père et mes oncles, Roy et John, ont continué à dormir dans la grange jusqu’à ce que la maison ait des cloisons intérieures offrant plus d’intimité. Mon père m’a dit que la famille n’a pas eu d’électricité avant qu’il soit en dixième ou onzième année, c’est-à-dire au milieu des années 1940.

L’agriculture était, et est toujours, un travail difficile, nécessitant de longues heures de travail 365 jours par an. La famille entière était mise à contribution. Bien qu’il n’y ait jamais eu d’argent pour s’offrir du luxe, mon père disait qu’il y avait toujours de la nourriture en abondance sur la table, le repas du midi étant le plus copieux de la journée. Il se composait généralement de purée de pommes de terre et de sauce, de plusieurs sortes de légumes et de rôti de bœuf ou de jambon, et il se terminait toujours par une grosse part de tarte aux fruits. La plupart des aliments étaient cultivés à « la ferme » (mémoires non publiés, p. 7 et 8).

Formulaire de recensement comportant 17 colonnes et montrant les noms de 11 personnes écrits à la main à l’encre noire sur des lignes individuelles.

Recensement de 1931, Robert et Blanche et leurs sept enfants. Ils vivaient à proximité de William King, le fils d’Auldjo et de Mary Ann King. Daniel Beach, le père âgé de Mary Ann King, logeait chez la famille. Source : Recensement de 1931 (bac-lac.gc.ca), compté de Leeds, sous district Bastard et Burgess, no 4, page 2 de 13.

La quête de l’histoire de mon grand-père, Robert Roy Greenhorn, a été une belle expérience teintée d’amertume par moments. Je ne peux qu’imaginer à quel point il a dû être terrifiant d’arriver dans un nouveau pays à l’âge de 9 ans et d’être séparé de son frère aîné. J’ai été bouleversée d’apprendre que mon grand-père avait été maltraité par sa première famille d’accueil. J’ai cependant pu trouver du réconfort dans le fait qu’il a ensuite été recueilli par un couple bienveillant, à qui il témoignait de l’affection.

Portrait réalisé en studio d’un jeune homme présenté dans un cadre ovale sur panneau rectangulaire noir. Le jeune homme porte un costume trois pièces et un chapeau melon, tient un document roulé et appuie son coude sur le dossier d’une chaise.

Robert Roy Greenhorn, photographe et lieu inconnus, vers la fin des années 1890. Photo offerte gracieusement par Pat Greenhorn.

Cette photo de mon grand-père a probablement été prise alors qu’il avait une vingtaine d’années. Se faire tirer le portrait à la fin du XIXe siècle était un événement important. Mon grand-père est vêtu de son plus beau costume, probablement le seul qu’il possède. Son gilet semble être rendu un peu trop petit pour lui. Il tient un document roulé, un accessoire indiquant qu’il sait lire et écrire. Son regard franc traduit la confiance en soi. Son langage corporel est empreint d’assurance. Bien que mon grand-père n’ait pas connu une ascension sociale fulgurante, son histoire est marquée par la résilience et la détermination.

Ressources complémentaires


Beth Greenhorn est gestionnaire de contenu en ligne à la Direction générale de la diffusion et de l’engagement de Bibliothèque et Archives Canada.

À la découverte de mon grand-père Robert Roy Greenhorn : sa vie dans les Orphan Homes of Scotland (partie 3)

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Groupe de garçons travaillant dans un champ à la ferme école de la Philanthropic SocietyPar Beth Greenhorn

Cet article renferme de la terminologie et des contenus à caractère historique que certains pourraient considérer comme offensants, notamment au chapitre du langage utilisé pour désigner des groupes raciaux, ethniques et culturels. Pour en savoir plus, consultez notre Mise en garde – terminologie historique.

Je tiens à remercier Mary Munk (collègue à la retraite du secteur de la généalogie et de l’histoire familiale de Bibliothèque et Archives Canada), ma tante Anna Greenhorn, ma cousine Pat Greenhorn et Steven Schwinghamer (Quai 21) pour l’aide qu’ils m’ont apportée dans la rédaction des parties 3 et 4 de cette série.

Au moment d’écrire ce troisième article sur mon grand-père Robert Roy Greenhorn, je n’avais toujours trouvé aucun document relatif à son émigration au Canada. J’ai contacté Quarriers Records Enquiry, mais selon le site British Home Children in Canada, les rapports conservés par Quarrier Orphan Homes of Scotland sur les progrès des enfants dans leurs foyers canadiens ont été détruits, semble-t-il à la suite d’une erreur de communication lors de la fermeture de l’établissement canadien en 1938. J’espérais également retrouver des documents concernant son placement dans les deux familles d’accueil avec lesquelles il a vécu après son arrivée à la maison de répartition Fairknowe, à Brockville, en Ontario, en 1889, mais je n’ai pas eu cette chance jusqu’à présent.

À ce jour, je n’ai pu mettre la main que sur deux documents se rapportant expressément à mon grand-père.

Le premier est ce portrait de groupe pris en mars 1889, peu après son arrivée à la maison Fairknowe. Robert et son frère John figurent tous deux sur cette photo. Tous les garçons sont nommés sous l’image, dans l’ordre alphabétique de leurs prénoms. Comme je n’ai jamais vu de photo de mon grand-père lorsqu’il était enfant, je suis incapable de le reconnaître. Selon ma tante Anna Greenhorn (la femme de mon oncle John), mon grand-père était très petit pour son âge. Je sais que, d’après la liste de passagers sur laquelle il figure, il était l’un des plus jeunes garçons de son groupe. Je me demande s’il ne fait pas partie des plus petits, au premier rang.

Photo en noir et blanc d’un grand groupe de garçons et de plusieurs hommes et femmes se tenant debout sur le parterre, l’escalier et la galerie d’un bâtiment en stuc blanc.

Le groupe d’arrivants du navire Siberian, 26 mars 1889, maison Fairknowe, Brockville, Ontario. Photo : William Quarrier – Brockville, Ont. 7 200 immigrés – « BRITISH HOME CHILDREN IN CANADA » (weebly.com)

La deuxième référence est une brève déclaration figurant à la page 43 du document Narrative of Facts, le rapport annuel de William Quarrier pour 1894. On peut y lire : [traduction] « […] un garçon de neuf ans, frère des deux enfants amenés au Canada précédemment, qui se portent bien. Celui-ci habitait avec une sœur mariée, mais il devenait incontrôlable et, malgré son jeune âge, il a volé, etc. » [Source : sans titre (iriss.org.uk)] Le garçon de neuf ans est Norval, le plus jeune frère de mon grand-père, et Jeanie, alors mariée, est sa sœur. Norval a quitté l’Écosse le 29 mars 1894. Il est arrivé à Halifax, en Nouvelle-Écosse, le 16 avril 1894, avant de rejoindre la maison Fairknowe à Brockville, en Ontario.

À la fin de la partie 2 de cette série, j’ai interrompu mon récit au moment où mon grand-père et son frère John ont été transférés du City Orphan Home, à Glasgow, à l’Orphan Homes of Scotland, situé à Bridge of Weir, à environ 25 kilomètres. Ils ont déménagé lorsque des lits se sont libérés à la suite de l’émigration annuelle de garçons vers le Canada. C’était le 11 juin 1886. L’Orphan Homes of Scotland allait héberger Robert et John pendant près de trois ans.

Lorsque mon grand-père et son frère arrivent à l’Orphan Homes of Scotland, cet orphelinat, d’abord constitué de deux maisons de campagne pouvant accueillir chacune de 20 à 30 enfants, est devenu une communauté autonome comptant près de 600 enfants (source, p. 37). Appelée « The Village », la communauté se compose de 16 maisons de campagne, d’une blanchisserie, d’ateliers et de fournils, d’un magasin et d’un bureau de poste, d’une écurie et d’une étable, d’un poulailler, d’une serre, de l’église Mount Zion, de salles de classe et d’une maison destinée au surintendant de l’établissement. Le bâtiment central abrite la salle principale, les salles de classe et les logements des enseignants. Il y a aussi le James Arthur, un navire enclavé destiné à l’entraînement des garçons qui allaient travailler dans la marine.

Le 14 mars 1889, une réunion spéciale est tenue au Village pour dire adieu aux garçons qui partent pour le Canada. Robert et John, ainsi que 128 autres garçons, quittent l’Écosse dès le lendemain. Des résidents de Glasgow et de Paisley sont invités à la réception. Selon un article paru dans le Glasgow Herald intitulé « Orphan Homes of Scotland: Departure of Children for Canada » (15 mars 1889, p. 8), plusieurs centaines de véhicules ont convergé vers la gare de Bridge of Weir, transportant des gens venus dire adieu aux petits immigrés. Je ne saurai jamais si la sœur aînée de Robert et John, Jeanie, qui travaillait à Paisley en 1885, faisait partie des invités. Si elle était présente, j’espère qu’elle a eu l’occasion de voir ses jeunes frères une dernière fois et de les serrer tous les deux dans ses bras.

Chaque garçon et fille qui émigrait au Canada recevait un coffre en bois portant l’initiale de son prénom et son nom de famille. Ma cousine Pat Greenhorn a hérité du coffre de notre grand-père, seul souvenir de son enfance. Comme je l’ai mentionné dans la partie 1 de cette série, chaque enfant était appelé à travailler. Les filles étaient généralement employées comme domestiques, et les garçons, comme ouvriers agricoles. Les coffres contenaient donc des vêtements de travail adaptés aux saisons canadiennes, une tenue pour la messe, des articles de toilette, du nécessaire pour recoudre les chaussettes et les vêtements, ainsi qu’une bible. En outre, les enfants recevaient un exemplaire du livre The Pilgrim’s Progress (le voyage du pèlerin) de John Bunyan, une allégorie religieuse racontant l’histoire d’un homme nommé Christian. Honteux et habité par le péché, Christian quitte la Cité de la destruction pour la Cité céleste en quête de la rédemption. Ce livre populaire a sans aucun doute été choisi pour les enseignements religieux et moraux qu’il renferme, afin d’encourager les enfants dans leur parcours et leur nouvelle vie au Canada.

Photo d’un coffre en bois marron. Un nom est inscrit au pochoir en lettres majuscules blanches du côté droit, et un autre nom en petites majuscules noires est visible dans le coin inférieur gauche.

Le coffre de Robert Greenhorn fourni par Quarrier Orphan Homes of Scotland. Photo : gracieuseté de Pat Greenhorn.

Robert et John ont voyagé sur le navire à vapeur S.S. Siberian, exploité par la compagnie de transport maritime Allan Line. Bibliothèque et Archives Canada (BAC) ne possède pas d’images numérisées de ce navire, mais détient une carte postale du S.S. Sardinian, qui a amené de petits immigrés au Canada à partir de 1875. Il est semblable au navire sur lequel mon grand-père a voyagé. Le Sardinian figure également sur le timbre-poste canadien de 2010 commémorant les petits immigrés anglais (voir la partie 1).

Photo en couleur d’un navire aux flancs noirs avec une bande rouge dans la partie inférieure et une cheminée rouge, noir et blanc. Un plus petit bateau blanc avec quatre rames et une cheminée qui fume est ancré à tribord, devant. Le nom du navire est écrit en lettres rouges dans le coin supérieur droit de l’image.

Le S.S. Sardinian, exploité par Allan Line, vers 1875-1917 (a212769k).

BAC possède la liste des passagers, y compris les garçons des orphelinats Quarrier et le reste des passagers de cabine, qui sont partis de Glasgow et de Liverpool pour se diriger vers le Canada sur le Siberian en mars 1889. Mon grand-père, inscrit sous le nom de Rob Greenhorn, figure parmi les garçons âgés de neuf ans.

À l’instar de tous les groupes d’émigrants des orphelinats Quarrier, mon grand-père a voyagé vers le Canada dans l’entrepont. Il s’agissait des places les moins chères sur les longs voyages en bateau à vapeur. Si l’on en croit les descriptions, ces quartiers d’habitation et de couchage étaient misérables. Installés dans la partie la plus basse du navire, l’espace contenant les machines, les passagers de l’entrepont étaient entassés et disposaient de peu d’air frais, ce qui provoquait une puanteur insupportable (Entrepont – Wikipédia). Dans son rapport annuel de 1889, William Quarrier remercie Allan Line pour la commodité et le confort des installations, qui étaient (traduction) « comme d’habitude très généreuses et satisfaisantes » [1889, p. 24, sans titre (iriss.org.uk)]. Les souvenirs qu’a conservés mon grand-père de ce voyage diffèrent de ceux de William Quarrier. L’été dernier, ma tante Anna m’a raconté l’expérience de Robert sur le Siberian. D’après mon grand-père, les garçons étaient entassés comme des sardines. Ils étaient 14 dans une cabine où l’air était lourd et nauséabond (source : Conversation entre Anna Greenhorn et Beth Greenhorn, 22 août 2023).

Mon grand-père est arrivé à Halifax, en Nouvelle-Écosse, le 26 mars 1889, neuf jours après son départ. Une fois débarqués du navire, les garçons étaient pris en charge par des fonctionnaires de l’immigration dans l’entrepôt du quai 2. Cette photo des archives de la Nouvelle-Écosse montre cet entrepôt avant qu’un incendie ne le détruise en 1895.

Photo en noir et blanc d’un long bâtiment en brique d’un étage sur un quai en bois. Plusieurs voiliers se trouvent devant le quai, et un grand bâtiment en brique portant le nom de l’entreprise en lettres blanches se trouve derrière, du côté gauche.

L’entrepôt du Quai 2 avec l’élévateur à grains de l’Intercolonial Railway à l’arrière-plan, port d’Halifax, avant 1895. Photo : fonds Harry et Rachel Morton, numéro d’acquisition 2005-004/004, album Longley, partie 1, numéro 40, Archives de la Nouvelle-Écosse.

Avant 1892, la Direction de l’immigration relevait du ministère de l’Agriculture. Les installations d’Halifax vouées aux immigrants étaient rudimentaires. En janvier 1889, trois mois avant l’arrivée de mon grand-père, le sous-ministre de l’agriculture, John Lowe, a inspecté l’entrepôt du quai 2. Il a conclu que celui-ci n’était pas adéquat. Dans une note datée du 23 avril 1889, il écrit :

[Traduction]
À l’heure actuelle, les immigrants sont reçus dans le hangar à marchandises du Chemin de fer Intercolonial, dans le port en eau profonde. Une petite pièce située à l’angle de ce bâtiment est destinée à abriter les femmes et les enfants, mais sa capacité d’accueil est tout à fait insuffisante compte tenu du nombre d’immigrants qui arrivent. Des désagréments importants surviennent […] dans le hangar à marchandises, et lorsqu’un grand nombre de personnes arrivent et doivent attendre pendant plusieurs heures […] les épreuves que subissent les immigrants sont très dures, et dans certains cas, des enfants fragiles tombent gravement malades. Pour les raisons mentionnées ci-dessus, il est absolument nécessaire et urgent de mettre à la disposition des immigrants arrivant à Halifax des locaux adéquats. Il ne faudrait pas qu’un autre hiver se passe sans que l’on érige de telles structures d’accueil. [RG17, vol. 610, dossier 69092]

Après l’inspection faite par les agents d’immigration, mon grand-père et son groupe sont montés à bord d’un train du Chemin de fer Intercolonial à destination de la maison Fairknowe, située à Brockville, en Ontario. La distance entre Halifax et Brockville est de 1 730 kilomètres (1 074 milles). Cela a dû être un autre voyage épuisant, d’une durée de plusieurs jours.

Dans le quatrième et dernier article de cette série, l’histoire de Robert Roy Greenhorn nous mènera au Canada, plus précisément à la maison Fairknowe à Brockville, en Ontario, et plus tard à Philipsville, en Ontario, où il vivra jusqu’à la fin de sa vie.

Ressources complémentaires


Beth Greenhorn est gestionnaire de l’équipe du contenu en ligne à la Direction générale de la diffusion et de l’engagement de Bibliothèque et Archives Canada.

 

À la découverte de mon grand-père Robert Roy Greenhorn : sa vie en Écosse (partie 2)

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Groupe de garçons travaillant dans un champ à la ferme école de la Philanthropic SocietyPar Beth Greenhorn

Cet article renferme de la terminologie et des contenus à caractère historique que certains pourraient considérer comme offensants, notamment au chapitre du langage utilisé pour désigner des groupes raciaux, ethniques et culturels. Pour en savoir plus, consultez notre Mise en garde – terminologie historique.

Dans la première partie de cette série de quatre, j’ai parlé de mon grand-père Robert Roy Greenhorn (1879-1962). J’ai découvert qu’il était un petit immigré anglais et qu’il avait été pensionnaire dans les orphelinats de Quarrier, en Écosse. Dans la deuxième partie, nous nous rendrons dans les villes écossaises où sont nés mon grand-père et ses parents : Gartsherrie et Falkirk.

Je tiens à remercier Anna Greenhorn, sa fille Pat Greenhorn et ma cousine Joyce Madsen, qui ont généreusement partagé leurs souvenirs de Robert Roy Greenhorn.

Groupe de 53 personnes devant une grande maison avec une galerie. Des garçons sont debout en quatre rangées. D’autres garçons, quatre filles et trois hommes portant un chapeau se trouvent derrière eux.

Anciens pensionnaires des orphelinats de Quarrier, en Écosse, photographiés à l’orphelinat Fairknowe, à Brockville (Ontario), entre 1920 et 1930 (a041418). Cette photo a été prise environ 30 ans après l’arrivée de mon grand-père Robert et de ses frères.

Les chercheurs en généalogie sont souvent confrontés à des documents ou des renseignements manquants ou incomplets. Il faut donc consulter une gamme d’archives et de documents publiés pour établir des liens dans la vie de la personne recherchée. C’est particulièrement vrai si celle-ci n’était ni riche ni célèbre.

Pour reconstituer la vie de mon grand-père, j’ai rassemblé des faits trouvés dans des recensements canadiens, des listes de passagers et des documents sur les petits immigrés anglais. En plus de ces ressources conservées à BAC, j’ai consulté des sources primaires numérisées sur Ancestry, des recensements écossais, des publications historiques, des journaux et des expositions en ligne.

Mon oncle John et ma tante Anna (le frère et la belle-sœur de mon père) ont fait des recherches sur la famille Greenhorn, et je leur en suis très reconnaissante. Je remercie spécialement ma tante de m’avoir donné des photocopies de deux pages tirées de grands livres :

  • la page 40, intitulée « Greenhorn, John & Robert », qui contient des entrées pour le 10 décembre 1885, le 11 juin 1886 et le 15 mars 1889;
  • la page 285, intitulée « Greenhorn, Norval », qui contient des entrées pour les 6 et 8 juillet 1892, le 29 mars 1894 et le 25 novembre 1904.

J’ai demandé à l’équipe de Quarriers Aftercare à Bridge of Weir, en Écosse, de vérifier la source de ces documents photocopiés. J’attends encore la réponse, mais il s’agit probablement de copies de grands livres tenus par les orphelinats de Quarrier. Ces deux pages expliquent pourquoi mon grand-père Robert et ses frères, John et Norval, sont entrés à l’orphelinat et ont émigré au Canada. Elles nomment une personne qui a joué un rôle essentiel dans cette histoire : Jeanie Greenhorn, la sœur aînée de mon grand-père. Nous y reviendrons.

Étant donné que mes grands-parents Greenhorn, Robert et Blanche (née Carr), exploitaient une ferme laitière, j’ai présumé que mon grand-père venait d’une famille d’agriculteurs, ou qu’il avait à tout le moins grandi sur une ferme. Je n’aurais jamais pensé que sa famille faisait partie de la classe ouvrière pauvre, victime de l’industrialisation en Écosse. Mon arrière-grand-père, Norval Greenhorn (1839-1882), et son beau-père, mon arrière-arrière-grand-père John Fleming (1805-1887), étaient ferronniers dans les villages industriels de Gartsherrie et de Falkirk.

Gartsherrie est aujourd’hui une banlieue de Coatbridge. Cet ancien village industriel situé environ 14 kilomètres à l’est de Glasgow est la ville natale de mon arrière-grand-mère Margaret Greenhorn (née Fleming, 1845-1885). En 1843, l’usine sidérurgique de Gartsherrie est probablement le plus grand producteur mondial de fonte brute. En 1864, Andrew Miller décrit les villes de Coatbridge et de Gartsherrie de manière aussi imagée que déprimante :

Un visiteur qui se rend dans un district où l’on produit du fer, comme Coatbridge, doit être fort impressionné par toutes ces flammes qui jaillissent lors d’une nuit sombre. À quoi pourrait bien penser un homme qui n’aurait jamais vu une usine sidérurgique, ou qui n’en aurait même jamais entendu parler, […] et qui verrait pour la première fois [du haut de l’église de Gartsherrie] près de 50 hauts fourneaux qui crachent le feu, pendant que les innombrables cheminées et chaudières des usines et des forges environnantes émettent leur éblouissante lumière blanche, semblable à celle d’un météore dans la pénombre? (Traduction d’une citation tirée de la page Web The Bairds of Gartsherrie, North Lanarkshire Council)

La photo ci-dessous de l’usine sidérurgique de Gartsherrie, prise au milieu de la décennie 1870, montre les hauts fourneaux (utilisés pour la fonte des minerais) de l’aile la plus récente, bâtie sur le canal Monkland. L’aile plus ancienne, de l’autre côté du canal, avait elle aussi huit fourneaux, pour un total de seize.

Installation industrielle. Un bâtiment de briques de plusieurs étages surmonté d’une cheminée, à gauche, et huit hauts fourneaux, à droite, occupent environ les deux tiers de la photo. Deux grandes barges se trouvent sur le canal qui passe devant l’aire de travail et les fourneaux.

La nouvelle aile de l’usine sidérurgique avec ses huit fourneaux, Gartsherrie (Écosse), vers 1875. Photo : The Bairds of Gartsherrie – CultureNL Museums (Collections des musées du North Lanarkshire Council).

Dans l’Ordnance Gazetteer of Scotland (Francis H. Groome [directeur de publication], 1884, vol. I, p. 273), Coatbridge est ainsi décrit : « Le feu, la fumée, la suie et le vacarme généré par la machinerie sont ses principales caractéristiques. La lumière des fourneaux dans la nuit donne l’impression qu’il y a eu une grosse explosion. » [Traduction]

Selon le recensement de l’Écosse réalisé en 1851 (les recensements écossais peuvent être consultés sur Ancestry), mon arrière-grand-mère Margaret Fleeming [sic], âgée de six ans, vivait à Gartsherrie. Son père, John Fleeming [sic], 43 ans, était chargeur de fourneaux (furnace filler). Je suppose qu’il travaillait à l’usine sidérurgique de Gartsherrie, car la famille vivait au 154, North Square. Il s’agit d’une des résidences bâties pour les ouvriers par la société William Baird and Company, fondatrice de l’usine. Ces résidences étaient abandonnées au moment où la photo ci-dessous a été prise, en 1966. Elles ont été démolies en 1969.

Une rue pavée devant une longue rangée de maisons de pierres abandonnées. Les maisons n’ont plus de toits.

Les bâtiments qui formaient le North Square et qui jadis hébergeaient les ouvriers de l’usine sidérurgique de Gartsherrie (Écosse), en 1966, peu avant leur démolition. Photo : Canmore – National Record of the Historic Environment

Un plan des rues tracé en 1930 montre que les résidences North Square sont coincées entre deux voies de chemin de fer. De plus, l’usine sidérurgique et ses hauts fourneaux sont visibles de cet endroit. Selon la page anglaise de Wikipédia sur Coatbridge, la plus grande partie des résidents vivent dans d’étroites rangées de maisons situées tout près de l’usine sidérurgique. Dans ce milieu surpeuplé, les conditions de vie sont épouvantables et la tuberculose pullule.

L’Ordnance Gazetteer of Scotland (1883, vol. III, p. 80) explique qu’à Gartsherrie, « Il y a 400 bâtiments pour ouvriers comprenant chacun deux ou trois appartements, un petit lot à cultiver et un approvisionnement limité en gaz et en eau. » [Traduction] Le complexe sidérurgique comprend également une école pouvant accueillir 612 élèves (il y en avait 253 en 1881) et une école secondaire dont 400 des 666 places disponibles étaient occupées.

On peut supposer que les ferronniers et leurs familles s’évadaient rarement de la misère de Gartsherrie. La révolution industrielle prolonge les heures de travail, qui ne sont plus régulées par les saisons et le coucher du soleil. Les ouvriers travaillent de 14 à 16 heures par jour, six jours par semaine. Le tableau ci-dessous, peint en 1853, s’intitule Gartsherrie by Night; il montre les fourneaux en marche pendant la nuit.

Selon le recensement écossais de 1861, mon arrière-grand-père Norval Greenhorn vit avec ses parents et ses frères dans l’appartement 8 sur la rue Back Row, à Falkirk. Cette ville située environ 27 kilomètres au nord-est de Coatbridge fabrique du fer et de l’acier. Norval, âgé de 22 ans, semble travailler comme ferronnier.

Les conditions de vie des ouvriers ne semblent pas moins misérables qu’à Gartsherrie. D’après la Société d’histoire locale de Falkirk, la rue Back Row de l’époque victorienne (devenue la Manor Street) est étroite et sinistre. Des bâtiments insalubres et surpeuplés, reconnus pour leur état de délabrement, sont fréquemment frappés par des éclosions de choléra et de typhus.

Mes arrière-grands-parents Margaret et Norval Greenhorn se sont mariés en mars 1864. Étrangement, le recensement écossais de 1871 ne fait nullement mention de Norval dans la déclaration de Margaret. Celle-ci travaille comme domestique et vit avec ses parents, son frère, sa belle-sœur et son tout jeune neveu au 154, North Square (voir la troisième image ci-dessus), à Gartsherrie. Le recensement mentionne cependant une petite-fille, « James Grenham », âgée de six ans. Je crois qu’il s’agit de Jeanie Greenhorn, la plus vieille des enfants de Norval et Margaret, née en 1864. L’omission de Norval s’explique peut-être par le fait qu’il travaillait encore à Falkirk, bien que son nom ne soit pas mentionné là-bas, ni dans aucune autre déclaration du recensement de 1871.

Norval et Margaret ont eu sept ou huit enfants, dont quatre seulement ont survécu : Jeanie (1864-1938), John (1877-1961), mon grand-père Robert (1879-1962) et le cadet, Norval (1883-vers 1960).

Au moment du recensement écossais de 1881, Margaret et Norval vivent au 154, North Square, à Gartsherrie avec le père de Margaret (John Fleming) et leurs deux fils : mon grand-oncle John, trois ans, et mon grand-père Robert, deux ans plus jeune. John Fleming est un chargeur de fourneaux au chômage. Norval père travaille comme finisseur de chambres à air. Jeanie Greenhorn, 16 ans, a quitté le domicile parental et travaille comme domestique au service du fruitier George Bissett et de son épouse Sarah, à Cleland Place, environ 17 kilomètres au sud-est de Gartsherrie.

Les orphelinats en Écosse m’ont appris que mon arrière-grand-père Norval est mort d’une inflammation pulmonaire à la fin de décembre 1882. Son épouse Margaret devient donc veuve à 37 ou 38 ans, après le décès du soutien de famille. Elle est alors enceinte de leur fils Norval. Elle doit aussi prendre soin de ses deux fils âgés de cinq et trois ans.

On peut difficilement imaginer les souffrances et les inquiétudes de la mère et de sa progéniture. Les pages du grand livre fournies par ma tante Anna nous informent que Margaret est décédée le 3 décembre 1885 d’une insuffisance rénale. Mon grand-père et sa fratrie deviennent alors orphelins.

Les documents des orphelinats sur John et Robert Greenhorn disent que Jeanie a 20 ans et travaille comme domestique au service de Margaret Kerr (née Campbell) à la maison Gallowhill, à Paisley, lorsque sa mère, Margaret Greenhorn, tombe malade. Madame Kerr accorde un mois de « vacances » à Jeanie pour qu’elle accompagne sa mère dans ses derniers moments.

Un immense fardeau tombe sur les épaules de Jeanie. Elle doit soudainement prendre soin de ses trois petits frères âgés de moins de huit ans. Une telle situation serait pénible pour n’importe qui, mais c’est encore pire pour une domestique encore célibataire.

Jeanie connaissait sans doute le philanthrope William Quarrier. En 1876, il a fondé le City Orphan Home à Glasgow et, en 1878, il a ouvert l’Orphan Homes of Scotland à Bridge of Weir, environ 24 kilomètres à l’ouest de Glasgow. Du milieu des années 1870 à la fin de la décennie 1880, les journaux locaux publient régulièrement des articles qui louangent Quarrier pour son travail infatigable visant à venir en aide aux enfants nécessiteux à Glasgow et ailleurs en Écosse. Le Glasgow Herald du 28 mars 1884 parle d’un rassemblement organisé dans la ville, la veille du départ annuel d’une cohorte de garçons pour le Canada :

« Dans une grande ville aussi peuplée que Glasgow, […] il doit y avoir des organismes publics pour prendre soin des enfants nécessiteux qui n’ont plus personne pour prendre soin d’eux. […] La population a une immense dette envers M. Quarrier et son personnel. (Applaudissements) […] Tous les garçons partis au Canada dans l’espoir d’une vie meilleure ont été accueillis dans de belles maisons et ont pu choisir un emploi. […] Les villes canadiennes sont moins densément peuplées qu’ici et la pauvreté y est inexistante. Une bonne partie de la population travaille encore à la ferme. » (« Orphan Homes of Scotland », p. 9 [Traduction])

À peine quelques semaines avant le décès de Margaret Greenhorn, l’Evening News de Glasgow a publié un article intitulé « The Charitable Institutions of Glasgow: Their Past Work and Future Condition » (partie III, 16 novembre 1885, p. 2). Le texte louange William Quarrier, le décrivant comme « un homme remarquable […] qui fait un travail remarquable méritant d’être souligné. Bien avant que son nom soit connu du grand public, il était très populaire auprès des pauvres et des laissés-pour-compte à Glasgow » [Traduction].

Je ne saurai jamais si Jeanie a lu cet article, mais je suis persuadée que, comme bien d’autres à Glasgow, elle connaissait très bien Quarrier et admirait son travail de bienfaisance. Compte tenu des logements insalubres, des conditions de travail déplorables et de la pollution à Gartsherrie et dans les environs, le Canada devait paraître comme un endroit sain et sécuritaire où les enfants démunis pourraient prospérer.

Le 10 décembre 1885, John et Robert Greenhorn deviennent pensionnaires à l’orphelinat. Selon les photocopies que m’a fournies ma tante Anna, Jeanie y a amené les deux garçons. Elle a accepté qu’ils aillent au Canada après que M. Colin, pasteur de l’église baptiste à Coatbridge, lui a donné tous les détails de l’organisation. Quant au petit Norval, trois ans, il est hébergé par une de ses tantes Greenhorn vivant à Haddington, à l’est d’Édimbourg.

Robert et John vivent au City Orphan Home, à Glasgow, pendant six mois. Le 11 juin 1886, ils déménagent à l’Orphan Homes of Scotland, à Bridge of Weir. Je n’ai trouvé aucune photo de l’intérieur de l’orphelinat à Glasgow, mais je suppose que mon grand-père et mon grand-oncle ont connu des dortoirs semblables à celui de l’orphelinat à Huberdeau, au Québec.

Un grand dortoir comprenant plusieurs rangées de lits couverts de draps blancs. Un corridor sépare deux groupes de rangées de lits.

Le dortoir à l’orphelinat d’Huberdeau, Québec, en 1926 (e004665752).

Dans la troisième et dernière partie de cette série, l’histoire de Robert Roy Greenhorn nous mènera de l’Orphan Homes of Scotland, à Bridge of Weir, à la maison Fairknowe, à Brockville en Ontario, au Canada.


Beth Greenhorn est gestionnaire de l’équipe du contenu en ligne à la Direction générale de la diffusion et de l’engagement à Bibliothèque et Archives Canada.

À la découverte de mon grand-père Robert Roy Greenhorn : le « petit immigré anglais » (partie 1)

English version

Groupe de garçons travaillant dans un champ à la ferme école de la Philanthropic SocietyPar Beth Greenhorn

Cet article renferme de la terminologie et des contenus à caractère historique que certains pourraient considérer comme offensants, notamment au chapitre du langage utilisé pour désigner des groupes raciaux, ethniques et culturels. Pour en savoir plus, consultez notre Mise en garde – terminologie historique.

Robert Roy Greenhorn (1879-1962), mon grand-père paternel, est un des milliers d’enfants envoyés au Canada par les orphelinats de William Quarrier, en Écosse. Il est ainsi devenu un « petit immigré anglais », un terme que j’ai entendu pour la première fois quand j’ai commencé à travailler à Bibliothèque et Archives Canada (BAC), en 2003. Je n’ai appris qu’en 2012 que mon grand-père et ses deux frères, John et Norval, étaient de petits immigrés anglais. L’été dernier, c’est-à-dire onze ans plus tard, je me suis dit qu’il était temps d’écrire l’histoire de mon aïeul.

Le présent billet de blogue est la première partie d’une série de quatre qui veut rendre hommage à mon grand-père Robert Roy Greenhorn. Il est publié le 20 novembre pour souligner la Journée nationale de l’enfant au Canada.

Portrait sur lin dans un cadre ovale du buste d’un jeune homme portant une chemise à col boutonné, une cravate, une veste et un veston.

Robert Roy Greenhorn, lieu inconnu, début des années 1900. Courtoisie de l’auteure, Beth Greenhorn.

Comme de nombreux Canadiens, je n’ai pas entendu parler des petits immigrés anglais à l’école. En fait, je ne connaissais même pas le terme. Jamais mon père ou d’autres membres plus âgés de la famille ne m’en ont parlé. Ce n’est qu’en cherchant des images pour le balado de BAC sur les petits immigrés anglais, en 2012, que j’ai appris l’existence des anciens réseaux d’émigration d’enfants. Ça a piqué ma curiosité : pourquoi mon grand-père avait-il émigré au Canada, et dans quelles circonstances? C’est comme ça que ma recherche a commencé.

Des années 1860 au milieu du 20e siècle, plus de 100 000 enfants pauvres, sans-abri et orphelins de Grande-Bretagne ont été relogés au Canada et dans d’autres colonies britanniques. Ils travaillaient dans des familles rurales canadiennes jusqu’à l’âge de 18 ans, généralement en tant que domestiques ou agriculteurs. On les appelle petits immigrés anglais parce que ces enfants quittaient la Grande-Bretagne pour le Canada grâce au travail d’organismes d’émigration.

L’industrialisation de la Grande-Bretagne au 19e siècle a provoqué des souffrances inimaginables pour des centaines de milliers de personnes. La pollution, la pauvreté, les taudis et les inégalités sociales explosent (voir l’article en anglais de Patrick Stewart The Home Children, p. 1). La vie est particulièrement difficile pour les enfants dans les foyers frappés par la pauvreté. Une recherche dans les grands titres des journaux britanniques de l’époque victorienne permet de relever des termes très durs pour désigner ces malheureux : enfants abandonnés (waifs and strays), indigents (paupers), délinquants (delinquents) et galopins (street urchins), pour ne nommer que ceux-là. Aucun système d’aide sociale ne prend en charge le nombre croissant d’enfants pauvres, négligés et orphelins.

Patricia Roberts-Pichette décrit ainsi les conditions de travail lamentables de la classe ouvrière démunie dans les industries de Grande-Bretagne (About Home Children, p. 7) :

La plupart des petits immigrés anglais viennent des familles ouvrières les plus pauvres, qui vivent dans les pires taudis des grandes villes industrielles. Les familles se trouvant dans un état d’extrême pauvreté à cause de la perte d’un emploi, d’une maladie, d’un handicap ou du décès du soutien de famille. […] Les travailleurs sociaux, les ecclésiastiques et les fonctionnaires craignent que ces enfants sombrent dans la délinquance et la criminalité pour survivre. [Traduction]

Comme l’explique Susan Elizabeth Brazeau, des organismes philanthropiques, caritatifs et religieux sont convaincus que le retrait des enfants aiderait à régler les problèmes socioéconomiques (They Were But Children: The Immigration of British Home Children to Canada, p. 1) :

Le réseau d’émigration a pour but de sortir les enfants britanniques de leurs conditions de vie jugées malsaines et inacceptables d’un point de vue social et moral. Dans les familles, les fermes et les foyers canadiens, les enfants devraient acquérir les compétences nécessaires pour devenir des membres productifs de la classe ouvrière. […] Ces enfants ont été appelés « petits immigrés anglais ». [Traduction]

Le programme avait donc un double objectif : réduire le fardeau que constituaient les enfants démunis en Grande-Bretagne, tout en offrant à la population croissante des colonies une main-d’œuvre bon marché pour travailler à la ferme.

Timbre orné d’une photo sépia d’un garçon vêtu d’un long manteau avec une valise à ses pieds. Cette photo est superposée sur une photo sépia d’un garçon labourant un champ à l’aide de deux chevaux. La photo d’un navire se trouve sous ces deux photos.

Timbre canadien émis le 1er septembre 2010 en l’honneur des petits immigrés anglais (e011047381).

L’orphelinat de Quarrier, en Écosse, est un des nombreux organismes fondés au 19e siècle qui s’occupe de la migration des enfants. C’est cet organisme privé, fondé par le fabricant de chaussures et philanthrope William Quarrier (1829-1903) (biographie en anglais), qui a envoyé mon grand-père et ses frères au Canada. De 1870 à 1938, Quarrier et plus tard ses filles ont organisé l’émigration de 7 000 enfants au Canada. La plupart d’entre eux ont abouti en Ontario.

Malheureusement, mon grand-père paternel, Robert Roy Greenhorn, est décédé avant ma naissance. Tout ce que je sais de lui vient des souvenirs racontés par mon père et de quelques photographies. Mon père, le cadet de la famille, était très lié à sa mère Blanche (née Carr, 1898-1970). En tant que « bébé de la famille » ayant grandi à une époque où les rôles des genres étaient bien définis, il a probablement passé plus de temps avec sa mère et ses sœurs, donc dans la maison et le potager, qu’avec son père. En plus, mon grand-père avait 51 ans quand mon père est né. La différence d’âge a probablement affaibli le lien entre eux. Par conséquent, les souvenirs d’enfance de mon père concernaient plus sa mère et sa fratrie, notamment son frère le plus jeune, Arnold, né seulement trois ans avant lui.

Trois femmes accroupies devant cinq hommes et une femme debout.

Première rangée, de gauche à droite : mes tantes Jo (Josephine), Jean et Jennie; deuxième rangée : mes oncles Roy et Arnold, mes grands-parents Robert et Blanche, mon oncle John et mon père Ralph. Philipsville (Ontario), 1947. Courtoisie de l’auteure, Beth Greenhorn.

Je sais très peu de choses sur l’enfance de mon grand-père Robert. Lui et ses frères John et Norval sont nés près de Glasgow, en Écosse, et ont émigré au Canada pendant leur enfance. Je sais aussi qu’ils sont venus sans leurs parents et qu’ils sont devenus orphelins très jeunes. J’ai toujours pensé que les trois frères avaient fait la traversée ensemble, mais des recherches ont montré que Robert et John sont partis pour le Canada en mars 1889, et que leur frère Norval les a suivis cinq ans plus tard, en 1894.

Dans ses mémoires non publiés écrits en 2015, mon père transmet un de ses rares souvenirs de mon grand-père :

Mon père était travaillant, c’était sa force. Il avait le sens de l’humour et jouait très bien au hockey, selon ce que j’ai compris. La meilleure façon de le décrire serait de dire que l’environnement a laissé sur lui des traces et qu’il était couvert de cicatrices. […] Si seulement je lui avais posé plus de questions sur son enfance, je l’aurais mieux compris. [Traduction]

Au début, les Canadiens appuient les organismes d’émigration et accueillent les enfants à bras ouverts. Toutefois, comme le mentionne Susan Elizabeth Brazeau dans l’article They Were But Children (p. 5 et 6), le vent tourne quand des histoires sordides commencent à circuler : des enfants s’enfuient, s’attaquent à leurs hôtes, volent de la nourriture ou souffrent de la faim. Il y en a même un qui est mort. Dans l’opinion publique, l’acceptation fait place à la méfiance. Les gens se demandent si « la Grande-Bretagne se débarrasse de ses pires éléments : les va-nu-pieds, les idiots, les malades et les criminels » [Traduction].

Je ne saurai jamais comment mon grand-père Robert a supporté l’épreuve d’être orphelin. Compte tenu des étiquettes péjoratives attribuées aux enfants de milieux défavorisés, je n’ai aucun mal à croire que la honte associée au statut de petit immigré a pu laisser de nombreuses cicatrices. J’aurais aimé en savoir plus sur la vie de mon grand-père et sur ce que cachait sa carapace. Qu’est-il arrivé à ses parents? Dans quelles circonstances les trois frères sont-ils devenus des pensionnaires d’un orphelinat en Écosse?

Je continuerai de raconter l’histoire de Robert Roy Greenhorn dans le deuxième article de la série. Ce périple vers les origines nous mènera à Gartsherrie et à Falkirk, en Écosse.

Autres ressources


Beth Greenhorn est gestionnaire de l’équipe du contenu en ligne à la Direction générale de la diffusion et de l’engagement à Bibliothèque et Archives Canada.